Titre : L'Afrique française : bulletin mensuel du Comité de l'Afrique française et du Comité du Maroc
Auteur : Comité de l'Afrique française. Auteur du texte
Auteur : Comité du Maroc (Paris). Auteur du texte
Éditeur : Comité de l'Afrique française (Paris)
Date d'édition : 1921-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32683501s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1921 01 janvier 1921
Description : 1921/01/01 (A31,N1)-1921/12/31 (A31,N12). 1921/01/01 (A31,N1)-1921/12/31 (A31,N12).
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97878865
Source : CIRAD, 2017-132476
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/07/2017
DE L'AFRIQUE FRANÇAISE 57
de la généraliser au point qu'elle exerce une
influence sur les procédés actuels d'administra-
tion, il faudra que nos écoles aient, en plus des
jeunes gens instruits réclamés par les entreprises
privées ou les services publics, formé dans chaque
région, dans chaque canton, une élite apte à rem-
plir les fonctions nouvelles qui leur seront con-
férées.
Ce résultat ne sera probablement pas atteint
avant une dizaine d'années.
Pour le moment, nous sommes obligés de nous
en tenir au système de l'administration directe,
tempérée par le concours, d'ailleurs de plus en
plus actif et utile, des chefs indigènes et, pour
cette tàche, il y a un effectif minimum d'agents
européens au-dessous duquel on ne peut des-
cendre sans compromettre le bon fonctionnement
- de l'administration.
A mesure que les années de guerre raréfiaient
notre.personnel, nous avons resserré les effectifs
de tous les services. En ce qui concerne les cercles
civils, nous en sommes arrivés à nous contenter
d'un effectif théorique de 41 administrateurs de
tous grades et de 31 agents des affaires indigènes,
24 de ces derniers étant d'ailleurs immobilisés
dans la gestion des caisses. Le personnel actif a
été ainsi ramené progressivement à 48 agents. Ce
chiffre correspond en moyenne à un agent euro-
péen par 34.000 habitants et pour 4.000 kilomètres
carrés équivalant à la superficie d'un petit dépar-
tement de France. Il serait donc difficile de dire
que la Guinée s'offre, pour l'administration de ses
16 cercles civils, un luxe exagéré de fonction-
naires, et il semble, au contraire, qu'elle soit allée
jusqu'aux extrêmes limites de la compression.
En réalité, aucun administrateur ne peut plus
faire que des tournées brèves ou rapides; toute
son activité est absorbée par le recouvrement de
l'impôt, par les multiples questions que soulève
le recrutement des tirailleurs, par la justice
indigène presque aussi formaliste que la justice
française, et par les affaires courantes.
Un certain nombre de subdivisions ont été fer-
mées et celles qui subsistent seront fermées inces-
samment; ces fermetures augmentent le travail
des chefs lieux de cercle; mais il vaut mieux
avoir un Européen de plus au chef-lieu que de le
laisser isolé dans un poste, et le cercle peut ainsi
accomplir sa besogne de bureau. Si la situation
du personnel s'aggravait encore, il faudrait se
résoudre à fusionner des cercles, mesure qui a déjà
été réalisée en 1913 et 1918, partout où les faci-
lités de communication le permettaient.
On ne saurait dire que, dans de telles condi-
tions, la sécurité de la colonie soit en péril; elle
repose sur le loyalisme des populations et de leurs
chefs, loyalisme dont elles nous ont donné maintes
preuves pendant la guerre. Mais peu à peu l'admi-
nistration se relâche de son exactitude : en beau-
coup de régions, les recensements fiscaux n'ont
pas été contrôlés depuis 1913 ; les indigènes trop
éloignés d'un tribunal de subdivision recourent
à l'arbitrage du chef de village ou de canton; les
opérations du prochain recrutement seront très
longues et, accaparant tout le personnel européen
et indigène, arrêteront presque partout la vie
administrative Enfin, ce qui est le plus regret-
table, la mise en valeur économique du pays
passe au dernier plan et aurait même dû être
abandonnée, si nous n'avions trouvé dans les
milieux indigènes un désir de faire quelque
chose, partant, une collaboration volontaire, gràce
à quoi, en distribuant des instruments agricoles,
nous nous acheminons lentement, mais progres-
sivement, vers l'intensification des cultures.
