Titre : L'Afrique française : bulletin mensuel du Comité de l'Afrique française et du Comité du Maroc
Auteur : Comité de l'Afrique française. Auteur du texte
Auteur : Comité du Maroc (Paris). Auteur du texte
Éditeur : Comité de l'Afrique française (Paris)
Date d'édition : 1917-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32683501s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1917 01 janvier 1917
Description : 1917/01/01 (N1,A27)-1917/12/31 (N12,A27). 1917/01/01 (N1,A27)-1917/12/31 (N12,A27).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97885087
Source : CIRAD, 2017-132476
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/07/2017
DE L'AFRIQUE FRANÇAISE 77
allemandes doivent fournir à la métropole. L'em-
pire colonial seul permettra à l'Allemagne de
s'affranchir de la mauvaise volonté de ses princi-
paux fournisseurs ; plus elle demandera à son
empire colonial, moins elle aura à redouter la
guerre économique que ses ennemis se préparent
à lui faire.
La guerre actuelle est, beaucoup plus qu'on ne
le croit, une guerre pour les colonies. Quelque
importance qu'on attribue à l'acquisition de la
Belgique ou de la Courlande, ce serait une erreur
dangereuse de croire qu'il suffise à l'Allemagne
de s'agrandir en Europe. Seul un empire colonial
proportionné à son importance peut assurer son
avenir mondial. C'est la véritable cause de la
guerre et c'est pour cela que l'Angleterre y a
participé. Le jour où l'Allemagne serait réduite à
l'horizon européen, elle cesserait d'être une puis-
sance mondiale. L'anglicisation du globe, com-
mencée avec la destruction de l'Armada espagnole
en 1588, poursuivie à travers la lutte contre Napo-
léon 1er, aboutit logiquement à la convention du
4 septembre 1914. La paix va partager le monde
pour longtemps. Quiconque admet un recul colo-
nial de l'Allemagne aide l'Angleterre à s'assurer la
domination universelle.
L'union économique des quatre puissances cen-
trales, Allemagne, Autriche, Hongrie et Turquie,
même y joignant leurs alliés balkaniques et
l'Asie Mineure, ne compenserait nullement la
perte des colonies. Si étroits que soient les liens
entre les quatre puissances, les Osmanlis, les
Bulgares, les Magyars, les Polonais, les Autri-
chiens ne se subordonneront jamais complète-
ment. La grande Allemagne comporte nécessai-
rement un domaine d'outre-mer où elle soit la
maîtresse et se sente véritablement chez elle ;
c'est seulement ainsi qu'elle pourra braver la
haine sauvage de ses ennemis. Il faudra long-
temps pour obtenir du paysan bulgare ou turc
une production intensive. L'Asie Mineure ne peut
fournir du cuivre, du coprah, du caoutchouc, de
l'huile de palme. L'Allemagne et ses alliés peuvent
se suffire à eux-mêmes en ce qui concerne les
produits de la zone tempérée et subtropicale.
Mais, pour constituer un domaine complètement
indépendant au point de vue économique, une
« autarchie », il est indispensable d'y adjoindre
d'importantes régions tropicales. Le grand danger
de l'avenir, danger qu'on n'aperçoit pas assez
dans certains milieux commerciaux et industriels,
serait la monopolisation de certains produits
coloniaux par l'Entente et surtout par l'Angleterre,
ce vampire de l'Europe.
Les préjugés du monde des travailleurs contre
la politique coloniale ont été fort ébranlés par la
guerre. Beaucoup plus que la limitation des
exportations par le blocus anglais, la prohibition
des importations de coton, de laine, de caout-
chouc, de graines oléagineuses, de matières
fibreuses et alimentaires, a fait comprendre à tous
l'importance de l'économie coloniale, et la néces-
sité, dans l'intérêt des travailleurs, de produire
les matières premières dans son propre domaine
colonial. L'automobiliste regarde tristement sa roue
dégonflée : qu'il songe à se procurer lui-même du
caoutchouc aux colonies. La ménagère se plaint
de n'avoir plus de margarine ni de beurre végé-
tal : qu'elle ne laisse pas l'Angleterre monopoliser
les huiles et les amandes de palme. Beaucoup
de socialistes ont donc évolué du marxisme au
colonialisme.
