Titre : Le Monde colonial illustré : revue mensuelle, commerciale, économique, financière et de défense des intérêts coloniaux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1929-09-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34459430v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 septembre 1929 01 septembre 1929
Description : 1929/09/01 (A7,N73)-1929/09/30. 1929/09/01 (A7,N73)-1929/09/30.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97457277
Source : CIRAD, 2016-192274
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 03/10/2016
N° 73. — SEPTEMBRE 1929 LE MONDB COLONIAL ILLUSTRE
231
SAINT-LOUIS ET LE FLEUVE SÉNÉGAL
S^I0UI5 et ptL'E.mLouc!iure du Sénëoal.
te à rniWé.5im es /rlt:(/r¡I/élnl' feô /:JÓcSl'ÍïOflÚ c/e
rEmbouchure dl Jenigà/ depc/fô -1820..
chant grave de la mer. La ville,
quoique entourée parles eaux abon-
dantes du Sénégal, est mal tenue.
Les rues, autrefois bétonnées, sont
de véritables cassè-cou. Le soir, elle
est plongée dans l'obscurité.
Les quais ont peu d'activité.
L'embouchure du Sénégal, qui était
en 1820 à 3 kilomètres, se déplace.
Elle est à 18 kilomètres - au sud,
obstruée par les sables une grande
partie de l'année, par suite du phé-
nomène de la barre, ce qui rend
la navigation difficile.
Pourtant, les techniciens sont
-unanimes à déclarer depuis qua-
rante ans que la fixation de l'ém-
bouchure est exécutable et qu'elle
présente un intérêt incontestable
pour l'avenir du Soudan et du
Sénégal.
Le dernier projet accepté par le
Conseil supérieur des Travaux pu-
blics des Colonies date de 1921.
Il à été longuement étudié par
l'ingénieur Louise.
Dans ce projet; l'embouchure est
fixée à 6 kilomètres de Saint-Louis
par deux digues nord et sud,
laissant entre elles un passage de
750 mètres, qui permettra l'entrée
des navires eh toutes saisons, par
des fonds de 8 mètres, correspon-
dant à ceux actuels du fleuve.
Quand ce projet sera réalisé,
Saint-Louis, capitale du Sénégal,
deviendra. un port fluvial impor-
tant, très bien abrité, à l'embou-
chure d'un neuve de 900 kilo-
mètres, dont la navigabilité devra
être régularisée.
Ce port sera le centre d'attrac-
tion réelle du fleuve et par consé-
quent du Soudan, relié directe-
ment à la mer.
Les produits seront exportés
avec^ bénéfices, par eau, de Kayes
en Europe, évitant le transborde-
ment coûteux par Dakar, qui
double le prix du fret de ou pour
la métropole.
Les communications étant di-
rectes et le prix du fret abaissé
au taux des autres ports de la
côte, il en résultera une augmenta-
tion considérable du trafic.
La production de la région èt du
fleuve prendra de l'essor dès que
l'évacuation des produits pourra se
faire à des prix compatibles avec
la valeur de ces produits.
Toutes les objections he résistent
pas contre ce fait indéniable : la
nature a doté cette contrée d'un
instrument incomparable pour sa
fertilité et ses transports ; à
l'homme de vouloir l'améliorer
pour son usage.
Le regretté gouverneur général de
l'Afrique occidentale française Van
Vollenhoven a dit :
« La volonté d'abord; les moyens
ensuite, et ceux-ci n'ont jamais fait
défaut à ceux qui possèdent celle-
là. » E. POIX.
Lors de-son récent voyage en Afrique occidentale
française, M. le ministre des Colonies n'a pas vu
Saint-Louis, -et c'est regrettable.
Après la pénible traversée du Cayor par la voie
ferrée ou en auto par de mauvaises pistes, il eût été
agréablement surpris, à son arrivée sur le grand pont
Faidherbe, de découvrir la vieille capitale, dans son
île, enserrée entre les deux bras du Sénégal.
Assez mal protégée des assauts de l'Océan par
l'étroite langue de Barbarie, Saint-Louis est tantôt
brûlée par les vents d'est, rafraîchie par la brise de
mer ou plongée dans les brumes du fleuve qui l'entoure.
