Titre : Le Monde colonial illustré : revue mensuelle, commerciale, économique, financière et de défense des intérêts coloniaux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1940-02-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34459430v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 février 1940 01 février 1940
Description : 1940/02/01 (A18,N200)-1940/02/28. 1940/02/01 (A18,N200)-1940/02/28.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9759226m
Source : CIRAD, 2016-192274
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/12/2016
40
Photos Sœurs Blanches.
— Rassure-toi, FathIna, je ferai les démarches
nécessaires, et tu obtiendras l'allocation militaire!
COMME ILS SONT PARTIS...
DES monts du Djurdjura jusqu'aux plus lointaine s
oasis sahariennes, une grande clameur s'est
élevée : la guerre, c'est la guerre ! Appelés
par la mobilisation générale, les hommes sont partis
bravement, résolus à faire leur devoir. Car ces indi-
gènes, Arabes et Kabyles, sont français de coeur ;
ils savent qu'en défendant la mère-patrie, ils sauve-
gardent en même temps la liberté de leurs foyers.
Et, si les femmes ne comprennent pas le motif de cette
guerre, les hommes le leur expliquent : « Si l'on vous
disait : donnez-nous votre maison et allez coucher
dehors, vous laisseriez-vous faire sans résister ?
Eh bien ! c'est la même chose que les Allemands font
en Europe ! »
Aussi tous ces visages bronzés par le soleil re-
flètent-ils une résolution calme, mais grave, et que
l'on sent inébranlable. Un Kabyle, père de trois
enfants, répond aux Sœurs qui le félicitent de son
joyeux courage : « Ce ne sont pas les discours des
caïds dans les journaux, ni les paroles d'un tel ou
d'un tel, mais c'est mon cœur qui me dit ce que je
dois faire. J'aime la France, et c'est pour elle que je
partirai et ferai mon devoir ». Un autre, instituteur,
ne le cède pas en bravoure : « Nous ferons tous notre
devoir, et mon fils qui a douze ans, s'il le faut, partira
aussi avec moi ».
Ailleurs, les chrétiens indigènes, mobilisés, par-
tent en chantant la « Marseillaise», puis un cantique
à saint Joseph. Minute poignante : ces jeunes hommes
sont l'espoir du village chrétien ; ils y laissent leur
femme, leurs petits enfants. Combien, parmi eux, ne
reviendront pas ! Mais les femmes chrétiennes ont su
élever leur cœur à la hauteur des circonstances;
l'une d'elles, nous parlant de ses deux fils mobilisés,
ajoute : « S'ils meurent, les autres seront sauvés ! »
D'un bout à l'autre de l'Afrique du Nord, règne la
même conviction : la France ne fait pas une guerre de
conquête ; elle se bat pour défendre, avec la civilisa-
tion, la liberté de tous ses fils contre une hégémonie
tyrannique. Elles le savent bien, les mères, les
épouses esseulées dans leur pauvre demeure de
pierre ou de toub, bâtie à l'ombre des grands
palmiers ou près des oliviers sombres. Cette pensée
les console, lorsqu'elles songent au dernier adieu
du soldat lointain, qui accepte de mourir par amour
pour la France.
LES SŒURS BLANCHES
D'AFRIQUE
« MOBILISÉES »
POUR AIDER CELLES QUI RESTENT
Restée seule, la femme arabe ou kabyle va con-
naître la misère. Sans doute elle a droit aux alloca-
tions militaires ; mais comment les toucher ? Com-
ment remplir les formalités nécessaires, surtout
si elle habite une grande ville et n'a pas l'habitude
de quémander sans cesse ? Devant les détresses
qu'elles découvraient en visitant les indigènes, les
Sœurs Blanches ne pouvaient rester indifférentes ;
dans nombre de postes, un embryon de secrétariat
social, né des circonstances, se mit à fonctionner.
Dans les grandes villes, la permanence ouverte
chaque matin voit se presser une nombreuse af-
fluence.
