Titre : L'Afrique française : bulletin mensuel du Comité de l'Afrique française et du Comité du Maroc
Auteur : Comité de l'Afrique française. Auteur du texte
Auteur : Comité du Maroc (Paris). Auteur du texte
Éditeur : Comité de l'Afrique française (Paris)
Date d'édition : 1917-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32683501s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1917 01 janvier 1917
Description : 1917/01/01 (N1,A27)-1917/12/31 (N12,A27). 1917/01/01 (N1,A27)-1917/12/31 (N12,A27).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97885087
Source : CIRAD, 2017-132476
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/07/2017
98 BULLETIN l'U COMITÉ
était faite par deux Noirs qui, au fond avaient
bien plus d'influence que leurs patrons sur les
indigènes. Brazza sur la rive droite était, repré-
senté par le sergent Malamine, Sénégalais retors
et fidèle jusqu'à la brutalité. Sur la rive gauche,
Stanley avait comme factotum un Somali du
nom de Douala, fort intelligent et doué d'une
patience capable de désarmer le plus intransi-
geant des indigènes. C'est surtout à Malamine et
Douala que revient l'honneur d'avoir rallié les
indigènes à la politique française et belge.
Malgré Stanley qui semblait gêné de ma pré-
sence, je restai six jours au village de Mfoa et
j'eus tout le temps d'examiner le pays. Je causai
longuement avec Malamine et avant de le quitter
je lui donnai tout le ravitaillement dont je pou-
vais disposer et dont il avait le plus grand besoin.
Ce qui lui fit le plus de plaisir, ce fut le sel et le
savon. Quant aux étoiles, il n'en avait cure et à
mon arrivée j'avais eu quelque peine à recon-
naître le représentant de la France dans ce grand
Noir, court vêtu à la méthode indigène et avec
les cheveux tressés en côtes de melon comme le
plus élégant des Batékés.
Je revins alors-à Landana où je rendis compte
à mon Supérieur que le village de Mfoa au-dessus
des cataractes était véritablement la clef de l'in-
térieur et qu'il y avait urgence à établir là une
importante misssion.
La politique de l'intérieur ne devait pas faire
oublier celle de la côte, et il importait de s'assurer
la possession du littoral si l'on ne voulait pas
plus tard être bloqué sans porte de sortie sur la
mer.
Pendant qu'avec la cannonnière Oriflamme,
M. de Brazza prenait possession de Loango, le
Sagittaire essayait d'occuper Pointe-Noire. Là
malheureusement une fausse manœuvre faillit
tout compromettre et les indigènes prirent les
armes. Très prudent, le commandant du Sagit-
taire comprit qu'il valait mieux recourir à la
douceur et il vint à Landana pour y solliciter le
concours des missionnaires. Pendant un mois, je
restai à bord du Sagittaire comme interprète. Et
un beau jour après une formidable douche dans
la barre et une bordée de coups de fusil dans les
grandes herbes, j'eus la satisfaction d'amener les
chefs à composition et à faire leur soumission à
bord du navire de guerre.
A mon avis, cette occupation n'était pas encore
suffisante et il fallait prendre le reste de la côte
jusqu'à l'embouchure du Congo. Je m'attelai à
cette besogne avec l'aide de M. Dolisie que M. de
Braza venait d'envoyer comme premier chef de
poste à Loango. Nous fimes signer des traités de
protectorat par les chefs de Landana, Malembé,
Cabinda, pendant que le directeur de la maison
Daumas-Béraud faisait de même avec le chef de
la baie de Banane.
Malheureusement le commandant du Sagittaire
prétendit avoir l'ordre de ne pas dépasser le
5° 12' sud et il refusa de ratifier ces traités. Ce fut
une énorme faute politique qui nous priva d'i m-
menses avantages dont on voit aujourd'hui toute
la valeur.
En 1883, inquiet de savoir le poste de Mfoa
abandonné par suite de la relève si malencon-
treuse faite par Mizon, M. de Brazza pressa les
missionnaires d'aller s'installer à l'endroit que la
Société de Géographie venait d'appeler Brazza-
ville. C'était une assez grosse dépense pour la-
quelle M. de Brazza ne donnait absolument rien.
Mais il n'avait pas l'habitude de s'inquiéter pour
si peu! et même il me demanda d'emmener avec
moi M. Dolisie... sans augmentation de prix!