En résumé, privée de la majeure partie de ses
moyens d'action, la colonie se replie sur elle-
même, et tout ce qu'il est possible de lui deman-
der, c'est de ne pas regresser, de conserver foi
dans son avenir et de se préparer à reprendre la
marche en avant dès le retour à la vie normale.
Une grande partie des autochtones et la majo-
rité de leurs chefs comprennent aujourd'hui que
leur pays doit se transformer tant au point de
vue économique qu'au point de vue politique. Au
premier point de vue, des signes non douteux
d'évolution nous ont été donnés : ce sont les
demandes spontanées d'intervention qui nous vien-
nent de régions dont nous n'avons pu encore nous
occuper, c'est la facilité avec.laquelle nous recru-
tons des jeunes gens de bonne famille pour les
envoyer en France s'initier à des méthodes d'a-
griculture plus perfectionnées, c'est l'offre de
nombreux villages de construire eux-mêmes des
routes carrossables sur lesquelles circuleraient
des charrettes à bœufs, si 1 administration peut
leur indiquer le tracé et faire diriger l'exécution.
Au point de vue politique, la guerre, les
mesures annoncées par les décrets des 14 jan-
vier 1918, le retour de tirailleurs de plus en plus
nombreux ont une influence certaine sur la men-
talité de nos indigènes. Ils ne sentent encore que
confusément qu'il y a quelque chose de changé.
La grève a fait apparition en 1919 chez les
manœuvres du port de Conakry, elle s'étend timi-
dement aux ouvriers des entreprises publiques ou
privées, provoquée plutôt par un état sentimental
que par des causes nettement discernées.
Les indigènes instruits de l'administration ou
de commerce parlent de leurs droits, discutent
les mesures dont ils sont l'objet.
Les chefs indigènes — certains du moins — ne
sont pas loin de réclamer un statut.
Les indices sont donc assez nombreux d'une
évolution sociale; aucun cependant n'est encore
nettement caractérisé. Il y a dans la masse des
indigènes une sorte de travail molléculaire, qui ne
sait comment se traduire en paroles, et qui est
encore inhabile à se manifester en actes.
A cet égard, les dernières élections d'un délé-
gué au conseil supérieur de la colonie ont intro-
duit un élément nouveau. Pour la première fois
les originaires des quatre communes du Sénégal
ont été admis au vote, en vertu de la loi du
29 septembre 1916. Ce n'est pas sans un certain
étonnement, ou même quelque déception, que
l'élite de nos indigènes s'est vue écartée d une
élection qui intéressait directement leur colonie,
de la généraliser au point qu'elle exerce une
influence sur les procédés actuels d'administra-
tion, il faudra que nos écoles aient, en plus des
jeunes gens instruits réclamés par les entreprises
privées ou les services publics, formé dans chaque
région, dans chaque canton, une élite apte à rem-
plir les fonctions nouvelles qui leur seront con-
férées.
Ce résultat ne sera probablement pas atteint
avant une dizaine d'années.
Pour le moment, nous sommes obligés de nous
en tenir au système de l'administration directe,
tempérée par le concours, d'ailleurs de plus en
plus actif et utile, des chefs indigènes et, pour
cette tàche, il y a un effectif minimum d'agents
européens au-dessous duquel on ne peut des-
cendre sans compromettre le bon fonctionnement
- de l'administration.
A mesure que les années de guerre raréfiaient
notre.personnel, nous avons resserré les effectifs
de tous les services. En ce qui concerne les cercles
civils, nous en sommes arrivés à nous contenter
d'un effectif théorique de 41 administrateurs de
tous grades et de 31 agents des affaires indigènes,
24 de ces derniers étant d'ailleurs immobilisés
dans la gestion des caisses. Le personnel actif a
été ainsi ramené progressivement à 48 agents. Ce
chiffre correspond en moyenne à un agent euro-
péen par 34.000 habitants et pour 4.000 kilomètres
carrés équivalant à la superficie d'un petit dépar-
tement de France. Il serait donc difficile de dire
que la Guinée s'offre, pour l'administration de ses
16 cercles civils, un luxe exagéré de fonction-
naires, et il semble, au contraire, qu'elle soit allée
jusqu'aux extrêmes limites de la compression.
En réalité, aucun administrateur ne peut plus
faire que des tournées brèves ou rapides; toute
son activité est absorbée par le recouvrement de
l'impôt, par les multiples questions que soulève
le recrutement des tirailleurs, par la justice
indigène presque aussi formaliste que la justice
française, et par les affaires courantes.