Les allocations militaires obtenues, le secrétariat
continue à fonctionner : trait d'union entre le mobilisé
et sa famille, il écrit les lettres destinées à l'absent,
lit et, au besoin, traduit celles qui arrivent des divers
secteurs postaux, donne aux femmes, avec de bons
conseils, tous les renseignements utiles, etc. De plus,
les Sœurs se sont ingéniées à procurer du travail
Pour réconforter les vieillards et les chômeurs, une bonne poupe bien chaude...
aux femmes de mobilisés qui en désiraient : ici, on
installe un atelier de confection ; ailleurs, on tisse
des couvertures pour l'armée, et le reste.
Dans tous les postes de mission, les œuvres sani-
taires : dispensaires, consultations de nourrissons,
gouttes de lait, soins des malades à domicile, hôpi-
taux, hospices, continuent à fonctionner comme par
le passé. Comme le disait un Chef d'Annexe à la
Supérieure des Sœurs Blanches, au Sahara : « Il
n'y a pas de raison de fermer le dispensaire ; au con-
traire, il faut montrer aux indigènes que tout marche
quand même...» Et, dans beaucoup de localités, on
compte sur les Sœurs pour assurer les divers ser-
vices malgré les difficultés de l'heure et le départ
d'un certain nombre de Sœurs infirmières mobili-
sées.
AVEC L'ARMÉE D'AFRIQUE
Dès le début des hostilités, les Sœurs Blanches
prenaient du service dans les ambulances. Tandis
que les unes se dirigeaient vers Thibar, en Tunisie
où le scolasticat des Pères Blancs est transformé en
un hôpital d'un millier de lits, les autres formaient
trois équipes mobiles et suivaient les divers groupes
de l'armée d'Afrique dans ses déplacements. Mais
quels détails donner aux lecteurs du « Monde
Colonial Illustré », alors que les Sœurs mobilisées se
montrent d'une extrême réserve ? Comme l'écrit
l'une d'elles : « Nous ne pouvons vous donner de
renseignements précis, notre qualité de « mili-
taires » nous l'interdit ». Elles sont « quelque part
dans la zone des armées », et leur secteur postal
change parfois de numéro sans qu'elles aient changé
de localité.
Après un trajet très long parce que très lent, ce fut
le cantonnement, l'installation provisoire, puis l'amé-
nagement du centre hospitalier. Maintes occasions
de « servir » se présentent pour les S surs, et les dif-
férents services réclament leur aide : infirmerie,
cabinet dentaire, salle d'opérations, sans oublier
stérilisation, radio, voire même «popote» !... Les
désagréments inévitables sont accueillis en souriant,
et, le soir, on se glisse dans le sac de couchage pour
un repos bien gagné. « Outre nos occupations ordi-
naires, écrit une Sœur, nous refaisons des talons aux
chaussettes de nos soldats et nous tentons de suppri-
mer les accrocs des pantalons. Ces braves gens, un
peu gênés au début, sont maintenant bien à l'aise
avec nous.»
Et les Sœurs, bravement, ont établi leurs quartiers
d'hiver sur le petit coin de frontière que garde
l'armée d'Afrique. Y seront-elles encore dans un
mois... dans quinze jours... demain ? Dieu seul le
sait... Africaines de par la volonté de leur fondateur,
le Cardinal Lavigerie, les Sœurs Blanches suivront
l'armée d'Afrique partout où le G. Q. G. l'enverra...
Mais toutes, sur le front, dans les ambulances ou
dans les postes de mission, n'ont qu'un désir : aider
ceux et celles qui les entourent à supporter l'épreuve,
maintenir les courages et élever les âmes en leur
faisant aimer davantage la loyauté, la justice, la
charité pour lesquelles la France se bat.
SŒUR MARIE-ANDRÉ DU SACRÉ-CŒUR,
Missionnaire de Notre-Dame d'Afrique, Docteur en droit.
