Titre : Revue française d'Outre-mer
Éditeur : A. Challamel (Paris)
Date d'édition : 1939-02-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb344252672
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 février 1939 01 février 1939
Description : 1939/02/01 (A43,N763)-1939/02/28. 1939/02/01 (A43,N763)-1939/02/28.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3201658n
Source : CIRAD, 2018-237423
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/02/2019
FÉVRIER 1939 — LA REVUE FRANÇAISE D’»UTRE-MER
39
Saxons el trop de Français sont restés excessive
ment sensibles aux gentillesses allemandes. Le
maître du quatrième Reich est Adolf Hitler; mais
son fondateur véritable fut Gustave Stresemann.
Leurs buts n’ont pas sensiblement varié; les « ma
nières » des deux hommes sont séparées tout au
plus par une question de méthode, sinon même par
une simple question d’opportunité...
En attendant le développement de cette situa
tion, il faut constater que le « décalage » entre les
revendications coloniales de l’Allemagne et celles
de l’Italie apparaît nettement : certes, toutes deux
voudraient de nouvelles bases stratégiques ; mais il
vaut mieux tenir les bases pour faire la guerre que
faire la guerre pour les acquérir. Certes encore,
toutes deux veulent des colonies. Mais la situation
de septembre s’est infléchie géographiquement : au
jourd’hui, c’est l’Italie qui réclame des territoires
et des hommes qu’elle prétend italiens ; l’Alle
magne réclame des richesses et des débouchés, qui
sont des objets plus facilement négociables. Au
jourd’hui, comme en septembre, une des extré
mités de l’axe tourne plus vite que l’autre ; seule
ment ce n’est plus la même et, à tort ou à raison,
l’on est porté à considérer le fait comme moins
dangereux.
En septembre encore, le Reich avait réussi à en
traîner la Pologne dans son sillage, car les Polo
nais revendiquaient la Silésie de Teschen. Rome ne
demanderait pas mieux que d’intéresser Varsovie
à la Méditerranée. Mais s’il est des Polonais qui
brûlent de participer à la redistribution mondiale,
il en est d'autres que le colonialisme européen de
l’Allemagne préoccupe visiblement. Le Reich s’est
opposé à la jonction de la Pologne et, de la Hon
grie. Il paraît d’autre part paradoxal, aux yeux des
Polonais réalistes, de poursuivre une expansion
outre-mer au moment même où les étudiants nazis
de Dantzig manifestent des «aspirations naturelles»
qui aboutiraient, en cas de réussite, à couper à ja
mais la Pologne de son étroit corridor sur l’Océan.
Or, entre temps, des crises ministérielles ont
éclaté en Yougoslavie et en Hongrie, un croiseur
britannique a « soufflé » Minorque aux escadrilles
italiennes et la France a délégué à Rurgos le maré
chal Pétain... Bref, la seule revendication qui ait pro
gressé au cours de ces dernières semaines, est celle
des Japonais qui occupent Hai-Nan.
II
Hai-Nan
Il suffit de jeter les yeux sur une carte du Pa
cifique pour mesurer le danger du coup que cette
occupation porte à l’Occident : Hong-Kong et Ma
cao tournés, Kouang Tchéou Wan et le Tonkin
embouteillés, les Philippines et les Indes Néer
landaises menacées, les détroits serrés de plus près,
le Siam étayé... A vrai dire tous ces dangers sont
encore à terme, car s’il est facile d’utiliser Hai-Nan
comme base aérienne, il faudra un certain temps
pour en faire une base navale efficace. D’autre part,
il se peut que cette occupation soit une initiative
purement japonaise ; mais si elle a été effectuée à
l’instigation du « triangle », le symptôme est d’une
extrême gravité.
Arrêtons-nous un instant aux causes de nos mal
heurs afin qu’ils nous servent au moins de leçon :
il y eut jadis une conférence navale, tenue à Was
hington, où Américains et Britanniques surent si
bien manœuvrer les plénipotentiaires français, que
notre flotte de haute mer fut réduite, nonobstant la
longueur de nos côtes et de nos communications
maritimes, à la parité avec la flotte italienne, à l’in
fériorité par rapport à la flotte japonaise. Il y eut
chez nous des stratèges en chambre qui déclarèrent
que l’avenir était à l’aviation et au sous-marin, que
les cuirassés ne pouvaient plus que « pourrir au
fond des ports » et qui décidèrent de démolir six
navires de ligne alors en construction, toute la sé
rie des Normandie (1) qui nous fait aujourd’hui
cruellement défaut (2). Lorsqu’il nous fallut oppo
ser quelque chose aux « cuirassés de poche » alle
mands, il se trouva, toujours chez nous, des poli
ticiens qui réduisirent à 26.000 tonnes la puissance
de nos nouveaux navires « afin de ne pas inquié
ter... l’Angleterre ». Il y a quelques mois encore un
ministre français prenait l’engagement de ne pas
dépasser le tonnage de 35.000 tonnes « aussi long
temps qu’une puissance continentale européenne
n’en prendrait l’initiative ». Il pensait à l’Italie et à
l’Allemagne, mais il avait oublié le Japon !
