Titre : L'Afrique française : bulletin mensuel du Comité de l'Afrique française et du Comité du Maroc
Auteur : Comité de l'Afrique française. Auteur du texte
Auteur : Comité du Maroc (Paris). Auteur du texte
Éditeur : Comité de l'Afrique française (Paris)
Date d'édition : 1921-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32683501s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1921 01 janvier 1921
Description : 1921/01/01 (A31,N1)-1921/12/31 (A31,N12). 1921/01/01 (A31,N1)-1921/12/31 (A31,N12).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97878865
Source : CIRAD, 2017-132476
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/07/2017
196 BULLETIN DU COMI,TÉ
e Chérif ne le suivit pas ; son fils aîné Abba Djiddoum
le remplaça à la tête de sa bannière.
Le 22 avril, le commandant Lamy attaquait le camp de
Lakta et l'enlevait en un victorieux assaut à la fin duque1
il fut tué. Rabah avait également trouvé la mort. Son fils
ainé, Fad El Allah s'enfuyait de Karnak-Logone sur
Dikoa, poursuivi par le capitaine Reibell.
Le Chérif Idjilé n'avait pas voulu suivre Fad El Allah
et les rabistes fugitifs; il s'était retiré dans son village
d'où Sanda, le sultan du Bornou que nous venions de
reconnaître, le fit venir à Kousseri. Il voulut dit-on, le
mettre à mort. Le Chérif en -appela à Gentil qui l'ins-
talla sur la rive droite du Chari en face de Kousseri, dans
ce coin de brousse où s'élève maintenant Fort-Lamy.
Le Fakih Naim,bazinguerdans labannièrede Bichara,
avait abandonné Fad El Allah à Karnak-Logone et était
yenu se présenter aux autorités françaises. Il avait reçu
le commandement du petit groupe d'indigènes de toutes
races campés à Fort-Lamy. Pour s'être approprié sans
vergogne les dépouilles de Rabah, il fut peu après des-
titué et remplacé par Zehn El Abdin, Djellaba comman-
dant une des deux bannières de la garde personnelle de
Rabah. Celui-ci, au bout de deux mois à peine, -s'enfuit
au Kanem chez les Senoussistes de Bir Alali.
Le commandement indigène de Fort-Lamy fut alors
donné au Chérif Idjilé qui jusqu'alors s'était contenté du
commandement des Arabes et avait assuré, avec ses
captifs, la gardedes immenses troupeaux de bœufs et de
chevaqx enlevés à Rabah et à ses fils.
Quand les Allemands vinrent occuper le Nord-Came-
roun, le propre pays du Chérif, il resta près de nous et
ne songea pas à passer sur la rive gauche du Chari. Aux
jours sombres de 1901 quand nos troupes échouèrent à
l'attaque de la Zaouïa de Bir Alali où fut tué le capitaine
Millot, la fidélité du Chérif ne se démentit pas.
Elle ne s'est d'ailleurs jamais démentie, bien que des
intrigants qui briguaient sa place l'aient accusé à diffé- -
rentes reprises de vouloir passer au Bornou Anglais
où son fils aîné, Abba Djiddoum, est chefdu riche canton
de Margouba. Mais ses fidèles savaient qu'il n'en était
rien et l'avaient entendu dire bien souvent : (( Je veux
mourir près des Français ».
Autour du grand ficus sous lequel Gentil avait campé,
le Chérif rassembla peu à peu des Arabes du Bornou et
du Baguirmi et les gens de toutes races : Mandjas, Saras,
Bandas, Kreichs enlevés et entraînés par Rabah. Le
pays désert se peupla. Et si, actuellement, Fort-Lamy
avec sa ville européenne encadrée des deux quartiers
indigènes de Djenb El Bahr et de Djenb El Gato
compte une dizaine de mille âmes, l'action personnelle
du Chérif n'y est pas étrangère.
