Titre : Le Monde colonial illustré : revue mensuelle, commerciale, économique, financière et de défense des intérêts coloniaux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1940-03-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34459430v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 mars 1940 01 mars 1940
Description : 1940/03/01 (A18,N201)-1940/03/31. 1940/03/01 (A18,N201)-1940/03/31.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97592256
Source : CIRAD, 2016-192274
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/12/2016
60
LE DERNIER INTERVIEW DE CHAVANNES,
dernier compagnon de Brazza.
Avec Chavannes disparaît un des rares
survivants de l'épopée de Brazza.
Voici le dernier interview pris par
Léon Poirier pour son film sur Brazza
.(1).
Un monsieur important. — Moi, j'ai
un candidat sérieux. Il vous a écrit
d'ailleurs.
Brazza. — Comment s'appelle-t-il ?
Le monsieur important. — De Cha-
vannes. Il a vingt-sept ans.
Quatre jours plus tard, Charles de
Chavannes est dans le salon d'attente
de l'Hôtel de Bade, très ému à la pensée
d'être, dans quelques instants, reçu par
l'illustre explorateur. Son trouble aug-
mente lorsqu'un Noir vêtu de la vareuse
des matelots vient le chercher pour
le guider jusqu'à la chambre du
« commandant ».
Le Laptot (montrant la porte à de
Chavannes). — Commandant... Frappe...
Cht. vannes suit cette indication et, à
la deuxième tentative, la voix de Brazza
dit nonchalamment : « Entrez ! »
L'aspirant secrétaire allant de sur-
prise en surprise pénètre alors au milieu
d'un désordre pittoresque de cantines,
de sagaies, de cartes, de masques pa-
houins, au milieu duquel, en robe de
chambre, étendu sur son lit, Brazza
compulse des dossiers en fumant une
cigarette dont il secoue la cendre dans
un soulier en guise de cendrier.
Prélude au campement de brousse
dont Chavannes, venu en jaquette et
gants beurre frais, reste tout éberlué.
Brazza. — Vous pouvez approcher...
(1) Léon POIRIER, Brazza, ou l'épopée du
Congo (collection Livres-films), Paris, Marne,
1940, in-12, 158 p. photos.
C'est vous qui m'avez écrit de Lyon ?
De Chavannes. — Oui, monsieur.
Brazza. — Alors le Congo vous
tente ?
De Chavannes. — Oui, monsieur.
Brazza. — Il faut de la volonté.
De Chavannes. — J'ai au moins celle
de vous suivre n'importe où.
Brazza. — Quels sont vos titres ?
De Chavannes. — Je suis licencié en
droit.
Brazza. — Savez-vous faire la cui-
sine ?...
... C'est ainsi qu'en 1884, il y a plus
d'un demi siècle, je devins le secrétaire
de Brazza et partis avec lui dans sa nou-
velle mission de l'Ouest Africain, dit
un vieillard à un visiteur qui semble
l'interroger.
C'est Charles de Chavannes lui-même
qui, en 1939, dans sa charmante mai-
son d'Antibes, conte à l'auteur du film
ses souvenirs.
De Chavannes. — Qui se souvient du
passé ? Presque tous sont morts. Ceux
de la première heure : Ballay, Hamon,
Marche et combien d'autres, de Las-
tours, emporté par les fièvres, Flico-
teaux, tué par un buffle, Crampel
massacré...
L'auteur du film. — Et Brazza ?
De Chavannes. — L'ingratitude envers
les grands hommes est le propre des
peuples forts, a dit Plutarque, mais du
moins repose-t-il à Alger, dans la terre
africaine, et a-t-on pu graver sur sa
tombe la seule épitaphe qu'il souhai-
tait :
SA MÉMOIRE
EST PURE DE SANG HUMAIN.
Léon POIRIER.
Dès le début de la mobilisation des centaines
d'indigènes gabonais se sont présentés
spontanément aux bureaux de recrutement
pour être incorporés dans l'armée. Un pre-
mier contingent de ces volontaires vient
d'être dirigé sur la Métropole, après avoir
reçu au Gabon même une première instruc-
tion militaire. La photographie ci-contre
montre les volontaires défilant à Libreville,
au cours d'une cérémonie présidée par M. le
gouverneur Masson, entouré des notabilités
civiles et militaires.
Le Têt, fête de l'an annamite, a été célébré
cette année, le 8 février, dans tous les camps
de France où sont hébergés les travailleurs
indochinois venus depuis la guerre pour
intensifier la main-d'œuvre de nos usines
d'armements. M. Charles Pomaret, ministre
du Travail, a tenu à ce que cette fête soit
célébrée avec un éclat particulier et une
émotion que l'on devine. Le dessin ci-dessus
de Le Pho représente «le culte des ancêtres»,
particulièrement honorés le jour du Têt.
Le 23 janvier, dans la cour des Invalides,
a été présentée une section d'automobiles
sanitaires de vingt voitures, don de l'Indo-
chine et remise à la France par le Comité
de « La Fraternité de guerre franco-indochi-
noise », fondé par Mme Catroux. De gauche à
droite sur la photographie ci-contre : Mme de
Carbuccia, présidente de l'œuvre française
des Sections sanitaires du front, le lieute-
nant pilote aviateur Jean de Beaumont,
député de Cochinchine, le gouverneur géné-
ral Brévié et Mgr Le Hunsec, bénissant les
ambulances.