Notre patriotisme n'hésita pas et au mois d'août
1883 M. Dolisie se mit en route avec moi et deux
autres missionnaires.
Pendant ce temps-là, M. de Brazza prenait la
route de l'Ogooué et il nous avait donné rendez-
vous à Brazzaville pour le mois de septembre.
M. de Brazza avoua plus tard qu'il avait complè-
tement oublié ce rendez-vous. Ce n'est que
huit mois plus tard, quand M. Dolisie alla le
relancer dans l'Ogooué, que M. de Brazza se sou-
vint que nous l'attendions dans l'intérieur. Char-
mants, ces rendez-vous à longue portée avec rien
à se mettre sous la dent !
Cette absence insolite du grand chef nous créa
les plus gros ennuis. Dans une conférence citée
par M. Girard, M. de Brazza dit que « les indi-
gènes par une réserve excessive avaient refusé de
recevoir le P. Augouard et ses missionnaires ».
Pourquoi M. de Brazza ne dit-il pas que son lieu-
tenant M. Dolisie eut à subir le même sort?
M. de Brazza aurait mieux fait de dire toute la
vérité qu'il m'avoua plus tard à moi-même. Il
avait dit aux indigènes que quiconque se présen-
terait en son nom aurait une plume de coq à son
chapeau, mais qu'il faudrait éconduire impi-
tovablement tous les autres.
Et non seulement M. de Brazza ne fut pas pré-
sentau rendez-vous, mais encore il oublia de nous
donner le signal qui devait nous faire reconnaître
pour amis. De sorte que ce ne fut pas de sa faute
si nous ne reçûmes pas des coups de fusil à cette
époque.
Pour ne pas compliquer la situation et éviter
les conflits avec les indigènes, je crus prudent
de revenir un peu en arrière et nous nous instal-
làmes provisoirement à Linzolo en attendant
M. de Brazza qui ne devait pas tarder à arriver.
Mais ce dernier nous ayant complètement
oubliés, notre installation de Linzolo devint défi-
nitive et ce fut pour nous un grand bonheur. La
vie est horriblement chère chez les Batékés qui
vivaient de courtage et n'avaient point de cultures;
tandis qu'à Linzolo nous avions des vivres en
abondance.
M. de Brazza n'arriva qu'au mois de juin de
l'année suivante; de sorte que les missionnaires
eurent l'honneur de faire flotter les couleurs de
la France dans la région de Brazzaville dix mois
avant l'arrivée du gouverneur.
était faite par deux Noirs qui, au fond avaient
bien plus d'influence que leurs patrons sur les
indigènes. Brazza sur la rive droite était, repré-
senté par le sergent Malamine, Sénégalais retors
et fidèle jusqu'à la brutalité. Sur la rive gauche,
Stanley avait comme factotum un Somali du
nom de Douala, fort intelligent et doué d'une
patience capable de désarmer le plus intransi-
geant des indigènes. C'est surtout à Malamine et
Douala que revient l'honneur d'avoir rallié les
indigènes à la politique française et belge.
Malgré Stanley qui semblait gêné de ma pré-
sence, je restai six jours au village de Mfoa et
j'eus tout le temps d'examiner le pays. Je causai
longuement avec Malamine et avant de le quitter
je lui donnai tout le ravitaillement dont je pou-
vais disposer et dont il avait le plus grand besoin.
Ce qui lui fit le plus de plaisir, ce fut le sel et le
savon. Quant aux étoiles, il n'en avait cure et à
mon arrivée j'avais eu quelque peine à recon-
naître le représentant de la France dans ce grand
Noir, court vêtu à la méthode indigène et avec
les cheveux tressés en côtes de melon comme le
plus élégant des Batékés.
Je revins alors-à Landana où je rendis compte
à mon Supérieur que le village de Mfoa au-dessus
des cataractes était véritablement la clef de l'in-
térieur et qu'il y avait urgence à établir là une
importante misssion.
La politique de l'intérieur ne devait pas faire
oublier celle de la côte, et il importait de s'assurer
la possession du littoral si l'on ne voulait pas
plus tard être bloqué sans porte de sortie sur la
mer.