LE MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ
N° 200 ......... FÉVRIER 1940
Photos Sœurs Blanches.
— Rassure-toi, FathIna, je ferai les démarches
nécessaires, et tu obtiendras l'allocation militaire!
COMME ILS SONT PARTIS...
DES monts du Djurdjura jusqu'aux plus lointaine s
oasis sahariennes, une grande clameur s'est
élevée : la guerre, c'est la guerre ! Appelés
par la mobilisation générale, les hommes sont partis
bravement, résolus à faire leur devoir. Car ces indi-
gènes, Arabes et Kabyles, sont français de coeur ;
ils savent qu'en défendant la mère-patrie, ils sauve-
gardent en même temps la liberté de leurs foyers.
Et, si les femmes ne comprennent pas le motif de cette
guerre, les hommes le leur expliquent : « Si l'on vous
disait : donnez-nous votre maison et allez coucher
dehors, vous laisseriez-vous faire sans résister ?
Eh bien ! c'est la même chose que les Allemands font
en Europe ! »
Aussi tous ces visages bronzés par le soleil re-
flètent-ils une résolution calme, mais grave, et que
l'on sent inébranlable. Un Kabyle, père de trois
enfants, répond aux Sœurs qui le félicitent de son
joyeux courage : « Ce ne sont pas les discours des
caïds dans les journaux, ni les paroles d'un tel ou
d'un tel, mais c'est mon cœur qui me dit ce que je
dois faire. J'aime la France, et c'est pour elle que je
partirai et ferai mon devoir ». Un autre, instituteur,
ne le cède pas en bravoure : « Nous ferons tous notre
devoir, et mon fils qui a douze ans, s'il le faut, partira
aussi avec moi ».
Ailleurs, les chrétiens indigènes, mobilisés, par-
tent en chantant la « Marseillaise», puis un cantique
à saint Joseph. Minute poignante : ces jeunes hommes
sont l'espoir du village chrétien ; ils y laissent leur
femme, leurs petits enfants. Combien, parmi eux, ne
reviendront pas ! Mais les femmes chrétiennes ont su
élever leur cœur à la hauteur des circonstances;
l'une d'elles, nous parlant de ses deux fils mobilisés,
ajoute : « S'ils meurent, les autres seront sauvés ! »
D'un bout à l'autre de l'Afrique du Nord, règne la
même conviction : la France ne fait pas une guerre de
conquête ; elle se bat pour défendre, avec la civilisa-
tion, la liberté de tous ses fils contre une hégémonie
tyrannique. Elles le savent bien, les mères, les
épouses esseulées dans leur pauvre demeure de
pierre ou de toub, bâtie à l'ombre des grands
palmiers ou près des oliviers sombres. Cette pensée
les console, lorsqu'elles songent au dernier adieu
du soldat lointain, qui accepte de mourir par amour
pour la France.
LES SŒURS BLANCHES
D'AFRIQUE
« MOBILISÉES »
POUR AIDER CELLES QUI RESTENT
Restée seule, la femme arabe ou kabyle va con-
naître la misère. Sans doute elle a droit aux alloca-
tions militaires ; mais comment les toucher ? Com-
ment remplir les formalités nécessaires, surtout
si elle habite une grande ville et n'a pas l'habitude
de quémander sans cesse ? Devant les détresses
qu'elles découvraient en visitant les indigènes, les
Sœurs Blanches ne pouvaient rester indifférentes ;
dans nombre de postes, un embryon de secrétariat
social, né des circonstances, se mit à fonctionner.
Dans les grandes villes, la permanence ouverte
chaque matin voit se presser une nombreuse af-
fluence.