LE MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ
N° 201 ........... MARS 1940
LE DERNIER INTERVIEW DE CHAVANNES,
dernier compagnon de Brazza.
Avec Chavannes disparaît un des rares
survivants de l'épopée de Brazza.
Voici le dernier interview pris par
Léon Poirier pour son film sur Brazza
.(1).
Un monsieur important. — Moi, j'ai
un candidat sérieux. Il vous a écrit
d'ailleurs.
Brazza. — Comment s'appelle-t-il ?
Le monsieur important. — De Cha-
vannes. Il a vingt-sept ans.
Quatre jours plus tard, Charles de
Chavannes est dans le salon d'attente
de l'Hôtel de Bade, très ému à la pensée
d'être, dans quelques instants, reçu par
l'illustre explorateur. Son trouble aug-
mente lorsqu'un Noir vêtu de la vareuse
des matelots vient le chercher pour
le guider jusqu'à la chambre du
« commandant ».
Le Laptot (montrant la porte à de
Chavannes). — Commandant... Frappe...
Cht. vannes suit cette indication et, à
la deuxième tentative, la voix de Brazza
dit nonchalamment : « Entrez ! »
L'aspirant secrétaire allant de sur-
prise en surprise pénètre alors au milieu
d'un désordre pittoresque de cantines,
de sagaies, de cartes, de masques pa-
houins, au milieu duquel, en robe de
chambre, étendu sur son lit, Brazza
compulse des dossiers en fumant une
cigarette dont il secoue la cendre dans
un soulier en guise de cendrier.
Prélude au campement de brousse
dont Chavannes, venu en jaquette et
gants beurre frais, reste tout éberlué.
Brazza. — Vous pouvez approcher...
(1) Léon POIRIER, Brazza, ou l'épopée du
Congo (collection Livres-films), Paris, Marne,
1940, in-12, 158 p. photos.
C'est vous qui m'avez écrit de Lyon ?
De Chavannes. — Oui, monsieur.
Brazza. — Alors le Congo vous
tente ?
De Chavannes. — Oui, monsieur.
Brazza. — Il faut de la volonté.
De Chavannes. — J'ai au moins celle
de vous suivre n'importe où.
Brazza. — Quels sont vos titres ?
De Chavannes. — Je suis licencié en
droit.
Brazza. — Savez-vous faire la cui-
sine ?...
... C'est ainsi qu'en 1884, il y a plus
d'un demi siècle, je devins le secrétaire
de Brazza et partis avec lui dans sa nou-
velle mission de l'Ouest Africain, dit
un vieillard à un visiteur qui semble
l'interroger.
C'est Charles de Chavannes lui-même
qui, en 1939, dans sa charmante mai-
son d'Antibes, conte à l'auteur du film
ses souvenirs.
De Chavannes. — Qui se souvient du
passé ? Presque tous sont morts. Ceux
de la première heure : Ballay, Hamon,
Marche et combien d'autres, de Las-
tours, emporté par les fièvres, Flico-
teaux, tué par un buffle, Crampel
massacré...
L'auteur du film. — Et Brazza ?
De Chavannes. — L'ingratitude envers
les grands hommes est le propre des
peuples forts, a dit Plutarque, mais du
moins repose-t-il à Alger, dans la terre
africaine, et a-t-on pu graver sur sa
tombe la seule épitaphe qu'il souhai-
tait :
SA MÉMOIRE
EST PURE DE SANG HUMAIN.
Léon POIRIER.
Dès le début de la mobilisation des centaines
d'indigènes gabonais se sont présentés
spontanément aux bureaux de recrutement
pour être incorporés dans l'armée. Un pre-
mier contingent de ces volontaires vient
d'être dirigé sur la Métropole, après avoir
reçu au Gabon même une première instruc-
tion militaire. La photographie ci-contre
montre les volontaires défilant à Libreville,
au cours d'une cérémonie présidée par M. le
gouverneur Masson, entouré des notabilités
civiles et militaires.
Le Têt, fête de l'an annamite, a été célébré
cette année, le 8 février, dans tous les camps
de France où sont hébergés les travailleurs
indochinois venus depuis la guerre pour
intensifier la main-d'œuvre de nos usines
d'armements. M. Charles Pomaret, ministre
du Travail, a tenu à ce que cette fête soit
célébrée avec un éclat particulier et une
émotion que l'on devine. Le dessin ci-dessus
de Le Pho représente «le culte des ancêtres»,
particulièrement honorés le jour du Têt.
Le 23 janvier, dans la cour des Invalides,
a été présentée une section d'automobiles
sanitaires de vingt voitures, don de l'Indo-
chine et remise à la France par le Comité
de « La Fraternité de guerre franco-indochi-
noise », fondé par Mme Catroux. De gauche à
droite sur la photographie ci-contre : Mme de
Carbuccia, présidente de l'œuvre française
des Sections sanitaires du front, le lieute-
nant pilote aviateur Jean de Beaumont,
député de Cochinchine, le gouverneur géné-
ral Brévié et Mgr Le Hunsec, bénissant les
ambulances.
LE MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ
N° 201 ........... MARS 1940
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