Titre : L'Afrique française : bulletin mensuel du Comité de l'Afrique française et du Comité du Maroc
Auteur : Comité de l'Afrique française. Auteur du texte
Auteur : Comité du Maroc (Paris). Auteur du texte
Éditeur : Comité de l'Afrique française (Paris)
Date d'édition : 1918-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32683501s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1918 01 janvier 1918
Description : 1918/01/01 (N1,A28)-1918/12/31 (N12,A28). 1918/01/01 (N1,A28)-1918/12/31 (N12,A28).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9789150r
Source : CIRAD, 2017-132476
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/08/2017
D.E L'AFRIQUE FRANÇAISE 77
qua pas de signaler les services considérables
qu'il lui avait rendus par son habileté diploma
tique, sa pondération, son bon sens, sa finesse et
sa maîtrise de soi-même. Aussi l'administration
coloniale voulut-elle se l'attacher. En 1893, Clozel
fut nommé administrateur de 3" classe et chargé
d'une mission aux dépenses de laquelle participa
le Comité de l'Afrique Française et dont le but
était de faire la liaison entre les affluents occi-
dentaux du Congo et les cours 'd'eau allant se
déverser dans le lac Tchad. Cette mission, con-
duite avec tact et prudence, eut un plein succès.
Clozel, après avoir remonté la Sangha aussi loin
qu'il était possible, atteignit le cours supérieur
de la Ouahm.
Affecté à la Côte d'Ivoire en 1896, il fut chargé
d'asseoir notre autorité sur les pays agni et abron
limitrophes de la colonie anglaise, qui n'étaient
encore pourvus que d'une administration tout à
fait embryonnaire, limitée d'ailleurs au Sud de
l'Indénié. Clozel organisa fortement Zaranou,
mit fin à l'anarchie qui régnait dans l'Assikasso,
fonda un poste dans cette dernière province près
d'Annibilékrou et, poussant au Nord, se rendit en
1897 à Bondoukou pour mettre à exécution le
traité de protectorat obtenu en 1888 par Treich-
Laplène des notables de la région.
C'était là un coup d'audace : Bondoukou avait
été occupé et rançonné pendant plusieurs mois
par les bandes de Samori, qui venaient seulement
d'évacuer le pays sous la menace d'une forte in-
tervention britannique. Tout un bataillon de
troupes anglaises, avec du canon, s'était avancé
jusqu'aux faubourgs de la ville, mettant en fuite
les gens de Sa-mori et donnant aux autochtones
une idée tangible de la puissance de nos voisins.
C'est quelques jours après le départ de ce bataillon
que Clozel arriva, escorté seulement de 10 mili-
ciens, et se présentant en maître. Les chefs indi-
gènes ne manquèrent pas d'établir une compa-
raison entre la faiblesse numérique de son escorte
et la force du détachement anglais encore tout
proche, et ils ne purent s'empêcher de faire
observer au nouveau venu qu'il était bien pré-
somptueux de vouloir, avec 10 fusils, établir une
domination que Samori n'avait pas réussi à main-
tenir avec 2.000 hommes environ et que les An-
glais n'avaient pas osé ou pas voulu asseoir avec
500 soldats et des canons. « Si nous acceptons
ton autorité, lui dirent-ils, et que les sofa ou les
Anglais reviennent pour te la disputer, tu ne
pourras faire autrement que de partir et c'est
nous qui, pour t'avoir laissé t'installer ici, subi-
rons les effets d-t; la haine du vainqueur. »
Clozel, après avoir écouté leurs doléances avec
sa patience coutumière, prit la parole à son tour,
sur ce ton froid, ferme et mesuré dont il usait
pour s'adresser aux indigènes et qui les impres-
sionnait comme étant l'expression d une volonté
implacable unie à un sentiment profond de la
justice et à une réelle bonté : « Je suis venu ici,
dit-il, pour tenir la parole que vous ont donnée
L'A.PRIQiJl FRANÇAISE — NOS 4, 5 et 6.
Treich-Laplène et Binger, il y a une dizaine d'an-
nées, sur votre demande, de vous protéger contre
toute attaque et contre toute domination autre
que celle de la France; si nous avons différé jus-
qu'ici d'exécuter les clauses du traité conclu avec
vous, c'est que des circonstances majeures nous
en ont empêchés; aujourd'hui, je viens remplir
les engagements pris envers vous par le gouver-
nement français. V 011S pouvez être assurés que,
du jour de mon installation au milieu de vous,
nul n'osera attenter à votre sécurité. Je n'ai que
10 soldats, c'est vrai, mais comme chacun de mes
soldats vaut 100 soldats anglais et 1.000 sofa, je
suis beaucoup plus fort que le commandant britan-
nique et que Samori. Vous en avez eu d'ailleurs
une preuve : l'officier qui commandait le déta-
chement anglais a quitté le pays dès qu'il a su
que je m'approchais; c'est donc qu'il se sentait le
plus faible. Dès le moment que les sofa avaient
fui devant lui, comment voudriez-vous qu'ils
osent s'attaquer à moi, qui suis plus fort que lui?»
