Titre : La Dépêche coloniale illustrée
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-10-15
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327559237
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 15 octobre 1906 15 octobre 1906
Description : 1906/10/15 (A6,N19). 1906/10/15 (A6,N19).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9743175m
Source : CIRAD, 2016-191284
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/09/2016
La Dépêche Coloniale
ILLUSTRÉE
15; Octobre 19Utt ^t>° Anuee ïMu 19
- Adresse télégraphique : Deponiale-Paris
Co
Directeur : J.-PAUL TROUIXJLET
Baiemix :
12, Rue Saint Georges, Paris
Ti4léplione : 157-47
D'ALiGER A LA JWECQUE
O. N demandait au Prophète quelle était
« l'œuvre la plus méritoire. — La foi,
« répondit-il. — Et ensuite ? — La
« guerre sur le chemin de Dieu (la guerre
« sainte). — Et ensuite? — Le pèlerinage ».
ce Dieu a ordonné aux hommes le pèlerinage
« à la Maison de la Kaaba. »
Ces paroles simples, extraites du Coran, suf-
fisent pourtant, en plein vingtième siècle, à
mettre en émoi, à une certaine
époque de l'année, les millions de
musulmans répandus à travers le
vieux continent.. Et, dans les hameaux
les plus reculés de l'Afrique et de
l'Asie, chez les populations les plus
primitives, les plus ignorantes, les
plus misérables, la même idée fixe
germe dans des millions de cerveaux,
la même pensée converge vers la cité
mystérieuse que les musulmans ap-
pellent avec emphase Oum-el-Kora
(la Mère des Villes), une force sur-
humaine les pousse alors vers le
Hedjaz. Pendant des jours et des
mois, ils suivront les sentiers qui
conduisent vers la cité du Prophète.
Faméliques, vêtus de haillons sor-
dides, cachant dans un pli de leur
burnous les quelques pièces d'or qui
constituent toute leur fortune, ils
iront sans trève, sous le grand soleil
■et dans la nuit étoilée, avec, constam-
ment devant eux, la vision d'Allah et les paradis
futurs...
Tels ils furent il y a vingt siècles, tels ils sont
aujourd'hui encore. Nos civilisations ne les ont
même pas effleurés. Et telle aussi est demeurée
leur ville sainte, dont la Bible fait mention sous
le nom de Miesca, et que les écrivains latins,
Ptolémée entre autres, nomment Macaraba.
LA « SAVOIE û LÈVE L'ANCRE
La ville ne commença pourtant à prendre
une importance historique qu'à la naissance de
Mahomet, 622 années après la naissance du
LA « SAVOIE » EMBARQUANT LES PELERINS, A ALGER
Christ. Mais alors que le monde entier se trans-
formait, le Hedjaz conservait son aspect pri-
mitif. Les anciens édifices en ruines étaient
reconstruits sous leur premier aspect, et la tra-
dition ainsi se perpétuait immuable à travers
les générations de croyants.
En Algérie et en Tunisie, le gouvernement
français réglementa le pèlerinage.' Et l'on
assista, chaque saison, à cet exode que rien
n'arrivait à enrayer. Pendant des années, sur-
tout dans les campagnes et parmi les po pula...
tions les plus pauvres, des hordes de Meskines
entassaient sou par sou, se privant de tout,
conservant l'unique espoir d'être un jour Nadji..
Une simple anecdote, toute récente, donnera
une idée de cette folie mystique :
L'an dernier, une voiture automobile montée
par quelques touristes croisa, dans les gorges
de la Chiffe, près de Blida, un Arabe conduisant
un mulet. La voiture faisait grand fracas. La
bête, qui portait sur son dos un chargement de
fruits et de légumes, prit peur, s'emballa, épar-
pillant tout le long de la route les bribes de son
chargement. Le muletier, cloué sur place, se
lamentait sur l'étendue du désastre, et sa dou-
leur apitoya les touristes qui lui vinrent en aide
et réparèrent avec lui le mal. L'homme déclara
alors que cette perte d'argent allait peut-être
l'empêcher de réunir la somme nécessaire pour
aller à La Mecque. Le pèlerinage ne devait cepen-
dant avoir lieu que cinq mois- plus tard. Mais
le fellah avait fait ses calculs, déjoués par cet
accident fortuit. Aller à La Mecque ! C'était là
sa seule préoccupation, celle à quoi il rapportait
tout !