(1) Il n'en reste que le Béarn transformé en porte-avions.
(2) Ces cuirassés seraient en effet plus modernes que les quatre
navires italiens qui datent de 1913, et que les trois plus anciens
navires de ligne encore en service actif dans nos escadres.
39
Saxons el trop de Français sont restés excessive
ment sensibles aux gentillesses allemandes. Le
maître du quatrième Reich est Adolf Hitler; mais
son fondateur véritable fut Gustave Stresemann.
Leurs buts n’ont pas sensiblement varié; les « ma
nières » des deux hommes sont séparées tout au
plus par une question de méthode, sinon même par
une simple question d’opportunité...
En attendant le développement de cette situa
tion, il faut constater que le « décalage » entre les
revendications coloniales de l’Allemagne et celles
de l’Italie apparaît nettement : certes, toutes deux
voudraient de nouvelles bases stratégiques ; mais il
vaut mieux tenir les bases pour faire la guerre que
faire la guerre pour les acquérir. Certes encore,
toutes deux veulent des colonies. Mais la situation
de septembre s’est infléchie géographiquement : au
jourd’hui, c’est l’Italie qui réclame des territoires
et des hommes qu’elle prétend italiens ; l’Alle
magne réclame des richesses et des débouchés, qui
sont des objets plus facilement négociables. Au
jourd’hui, comme en septembre, une des extré
mités de l’axe tourne plus vite que l’autre ; seule
ment ce n’est plus la même et, à tort ou à raison,
l’on est porté à considérer le fait comme moins
dangereux.
En septembre encore, le Reich avait réussi à en
traîner la Pologne dans son sillage, car les Polo
nais revendiquaient la Silésie de Teschen. Rome ne
demanderait pas mieux que d’intéresser Varsovie
à la Méditerranée. Mais s’il est des Polonais qui
brûlent de participer à la redistribution mondiale,
il en est d'autres que le colonialisme européen de
l’Allemagne préoccupe visiblement. Le Reich s’est
opposé à la jonction de la Pologne et, de la Hon
grie. Il paraît d’autre part paradoxal, aux yeux des
Polonais réalistes, de poursuivre une expansion
outre-mer au moment même où les étudiants nazis
de Dantzig manifestent des «aspirations naturelles»
qui aboutiraient, en cas de réussite, à couper à ja
mais la Pologne de son étroit corridor sur l’Océan.
Or, entre temps, des crises ministérielles ont
éclaté en Yougoslavie et en Hongrie, un croiseur
britannique a « soufflé » Minorque aux escadrilles
italiennes et la France a délégué à Rurgos le maré
chal Pétain... Bref, la seule revendication qui ait pro
gressé au cours de ces dernières semaines, est celle
des Japonais qui occupent Hai-Nan.
II
Hai-Nan
Il suffit de jeter les yeux sur une carte du Pa
cifique pour mesurer le danger du coup que cette
occupation porte à l’Occident : Hong-Kong et Ma
cao tournés, Kouang Tchéou Wan et le Tonkin
embouteillés, les Philippines et les Indes Néer
landaises menacées, les détroits serrés de plus près,
le Siam étayé... A vrai dire tous ces dangers sont
encore à terme, car s’il est facile d’utiliser Hai-Nan
comme base aérienne, il faudra un certain temps
pour en faire une base navale efficace. D’autre part,
il se peut que cette occupation soit une initiative
purement japonaise ; mais si elle a été effectuée à
l’instigation du « triangle », le symptôme est d’une
extrême gravité.
Arrêtons-nous un instant aux causes de nos mal
heurs afin qu’ils nous servent au moins de leçon :
il y eut jadis une conférence navale, tenue à Was
hington, où Américains et Britanniques surent si
bien manœuvrer les plénipotentiaires français, que
notre flotte de haute mer fut réduite, nonobstant la
longueur de nos côtes et de nos communications
maritimes, à la parité avec la flotte italienne, à l’in
fériorité par rapport à la flotte japonaise. Il y eut
chez nous des stratèges en chambre qui déclarèrent
que l’avenir était à l’aviation et au sous-marin, que
les cuirassés ne pouvaient plus que « pourrir au
fond des ports » et qui décidèrent de démolir six
navires de ligne alors en construction, toute la sé
rie des Normandie (1) qui nous fait aujourd’hui
cruellement défaut (2). Lorsqu’il nous fallut oppo
ser quelque chose aux « cuirassés de poche » alle
mands, il se trouva, toujours chez nous, des poli
ticiens qui réduisirent à 26.000 tonnes la puissance
de nos nouveaux navires « afin de ne pas inquié
ter... l’Angleterre ». Il y a quelques mois encore un
ministre français prenait l’engagement de ne pas
dépasser le tonnage de 35.000 tonnes « aussi long
temps qu’une puissance continentale européenne
n’en prendrait l’initiative ». Il pensait à l’Italie et à
l’Allemagne, mais il avait oublié le Japon !
(1) Il n'en reste que le Béarn transformé en porte-avions.
(2) Ces cuirassés seraient en effet plus modernes que les quatre
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