Tout cela fut dit avec un tel calme, avec une
si belle et si tranquille assurance, que les chefs du
pays se laissèrent gagner à la confiance de cet
homme si sûr de lui-même.
Ils n'eurent pas à le regretter,, du reste, et les
événements parurent donner raison au discours
de Clozel : les Anglais ne revinrent pas et l'on
n'entendit plus parler de Samori. A vrai dire,
Clozel, qui avait l'art de se faire très exactement
renseigner sans en avoir l'air, savait que les
autorités britanniques étaient fort préoccupées de
la situation politique du pays achanti et que
c'était là la raison qui avait fait rappeler de
Bondoukou le commandant du détachement an-
glais; il savait de plus que les bandes de Samori
étaient retenues dans le Xord par la menace d'une
colonne française en préparation au Soudan.
Mais sachant que, au contraire de la fable, la
vérité n'est pas toujours acceptée sans contrôle,
il préféra affirmer une force qu'il savait ne pas
posséder et l'imposer du premier coup par cetle
affirmation même.
De fait, son autorité fut acceptée si complète-
ment et il sut si bien se concilier la confiance des
indigènes que ceux-ci, non seulement l'autori-
sèrent à s'installer auprès d'eux, mais encore lui
fournirent avec empressement tous les terrains,
les matériaux et la main d'oeuvre dont il avait
besoin pour construire à Bondoukou un poste
français. Ils ne devaient pas tarder à donner une
preuve plus éclatante encore de la sincérité de
leur attachement il Clozel et de la solidité de l'in-
fluence que celui-ci avait su acquérir sur eux.
La construction du poste n'était pas achevée
encore, lorsqu'on apprit que l'Indénié était agité
par des récolteurs de caoutchouc originaires de la
Gold Coast. Ceux-ci étaient mécontents des mesu-
res douanières récemment ordonnées par le gou-
vernement de la Côte d'Ivoire en vue d'empècher
que les caoutchoucs français fussent dirigés sur la
colonie anglaise, etils essayaientde fomenter une
révolte parmi nos propres sujets. Clozel dut
retourner en hâte du côté Je Zaranou pour y
qua pas de signaler les services considérables
qu'il lui avait rendus par son habileté diploma
tique, sa pondération, son bon sens, sa finesse et
sa maîtrise de soi-même. Aussi l'administration
coloniale voulut-elle se l'attacher. En 1893, Clozel
fut nommé administrateur de 3" classe et chargé
d'une mission aux dépenses de laquelle participa
le Comité de l'Afrique Française et dont le but
était de faire la liaison entre les affluents occi-
dentaux du Congo et les cours 'd'eau allant se
déverser dans le lac Tchad. Cette mission, con-
duite avec tact et prudence, eut un plein succès.
Clozel, après avoir remonté la Sangha aussi loin
qu'il était possible, atteignit le cours supérieur
de la Ouahm.
Affecté à la Côte d'Ivoire en 1896, il fut chargé
d'asseoir notre autorité sur les pays agni et abron
limitrophes de la colonie anglaise, qui n'étaient
encore pourvus que d'une administration tout à
fait embryonnaire, limitée d'ailleurs au Sud de
l'Indénié. Clozel organisa fortement Zaranou,
mit fin à l'anarchie qui régnait dans l'Assikasso,
fonda un poste dans cette dernière province près
d'Annibilékrou et, poussant au Nord, se rendit en
1897 à Bondoukou pour mettre à exécution le
traité de protectorat obtenu en 1888 par Treich-
Laplène des notables de la région.
C'était là un coup d'audace : Bondoukou avait
été occupé et rançonné pendant plusieurs mois
par les bandes de Samori, qui venaient seulement
d'évacuer le pays sous la menace d'une forte in-
tervention britannique. Tout un bataillon de
troupes anglaises, avec du canon, s'était avancé
jusqu'aux faubourgs de la ville, mettant en fuite
les gens de Sa-mori et donnant aux autochtones
une idée tangible de la puissance de nos voisins.
