Titre : L'Afrique française : bulletin mensuel du Comité de l'Afrique française et du Comité du Maroc
Auteur : Comité de l'Afrique française. Auteur du texte
Auteur : Comité du Maroc (Paris). Auteur du texte
Éditeur : Comité de l'Afrique française (Paris)
Date d'édition : 1919-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32683501s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1919 01 janvier 1919
Description : 1919/01/01 (N1)-1919/12/31 (N12). 1919/01/01 (N1)-1919/12/31 (N12).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k98041559
Source : CIRAD, 2017-132476
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
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- SOMMAIRE
- Nos 1 et 2
- Nos 3 et 4
- Nos 5 et 6
- .......... Page(s) .......... 107
- .......... Page(s) .......... 111
- Nos 7 et 8
- Nos 9 et 10
RENSEIGNEMENTS COLONIAUX
LE "KITTEMO"
Parmi les coutumes ancestrales aux rites et
statuts immuables apportées par le clan de la
grande tribu des Bakongo venue du Congo belge
s'établir sur le territoire de l'A. E. F. compris
entre le fleuve Congo au Sud, la Loufouloukari
(Foulakary) au Nord et à l'Est, la frontière belge
à l'Ouest, il n'en est peut-être pas de plus inté-
ressante que celle qui porte le nom de « Kittemo ».
Les voyageurs anciens et modernes ont toujours
attiré notre attention sur les facultés innées des
Bakongo pour le négoce. Déjà au xvie siècle, l'an-
cien royaume du Congo était sillonné de routes
commerciales dont la principale, qui le traversait
complètement, partait de la côte à Loanda, pas-
sait parles provinces de Mbamba, Mbata, Nsoundi,
Mpangou et aboutissait sur le Kouango à Mouene-
Koundi, soit, à vol d'oiseau, une distance approxi-
mative de 600 kilomètres.
De cette activité commerciale, le kittemo est
précisément l'une des manifestations les plus
curieuses.
Qu'est-ce donc que le kittemo? C'est à propre-
ment parler une association commerciale, une
« communauté » d'intérêts comme le mot l'in-
dique, qui groupe un certain nombre de membres
soumis à des obligations nettement définies par
des statuts méticuleusement fixés.
La création d'un kittemo a quelque analogie
avec celle d'un marché. C'est d'ailleurs sur les
marchés indigènes que s'amorcent les kittemo les
plus importants.
Tel chef ou tel indigène connu par ses richesses,
s'abouche avec des congénères venus parfois de
plusieurs jours de marche pour prendre part aux
transactions commerciales et qu'il sait être dans
l'aisance. Il leur propose alors de fonder un kit-
temo. En cas d'acceptation formelle, les invités,
dont le nombre peut aller parfois jusqu'à trente,
se trouvent au rendez-vous fixé. On discute alors
le montant de la cotisation à verser par chacun
des membres futurs. Celle-ci, toujours en espèces,
peut atteindre 50 francs par individu, mais les
kittemo de cette importance sont plutôt rares.
La plupart d'entre eux ne groupent guère que des
cotisations individuelles de 10 à 25 francs.
L'accord une fois fait sur cette question, on fixe
la date des versements. C'est généralement toutes
les quinzaines et le jour d'un marché hebdoma-
daire très fréquenté, soit dans la terre de celui
qui a proposé la fondation du kittemo, soit dans
la région, les intéressés sachant devoir s'y ren-
contrer.
Quel sera le montant de la cotisation et la date
du versement fixés d'un commun accord, le pré-
sident du kittemo? C'est tout naturellement le
chef ou l'indigène qui a procédé à son organisa-
tion et à qui tous les membres verseront au jour
arrêté le montant de leur cotisation individuelle,
soit, par exemple, 20 francs. L'intéressé, en
admettant que l'association groupe 20 membres,
va donc se trouver en possession d'une somme
de 400 francs. Quinze jours après, un autre des
coassociés désigné à la majorité comme prési-
dent touchera à son tour le montant des cotisa-
tions et ainsi de suite pour chacun des membres
du kittemo. A ce moment le kittemo est dissous
et l'organisateur est alors récompensé par les
adhérents par le versement d une petite somme
d'argent.