Au centre de l'île, le Palais du Gouvernement du Séné-
gal, vieux fortin de l'époque de la conquête, transformé
pour les besoins des nombreux services administratifs.
Sur la place, un Faidherbe en bronze rôtit sous le
soleil tropical, entouré de casernes peu esthétiques.
Des indigènes en boubous brodés se promènent
casque en tête, badine à la main. Les diguaines vont
en bande, traînant leurs babouches par les petites rues
étroites, couvertes de pagnes bariolés et de bijoux
d'or de Galam. Les énormes bracelets de pied, qui
étaient en argent massif, sont remplacés par des bra-
celets en aluminium. Ces dames ont supprimé leurs
cheveux tressés et portent des perruques en sisal.
Des taxis transportent des indigènes friands de
déplacements.
Après le pont sur le petit bras du fleuve, voici le
marché bruyant aux odeurs fortes, des Maures pouil-
leux et leurs chameaux. C'est un grouillement intense.
Les rues qui vont à la mer sont encombrées de cases
malpropres. Parfois les appels du muezzin à la prière
s'élèvent aigus de la mosquée, accompagnés par le
ST LOUIS.
PLAN
SUR LA MONTAGNE
Sermon Africain
, pour nos Frères de l'Administration
et du Commerce
Et nos Pères, les Abbés à Mitre et à Crosse.
L'administrateur d'un Cercle, le Commandant,
comme disent les indigènes avec crainte, et les Euro-
péens avec ironie, ayant fait bâtir un pavillon'sur la
montagne voisine de sa résidence, fut blâmé : par ses
chefs, les inspecteurs et le gouverneur, et par les autres
fonctionnaires et les commerçants du Cercle. Tous
crièrent : « Il » veut nous dominer ! Le malheureux
ne désirait peut-être que changer d'air et de point de
vue au moins une fois la semaine, s'isoler pour un
jour, contempler « les grands pays muets » et embras-
ser d'un regard philosophique les petites maisons des
hommes : les bureaux, l'école, la poste, les boutiques
et les huttes indigènes.
Nous aurions tous besoin de monter sur la montagne
et d'y faire retraite.
Et de promener ensuite un œil perspicace. Est-ce
là fantaisie de tyran, orgueil de propriétaire, folie
de réformateur?
Du haut de sa montagne, que voit le commandant?
Son-Cercle, qui n'existe plus. Son Cercle, qui, pendant
toute la semaine, est devenu le possessif colonial des
techniciens et des commerçants. Ferme-école, entre-
prise de voirie, laboratoire médical et vétérinaire,
bueau annexe du grand bureau des Phynances et du
suprême bureau du Trésor, champ de manœuvres
militaires, autodrome et auberge pour camelots de
l'exotisme, parc à bestiaux, marché de coton, de
karité, d'arachide, de kapok, le Cercle a été tout cela
et le commandant a été la bonne à tout faire... Les
techniciens lui ont dit vertement : « Par ordre de mon
chef de service... » et les commerçants lui ont murmuré
fixement : « Les intérêts du commerce... ». 'Le comman-
dant, ce féodal, n'a eu le droit d'être énergique qu'en-
vers l'indigène, ce perpétuel fournisseur de manœuvres,
d'élèves, de produits. Le commandant ne commande
plus l'indigène pour l'indigène, mais pour les besoins
d'une civilisation mercantile mimétique et mécanique.
Besoins qui seraient contradictoires entre eux et
opposés à toute colonisation sérieuse s'ils n'étaient
classés par ordre d'urgence, modérés et contrôlés par
un chef. Ce chef, c'est le commandant, l'administra-
teur.
Il ne s'agit pas de revenir en arrière. Le comman-
dant n'est plus, sauf en de rares asiles, le Français
qui monte une garde bienveillante, parmi des .popu-
lations apprivoisées. Mais il ne saurait être sans danger
l'intermédiaire obéissant et fourbu entre les techni-
ciens et les commerçants d'une part et les indigènes
d'autre part. Il doit. les administrer tous.
J'entends bien que des circulaires rappellent sa
primauté. Mais ce sont des circulaires. J'entends bien
que des règlements le protègent. Mais,s'il appliquait
la lettre de ces textes, quels cris européens au pied de
la montagne de règlements et de circulaires!