Et ils sont des milliers dans le même cas, dans
les trois départements algériens. L'obsession
du pèlerinage leur donne une sorte de folie
mystique, entretenue par les exhortations des
marabouts. Le gouvernement tenta de réagir
contre ce qu'il considérait avec raison comme
une ruine pour la colonie. De 1902 à 1905, il n'y
eut pas de pèlerinage officiel. Que se produisit-
il alors ?
Ne pouvant plus s'embarquer dans les ports,
les musulmans algériens essayèrent de gagner
le Hedjaz en passant par le sud. Des centaines
périrent de faini, de soif et d'épuisement dans
les sables du désert. Ce pèlerinage en contre-
bande présentait un autre inconvé-
nien t.
N étant plus astreints aux mesures
sanitaires, les pèlerins qui revenaient
dans leurs douars rapportaient avec
eux le germe de maladies conta-
gieuses qui ne tardaient pas à provo-
quer des épidémies. Le pèlerinage
fut donc officiellement rétabli en
1905, et plusieurs milliers de musul-
mans algériens vinrent s'embarquer -
dans les ports des départements d'Al-
ger, Oran et Constantine sur les
paquebots en partance pour Djed'Iah.
A bord de" chaque navire, un admi-
nistrateur de commune mixle fut
chargé d'accompagner les pèlerins
en qualité de commissaire du Gou-
vernement. Comment, dans quelles
conditions s'accomplit ce pèlerinage
de 1905 ? C'est ce que nous dira plus
loin un des administrateurs faisant
fonctions de commissaire du Gouver-
nement, dans le rapport duquel nous avons
puisé maints extraits intéressants, y ajoutant
des documents personnels et des récits de pèle-
rins. Ponr l'instant, nous allons suivre les pé-
ripéties de l'embarquement à bord de la Savoie,
de la Compagnie des Transports maritimes,
qui dans quelques heures va lever l'ancre et
prendre le large avec sa cargaison humaine.
UN PÈLERIN EN COSTUME DE PÈLERINAGE
ILLUSTRÉE
15; Octobre 19Utt ^t>° Anuee ïMu 19
- Adresse télégraphique : Deponiale-Paris
Co
Directeur : J.-PAUL TROUIXJLET
Baiemix :
12, Rue Saint Georges, Paris
Ti4léplione : 157-47
D'ALiGER A LA JWECQUE
O. N demandait au Prophète quelle était
« l'œuvre la plus méritoire. — La foi,
« répondit-il. — Et ensuite ? — La
« guerre sur le chemin de Dieu (la guerre
« sainte). — Et ensuite? — Le pèlerinage ».
ce Dieu a ordonné aux hommes le pèlerinage
« à la Maison de la Kaaba. »
Ces paroles simples, extraites du Coran, suf-
fisent pourtant, en plein vingtième siècle, à
mettre en émoi, à une certaine
époque de l'année, les millions de
musulmans répandus à travers le
vieux continent.. Et, dans les hameaux
les plus reculés de l'Afrique et de
l'Asie, chez les populations les plus
primitives, les plus ignorantes, les
plus misérables, la même idée fixe
germe dans des millions de cerveaux,
la même pensée converge vers la cité
mystérieuse que les musulmans ap-
pellent avec emphase Oum-el-Kora
(la Mère des Villes), une force sur-
humaine les pousse alors vers le
Hedjaz. Pendant des jours et des
mois, ils suivront les sentiers qui
conduisent vers la cité du Prophète.
Faméliques, vêtus de haillons sor-
dides, cachant dans un pli de leur
burnous les quelques pièces d'or qui
constituent toute leur fortune, ils
iront sans trève, sous le grand soleil
■et dans la nuit étoilée, avec, constam-
ment devant eux, la vision d'Allah et les paradis
futurs...