Les allocations militaires obtenues, le secrétariat
continue à fonctionner : trait d'union entre le mobilisé
et sa famille, il écrit les lettres destinées à l'absent,
lit et, au besoin, traduit celles qui arrivent des divers
secteurs postaux, donne aux femmes, avec de bons
conseils, tous les renseignements utiles, etc. De plus,
les Sœurs se sont ingéniées à procurer du travail
Pour réconforter les vieillards et les chômeurs, une bonne poupe bien chaude...
aux femmes de mobilisés qui en désiraient : ici, on
installe un atelier de confection ; ailleurs, on tisse
des couvertures pour l'armée, et le reste.
Dans tous les postes de mission, les œuvres sani-
taires : dispensaires, consultations de nourrissons,
gouttes de lait, soins des malades à domicile, hôpi-
taux, hospices, continuent à fonctionner comme par
le passé. Comme le disait un Chef d'Annexe à la
Supérieure des Sœurs Blanches, au Sahara : « Il
n'y a pas de raison de fermer le dispensaire ; au con-
traire, il faut montrer aux indigènes que tout marche
quand même...» Et, dans beaucoup de localités, on
compte sur les Sœurs pour assurer les divers ser-
vices malgré les difficultés de l'heure et le départ
d'un certain nombre de Sœurs infirmières mobili-
sées.
AVEC L'ARMÉE D'AFRIQUE
Dès le début des hostilités, les Sœurs Blanches
prenaient du service dans les ambulances. Tandis
que les unes se dirigeaient vers Thibar, en Tunisie
où le scolasticat des Pères Blancs est transformé en
un hôpital d'un millier de lits, les autres formaient
trois équipes mobiles et suivaient les divers groupes
de l'armée d'Afrique dans ses déplacements. Mais
quels détails donner aux lecteurs du « Monde
Colonial Illustré », alors que les Sœurs mobilisées se
montrent d'une extrême réserve ? Comme l'écrit
l'une d'elles : « Nous ne pouvons vous donner de
renseignements précis, notre qualité de « mili-
taires » nous l'interdit ». Elles sont « quelque part
dans la zone des armées », et leur secteur postal
change parfois de numéro sans qu'elles aient changé
de localité.
Après un trajet très long parce que très lent, ce fut
le cantonnement, l'installation provisoire, puis l'amé-
nagement du centre hospitalier. Maintes occasions
de « servir » se présentent pour les S surs, et les dif-
férents services réclament leur aide : infirmerie,
cabinet dentaire, salle d'opérations, sans oublier
stérilisation, radio, voire même «popote» !... Les
désagréments inévitables sont accueillis en souriant,
et, le soir, on se glisse dans le sac de couchage pour
un repos bien gagné. « Outre nos occupations ordi-
naires, écrit une Sœur, nous refaisons des talons aux
chaussettes de nos soldats et nous tentons de suppri-
mer les accrocs des pantalons. Ces braves gens, un
peu gênés au début, sont maintenant bien à l'aise
avec nous.»
Et les Sœurs, bravement, ont établi leurs quartiers
d'hiver sur le petit coin de frontière que garde
l'armée d'Afrique. Y seront-elles encore dans un
mois... dans quinze jours... demain ? Dieu seul le
sait... Africaines de par la volonté de leur fondateur,
le Cardinal Lavigerie, les Sœurs Blanches suivront
l'armée d'Afrique partout où le G. Q. G. l'enverra...
Mais toutes, sur le front, dans les ambulances ou
dans les postes de mission, n'ont qu'un désir : aider
ceux et celles qui les entourent à supporter l'épreuve,
maintenir les courages et élever les âmes en leur
faisant aimer davantage la loyauté, la justice, la
charité pour lesquelles la France se bat.
SŒUR MARIE-ANDRÉ DU SACRÉ-CŒUR,
Missionnaire de Notre-Dame d'Afrique, Docteur en droit.
LE MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ
N° 200 ......... FÉVRIER 1940
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.66%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.66%.
-
-
Page
chiffre de pagination vue 22/26
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k9759226m/f22.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k9759226m/f22.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k9759226m/f22.image
- Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k9759226m
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k9759226m
Facebook
Twitter