Là encore, c'est une question d'hommes plus que
de principes et, si les coloniaux tenaient tous à honneur
de faire oraison et de considérer au moins une fois
la .semaine leur travail d'assez haut, ils s'entendraient,
et non plus seulement sur le dos de l'indigène.
Nous adressions dernièrement à notre gouverneur
général un appel véhément dans le langage qu'il nous
a lui-même enseigné : hardi et direct.
Nous craindrions, hélas, de n'être pas entendus si
nous parlions à d'autres.
Que voit le commandant du haut de sa montagne?
Tel chef de service qui est, lui, un homme avant d'être
un technicien et qui est entouré de comptables déguisés
en ingénieurs, fiers de leurs primes de technicité et
de leur mentalité syndicale. Tel chef d'industrie qui
redoute les ouvriers prétendus spécialistes et ne
demande à son siège social que des hommes de bonne
volonté.
Que voit le commandant du haut de sa montagne ?
Un pays très ancien, et non pas'neuf comme on le dit
en France, une vie indigène compliquée et profonde,
une tâche coloniale très nuancée et qui n'est pas mise
en formules dans les manuels Roret ou dans les
mémento à l'usage des étudiants utilitaires.
S'il est vrai que les Européens exagèrent aux colo-
nies les défauts et les vices du siècle, quelle infatuation,
quelle agitation ne s'observent pas en l'Afrique
actuelle ! A quelles cures d'humilité contemplative
ne devrions-nous pas venir de temps à autre !
Nous ferons cependant une querelle à notre com-
mandant bâtisseur sur la montagne. Il n'était --pas.
besoin d'un -pavillon aménagé à l'européenne.
Une hutte indigène suffisait. Elle était, sous .son
toit fragile et antique, le seul abri qui convînt désormais
à celui que nos pères appelaient l'honnête homme.
Le bon sens et le bon goût habitent. en France
même de bien discrets logis. Il est juste et harmonieux
qu'il en soit ainsi en Afrique.
Et là, sur la montagne soudanaise, et là, dans cette
hutte misérable, je convie malgré tout, rêveur -incu-
rable, avec un geste de pauvre honteux, les hérauts
du Transsaharien, les magiciens des irrigations du
Niger et les académiciens de l'Académie coloniale.
Louis FAIVRE.
231
SAINT-LOUIS ET LE FLEUVE SÉNÉGAL
S^I0UI5 et ptL'E.mLouc!iure du Sénëoal.
te à rniWé.5im es /rlt:(/r¡I/élnl' feô /:JÓcSl'ÍïOflÚ c/e
rEmbouchure dl Jenigà/ depc/fô -1820..
chant grave de la mer. La ville,
quoique entourée parles eaux abon-
dantes du Sénégal, est mal tenue.
Les rues, autrefois bétonnées, sont
de véritables cassè-cou. Le soir, elle
est plongée dans l'obscurité.
Les quais ont peu d'activité.
L'embouchure du Sénégal, qui était
en 1820 à 3 kilomètres, se déplace.
Elle est à 18 kilomètres - au sud,
obstruée par les sables une grande
partie de l'année, par suite du phé-
nomène de la barre, ce qui rend
la navigation difficile.
Pourtant, les techniciens sont
-unanimes à déclarer depuis qua-
rante ans que la fixation de l'ém-
bouchure est exécutable et qu'elle
présente un intérêt incontestable
pour l'avenir du Soudan et du
Sénégal.
Le dernier projet accepté par le
Conseil supérieur des Travaux pu-
blics des Colonies date de 1921.
Il à été longuement étudié par
l'ingénieur Louise.
Dans ce projet; l'embouchure est
fixée à 6 kilomètres de Saint-Louis
par deux digues nord et sud,
laissant entre elles un passage de
750 mètres, qui permettra l'entrée
des navires eh toutes saisons, par
des fonds de 8 mètres, correspon-
dant à ceux actuels du fleuve.
Quand ce projet sera réalisé,
Saint-Louis, capitale du Sénégal,
deviendra. un port fluvial impor-
tant, très bien abrité, à l'embou-
chure d'un neuve de 900 kilo-
mètres, dont la navigabilité devra
être régularisée.
