Titre : L'Océanie française : bulletin mensuel du Comité de l'Océanie française
Auteur : Comité de l'Océanie française. Auteur du texte
Éditeur : Comité de l'Océanie française (Paris)
Date d'édition : 1918-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32828039d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1918 01 janvier 1918
Description : 1918/01/01 (A14,N44)-1918/12/31 (A14,N46). 1918/01/01 (A14,N44)-1918/12/31 (A14,N46).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k32056228
Source : CIRAD, 2019-18526
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/03/2019
L’OCEANIE FRANÇAISE
9
d’abandonner aux Allemands la possession du
tungstène, indispensable à la trempe de notre
acier... Nous étions les maîtres de l’industrie
du textile; mais nos ennemis possédaient les
matières colorantes, sans lesquelles cette in
dustrie se voyait les ailes brisées »...
La guerre éclaira brusquement et crûment
l’état de dépendance où l’on était tombé. L’An
gleterre avait besoin de métaux australiens.
Mais « il fallut se résignera l’une de ces alter
natives: ou bien arrêter complètement l’indus
trie, ou bien recourir à l’intermédiaire des
agences allemandes qui, en vertu des contrats
établis, pouvaient, seules, acheter les métaux aux
compagnies australiennes, et les revendre à
l’Angleterre. »
L’esprit réaliste de M. Hughes ne se laisse
pas duper par les masques juridiques pour les
quels nous professons en France un respect
exagéré: « Lesagences allemandes dont je parle
dit-il, n’étaient pas établies en Allemagne, mais
à Londres. Légalement, elles étaient anglaises ;
en fait, elles étaient allemandes. Sous le man
teau de la naturalisation, nos ennêmis avaient
pénétré au cœur même *de la citadelle : après
20 mois de guerre, le gouvernement anglais
devait acheter le plomb par l’intermédiaire
d’une maison allemande: c’était une des ten
tacules de cette grande « pieuvre des métaux »
dont la tête se trouvait à Francfort. Je ne con
nais pas exactement la nature des relations
qui existaient entre la tète de la pieuvre de
Francfort et ses tentacules de Londres. Mais
peu importe, j’ignore tout des apparences mais
JE CONNAIS RIEN LA RÉALITÉ.»
Voilà un goût d’approfondirtrop rare, et voilà
qui montre qu’un pays en guerre peut avoir
profit à être gouverné pardes travaillistes plu
tôt que par des avocats.
Le phénomène décrit par M. Hughes n’était
pas spécial à l’Angleterre: « Aux Etats-Unis, la
pieuvre de Francfort se présentait sous la raison
sociale de « Compagnie américaine du métal)) ;
en Afrique, c’était la « Compagnie africaine du
métal » ; et en Australie, la v Compagnie aus
tralienne du métal )) Ce n’était pas plus diffi
cile que cela, puisque nousnous y laissions tous
prendre. « Que vaut une étiquette ? Rien ! et un
serment ? Pas davantage ! Le certificat de natu
ralisation n’était pour eux qu’un chiffon de pa
pier. » Ainsi, chez M. Hughes, l’indignation du
moraliste vient confirmer et renforcer la clair
voyance de l’homme d’Etat.
De tels faits ont amené M. Hughes à reviser
ses doctrines économiques. Il était jadis « libre-
échangiste entre les libre-échangistes ; la
Richesse des nations était sa Bible et Adam
Smith son prophète. » Et « la marée des cir
constances, qui n’attend pas les retardataires »
l’a conduit à Manchester, « la Mecque dulaisser-
faire », pour préconiser l’abandon de l’ancienne
politique anglaise. Car « il est inutile d’en dis
cuter la valeur intrinsèque, il suffit de savoir
si elle est adaptée aux besoins actuels ». A
Manchester même, la Chambre de Commerce a
reconnu que non.
Du point de vue de l’orthodoxie économique,
« il semblait que l’Angleterre fût la seule nation
en progrès. Mais elle a découvert, au début de
la guerre, que l’industrie de l’Empire reposait
sur une base presque complètement étrangère,
et en grande partie ennemie. —Voilà, déclare
M. Il ughes, l’accusation que je porte contre la
politique du « laisser-faire ».
