166 JOURNAL D'AGRICULTURE TROPICALE N° 60 — JUIN 1906
La Vigne au Guatémala
La tentative de M. JUAN J. RODRIGUEZ. - Le raisin de table de Salama (Baja Verapaz).
Le cep genre Chasselas, d'Escuintla. — La fourmi rouge.
Par M. JORGE GARCIA SALAS.
Depuis trois ans, nous avons publié une lon-
gue série d'articles et de notes sur la vigne
et la vinification dans, la zone tropicale. La
conclusion générale qu'il convient d'en tirer
est qu'en climat tropical on peut obtenir, en
s'y prenant bien, du raisin de table mais qu'il
est terriblement difficile, pour ne pas dire
impossible, d'obtenir du bon vin, quelle que
soit la marche de la fermentation : c'est le
moût même qui est insuffisant. Cette thèse
a été présentée avec force, appuyée sur de
nombreuses constatations de faits, dans
l'étude de M. BERTONI, du Paraguay, publiée
dans notre nO 56, pp. 40-45.
M. D'HÉRELLE, ingénieur-chimiste établi
dans le Guatémala, auquel M. GARCIA SALAS
répond plus particulièrement, développait
dans sa note (« J. d'A. T. » n°45), une opi-
nion beaucoup plus optimiste, tout en souli-
gnant d'ailleurs son caractère essentiellement
théorique, car il a eu peu d'occasions, lui-
même, d'observer la vigne en pays chauds. La
tentative locale à laquelle tous les deux font
allusion est indiquée par quelques mots seu-
lement dans la note de M. D'HERELLE : « Un
essai récent a complètement échoué malgré
les' capitaux assez considérables engagés dans
l'entreprise, capitaux fournis, paraît-il, par
des maisons de Bordeaux», dit M. D'HERELLE.
Dans cet échec, « la faute n'en est pas à la
vigne » ; on verra que M. GARCIA SALAS
n'est pas du même avis.
Dans sa note précitée, M. D'HERELLE si-
gnalait, d'après les dires d'amis dignes de
foi, les environs de Juntas et de Tocaina en
-Colombie comme une région produisant en
quantité du raisin exquis. Ce. pays se trouve,
dit-il, à 350 ou 400 mètres d'altitude, sous le
quatrième degré de latitude Nord.
N. d. 1. R.
*
* *
Je ne connais que par ouï-dire l'essai
auquel M. D'HERELLE fait allusion ; d'après
la description détaillée qui m'en a été faite
et mes excursions à travers la région, je
puis assurer que l'échec est dû et au climat
et au terrain, fort peu favorables tous les
deux.
Vers 1896 ou 97, un essai du même genre,
mais conduit avec plus de méthode, a été
fait aux portes de la capitale. Son directeur
était un français, viticulteur de profession
et ayant beaucoup voyagé en pays chauds.
Mille ceps environ, tous du Bordelais, fu-
rent plantés dans un terrain d'alluvions ar-
gileuses, si je ne me trompe, bien défoncé,
très bien drainé et abrité contre les forts
vents.
Tous reprirent parfaitement et poussèrent
vigoureux pendant un an ou un an et demi.
La conduite adoptée était la forme en espa-
lier sur fil de fer d'après le système courant
dans la Gironde.
Le capitaliste, inspirateur de l'essai,
M. JUAN J. RODRIGUEZ de qui je. tiens ces
détails (1), avait les plus grands espoirs
lorsque la mort vint surprendre l'intelligent,
viticulteur qui conduisait la plantation ;
d'autre part des litiges entre M. RODRIGUEZ
et des voisins aboutirent à la destruction
du vignoble qui n'avait encore pu donner
des résultats bien précis. — M. RODRIGUEZ
me dit qu'il avait pu remarquer déjà une
première grappe sur l'un des ceps de sa
petite plantation alors âgée de 2 ans.
A Salama, petite ville du département de
la Baja Verapaz, à 900 mètres d'altitude,
dans des conditions climalériques tout à
fait différentes, en pays beaucoup plus sec
et à terrains plus meubles, — on compte par
dizaines les habitants qui ont leurs lots de
15, 20, 30 et jusqu'à 50 ares de vignes qu'ils
conduisent en treilles et cultivent d'ailleurs
(1 ) Notre abonné dès le premier jour. Agriculteur
d'initiative, s'intéressant à toul; il a été souvent question
de lui dans le « J. d'A. T. » — N. D. L. R.
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