Ce port sera le centre d'attrac-
tion réelle du fleuve et par consé-
quent du Soudan, relié directe-
ment à la mer.
Les produits seront exportés
avec^ bénéfices, par eau, de Kayes
en Europe, évitant le transborde-
ment coûteux par Dakar, qui
double le prix du fret de ou pour
la métropole.
Les communications étant di-
rectes et le prix du fret abaissé
au taux des autres ports de la
côte, il en résultera une augmenta-
tion considérable du trafic.
La production de la région èt du
fleuve prendra de l'essor dès que
l'évacuation des produits pourra se
faire à des prix compatibles avec
la valeur de ces produits.
Toutes les objections he résistent
pas contre ce fait indéniable : la
nature a doté cette contrée d'un
instrument incomparable pour sa
fertilité et ses transports ; à
l'homme de vouloir l'améliorer
pour son usage.
Le regretté gouverneur général de
l'Afrique occidentale française Van
Vollenhoven a dit :
« La volonté d'abord; les moyens
ensuite, et ceux-ci n'ont jamais fait
défaut à ceux qui possèdent celle-
là. » E. POIX.
Lors de-son récent voyage en Afrique occidentale
française, M. le ministre des Colonies n'a pas vu
Saint-Louis, -et c'est regrettable.
Après la pénible traversée du Cayor par la voie
ferrée ou en auto par de mauvaises pistes, il eût été
agréablement surpris, à son arrivée sur le grand pont
Faidherbe, de découvrir la vieille capitale, dans son
île, enserrée entre les deux bras du Sénégal.
Assez mal protégée des assauts de l'Océan par
l'étroite langue de Barbarie, Saint-Louis est tantôt
brûlée par les vents d'est, rafraîchie par la brise de
mer ou plongée dans les brumes du fleuve qui l'entoure.
Au centre de l'île, le Palais du Gouvernement du Séné-
gal, vieux fortin de l'époque de la conquête, transformé
pour les besoins des nombreux services administratifs.
Sur la place, un Faidherbe en bronze rôtit sous le
soleil tropical, entouré de casernes peu esthétiques.
Des indigènes en boubous brodés se promènent
casque en tête, badine à la main. Les diguaines vont
en bande, traînant leurs babouches par les petites rues
étroites, couvertes de pagnes bariolés et de bijoux
d'or de Galam. Les énormes bracelets de pied, qui
étaient en argent massif, sont remplacés par des bra-
celets en aluminium. Ces dames ont supprimé leurs
cheveux tressés et portent des perruques en sisal.
Des taxis transportent des indigènes friands de
déplacements.
Après le pont sur le petit bras du fleuve, voici le
marché bruyant aux odeurs fortes, des Maures pouil-
leux et leurs chameaux. C'est un grouillement intense.
Les rues qui vont à la mer sont encombrées de cases
malpropres. Parfois les appels du muezzin à la prière
s'élèvent aigus de la mosquée, accompagnés par le
ST LOUIS.
PLAN
SUR LA MONTAGNE
Sermon Africain
, pour nos Frères de l'Administration
et du Commerce
Et nos Pères, les Abbés à Mitre et à Crosse.
L'administrateur d'un Cercle, le Commandant,
comme disent les indigènes avec crainte, et les Euro-
péens avec ironie, ayant fait bâtir un pavillon'sur la
montagne voisine de sa résidence, fut blâmé : par ses
chefs, les inspecteurs et le gouverneur, et par les autres
fonctionnaires et les commerçants du Cercle. Tous
crièrent : « Il » veut nous dominer ! Le malheureux
ne désirait peut-être que changer d'air et de point de
vue au moins une fois la semaine, s'isoler pour un
jour, contempler « les grands pays muets » et embras-
ser d'un regard philosophique les petites maisons des
hommes : les bureaux, l'école, la poste, les boutiques
et les huttes indigènes.
Nous aurions tous besoin de monter sur la montagne
et d'y faire retraite.
Et de promener ensuite un œil perspicace. Est-ce
là fantaisie de tyran, orgueil de propriétaire, folie
de réformateur?
Du haut de sa montagne, que voit le commandant?