Tels ils furent il y a vingt siècles, tels ils sont
aujourd'hui encore. Nos civilisations ne les ont
même pas effleurés. Et telle aussi est demeurée
leur ville sainte, dont la Bible fait mention sous
le nom de Miesca, et que les écrivains latins,
Ptolémée entre autres, nomment Macaraba.
LA « SAVOIE û LÈVE L'ANCRE
La ville ne commença pourtant à prendre
une importance historique qu'à la naissance de
Mahomet, 622 années après la naissance du
LA « SAVOIE » EMBARQUANT LES PELERINS, A ALGER
Christ. Mais alors que le monde entier se trans-
formait, le Hedjaz conservait son aspect pri-
mitif. Les anciens édifices en ruines étaient
reconstruits sous leur premier aspect, et la tra-
dition ainsi se perpétuait immuable à travers
les générations de croyants.
En Algérie et en Tunisie, le gouvernement
français réglementa le pèlerinage.' Et l'on
assista, chaque saison, à cet exode que rien
n'arrivait à enrayer. Pendant des années, sur-
tout dans les campagnes et parmi les po pula...
tions les plus pauvres, des hordes de Meskines
entassaient sou par sou, se privant de tout,
conservant l'unique espoir d'être un jour Nadji..
Une simple anecdote, toute récente, donnera
une idée de cette folie mystique :
L'an dernier, une voiture automobile montée
par quelques touristes croisa, dans les gorges
de la Chiffe, près de Blida, un Arabe conduisant
un mulet. La voiture faisait grand fracas. La
bête, qui portait sur son dos un chargement de
fruits et de légumes, prit peur, s'emballa, épar-
pillant tout le long de la route les bribes de son
chargement. Le muletier, cloué sur place, se
lamentait sur l'étendue du désastre, et sa dou-
leur apitoya les touristes qui lui vinrent en aide
et réparèrent avec lui le mal. L'homme déclara
alors que cette perte d'argent allait peut-être
l'empêcher de réunir la somme nécessaire pour
aller à La Mecque. Le pèlerinage ne devait cepen-
dant avoir lieu que cinq mois- plus tard. Mais
le fellah avait fait ses calculs, déjoués par cet
accident fortuit. Aller à La Mecque ! C'était là
sa seule préoccupation, celle à quoi il rapportait
tout !
Et ils sont des milliers dans le même cas, dans
les trois départements algériens. L'obsession
du pèlerinage leur donne une sorte de folie
mystique, entretenue par les exhortations des
marabouts. Le gouvernement tenta de réagir
contre ce qu'il considérait avec raison comme
une ruine pour la colonie. De 1902 à 1905, il n'y
eut pas de pèlerinage officiel. Que se produisit-
il alors ?
Ne pouvant plus s'embarquer dans les ports,
les musulmans algériens essayèrent de gagner
le Hedjaz en passant par le sud. Des centaines
périrent de faini, de soif et d'épuisement dans
les sables du désert. Ce pèlerinage en contre-
bande présentait un autre inconvé-
nien t.
N étant plus astreints aux mesures
sanitaires, les pèlerins qui revenaient
dans leurs douars rapportaient avec
eux le germe de maladies conta-
gieuses qui ne tardaient pas à provo-
quer des épidémies. Le pèlerinage
fut donc officiellement rétabli en
1905, et plusieurs milliers de musul-
mans algériens vinrent s'embarquer -
dans les ports des départements d'Al-
ger, Oran et Constantine sur les
paquebots en partance pour Djed'Iah.
A bord de" chaque navire, un admi-
nistrateur de commune mixle fut
chargé d'accompagner les pèlerins
en qualité de commissaire du Gou-
vernement. Comment, dans quelles
conditions s'accomplit ce pèlerinage
de 1905 ? C'est ce que nous dira plus
loin un des administrateurs faisant
fonctions de commissaire du Gouver-
nement, dans le rapport duquel nous avons
puisé maints extraits intéressants, y ajoutant
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rins. Ponr l'instant, nous allons suivre les pé-
ripéties de l'embarquement à bord de la Savoie,
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qui dans quelques heures va lever l'ancre et
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UN PÈLERIN EN COSTUME DE PÈLERINAGE
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