La population de l'Europe,au cours du xixe siècle,
a passé de 180 à 500 millions d'habitants ; c'est
un phénomène sans précédent, qui fait de la poli-
tique coloniale une nécessité vitale. Depuis 1889,
les importations des pays européens en Allemagne
ont augmenté de 81 0/0, celles des pays extra-
européens de 480 0/0. Toute l'Europe centrale, du
simple travailleur au millionnaire, paie un lourd
tribut aux puissances de l'Entente pour les produits
coloniaux, qu'elle ne reçoit que de seconde main,
de Paris ou de Londres. Si la France et l'Angle-
terre réussissaient à s'assurer un monopole en
s'emparant des colonies allemandes et en détrui-
sant la Turquie, l'Allemagne trouverait partout
les portes fermées par des mesures douanières et
des tarifs préférentiels ; la situation pour elle
deviendrait intolérable. La puissance navale ne
saurait suffire sans les colonies. Quelle que soit la
valeur de la côte des Flandres pour fortifier la
puissance maritime de l'Allemagne, la récupéra-
tion de son empire colonial est à ce point de vue
plus importante encore. L'opposition économique
entre l'Angleterre et l'Allemagne survivra à la'
paix; il faut donc que l'Allemagne acquière son
indépendance pour les matières premières néces-
saires à son industrie et à l'alimentation de la
population industrielle.
Tout en s'assurant sa part dans la Méditer-
ranée orientale, en Chine et dans le Pacifique,
c'est dans l'Afrique centrale que l'Allemagne
doit se constituer un grand empire réunissant
l'Afrique orientale et le Cameroun. On connaît les
projets qu'avaient formés les Allemands avant la
guerre et qui visaient le Congo français, le Congo
belge et les colonies portugaises. Ils ne semblent
pas y avoir renoncé. A cet empire africain, ils
comptent accéder par l'Egypte redevenue turque,
c'est-à-dire allemande.
La Deutsche Kolonialzeitung a consacré un
supplément à reproduire les communications de
M. Ch. Lallemand à la Société de Géographie de
Paris le 27 novembre 1914 (1) et de sir Harry
Johnston à la Société de Géographie de Londres le
24 février 1915 (2). Ces communications, au dire
de ce périodique, sont un monument d'hypo-
crisie, de sottise, de mensonge, d'avidité et d im-
pudence; à Paris on s'est partagé l'Allemagne,
à Londres les colonies allemandes : c'est vendre
la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Au pro-
gramme colonial des Alliés, la Société coloniale
oppose le sien, dont voici le texte intégral (3) :
(1) La Géographie. 1914-1915, t. XXX, p. 81-83.
(2) Geographical Journal, 1915. t. XLV, p. 273-301. \ aussi
il Afrique française. 1915, p. 129-133 et 159-160.
(3) Deutsche Kolonialzeitung, 20 décembre 1916, p. 185.
allemandes doivent fournir à la métropole. L'em-
pire colonial seul permettra à l'Allemagne de
s'affranchir de la mauvaise volonté de ses princi-
paux fournisseurs ; plus elle demandera à son
empire colonial, moins elle aura à redouter la
guerre économique que ses ennemis se préparent
à lui faire.
La guerre actuelle est, beaucoup plus qu'on ne
le croit, une guerre pour les colonies. Quelque
importance qu'on attribue à l'acquisition de la
Belgique ou de la Courlande, ce serait une erreur
dangereuse de croire qu'il suffise à l'Allemagne
de s'agrandir en Europe. Seul un empire colonial
proportionné à son importance peut assurer son
avenir mondial. C'est la véritable cause de la
guerre et c'est pour cela que l'Angleterre y a
participé. Le jour où l'Allemagne serait réduite à
l'horizon européen, elle cesserait d'être une puis-
sance mondiale. L'anglicisation du globe, com-
mencée avec la destruction de l'Armada espagnole
en 1588, poursuivie à travers la lutte contre Napo-
léon 1er, aboutit logiquement à la convention du
4 septembre 1914. La paix va partager le monde
pour longtemps. Quiconque admet un recul colo-
nial de l'Allemagne aide l'Angleterre à s'assurer la
domination universelle.
L'union économique des quatre puissances cen-
trales, Allemagne, Autriche, Hongrie et Turquie,
même y joignant leurs alliés balkaniques et
l'Asie Mineure, ne compenserait nullement la
perte des colonies. Si étroits que soient les liens
entre les quatre puissances, les Osmanlis, les
Bulgares, les Magyars, les Polonais, les Autri-
chiens ne se subordonneront jamais complète-
ment. La grande Allemagne comporte nécessai-
rement un domaine d'outre-mer où elle soit la
maîtresse et se sente véritablement chez elle ;
c'est seulement ainsi qu'elle pourra braver la
haine sauvage de ses ennemis. Il faudra long-
temps pour obtenir du paysan bulgare ou turc
une production intensive. L'Asie Mineure ne peut
fournir du cuivre, du coprah, du caoutchouc, de
l'huile de palme. L'Allemagne et ses alliés peuvent
se suffire à eux-mêmes en ce qui concerne les
produits de la zone tempérée et subtropicale.
