Titre : Les Annales coloniales : revue mensuelle illustrée / directeur-fondateur Marcel Ruedel
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1929-05-01
Contributeur : Ruedel, Marcel. Directeur de publication
Contributeur : Monmarson, Raoul (1895-1976). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb326934111
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 mai 1929 01 mai 1929
Description : 1929/05/01-1929/05/31. 1929/05/01-1929/05/31.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9743134p
Source : CIRAD, 2016-191112
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/09/2016
Page 8
4
Les Annales Coloniales
Le déchargement de la morue à La Rochelle.
(Photo M. F. Reproduction interdite).
80 heures pour se porter de l'Est à l'Ouest
et plus de 50 heures pour se porter du Nord
au Sud.
Nous avons, à la Chambre, appelé l'atten-
tion du Gouvernement sur ce point et quel-
ques améliorations vont pouvoir ainsi être
apportées cette année.
Les causes de la crise actuelle
Ce qui menace vraiment l'industrie de la
pêche à la morue, c'est la crise financière
qu'elle traverse et celle-là ne fait que s'ag-
graver.
Chaque année, comme nous l'avons dit,
des bateaux disparaissent, soit qu'ils coulent,
soit qu'ils soient désarmés.
L'armement a beau faire, en effet, il n'ar-
rive pas, même quand la pêche est normale,
fi. réaliser des bénéfices suffisants.
Armateurs et pêcheurs se plaignent et me-
nacent d'abandonner la partie. Cette année,
a Saint-Malo-Saint-Servan, une dizaine de
bateaux sur soixante ont couvert leurs fiais.
La morue n'est pas payée assez cher à
l'annnnellt lui-même. Alors que les frais
d'armement ont passé de 60.000 à 500.000 fr.,
ce qui représente le coefficient 8, le prix de
la morue n'a augmenté que de 4 et 5.
Autre raison, parfois, qui est une consé-
quence de la première: dans l'attribution des
bénéfices, certains équipages considèrent
qu'ils sont frustrés d'une partie de leurs bé-
néfices légitimes.
Voila le point « névralgique ». C'est sur
lui que devra porter toute l'attention.
Il est nécessaire d'abord de tenir compte de
l'existence, entre l'armateur qui arrive avec
son chargement de morue, et les acheteurs
fiançais, d'un intermédiaire tout puissant
qu'on appelle le consignataire. C'est lui qui
en réalité achète en bloc les chargements de
morues pour les re' endre. L'armateur ne
connaît que lui. C'est un agent régularisa-
teur ou de spéculation. En tout cas, il assure
un débouché sûr et un paiement immédiat
Par la suite, le consignataire écoule sa
marchandise en fractionnant ou en groupant
lies achats sur le marché français ou étran-
ger.
Dans quelle mesure les maîtres du marché
français sont-ils libres de fixer le prix de la
morue ? Ne sont-ils pas obligés de tenir
compte du prix mondial.
Et voilà un autre élément qui, en effet,
entre en jeu et celui-là est d'importance
« la concurrence internationale ».
La France n'est pas seul pays producteur.
Les Islandais pêchent sur place. Les Cana-
diens aussi. Les Norvégiens et les Portugais
sont grands pêcheurs de morues, les pre-
miers vont aux « Lofoten », les seconds à
Terre-Neuve, et la France ne représente
qu'un sixième de la production totale.
D'autre part, la France ne consomm<
qu'une partie de sa production.
En 1927, l'armement français a rapporté
604.466 quintaux et il n'en a été consommé
en France que 328.555-
Le vendeur français est donc lui-même, en
partie, soumis aux fluctuations du marché
Le naufrage du voilier « La Parisienne » sur les rochers de t'!!e aux Chiens (1S2S).
mondial et dans les discussions qui s'ouvri-
ront, il appartiendra aux armateurs-vendeurs
de nous démontrer que ce n'est pas seule-
ment par lucre mais par nécessité qu'ils ré-
munèrent si faiblement l'armement.
Lorsque, au lieu de considérer le marché
on examine les rapports qui existent entre
l'armateur et son équipage, on constate, et
personnellement, je suis bien placé pour
cela, que certains tiraillements qui pour-
raient facilement devenir des conflits se pro-
duisent précisément au moment de la fixation
des prix qui détermine elle-même la fixation
de la part qui revient à chaque pêcheur.
Le paiement des marins Terre-Neuvas
s'effectue d'une façon assez compliquée; il
donne lieu à des paiements d'avance et en
fin de campagne à un pourcentage sur les
bénéfices... quand il y en a.
Les marins déclarent que, par des procédés
plus ou moins indirects, l'armateur s'arrange
de façon à se faire la plus grosse part, et que
la vente de la morue se fait en dehors de leur
présence. C'est encore un point qu'il con-
viendra de contrôler, quand (ce qui est abso-
lument désirable) les armateurs consentiront
à discuter (avec les représentants qualifiés
des pêcheurs) les modalités du contrat-type
de pêche qu'on appelle la charte-partie.