C'est quelques jours après le départ de ce bataillon
que Clozel arriva, escorté seulement de 10 mili-
ciens, et se présentant en maître. Les chefs indi-
gènes ne manquèrent pas d'établir une compa-
raison entre la faiblesse numérique de son escorte
et la force du détachement anglais encore tout
proche, et ils ne purent s'empêcher de faire
observer au nouveau venu qu'il était bien pré-
somptueux de vouloir, avec 10 fusils, établir une
domination que Samori n'avait pas réussi à main-
tenir avec 2.000 hommes environ et que les An-
glais n'avaient pas osé ou pas voulu asseoir avec
500 soldats et des canons. « Si nous acceptons
ton autorité, lui dirent-ils, et que les sofa ou les
Anglais reviennent pour te la disputer, tu ne
pourras faire autrement que de partir et c'est
nous qui, pour t'avoir laissé t'installer ici, subi-
rons les effets d-t; la haine du vainqueur. »
Clozel, après avoir écouté leurs doléances avec
sa patience coutumière, prit la parole à son tour,
sur ce ton froid, ferme et mesuré dont il usait
pour s'adresser aux indigènes et qui les impres-
sionnait comme étant l'expression d une volonté
implacable unie à un sentiment profond de la
justice et à une réelle bonté : « Je suis venu ici,
dit-il, pour tenir la parole que vous ont donnée
L'A.PRIQiJl FRANÇAISE — NOS 4, 5 et 6.
Treich-Laplène et Binger, il y a une dizaine d'an-
nées, sur votre demande, de vous protéger contre
toute attaque et contre toute domination autre
que celle de la France; si nous avons différé jus-
qu'ici d'exécuter les clauses du traité conclu avec
vous, c'est que des circonstances majeures nous
en ont empêchés; aujourd'hui, je viens remplir
les engagements pris envers vous par le gouver-
nement français. V 011S pouvez être assurés que,
du jour de mon installation au milieu de vous,
nul n'osera attenter à votre sécurité. Je n'ai que
10 soldats, c'est vrai, mais comme chacun de mes
soldats vaut 100 soldats anglais et 1.000 sofa, je
suis beaucoup plus fort que le commandant britan-
nique et que Samori. Vous en avez eu d'ailleurs
une preuve : l'officier qui commandait le déta-
chement anglais a quitté le pays dès qu'il a su
que je m'approchais; c'est donc qu'il se sentait le
plus faible. Dès le moment que les sofa avaient
fui devant lui, comment voudriez-vous qu'ils
osent s'attaquer à moi, qui suis plus fort que lui?»
Tout cela fut dit avec un tel calme, avec une
si belle et si tranquille assurance, que les chefs du
pays se laissèrent gagner à la confiance de cet
homme si sûr de lui-même.
Ils n'eurent pas à le regretter,, du reste, et les
événements parurent donner raison au discours
de Clozel : les Anglais ne revinrent pas et l'on
n'entendit plus parler de Samori. A vrai dire,
Clozel, qui avait l'art de se faire très exactement
renseigner sans en avoir l'air, savait que les
autorités britanniques étaient fort préoccupées de
la situation politique du pays achanti et que
c'était là la raison qui avait fait rappeler de
Bondoukou le commandant du détachement an-
glais; il savait de plus que les bandes de Samori
étaient retenues dans le Xord par la menace d'une
colonne française en préparation au Soudan.
Mais sachant que, au contraire de la fable, la
vérité n'est pas toujours acceptée sans contrôle,
il préféra affirmer une force qu'il savait ne pas
posséder et l'imposer du premier coup par cetle
affirmation même.
De fait, son autorité fut acceptée si complète-
ment et il sut si bien se concilier la confiance des
indigènes que ceux-ci, non seulement l'autori-
sèrent à s'installer auprès d'eux, mais encore lui
fournirent avec empressement tous les terrains,
les matériaux et la main d'oeuvre dont il avait
besoin pour construire à Bondoukou un poste
français. Ils ne devaient pas tarder à donner une
preuve plus éclatante encore de la sincérité de
leur attachement il Clozel et de la solidité de l'in-
fluence que celui-ci avait su acquérir sur eux.
La construction du poste n'était pas achevée
encore, lorsqu'on apprit que l'Indénié était agité
par des récolteurs de caoutchouc originaires de la
Gold Coast. Ceux-ci étaient mécontents des mesu-
res douanières récemment ordonnées par le gou-
vernement de la Côte d'Ivoire en vue d'empècher
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colonie anglaise, etils essayaientde fomenter une
révolte parmi nos propres sujets. Clozel dut
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