Titre : L'Afrique française : bulletin mensuel du Comité de l'Afrique française et du Comité du Maroc
Auteur : Comité de l'Afrique française. Auteur du texte
Auteur : Comité du Maroc (Paris). Auteur du texte
Éditeur : Comité de l'Afrique française (Paris)
Date d'édition : 1918-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32683501s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1918 01 janvier 1918
Description : 1918/01/01 (N1,A28)-1918/12/31 (N12,A28). 1918/01/01 (N1,A28)-1918/12/31 (N12,A28).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9789150r
Source : CIRAD, 2017-132476
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/08/2017
DE L'AFRIQUE FRANÇAISE 251
La seconde partie du rapport est consacrée à
une analyse de la situation des indigènes au point
de vue du droit criminel et a été rédigée par
M. A. J. Waters, procureur de la Couronne pour
le Protectorat, qui réside à Windhuk depuis le
mois d'octobre 1915.
Les témoignages sur lesquels le rapport est
fondé sont tirés de l'examen des pratiques judi-
ciaires et administratives des Allemands, des do-
cuments officiels ou autres trouvés dans les ar-
chivesgouvernementales de Windhuk, des décla-
, rations faites sous serment par des Européens
ayant l'habitude du payselpar deschefs indigènes
et enfin des écrits de Leutwein, gouverneur alle-
mand de 1894 à 1905, de Paul Hohrbach, du pro-
fesseur Karl Dove et d'autres autorités allemandes
bien connues. On n'y trouve aucun détail d'im-
portance qui, attesté par les indigènes, ne soit
confirmé par des sources allemandes irrécu-
sables.
La conclusion immédiate qui se dégage de la
lecture de ces documents lamentables est que les
Allemands sont absolument,incapables de gou-
verner les indigènes et le rapport montre d'une
façon irréfutable le sort qui atteindrait les mal-
heureuses races de cette partie de l'Afrique si
elles étaient jamais remises à la merci de leurs
inciens maîties. « L'opinion des indigènes, écrit
l'administrateur, est tout entière hostile à toute
idée de remiseà la merci de l'Allemagne. Et toute
allusion à la possibilité d'un tel acte de la part de
la Grande-Bretagne cause la plus grande conster-
nation. » On ne peut en eflet envisager un tel
projet même si l'on se borne à considérer l'intérêt
des innombrables témoins indigènes dont les dé-
clarations sont reproduites dans le rapport. Tous
ceux dont les noms sont indiques et leurs amis
deviendraient certainement, si ce n'est déjà fait,
« des hommes marqués » et leur « éloignement »
ne serait qu'une question de temps. Certainement
ce serait l'origine d'une campagne de « décou-
verte » (smelting-olll) par les agents de police
et parles sorciers avec tout le cortège habituel de
maux et d'horreurs. Quoique la réunion de cette
grande masse de documents ait pris relativement
peu de temps, la conclusion essentielle et terri-
fiante qui s'en dégage est celle de la complète
r inaptitude de l'Allemagne aux tâches coloniales,
de son indifférence parfaite pour les propres ga-
rantiesqu'elle avait elle-même promises aux po-
pulations indigènes et des cruautés qu'elle infli-
geait à ces populations quand le fardeau devenait
vraiment trop lourd et qu'elles essayaient de re-
f vendiquer leurs droits.
« Ce rapport, écrit l'administrateur, ne peut
laisser aucun doute sur les terribles « méthodes »
, suivies à la fois par l'administration coloniale al-
| lemande, agissant soit par ordre, soit au su du
V gouvernement de Berlin, et par les Allemands
installés comme colons ou résidant dans le pays.
' Il ne laisse non plus aucun doute sur l'état déplo-
rable dans lequel sont tombés les indigènes sous
les brutalités et les brigandages auxquels ils ont
l été systématiquement soumis. »
Les dossiers gouvernement aux de Windhuk
montrent bien que ces atrocités ont été systéma-
tiques et prouvent que depuis 1910 les autorités
allemandes étaient constamment dans un état
d'appréhension nerveuse. Elles s'attendaient sans
cesse à une nouvelle révolte indigène. N'ayant pas
tiré la leçon des insurrections précédentes, auto-
rités et colons continuaient étourdiment leurs
« terribles méthodes ». En voici une éloquente
preuve, une circulaire confidentielle adressée a,i
mois de mai 1912 par le gouverneur-Seitz à ses
magistrats :
LE GOUVERNEUR IMPÉRIAL
DU SUD-OUEST AFRICAIN
ALLEMAND.
Windhuk, 31 mai 1912.
A tous les magistrats.
Secret et personnel.
Pendant ces dernières semaines j'ai reçu de différentes
régions la nouvelle que dans certaines redons du pays il
se répand depuis quelque temps parmi les indigènes des
sentiments de désespoir.