Ce contrôle du marché et cette entente
loyale des armateurs et des équipages nous
paraissent de nature à préciser les causes du
mal dont nous souffrons actuellement et d'en
trouver les remèdes.
Les armateurs, pour justifier leur attitude
actuelle à l'égard des marins, font valoir
qu'ils sont dans une situation moins bonne
qu'autrefois. Ils font remarquer que l'arme-
ment de la grande pêche et le commerce de
la morue ont été privés, par suite de la ces-
sation des effets de la loi du 26 février 1911,
des avantages dus aux primes d'armement à
la grande pêche et à l'exportation de la mo-
rue.
Ces primes venaient s'ajouter, à une pro-
tection réelle du tarif douanier: elles per-
mettaient à l'armement français de produire
de la morue à un prix diminué de la valeur
de la prime d'armement et de vendre de la
morue à un prix diminué de la valeur de la
prime d'exportation qui variait de 10 à 20
francs par 100 kilogs.
Les armateurs ont déjà fait valoir cet ar-
gument à plusieurs reprises, notamment
quand ils ont refusé, cette année, d'accorder
à la Sainte-]eanne-d-1 Arc la subvention de
100.000 francs qui est maintenant payée par
l'Etat.
Aujourd'hui, le Comité Central des Arma-
teurs demande qu'on maintienne la protec-
tion qui _leur était accordée par les primes
en augmentant les tarifs de douane sur la
morue étrangère et c'est une question que le
Parlement aura bientôt à examiner avec la
plus grande attention.
Telles sont les questions qui se posent au-
jourd'hui quand on examine la situation de
la pêche morutière.
Elles inquiètent justement tous ceux qui se
préoccupent de l'avenir de notre marine
marchande et l'on ne peut s'empêcher de
regretter qu'on n'y ait fait aucune allusion
dans les rapports et documents parlementai-
res établis à propos du budget de 1929.
Nos chalutiers désarment ; quant à nos
voiliers, chaque année, leur nombre dimi-
nue. Leur construction, pour la plupart,
remonte à dix et douze ans. Que se passera-
t-il dans une dizaine d'années, quand il fau-
dra les remplacer ?
Ce n'est pas dans dix ans qu'il faudra se
le demander. Il sera trop tard.
Nous venons de voir l'importance au point
de vue commercial et maritime de la Pêche
morutière.
Nous venons de voir aussi qu'elle traverse
actuellement une crise qui peut être mor-
telle.
Agissons donc sans tarder et faisons tous
les efforts nécessaires pour faire vivre et pros-
pérer une industrie si précieuse pour le
Pays.
Michel GEIS TDOERFER,
Député des Côtes-du-Nord; Mem-
bre de la Commission de la
Marine Marchande ; Membre du
Conseil Supérieur des Pêches
Maritimes.
4
Les Annales Coloniales
Le déchargement de la morue à La Rochelle.
(Photo M. F. Reproduction interdite).
80 heures pour se porter de l'Est à l'Ouest
et plus de 50 heures pour se porter du Nord
au Sud.
Nous avons, à la Chambre, appelé l'atten-
tion du Gouvernement sur ce point et quel-
ques améliorations vont pouvoir ainsi être
apportées cette année.
Les causes de la crise actuelle
Ce qui menace vraiment l'industrie de la
pêche à la morue, c'est la crise financière
qu'elle traverse et celle-là ne fait que s'ag-
graver.
Chaque année, comme nous l'avons dit,
des bateaux disparaissent, soit qu'ils coulent,
soit qu'ils soient désarmés.
L'armement a beau faire, en effet, il n'ar-
rive pas, même quand la pêche est normale,
fi. réaliser des bénéfices suffisants.
Armateurs et pêcheurs se plaignent et me-
nacent d'abandonner la partie. Cette année,
a Saint-Malo-Saint-Servan, une dizaine de
bateaux sur soixante ont couvert leurs fiais.
La morue n'est pas payée assez cher à
l'annnnellt lui-même. Alors que les frais
d'armement ont passé de 60.000 à 500.000 fr.,
ce qui représente le coefficient 8, le prix de
la morue n'a augmenté que de 4 et 5.
Autre raison, parfois, qui est une consé-
quence de la première: dans l'attribution des
bénéfices, certains équipages considèrent
qu'ils sont frustrés d'une partie de leurs bé-
néfices légitimes.
Voila le point « névralgique ». C'est sur
lui que devra porter toute l'attention.
Il est nécessaire d'abord de tenir compte de
l'existence, entre l'armateur qui arrive avec
son chargement de morue, et les acheteurs
fiançais, d'un intermédiaire tout puissant
qu'on appelle le consignataire. C'est lui qui
en réalité achète en bloc les chargements de
morues pour les re' endre. L'armateur ne
connaît que lui. C'est un agent régularisa-
teur ou de spéculation. En tout cas, il assure
un débouché sûr et un paiement immédiat
Par la suite, le consignataire écoule sa
marchandise en fractionnant ou en groupant
lies achats sur le marché français ou étran-
ger.