Le kittemo peut alors se reconstituer dans les
mêmes conditions ou dans des proportions plus
ou moins étendues quant au nombre des mem-
bres et au montant de la cotisation.
Mais des difficultés peuvent surgir et le kittemo
peut être rompu pour plusieurs raisons. Parfois
un sociétaire refuse d'acquitter sa quote-part :
chacun reprend alors sa cotisation et l'on s'en
tient là. La mort d'un des membres du kittemo
peut également provoquer sa dissolution, à moins
qu'un parent ou un ami du défunt ne se présente
pour le remplacer. Plus rarement, l'encaisseur
disparaît avec les versements effectués par les
associés et c'est alors une palabre interminable,
chacun des adhérents s'acharnant à la poursuite
du délinquant ou de sa famille pour rentrer dans
ses fonds.
C'est afin d'éviter de pareilles surprises que
certains kittemo se sont fondés sous la protection
de l'Administration, en la personne du chef de
circonscription ou des chefs de subdivision. En
cas d'infraction, le coupable est considéré comme
ayant commis un abus de confiance, un vol et le
délit relève alors de la compétence du tribunal
indigène de la circonscription.
Il peut arriver aussi que l'un des membres du
kittemo soit momentanément dans l'impossibilité
absolue de verser sa cotisation. Il a généralement
un répondant choisi parmi les membres de sa
famille ou bien c'est le président ou quelque autre
associé qui verse pour lui. Inutile de dire que
l'un ou l'autre ne s'exécute qu'en bénéficiant lar-
gement de la situation.
Le fonctionnement du kittemo est donc simple
et offre de nombreux avantages. Si nous nous
reportons à l'exemple précité : un kittemo de
20 adhérents avec une cotisation individuelle de
20 francs, chacun d'eux va posséder à tour de rôle
une somme de 400 francs, dans laquelle est na-
turellement comprise sa propre cotisation. Que
va-t il en faire? C'est ici que son initiative se
déploie avec plus ou moins d'à-propos. Il paiera
ses dettes. S'il n'est pas marié, il s'empressera de
verser à la famille de la femme qu'il désire
épouser la dot exigée. S'il l'est déjà, il lui sera
loisible de prendre une seconde femme. Si son
foyer lui paraît suffisamment constitué, il se
livrera au négoce : il fréquentera les marchés de
la région dont le plus grand nombre se tiennent
tous les quatre jours et y achètera les produits
riches, caoutchouc et amandes de palme, qu'il
est certain de revendre à un prix plus élevé dans
les factoreries du chef-lieu de la colonie où il se
procurera des étoffes, des articles de bimbelo-
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LE "KITTEMO"
Parmi les coutumes ancestrales aux rites et
statuts immuables apportées par le clan de la
grande tribu des Bakongo venue du Congo belge
s'établir sur le territoire de l'A. E. F. compris
entre le fleuve Congo au Sud, la Loufouloukari
(Foulakary) au Nord et à l'Est, la frontière belge
à l'Ouest, il n'en est peut-être pas de plus inté-
ressante que celle qui porte le nom de « Kittemo ».
Les voyageurs anciens et modernes ont toujours
attiré notre attention sur les facultés innées des
Bakongo pour le négoce. Déjà au xvie siècle, l'an-
cien royaume du Congo était sillonné de routes
commerciales dont la principale, qui le traversait
complètement, partait de la côte à Loanda, pas-
sait parles provinces de Mbamba, Mbata, Nsoundi,
Mpangou et aboutissait sur le Kouango à Mouene-
Koundi, soit, à vol d'oiseau, une distance approxi-
mative de 600 kilomètres.
De cette activité commerciale, le kittemo est
précisément l'une des manifestations les plus
curieuses.
Qu'est-ce donc que le kittemo? C'est à propre-
ment parler une association commerciale, une
« communauté » d'intérêts comme le mot l'in-
dique, qui groupe un certain nombre de membres
soumis à des obligations nettement définies par
des statuts méticuleusement fixés.
La création d'un kittemo a quelque analogie
avec celle d'un marché. C'est d'ailleurs sur les
marchés indigènes que s'amorcent les kittemo les
plus importants.