Politique de dérive: « Nombre de braves gens
considèrent tout essai de direction du char de
l’Etat comme une entreprise impie». Mais jamais
homme de bon sens géra-t-il ses intérêts d’après
la politique du « laisser-faire » ?
Politique incompatible avec toute organisa
tion. « Prises séparément, les manufactures ont
une organisation plus ou moins complète, mais,
entre elles, aucune coordination. Encore moins
existe-t-il une autorité qui considère l'industrie
anglaise comme un tout. » Les Allemands ont
une autorité qui exerce un tel contrôle, mais,
c’est le Kaiser! quel est le pire mal, un tel
fédérateur, ou une situation comme celle de
l’industrie anglaise, comparable « à celle où se
trouverait notre armée si, au début de la guerre,
les hommes s’étaient enrôlés dans des compa
gnies indépendantes les unes des autres »?
M. Hughes donne en exemple l’industrie du
sucre. » Deux faits, dit-il, sont au-dessus de
toute discussion : le premier, c’est que cette
industrie s’est développée sous la stimulante
i n 11 uence d’une politique radicalement différente
de celle en vigueur aujourd’hui. Encore à ses
débuts, elle fut protégée et encouragée par ceux
qui, alors, gouvernaient l’Angleterre avec pré
voyance. »
Ainsi la pensée de M. Hughes, rendant hom
mage à l’ancienne politique conservatrice, a
suivi la même évolution que celle de Lloyd
George, — Lloyd George, auteur, avant la
guerre, du fameux budget antiaristocratique,
et qui, en décembre 191 G, ayant à former un-
ministère de Défense Nationale, le composa,
dans une si forte proportion, de Lords.
« Le deuxième fait, poursuit M. Hughes, c’est
que, sous l’influence de la politique qui a régi
ce pays durant ces derniers temps, l’industrie
sucrière a décliné d’une façon continue.
Nous possédons la coque, mais qu est devenue
Vamande ? »
Le résultat, ç’a été le découragement de la
culture de la canne dans tout l’Empire Bri
tannique, et l’encouragement de la produc
tion du sucre de betterave chez ses enne
mis. Et devant les stocks accumulés en
pleine guerre par les Empires centraux, des
droits de douane seraient, à eux seuls, impuis
sants à assurer une protection suffisante. Le
remède doit être plus radical : il faut garantir
aux producteurs et raffineurs de tout l’Empire
un prix minimum pour une quantité de sucre
minima. L’Australie a ouvert la voie : que la
Grande-Bretagne s’y engage! mais qu’elle se
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d’abandonner aux Allemands la possession du
tungstène, indispensable à la trempe de notre
acier... Nous étions les maîtres de l’industrie
du textile; mais nos ennemis possédaient les
matières colorantes, sans lesquelles cette in
dustrie se voyait les ailes brisées »...
La guerre éclaira brusquement et crûment
l’état de dépendance où l’on était tombé. L’An
gleterre avait besoin de métaux australiens.
Mais « il fallut se résignera l’une de ces alter
natives: ou bien arrêter complètement l’indus
trie, ou bien recourir à l’intermédiaire des
agences allemandes qui, en vertu des contrats
établis, pouvaient, seules, acheter les métaux aux
compagnies australiennes, et les revendre à
l’Angleterre. »
L’esprit réaliste de M. Hughes ne se laisse
pas duper par les masques juridiques pour les
quels nous professons en France un respect
exagéré: « Lesagences allemandes dont je parle
dit-il, n’étaient pas établies en Allemagne, mais
à Londres. Légalement, elles étaient anglaises ;
en fait, elles étaient allemandes. Sous le man
teau de la naturalisation, nos ennêmis avaient
pénétré au cœur même *de la citadelle : après
20 mois de guerre, le gouvernement anglais
devait acheter le plomb par l’intermédiaire
d’une maison allemande: c’était une des ten
tacules de cette grande « pieuvre des métaux »
dont la tête se trouvait à Francfort. Je ne con
nais pas exactement la nature des relations
qui existaient entre la tète de la pieuvre de
Francfort et ses tentacules de Londres. Mais
peu importe, j’ignore tout des apparences mais
JE CONNAIS RIEN LA RÉALITÉ.»