Un certain nombre de subdivisions ont été fer-
mées et celles qui subsistent seront fermées inces-
samment; ces fermetures augmentent le travail
des chefs lieux de cercle; mais il vaut mieux
avoir un Européen de plus au chef-lieu que de le
laisser isolé dans un poste, et le cercle peut ainsi
accomplir sa besogne de bureau. Si la situation
du personnel s'aggravait encore, il faudrait se
résoudre à fusionner des cercles, mesure qui a déjà
été réalisée en 1913 et 1918, partout où les faci-
lités de communication le permettaient.
On ne saurait dire que, dans de telles condi-
tions, la sécurité de la colonie soit en péril; elle
repose sur le loyalisme des populations et de leurs
chefs, loyalisme dont elles nous ont donné maintes
preuves pendant la guerre. Mais peu à peu l'admi-
nistration se relâche de son exactitude : en beau-
coup de régions, les recensements fiscaux n'ont
pas été contrôlés depuis 1913 ; les indigènes trop
éloignés d'un tribunal de subdivision recourent
à l'arbitrage du chef de village ou de canton; les
opérations du prochain recrutement seront très
longues et, accaparant tout le personnel européen
et indigène, arrêteront presque partout la vie
administrative Enfin, ce qui est le plus regret-
table, la mise en valeur économique du pays
passe au dernier plan et aurait même dû être
abandonnée, si nous n'avions trouvé dans les
milieux indigènes un désir de faire quelque
chose, partant, une collaboration volontaire, gràce
à quoi, en distribuant des instruments agricoles,
nous nous acheminons lentement, mais progres-
sivement, vers l'intensification des cultures.
En résumé, privée de la majeure partie de ses
moyens d'action, la colonie se replie sur elle-
même, et tout ce qu'il est possible de lui deman-
der, c'est de ne pas regresser, de conserver foi
dans son avenir et de se préparer à reprendre la
marche en avant dès le retour à la vie normale.
Une grande partie des autochtones et la majo-
rité de leurs chefs comprennent aujourd'hui que
leur pays doit se transformer tant au point de
vue économique qu'au point de vue politique. Au
premier point de vue, des signes non douteux
d'évolution nous ont été donnés : ce sont les
demandes spontanées d'intervention qui nous vien-
nent de régions dont nous n'avons pu encore nous
occuper, c'est la facilité avec.laquelle nous recru-
tons des jeunes gens de bonne famille pour les
envoyer en France s'initier à des méthodes d'a-
griculture plus perfectionnées, c'est l'offre de
nombreux villages de construire eux-mêmes des
routes carrossables sur lesquelles circuleraient
des charrettes à bœufs, si 1 administration peut
leur indiquer le tracé et faire diriger l'exécution.
Au point de vue politique, la guerre, les
mesures annoncées par les décrets des 14 jan-
vier 1918, le retour de tirailleurs de plus en plus
nombreux ont une influence certaine sur la men-
talité de nos indigènes. Ils ne sentent encore que
confusément qu'il y a quelque chose de changé.
La grève a fait apparition en 1919 chez les
manœuvres du port de Conakry, elle s'étend timi-
dement aux ouvriers des entreprises publiques ou
privées, provoquée plutôt par un état sentimental
que par des causes nettement discernées.
Les indigènes instruits de l'administration ou
de commerce parlent de leurs droits, discutent
les mesures dont ils sont l'objet.
Les chefs indigènes — certains du moins — ne
sont pas loin de réclamer un statut.
Les indices sont donc assez nombreux d'une
évolution sociale; aucun cependant n'est encore
nettement caractérisé. Il y a dans la masse des
indigènes une sorte de travail molléculaire, qui ne
sait comment se traduire en paroles, et qui est
encore inhabile à se manifester en actes.
A cet égard, les dernières élections d'un délé-
gué au conseil supérieur de la colonie ont intro-
duit un élément nouveau. Pour la première fois
les originaires des quatre communes du Sénégal
ont été admis au vote, en vertu de la loi du
29 septembre 1916. Ce n'est pas sans un certain
étonnement, ou même quelque déception, que
l'élite de nos indigènes s'est vue écartée d une
élection qui intéressait directement leur colonie,
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