Tel chef ou tel indigène connu par ses richesses,
s'abouche avec des congénères venus parfois de
plusieurs jours de marche pour prendre part aux
transactions commerciales et qu'il sait être dans
l'aisance. Il leur propose alors de fonder un kit-
temo. En cas d'acceptation formelle, les invités,
dont le nombre peut aller parfois jusqu'à trente,
se trouvent au rendez-vous fixé. On discute alors
le montant de la cotisation à verser par chacun
des membres futurs. Celle-ci, toujours en espèces,
peut atteindre 50 francs par individu, mais les
kittemo de cette importance sont plutôt rares.
La plupart d'entre eux ne groupent guère que des
cotisations individuelles de 10 à 25 francs.
L'accord une fois fait sur cette question, on fixe
la date des versements. C'est généralement toutes
les quinzaines et le jour d'un marché hebdoma-
daire très fréquenté, soit dans la terre de celui
qui a proposé la fondation du kittemo, soit dans
la région, les intéressés sachant devoir s'y ren-
contrer.
Quel sera le montant de la cotisation et la date
du versement fixés d'un commun accord, le pré-
sident du kittemo? C'est tout naturellement le
chef ou l'indigène qui a procédé à son organisa-
tion et à qui tous les membres verseront au jour
arrêté le montant de leur cotisation individuelle,
soit, par exemple, 20 francs. L'intéressé, en
admettant que l'association groupe 20 membres,
va donc se trouver en possession d'une somme
de 400 francs. Quinze jours après, un autre des
coassociés désigné à la majorité comme prési-
dent touchera à son tour le montant des cotisa-
tions et ainsi de suite pour chacun des membres
du kittemo. A ce moment le kittemo est dissous
et l'organisateur est alors récompensé par les
adhérents par le versement d une petite somme
d'argent.
Le kittemo peut alors se reconstituer dans les
mêmes conditions ou dans des proportions plus
ou moins étendues quant au nombre des mem-
bres et au montant de la cotisation.
Mais des difficultés peuvent surgir et le kittemo
peut être rompu pour plusieurs raisons. Parfois
un sociétaire refuse d'acquitter sa quote-part :
chacun reprend alors sa cotisation et l'on s'en
tient là. La mort d'un des membres du kittemo
peut également provoquer sa dissolution, à moins
qu'un parent ou un ami du défunt ne se présente
pour le remplacer. Plus rarement, l'encaisseur
disparaît avec les versements effectués par les
associés et c'est alors une palabre interminable,
chacun des adhérents s'acharnant à la poursuite
du délinquant ou de sa famille pour rentrer dans
ses fonds.
C'est afin d'éviter de pareilles surprises que
certains kittemo se sont fondés sous la protection
de l'Administration, en la personne du chef de
circonscription ou des chefs de subdivision. En
cas d'infraction, le coupable est considéré comme
ayant commis un abus de confiance, un vol et le
délit relève alors de la compétence du tribunal
indigène de la circonscription.
Il peut arriver aussi que l'un des membres du
kittemo soit momentanément dans l'impossibilité
absolue de verser sa cotisation. Il a généralement
un répondant choisi parmi les membres de sa
famille ou bien c'est le président ou quelque autre
associé qui verse pour lui. Inutile de dire que
l'un ou l'autre ne s'exécute qu'en bénéficiant lar-
gement de la situation.
Le fonctionnement du kittemo est donc simple
et offre de nombreux avantages. Si nous nous
reportons à l'exemple précité : un kittemo de
20 adhérents avec une cotisation individuelle de
20 francs, chacun d'eux va posséder à tour de rôle
une somme de 400 francs, dans laquelle est na-
turellement comprise sa propre cotisation. Que
va-t il en faire? C'est ici que son initiative se
déploie avec plus ou moins d'à-propos. Il paiera
ses dettes. S'il n'est pas marié, il s'empressera de
verser à la famille de la femme qu'il désire
épouser la dot exigée. S'il l'est déjà, il lui sera
loisible de prendre une seconde femme. Si son
foyer lui paraît suffisamment constitué, il se
livrera au négoce : il fréquentera les marchés de
la région dont le plus grand nombre se tiennent
tous les quatre jours et y achètera les produits
riches, caoutchouc et amandes de palme, qu'il
est certain de revendre à un prix plus élevé dans
les factoreries du chef-lieu de la colonie où il se
procurera des étoffes, des articles de bimbelo-
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