Grand, mince, tout de blanc vêtu, les traits fins, la
peau noire, la barbe blanche, il avait grand air. Il aimait
à dire qu'il était centenaire, mais n'avait que soixanté-
quatorze yns, étant né l'année où le sultan Chérif du
Ouadaï entra dans la capitale du Bornou (1846). Mu-
sulman très dévot, il ne se contentait pas au Ramadan de
jeûner pendant le mois prescrit, mais encore pendant les
deux mois précédents. Sa dignité d'allure, sa piété, sa
qualité de descendant du prophète lui donnaient dans
tout le pays une haute autorité morale.
Cet homme pieux n'était pas morose, mais au con-
traire fort jovial. Il avait conservé une mémoire d'une
remarquable fraîcheur et racontait avec humour ses
innombrables souvenirs. D'une politesse exquise, il
savait avec grâce presser la main de son interlocuteur
sur son cœur et son front; il ne manquait jamais de
vanter les mérites du chef en fonction et de célébrer ses
connaissances, non par flatterie mais par civilité.
Juge au tribunal indigène, son grand âge aidant, il
somnolait parfois pendant les longues séances, et les
mauvaises langues ajoutent qu'en semblable occasion,
quand le président, pour le consulter sur la peine, le
réveillait doucement, le Chérif, qui n'avait paT suivi les
débats, répondait invariablement : « Qu'on lui coupe la
main.».
Ainsi que l'exige la coutume, trois repas funèbres
(Sadaka) seront donnés aux pauvres : trois, huit et qua-
rante jours après le décès, périodes correspondant à
l'éclatement du ventre, à la rupture des articulations et
à la disparition des chairs.
La mort du Chérif a endeuillé toute la population de
Fort-Lamy, beaucoup de Fakihs .sont venus prier et
d'innombrables femmes se lamenter sur sa tombe. Les
danses ont cessé, la « Nouggara » ne retentit plus et la
« Rhaïta » ne fait plus entendre ses sons pleurards.
Ce n'est pas non plus sans émotion que les vieux
Tchadiens ont vu disparaître cette originale' et sym-
pathique figure.
Capitaine J. LEMOIGNE.
Le Journal officiel de la Haute-Volta qui est l'un des
plus intéressants de la série des organes officiels de
l'Afrique occidentale et équatoriale contient cet arrêté :
LE GOUVERNEUR DES COLONIES, LIEUTENANT-GOUVERNEUR
DE LA. HAUTE-VOLTA, OFFICIER DE LA LÉGION D'HON-
NEUR;
Vu le décret du 18 octobre 19°4, réorganisant le Gou-
vernement général de'l'Afrique occidentale française :
Vu le décret du ier mars 1919, portant création de la
colonie de la Haute-Volta j
Vu le décret du 3o décembre 1912, sur le régime finan-
cier des Colonies ;
Le Conseil d'administration entendu,
ARRÊTE :
ARTICLE PREMIER. — Est autorisé le remboursement de,
la somme de 3 francs au nommé Retihousida Kafango,
chef du village de Rakounga, canton de Samba, subdi-
vision de Koudougou, pour une s'omme indûment payée
au titre de l'impôt personnel indigène, exercice 192I.
ART 2. — La présente dépense est imputable au
Budget local de la Haute-Volta, chapitre VII article 2
paragraphe 1er, exercice 1421.
ART. 3. Le Secrétaire général est chargé de l'exécution
du présent arrêté qui sera notifié au Trésorier-Payeur,
enregistré et communiqué partout-où besoin sera.
Ouagadougou, le r3 avril 19:H.
HESLING.
Un profane sourirait de cet arrêté. Il aurait tort. Il
ne faudrait pas connaitre la vie indigène de l'Afrique
occidentale pour s'étonner de la forme solennelle donnée
à ce modeste remboursement, d'autant plus qu'il est suivi
d'un second arrêté qui prononce dans les mêmes con-
ditions des remboursements allant jusqu'à 267 francs
pour un village. Rien ne peut mieux affirmer aux-yeux
des indigènes la justice des chefs « toubab » : imaginez
d'ailleurs ce que serait pour chacun de nous l'invitation
à passer chez le percepteur pour toucher sans formalités
le remboursement d'un trop perçu!
e Chérif ne le suivit pas ; son fils aîné Abba Djiddoum
le remplaça à la tête de sa bannière.