Mais, pour constituer un domaine complètement
indépendant au point de vue économique, une
« autarchie », il est indispensable d'y adjoindre
d'importantes régions tropicales. Le grand danger
de l'avenir, danger qu'on n'aperçoit pas assez
dans certains milieux commerciaux et industriels,
serait la monopolisation de certains produits
coloniaux par l'Entente et surtout par l'Angleterre,
ce vampire de l'Europe.
Les préjugés du monde des travailleurs contre
la politique coloniale ont été fort ébranlés par la
guerre. Beaucoup plus que la limitation des
exportations par le blocus anglais, la prohibition
des importations de coton, de laine, de caout-
chouc, de graines oléagineuses, de matières
fibreuses et alimentaires, a fait comprendre à tous
l'importance de l'économie coloniale, et la néces-
sité, dans l'intérêt des travailleurs, de produire
les matières premières dans son propre domaine
colonial. L'automobiliste regarde tristement sa roue
dégonflée : qu'il songe à se procurer lui-même du
caoutchouc aux colonies. La ménagère se plaint
de n'avoir plus de margarine ni de beurre végé-
tal : qu'elle ne laisse pas l'Angleterre monopoliser
les huiles et les amandes de palme. Beaucoup
de socialistes ont donc évolué du marxisme au
colonialisme.
La population de l'Europe,au cours du xixe siècle,
a passé de 180 à 500 millions d'habitants ; c'est
un phénomène sans précédent, qui fait de la poli-
tique coloniale une nécessité vitale. Depuis 1889,
les importations des pays européens en Allemagne
ont augmenté de 81 0/0, celles des pays extra-
européens de 480 0/0. Toute l'Europe centrale, du
simple travailleur au millionnaire, paie un lourd
tribut aux puissances de l'Entente pour les produits
coloniaux, qu'elle ne reçoit que de seconde main,
de Paris ou de Londres. Si la France et l'Angle-
terre réussissaient à s'assurer un monopole en
s'emparant des colonies allemandes et en détrui-
sant la Turquie, l'Allemagne trouverait partout
les portes fermées par des mesures douanières et
des tarifs préférentiels ; la situation pour elle
deviendrait intolérable. La puissance navale ne
saurait suffire sans les colonies. Quelle que soit la
valeur de la côte des Flandres pour fortifier la
puissance maritime de l'Allemagne, la récupéra-
tion de son empire colonial est à ce point de vue
plus importante encore. L'opposition économique
entre l'Angleterre et l'Allemagne survivra à la'
paix; il faut donc que l'Allemagne acquière son
indépendance pour les matières premières néces-
saires à son industrie et à l'alimentation de la
population industrielle.
Tout en s'assurant sa part dans la Méditer-
ranée orientale, en Chine et dans le Pacifique,
c'est dans l'Afrique centrale que l'Allemagne
doit se constituer un grand empire réunissant
l'Afrique orientale et le Cameroun. On connaît les
projets qu'avaient formés les Allemands avant la
guerre et qui visaient le Congo français, le Congo
belge et les colonies portugaises. Ils ne semblent
pas y avoir renoncé. A cet empire africain, ils
comptent accéder par l'Egypte redevenue turque,
c'est-à-dire allemande.
La Deutsche Kolonialzeitung a consacré un
supplément à reproduire les communications de
M. Ch. Lallemand à la Société de Géographie de
Paris le 27 novembre 1914 (1) et de sir Harry
Johnston à la Société de Géographie de Londres le
24 février 1915 (2). Ces communications, au dire
de ce périodique, sont un monument d'hypo-
crisie, de sottise, de mensonge, d'avidité et d im-
pudence; à Paris on s'est partagé l'Allemagne,
à Londres les colonies allemandes : c'est vendre
la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Au pro-
gramme colonial des Alliés, la Société coloniale
oppose le sien, dont voici le texte intégral (3) :
(1) La Géographie. 1914-1915, t. XXX, p. 81-83.
(2) Geographical Journal, 1915. t. XLV, p. 273-301. \ aussi
il Afrique française. 1915, p. 129-133 et 159-160.
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