Pendant qu'avec la cannonnière Oriflamme,
M. de Brazza prenait possession de Loango, le
Sagittaire essayait d'occuper Pointe-Noire. Là
malheureusement une fausse manœuvre faillit
tout compromettre et les indigènes prirent les
armes. Très prudent, le commandant du Sagit-
taire comprit qu'il valait mieux recourir à la
douceur et il vint à Landana pour y solliciter le
concours des missionnaires. Pendant un mois, je
restai à bord du Sagittaire comme interprète. Et
un beau jour après une formidable douche dans
la barre et une bordée de coups de fusil dans les
grandes herbes, j'eus la satisfaction d'amener les
chefs à composition et à faire leur soumission à
bord du navire de guerre.
A mon avis, cette occupation n'était pas encore
suffisante et il fallait prendre le reste de la côte
jusqu'à l'embouchure du Congo. Je m'attelai à
cette besogne avec l'aide de M. Dolisie que M. de
Braza venait d'envoyer comme premier chef de
poste à Loango. Nous fimes signer des traités de
protectorat par les chefs de Landana, Malembé,
Cabinda, pendant que le directeur de la maison
Daumas-Béraud faisait de même avec le chef de
la baie de Banane.
Malheureusement le commandant du Sagittaire
prétendit avoir l'ordre de ne pas dépasser le
5° 12' sud et il refusa de ratifier ces traités. Ce fut
une énorme faute politique qui nous priva d'i m-
menses avantages dont on voit aujourd'hui toute
la valeur.
En 1883, inquiet de savoir le poste de Mfoa
abandonné par suite de la relève si malencon-
treuse faite par Mizon, M. de Brazza pressa les
missionnaires d'aller s'installer à l'endroit que la
Société de Géographie venait d'appeler Brazza-
ville. C'était une assez grosse dépense pour la-
quelle M. de Brazza ne donnait absolument rien.
Mais il n'avait pas l'habitude de s'inquiéter pour
si peu! et même il me demanda d'emmener avec
moi M. Dolisie... sans augmentation de prix!
Notre patriotisme n'hésita pas et au mois d'août
1883 M. Dolisie se mit en route avec moi et deux
autres missionnaires.
Pendant ce temps-là, M. de Brazza prenait la
route de l'Ogooué et il nous avait donné rendez-
vous à Brazzaville pour le mois de septembre.
M. de Brazza avoua plus tard qu'il avait complè-
tement oublié ce rendez-vous. Ce n'est que
huit mois plus tard, quand M. Dolisie alla le
relancer dans l'Ogooué, que M. de Brazza se sou-
vint que nous l'attendions dans l'intérieur. Char-
mants, ces rendez-vous à longue portée avec rien
à se mettre sous la dent !
Cette absence insolite du grand chef nous créa
les plus gros ennuis. Dans une conférence citée
par M. Girard, M. de Brazza dit que « les indi-
gènes par une réserve excessive avaient refusé de
recevoir le P. Augouard et ses missionnaires ».
Pourquoi M. de Brazza ne dit-il pas que son lieu-
tenant M. Dolisie eut à subir le même sort?
M. de Brazza aurait mieux fait de dire toute la
vérité qu'il m'avoua plus tard à moi-même. Il
avait dit aux indigènes que quiconque se présen-
terait en son nom aurait une plume de coq à son
chapeau, mais qu'il faudrait éconduire impi-
tovablement tous les autres.
Et non seulement M. de Brazza ne fut pas pré-
sentau rendez-vous, mais encore il oublia de nous
donner le signal qui devait nous faire reconnaître
pour amis. De sorte que ce ne fut pas de sa faute
si nous ne reçûmes pas des coups de fusil à cette
époque.
Pour ne pas compliquer la situation et éviter
les conflits avec les indigènes, je crus prudent
de revenir un peu en arrière et nous nous instal-
làmes provisoirement à Linzolo en attendant
M. de Brazza qui ne devait pas tarder à arriver.
Mais ce dernier nous ayant complètement
oubliés, notre installation de Linzolo devint défi-
nitive et ce fut pour nous un grand bonheur. La
vie est horriblement chère chez les Batékés qui
vivaient de courtage et n'avaient point de cultures;
tandis qu'à Linzolo nous avions des vivres en
abondance.
M. de Brazza n'arriva qu'au mois de juin de
l'année suivante; de sorte que les missionnaires
eurent l'honneur de faire flotter les couleurs de
la France dans la région de Brazzaville dix mois
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