La raison qui m'en est partout donnée est que les bruta-
lités des Européens contre les indigènes se développent
d'une façon alarmante. Il est à ce propos très regrettable
que même des fonctionnaires de police se soient rendus
quelquefois coupables de ces excès, et que ces brutalités
n'aient pas trouvé devant les tribunaux la punition qu'elles
méritaient selon les idées de justice des indigènes.
La conséquence en est que les indigènes semblent déses-
pérer de l'impartialité de notre justice et qu'ils sont pous-
sés à une haine aveugle de tout ce (lui est Blanc. Et fina-
lement ils se résoudraient à se secourir eux-mêmes,
c'est-à-dire que nous aurionsune nouvelle révolte indigène.
Il est bien certain que ces sentiments de haine des indi-
gènes, s'il n'est pas pourvu énergiquementàl'amélioration
de leur sort, produiront bientôt une nouvelle révolte indi-
gène désespérée et entraîneront par suite la ruine écono-
mique du pays.
Il est donc de l'intérêt de toute la population européenne
que les personnes qui se déchaînent en folles brutalités
contre les indigènes et qui considèrent leur peau blanche
comme une charte d'immunité contre le châtiment des
crimes les plus brutaux soient mises par tous les moyens
dans l'impossibilité de nuire.
Car un peuple qui a la prétention d'ètre regardé comme
une race dominante doit tout d'abord se garder lui-même
de toute souillure. *
Si les crimes commis par les Européens contre bs indi-
gènes ne sont pas punis ou lesont insuffisamment, il serait
impossible d'agir dans l'avenir. dans les cas de crimes
commis par les indigènes contre les Européens, avec la
sévérité qui s'impose dans l'intérêt général.
Je n'ai pas d'action sur la justice en ce qui concerne les
Européens, mais je dois dans la mesure du possible prendre
les mesures administratives nécessaires pour remédier à
la situation critique dont 1 existence ne fait pas de doute.
Par-dessus tout j'ai l'intention d'ordonner en pareil cas
que les Européens qui persisteront à traiter brutalement
leurs employés indigènes ne pourront recevoir plus long-
temps de main-d'œuvre indigène. D'ailleurs on n'obtiendra
un réel changement que si la population blanche elle même,
qui, je le sais, condamne de tout son pouvoir les brutalités
des mauvais éléments. ne laisse aucun doute sur son atti-
tude dans cette question à ces individus qui sont un danger
pour le bien public et si cette population blanche contribue
à empêcher ces crimes ou à les déférer il la justice, dans
tous les cas où ils se seront produits.
Et comme je suis convaincu que les conseils de districts
peuvent exercer à ce sujet une action sur leursconcitoyens,
je vous prie d'informer les conseils de districts dans le
plus grand secret lors de leur prochaine réunion du con-
tenu de la présente communication.
J'espère quavecl'aspistance de la population européenne
il sera possible de créer une situation qui rende aux indi-
La seconde partie du rapport est consacrée à
une analyse de la situation des indigènes au point
de vue du droit criminel et a été rédigée par
M. A. J. Waters, procureur de la Couronne pour
le Protectorat, qui réside à Windhuk depuis le
mois d'octobre 1915.
Les témoignages sur lesquels le rapport est
fondé sont tirés de l'examen des pratiques judi-
ciaires et administratives des Allemands, des do-
cuments officiels ou autres trouvés dans les ar-
chivesgouvernementales de Windhuk, des décla-
, rations faites sous serment par des Européens
ayant l'habitude du payselpar deschefs indigènes
et enfin des écrits de Leutwein, gouverneur alle-
mand de 1894 à 1905, de Paul Hohrbach, du pro-
fesseur Karl Dove et d'autres autorités allemandes
bien connues. On n'y trouve aucun détail d'im-
portance qui, attesté par les indigènes, ne soit
confirmé par des sources allemandes irrécu-
sables.
La conclusion immédiate qui se dégage de la
lecture de ces documents lamentables est que les
Allemands sont absolument,incapables de gou-
verner les indigènes et le rapport montre d'une
façon irréfutable le sort qui atteindrait les mal-
heureuses races de cette partie de l'Afrique si
elles étaient jamais remises à la merci de leurs
inciens maîties. « L'opinion des indigènes, écrit
l'administrateur, est tout entière hostile à toute
idée de remiseà la merci de l'Allemagne. Et toute
allusion à la possibilité d'un tel acte de la part de
la Grande-Bretagne cause la plus grande conster-
nation. » On ne peut en eflet envisager un tel
projet même si l'on se borne à considérer l'intérêt
des innombrables témoins indigènes dont les dé-
clarations sont reproduites dans le rapport. Tous
ceux dont les noms sont indiques et leurs amis
deviendraient certainement, si ce n'est déjà fait,
« des hommes marqués » et leur « éloignement »
ne serait qu'une question de temps. Certainement
ce serait l'origine d'une campagne de « décou-
verte » (smelting-olll) par les agents de police
et parles sorciers avec tout le cortège habituel de
maux et d'horreurs. Quoique la réunion de cette
grande masse de documents ait pris relativement
peu de temps, la conclusion essentielle et terri-
fiante qui s'en dégage est celle de la complète
r inaptitude de l'Allemagne aux tâches coloniales,
de son indifférence parfaite pour les propres ga-
rantiesqu'elle avait elle-même promises aux po-
pulations indigènes et des cruautés qu'elle infli-
geait à ces populations quand le fardeau devenait
vraiment trop lourd et qu'elles essayaient de re-
f vendiquer leurs droits.