Dans quelle mesure les maîtres du marché
français sont-ils libres de fixer le prix de la
morue ? Ne sont-ils pas obligés de tenir
compte du prix mondial.
Et voilà un autre élément qui, en effet,
entre en jeu et celui-là est d'importance
« la concurrence internationale ».
La France n'est pas seul pays producteur.
Les Islandais pêchent sur place. Les Cana-
diens aussi. Les Norvégiens et les Portugais
sont grands pêcheurs de morues, les pre-
miers vont aux « Lofoten », les seconds à
Terre-Neuve, et la France ne représente
qu'un sixième de la production totale.
D'autre part, la France ne consomm<
qu'une partie de sa production.
En 1927, l'armement français a rapporté
604.466 quintaux et il n'en a été consommé
en France que 328.555-
Le vendeur français est donc lui-même, en
partie, soumis aux fluctuations du marché
Le naufrage du voilier « La Parisienne » sur les rochers de t'!!e aux Chiens (1S2S).
mondial et dans les discussions qui s'ouvri-
ront, il appartiendra aux armateurs-vendeurs
de nous démontrer que ce n'est pas seule-
ment par lucre mais par nécessité qu'ils ré-
munèrent si faiblement l'armement.
Lorsque, au lieu de considérer le marché
on examine les rapports qui existent entre
l'armateur et son équipage, on constate, et
personnellement, je suis bien placé pour
cela, que certains tiraillements qui pour-
raient facilement devenir des conflits se pro-
duisent précisément au moment de la fixation
des prix qui détermine elle-même la fixation
de la part qui revient à chaque pêcheur.
Le paiement des marins Terre-Neuvas
s'effectue d'une façon assez compliquée; il
donne lieu à des paiements d'avance et en
fin de campagne à un pourcentage sur les
bénéfices... quand il y en a.
Les marins déclarent que, par des procédés
plus ou moins indirects, l'armateur s'arrange
de façon à se faire la plus grosse part, et que
la vente de la morue se fait en dehors de leur
présence. C'est encore un point qu'il con-
viendra de contrôler, quand (ce qui est abso-
lument désirable) les armateurs consentiront
à discuter (avec les représentants qualifiés
des pêcheurs) les modalités du contrat-type
de pêche qu'on appelle la charte-partie.
Ce contrôle du marché et cette entente
loyale des armateurs et des équipages nous
paraissent de nature à préciser les causes du
mal dont nous souffrons actuellement et d'en
trouver les remèdes.
Les armateurs, pour justifier leur attitude
actuelle à l'égard des marins, font valoir
qu'ils sont dans une situation moins bonne
qu'autrefois. Ils font remarquer que l'arme-
ment de la grande pêche et le commerce de
la morue ont été privés, par suite de la ces-
sation des effets de la loi du 26 février 1911,
des avantages dus aux primes d'armement à
la grande pêche et à l'exportation de la mo-
rue.
Ces primes venaient s'ajouter, à une pro-
tection réelle du tarif douanier: elles per-
mettaient à l'armement français de produire
de la morue à un prix diminué de la valeur
de la prime d'armement et de vendre de la
morue à un prix diminué de la valeur de la
prime d'exportation qui variait de 10 à 20
francs par 100 kilogs.
Les armateurs ont déjà fait valoir cet ar-
gument à plusieurs reprises, notamment
quand ils ont refusé, cette année, d'accorder
à la Sainte-]eanne-d-1 Arc la subvention de
100.000 francs qui est maintenant payée par
l'Etat.
Aujourd'hui, le Comité Central des Arma-
teurs demande qu'on maintienne la protec-
tion qui _leur était accordée par les primes
en augmentant les tarifs de douane sur la
morue étrangère et c'est une question que le
Parlement aura bientôt à examiner avec la
plus grande attention.
Telles sont les questions qui se posent au-
jourd'hui quand on examine la situation de
la pêche morutière.
Elles inquiètent justement tous ceux qui se
préoccupent de l'avenir de notre marine
marchande et l'on ne peut s'empêcher de
regretter qu'on n'y ait fait aucune allusion
dans les rapports et documents parlementai-
res établis à propos du budget de 1929.
Nos chalutiers désarment ; quant à nos
voiliers, chaque année, leur nombre dimi-
nue. Leur construction, pour la plupart,
remonte à dix et douze ans. Que se passera-
t-il dans une dizaine d'années, quand il fau-
dra les remplacer ?
Ce n'est pas dans dix ans qu'il faudra se
le demander. Il sera trop tard.
Nous venons de voir l'importance au point
de vue commercial et maritime de la Pêche
morutière.
Nous venons de voir aussi qu'elle traverse
actuellement une crise qui peut être mor-
telle.
Agissons donc sans tarder et faisons tous
les efforts nécessaires pour faire vivre et pros-
pérer une industrie si précieuse pour le
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Michel GEIS TDOERFER,
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