Voilà un goût d’approfondirtrop rare, et voilà
qui montre qu’un pays en guerre peut avoir
profit à être gouverné pardes travaillistes plu
tôt que par des avocats.
Le phénomène décrit par M. Hughes n’était
pas spécial à l’Angleterre: « Aux Etats-Unis, la
pieuvre de Francfort se présentait sous la raison
sociale de « Compagnie américaine du métal)) ;
en Afrique, c’était la « Compagnie africaine du
métal » ; et en Australie, la v Compagnie aus
tralienne du métal )) Ce n’était pas plus diffi
cile que cela, puisque nousnous y laissions tous
prendre. « Que vaut une étiquette ? Rien ! et un
serment ? Pas davantage ! Le certificat de natu
ralisation n’était pour eux qu’un chiffon de pa
pier. » Ainsi, chez M. Hughes, l’indignation du
moraliste vient confirmer et renforcer la clair
voyance de l’homme d’Etat.
De tels faits ont amené M. Hughes à reviser
ses doctrines économiques. Il était jadis « libre-
échangiste entre les libre-échangistes ; la
Richesse des nations était sa Bible et Adam
Smith son prophète. » Et « la marée des cir
constances, qui n’attend pas les retardataires »
l’a conduit à Manchester, « la Mecque dulaisser-
faire », pour préconiser l’abandon de l’ancienne
politique anglaise. Car « il est inutile d’en dis
cuter la valeur intrinsèque, il suffit de savoir
si elle est adaptée aux besoins actuels ». A
Manchester même, la Chambre de Commerce a
reconnu que non.
Du point de vue de l’orthodoxie économique,
« il semblait que l’Angleterre fût la seule nation
en progrès. Mais elle a découvert, au début de
la guerre, que l’industrie de l’Empire reposait
sur une base presque complètement étrangère,
et en grande partie ennemie. —Voilà, déclare
M. Il ughes, l’accusation que je porte contre la
politique du « laisser-faire ».
Politique de dérive: « Nombre de braves gens
considèrent tout essai de direction du char de
l’Etat comme une entreprise impie». Mais jamais
homme de bon sens géra-t-il ses intérêts d’après
la politique du « laisser-faire » ?
Politique incompatible avec toute organisa
tion. « Prises séparément, les manufactures ont
une organisation plus ou moins complète, mais,
entre elles, aucune coordination. Encore moins
existe-t-il une autorité qui considère l'industrie
anglaise comme un tout. » Les Allemands ont
une autorité qui exerce un tel contrôle, mais,
c’est le Kaiser! quel est le pire mal, un tel
fédérateur, ou une situation comme celle de
l’industrie anglaise, comparable « à celle où se
trouverait notre armée si, au début de la guerre,
les hommes s’étaient enrôlés dans des compa
gnies indépendantes les unes des autres »?
M. Hughes donne en exemple l’industrie du
sucre. » Deux faits, dit-il, sont au-dessus de
toute discussion : le premier, c’est que cette
industrie s’est développée sous la stimulante
i n 11 uence d’une politique radicalement différente
de celle en vigueur aujourd’hui. Encore à ses
débuts, elle fut protégée et encouragée par ceux
qui, alors, gouvernaient l’Angleterre avec pré
voyance. »
Ainsi la pensée de M. Hughes, rendant hom
mage à l’ancienne politique conservatrice, a
suivi la même évolution que celle de Lloyd
George, — Lloyd George, auteur, avant la
guerre, du fameux budget antiaristocratique,
et qui, en décembre 191 G, ayant à former un-
ministère de Défense Nationale, le composa,
dans une si forte proportion, de Lords.
« Le deuxième fait, poursuit M. Hughes, c’est
que, sous l’influence de la politique qui a régi
ce pays durant ces derniers temps, l’industrie
sucrière a décliné d’une façon continue.
Nous possédons la coque, mais qu est devenue
Vamande ? »
Le résultat, ç’a été le découragement de la
culture de la canne dans tout l’Empire Bri
tannique, et l’encouragement de la produc
tion du sucre de betterave chez ses enne
mis. Et devant les stocks accumulés en
pleine guerre par les Empires centraux, des
droits de douane seraient, à eux seuls, impuis
sants à assurer une protection suffisante. Le
remède doit être plus radical : il faut garantir
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un prix minimum pour une quantité de sucre
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