« Ce rapport, écrit l'administrateur, ne peut
laisser aucun doute sur les terribles « méthodes »
, suivies à la fois par l'administration coloniale al-
| lemande, agissant soit par ordre, soit au su du
V gouvernement de Berlin, et par les Allemands
installés comme colons ou résidant dans le pays.
' Il ne laisse non plus aucun doute sur l'état déplo-
rable dans lequel sont tombés les indigènes sous
les brutalités et les brigandages auxquels ils ont
l été systématiquement soumis. »
Les dossiers gouvernement aux de Windhuk
montrent bien que ces atrocités ont été systéma-
tiques et prouvent que depuis 1910 les autorités
allemandes étaient constamment dans un état
d'appréhension nerveuse. Elles s'attendaient sans
cesse à une nouvelle révolte indigène. N'ayant pas
tiré la leçon des insurrections précédentes, auto-
rités et colons continuaient étourdiment leurs
« terribles méthodes ». En voici une éloquente
preuve, une circulaire confidentielle adressée a,i
mois de mai 1912 par le gouverneur-Seitz à ses
magistrats :
LE GOUVERNEUR IMPÉRIAL
DU SUD-OUEST AFRICAIN
ALLEMAND.
Windhuk, 31 mai 1912.
A tous les magistrats.
Secret et personnel.
Pendant ces dernières semaines j'ai reçu de différentes
régions la nouvelle que dans certaines redons du pays il
se répand depuis quelque temps parmi les indigènes des
sentiments de désespoir.
La raison qui m'en est partout donnée est que les bruta-
lités des Européens contre les indigènes se développent
d'une façon alarmante. Il est à ce propos très regrettable
que même des fonctionnaires de police se soient rendus
quelquefois coupables de ces excès, et que ces brutalités
n'aient pas trouvé devant les tribunaux la punition qu'elles
méritaient selon les idées de justice des indigènes.
La conséquence en est que les indigènes semblent déses-
pérer de l'impartialité de notre justice et qu'ils sont pous-
sés à une haine aveugle de tout ce (lui est Blanc. Et fina-
lement ils se résoudraient à se secourir eux-mêmes,
c'est-à-dire que nous aurionsune nouvelle révolte indigène.
Il est bien certain que ces sentiments de haine des indi-
gènes, s'il n'est pas pourvu énergiquementàl'amélioration
de leur sort, produiront bientôt une nouvelle révolte indi-
gène désespérée et entraîneront par suite la ruine écono-
mique du pays.
Il est donc de l'intérêt de toute la population européenne
que les personnes qui se déchaînent en folles brutalités
contre les indigènes et qui considèrent leur peau blanche
comme une charte d'immunité contre le châtiment des
crimes les plus brutaux soient mises par tous les moyens
dans l'impossibilité de nuire.
Car un peuple qui a la prétention d'ètre regardé comme
une race dominante doit tout d'abord se garder lui-même
de toute souillure. *
Si les crimes commis par les Européens contre bs indi-
gènes ne sont pas punis ou lesont insuffisamment, il serait
impossible d'agir dans l'avenir. dans les cas de crimes
commis par les indigènes contre les Européens, avec la
sévérité qui s'impose dans l'intérêt général.
Je n'ai pas d'action sur la justice en ce qui concerne les
Européens, mais je dois dans la mesure du possible prendre
les mesures administratives nécessaires pour remédier à
la situation critique dont 1 existence ne fait pas de doute.
Par-dessus tout j'ai l'intention d'ordonner en pareil cas
que les Européens qui persisteront à traiter brutalement
leurs employés indigènes ne pourront recevoir plus long-
temps de main-d'œuvre indigène. D'ailleurs on n'obtiendra
un réel changement que si la population blanche elle même,
qui, je le sais, condamne de tout son pouvoir les brutalités
des mauvais éléments. ne laisse aucun doute sur son atti-
tude dans cette question à ces individus qui sont un danger
pour le bien public et si cette population blanche contribue
à empêcher ces crimes ou à les déférer il la justice, dans
tous les cas où ils se seront produits.
Et comme je suis convaincu que les conseils de districts
peuvent exercer à ce sujet une action sur leursconcitoyens,
je vous prie d'informer les conseils de districts dans le
plus grand secret lors de leur prochaine réunion du con-
tenu de la présente communication.
J'espère quavecl'aspistance de la population européenne
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