Le 22 avril, le commandant Lamy attaquait le camp de
Lakta et l'enlevait en un victorieux assaut à la fin duque1
il fut tué. Rabah avait également trouvé la mort. Son fils
ainé, Fad El Allah s'enfuyait de Karnak-Logone sur
Dikoa, poursuivi par le capitaine Reibell.
Le Chérif Idjilé n'avait pas voulu suivre Fad El Allah
et les rabistes fugitifs; il s'était retiré dans son village
d'où Sanda, le sultan du Bornou que nous venions de
reconnaître, le fit venir à Kousseri. Il voulut dit-on, le
mettre à mort. Le Chérif en -appela à Gentil qui l'ins-
talla sur la rive droite du Chari en face de Kousseri, dans
ce coin de brousse où s'élève maintenant Fort-Lamy.
Le Fakih Naim,bazinguerdans labannièrede Bichara,
avait abandonné Fad El Allah à Karnak-Logone et était
yenu se présenter aux autorités françaises. Il avait reçu
le commandement du petit groupe d'indigènes de toutes
races campés à Fort-Lamy. Pour s'être approprié sans
vergogne les dépouilles de Rabah, il fut peu après des-
titué et remplacé par Zehn El Abdin, Djellaba comman-
dant une des deux bannières de la garde personnelle de
Rabah. Celui-ci, au bout de deux mois à peine, -s'enfuit
au Kanem chez les Senoussistes de Bir Alali.
Le commandement indigène de Fort-Lamy fut alors
donné au Chérif Idjilé qui jusqu'alors s'était contenté du
commandement des Arabes et avait assuré, avec ses
captifs, la gardedes immenses troupeaux de bœufs et de
chevaqx enlevés à Rabah et à ses fils.
Quand les Allemands vinrent occuper le Nord-Came-
roun, le propre pays du Chérif, il resta près de nous et
ne songea pas à passer sur la rive gauche du Chari. Aux
jours sombres de 1901 quand nos troupes échouèrent à
l'attaque de la Zaouïa de Bir Alali où fut tué le capitaine
Millot, la fidélité du Chérif ne se démentit pas.
Elle ne s'est d'ailleurs jamais démentie, bien que des
intrigants qui briguaient sa place l'aient accusé à diffé- -
rentes reprises de vouloir passer au Bornou Anglais
où son fils aîné, Abba Djiddoum, est chefdu riche canton
de Margouba. Mais ses fidèles savaient qu'il n'en était
rien et l'avaient entendu dire bien souvent : (( Je veux
mourir près des Français ».
Autour du grand ficus sous lequel Gentil avait campé,
le Chérif rassembla peu à peu des Arabes du Bornou et
du Baguirmi et les gens de toutes races : Mandjas, Saras,
Bandas, Kreichs enlevés et entraînés par Rabah. Le
pays désert se peupla. Et si, actuellement, Fort-Lamy
avec sa ville européenne encadrée des deux quartiers
indigènes de Djenb El Bahr et de Djenb El Gato
compte une dizaine de mille âmes, l'action personnelle
du Chérif n'y est pas étrangère.
Grand, mince, tout de blanc vêtu, les traits fins, la
peau noire, la barbe blanche, il avait grand air. Il aimait
à dire qu'il était centenaire, mais n'avait que soixanté-
quatorze yns, étant né l'année où le sultan Chérif du
Ouadaï entra dans la capitale du Bornou (1846). Mu-
sulman très dévot, il ne se contentait pas au Ramadan de
jeûner pendant le mois prescrit, mais encore pendant les
deux mois précédents. Sa dignité d'allure, sa piété, sa
qualité de descendant du prophète lui donnaient dans
tout le pays une haute autorité morale.