Son-Cercle, qui n'existe plus. Son Cercle, qui, pendant
toute la semaine, est devenu le possessif colonial des
techniciens et des commerçants. Ferme-école, entre-
prise de voirie, laboratoire médical et vétérinaire,
bueau annexe du grand bureau des Phynances et du
suprême bureau du Trésor, champ de manœuvres
militaires, autodrome et auberge pour camelots de
l'exotisme, parc à bestiaux, marché de coton, de
karité, d'arachide, de kapok, le Cercle a été tout cela
et le commandant a été la bonne à tout faire... Les
techniciens lui ont dit vertement : « Par ordre de mon
chef de service... » et les commerçants lui ont murmuré
fixement : « Les intérêts du commerce... ». 'Le comman-
dant, ce féodal, n'a eu le droit d'être énergique qu'en-
vers l'indigène, ce perpétuel fournisseur de manœuvres,
d'élèves, de produits. Le commandant ne commande
plus l'indigène pour l'indigène, mais pour les besoins
d'une civilisation mercantile mimétique et mécanique.
Besoins qui seraient contradictoires entre eux et
opposés à toute colonisation sérieuse s'ils n'étaient
classés par ordre d'urgence, modérés et contrôlés par
un chef. Ce chef, c'est le commandant, l'administra-
teur.
Il ne s'agit pas de revenir en arrière. Le comman-
dant n'est plus, sauf en de rares asiles, le Français
qui monte une garde bienveillante, parmi des .popu-
lations apprivoisées. Mais il ne saurait être sans danger
l'intermédiaire obéissant et fourbu entre les techni-
ciens et les commerçants d'une part et les indigènes
d'autre part. Il doit. les administrer tous.
J'entends bien que des circulaires rappellent sa
primauté. Mais ce sont des circulaires. J'entends bien
que des règlements le protègent. Mais,s'il appliquait
la lettre de ces textes, quels cris européens au pied de
la montagne de règlements et de circulaires!
Là encore, c'est une question d'hommes plus que
de principes et, si les coloniaux tenaient tous à honneur
de faire oraison et de considérer au moins une fois
la .semaine leur travail d'assez haut, ils s'entendraient,
et non plus seulement sur le dos de l'indigène.
Nous adressions dernièrement à notre gouverneur
général un appel véhément dans le langage qu'il nous
a lui-même enseigné : hardi et direct.
Nous craindrions, hélas, de n'être pas entendus si
nous parlions à d'autres.
Que voit le commandant du haut de sa montagne?
Tel chef de service qui est, lui, un homme avant d'être
un technicien et qui est entouré de comptables déguisés
en ingénieurs, fiers de leurs primes de technicité et
de leur mentalité syndicale. Tel chef d'industrie qui
redoute les ouvriers prétendus spécialistes et ne
demande à son siège social que des hommes de bonne
volonté.
Que voit le commandant du haut de sa montagne ?
Un pays très ancien, et non pas'neuf comme on le dit
en France, une vie indigène compliquée et profonde,
une tâche coloniale très nuancée et qui n'est pas mise
en formules dans les manuels Roret ou dans les
mémento à l'usage des étudiants utilitaires.
S'il est vrai que les Européens exagèrent aux colo-
nies les défauts et les vices du siècle, quelle infatuation,
quelle agitation ne s'observent pas en l'Afrique
actuelle ! A quelles cures d'humilité contemplative
ne devrions-nous pas venir de temps à autre !
Nous ferons cependant une querelle à notre com-
mandant bâtisseur sur la montagne. Il n'était --pas.
besoin d'un -pavillon aménagé à l'européenne.
Une hutte indigène suffisait. Elle était, sous .son
toit fragile et antique, le seul abri qui convînt désormais
à celui que nos pères appelaient l'honnête homme.
Le bon sens et le bon goût habitent. en France
même de bien discrets logis. Il est juste et harmonieux
qu'il en soit ainsi en Afrique.
Et là, sur la montagne soudanaise, et là, dans cette
hutte misérable, je convie malgré tout, rêveur -incu-
rable, avec un geste de pauvre honteux, les hérauts
du Transsaharien, les magiciens des irrigations du
Niger et les académiciens de l'Académie coloniale.
Louis FAIVRE.
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