Cet homme pieux n'était pas morose, mais au con-
traire fort jovial. Il avait conservé une mémoire d'une
remarquable fraîcheur et racontait avec humour ses
innombrables souvenirs. D'une politesse exquise, il
savait avec grâce presser la main de son interlocuteur
sur son cœur et son front; il ne manquait jamais de
vanter les mérites du chef en fonction et de célébrer ses
connaissances, non par flatterie mais par civilité.
Juge au tribunal indigène, son grand âge aidant, il
somnolait parfois pendant les longues séances, et les
mauvaises langues ajoutent qu'en semblable occasion,
quand le président, pour le consulter sur la peine, le
réveillait doucement, le Chérif, qui n'avait paT suivi les
débats, répondait invariablement : « Qu'on lui coupe la
main.».
Ainsi que l'exige la coutume, trois repas funèbres
(Sadaka) seront donnés aux pauvres : trois, huit et qua-
rante jours après le décès, périodes correspondant à
l'éclatement du ventre, à la rupture des articulations et
à la disparition des chairs.
La mort du Chérif a endeuillé toute la population de
Fort-Lamy, beaucoup de Fakihs .sont venus prier et
d'innombrables femmes se lamenter sur sa tombe. Les
danses ont cessé, la « Nouggara » ne retentit plus et la
« Rhaïta » ne fait plus entendre ses sons pleurards.
Ce n'est pas non plus sans émotion que les vieux
Tchadiens ont vu disparaître cette originale' et sym-
pathique figure.
Capitaine J. LEMOIGNE.
Le Journal officiel de la Haute-Volta qui est l'un des
plus intéressants de la série des organes officiels de
l'Afrique occidentale et équatoriale contient cet arrêté :
LE GOUVERNEUR DES COLONIES, LIEUTENANT-GOUVERNEUR
DE LA. HAUTE-VOLTA, OFFICIER DE LA LÉGION D'HON-
NEUR;
Vu le décret du 18 octobre 19°4, réorganisant le Gou-
vernement général de'l'Afrique occidentale française :
Vu le décret du ier mars 1919, portant création de la
colonie de la Haute-Volta j
Vu le décret du 3o décembre 1912, sur le régime finan-
cier des Colonies ;
Le Conseil d'administration entendu,
ARRÊTE :
ARTICLE PREMIER. — Est autorisé le remboursement de,
la somme de 3 francs au nommé Retihousida Kafango,
chef du village de Rakounga, canton de Samba, subdi-
vision de Koudougou, pour une s'omme indûment payée
au titre de l'impôt personnel indigène, exercice 192I.
ART 2. — La présente dépense est imputable au
Budget local de la Haute-Volta, chapitre VII article 2
paragraphe 1er, exercice 1421.
ART. 3. Le Secrétaire général est chargé de l'exécution
du présent arrêté qui sera notifié au Trésorier-Payeur,
enregistré et communiqué partout-où besoin sera.
Ouagadougou, le r3 avril 19:H.
HESLING.
Un profane sourirait de cet arrêté. Il aurait tort. Il
ne faudrait pas connaitre la vie indigène de l'Afrique
occidentale pour s'étonner de la forme solennelle donnée
à ce modeste remboursement, d'autant plus qu'il est suivi
d'un second arrêté qui prononce dans les mêmes con-
ditions des remboursements allant jusqu'à 267 francs
pour un village. Rien ne peut mieux affirmer aux-yeux
des indigènes la justice des chefs « toubab » : imaginez
d'ailleurs ce que serait pour chacun de nous l'invitation
à passer chez le percepteur pour toucher sans formalités
le remboursement d'un trop perçu!
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.66%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.66%.
- Auteurs similaires Indochine française Indochine française /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Indochine française" or dc.contributor adj "Indochine française")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 202/758
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k97878865/f202.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k97878865/f202.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k97878865/f202.image
- Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k97878865
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k97878865
Facebook
Twitter