Titre : Le Monde colonial illustré : revue mensuelle, commerciale, économique, financière et de défense des intérêts coloniaux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1940-04-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34459430v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 avril 1940 01 avril 1940
Description : 1940/04/01 (A18,N202)-1940/04/30. 1940/04/01 (A18,N202)-1940/04/30.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9759224s
Source : CIRAD, 2016-192274
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/12/2016
LES
FRANÇAIS
REMONTAIEN'
ET CONQUÉRAIEN
T 'AFRIQUE française est constituée par un ensemble de colonies bien sou-
dées et formant bloc compact; celles de la côte se raccordent en effet,
par leur arrière-pays, entre elles ou avec des colonies intérieures.
Ceux qui furent, sur ce continent, nos émules dans la pénétration et la prise
de possession de terres inconnues : les Anglais, les Espagnols, possèdent
seulement en Afrique occidentale des colonies côtières, enclavées dans le bloc
français.
Quelle est l'origine de ce fait historique et géographique ?
Henry Hubert nous l'explique dans les lignes qui suivent, en soulignant
le goût particulier des Français, qu'ils aient été missionnaires, explorateurs
ou commerçants, pour la remontée des fleuves. Il nous fait bien comprendre
que ce goût de l'aventure et de l'inconnu nous a valu non seulement une
A. 0. F., mais une Amérique française et aussi une Indochine, sinon un
établissement durable à Madagascar plus rapide que celui de nos rivaux.
ABANDONNANT le pour une fois la boussole et
le microscope, j'aborderai un problème
d'histoire coloniale. D'aucuns diront peut-
être que je développe ici un paradoxe... Le pro-
blème est le suivant : « Par quel mécanisme les
Français furent-ils souvent entraînés, à diverses
époques de leur histoire coloniale, à occuper de
très vastes régions continentales? »
Il ne s'agit pas d'infliger au lecteur un cours
d'histoire. On ne rappellera que les choses essen-
tielles à la thèse soutenue. Commençons par
l'Amérique.
Le 24 juillet 1574, le Malouin Jacques Cartier, qui,
vraisemblablement, cherchait de l'or, débarquait à
l'embouchure du Saint-Laurent. L'année suivante,
il remontait le fleuve et fondait deux forts sur les
rives, dont l'un, Montréal, à 700 kilomètres de la mer.
Soixante-quinze ans plus tard, une compagnie
privée, mais autorisée par un acte royal et orga-
nisée pour l'exploitation des pelleteries, s'installe
au Canada. L'agent le plus actif de la compagnie,
Champlain, cherche à développer son négoce. Il
pratique une politique d'association avec les indi-
gènes — déjà! —et, grâce à leur aide, il peut visiter
des régions nouvelles. Mais il le fait en remontant
le fleuve et en s'engageant dans la région des
grands lacs. Il occupe peu à peu les pays visités
et devient finalement gouverneur de la colonie.
En 1654, deux autres Français, des chasseurs de
fourrures, Radisson et Groseillers, vont à leur
tour de l'avant. Partis du lac Supérieur, ils dé-
couvrent les sources du Mississipi. A leur sujet,on
ne peut guère parler d'appui officiel, puisqu'ils
finirent par constituer une société... anglaise.
Cependant, les Pères Ménard, Allouez et Mar-
quette fondent, peu après, des missions sur les
rives même du lac. Puis Marquette, aidé du chas-
seur de fourrures Jolliet, un jésuite et un trappeur
— je ne dis pas un trappiste — descendent le
Mississipi sur plusieurs centaines de kilomètres.
Affaires de prosélytisme pour le premier, affaires
tout court pour le second et esprit d'aventure
chez tous les deux.
Enfin, en 1682, un jeune colon, Cavelier de la
Salle, renseigné par Jolliet, descend le Mississipi
jusqu'à son embouchure et prend possession, au
nom du roi de France, de tous les territoires qu'il a
visités.
Voilà donc des Français, d'origine et d'occu-
pations différentes, qui, dédaignant systématique-
ment la zone littorale où se fondait la Nouvelle-
Angleterre, ont construit l'armature d'un empire,
à l'intérieur du continent américain, cela en s'as-
treignant à la recherche des voies d'eau et en les
utilisant presque exclusivement sur plus de
2 000 kilomètres de parcours.
Qu'on ne dise pas surtout qu'eux et leurs suc-
cesseurs n'ont fait que passer sur ces voies d'eau.
Ils les ont exploitées aussi pour une occupation
durable. Et, aujourd'hui encore, le souvenir des
Français demeure vivace sur ces rives. Tandis
qu'on n'a retrouvé, sur les bords du lac Supérieur,
d'autres vestiges du séjour des Normands qu'une
pierre gravée et la carcasse d'un « drakkar », ili
a par là, aux États-Unis, des villes qui s'appellent
Marquette, Brûlé, du Luth, Fond-du-Lac, Prairie-
des-Chiens, etc. Et le chapelet continue versle
Sud où, parmi beaucoup d'autres, aux nomsfran-
çais, des agglomérations comme Des Moines,
Saint-Louis et la Nouvelle-Orléans, sont connues
de tous.
Nos ancêtres ont fait là-bas du beau travail-
Par la suite, une lourde incompréhension métro-
politaine a gâché tout cela.
Traversons l'Atlantique. En 1638, Lambert, de
la Compagnie Normande, installe une « habita-
tion » qui, elle aussi, est à l'embouchure d'un
fleuve, le Sénégal. Peu après, un fort — Saint-
Louis — est construit dans le voisinage. Il protège
le commerce de nos compatriotes.
Ceux-ci auraient pu s'en tenir là. Attendez.*®
1685, Charbonneau remonte le premier loin dans le
fleuve. Il atteint Bakel. D'autres suivent. En 1*
Brue fonde le fort Saint-Joseph, le pendante
celui de Saint-Louis, mais à 900 kilomètres,
l'embouchure. Et le Sénégal, dont nous ne pos
dons pas les rives, devient cependant, gra#
l'occupation de ces deux points un fleuve
çais. Brue essaie de même la remontée
Gambie, puis de la Casamance, mais, par là,on
va pas loin en embarcation...
Stagnation pendant cent soixante-quinze >
Puis de Médine, point extrême de la navigaM
sur le Sénégal, notre activité recommence à bc*
geonner. Un seul objectif est envisagé : unWj
encore, le Niger. C'est bien l'histoire de l'Amène
qui recommence..
LE MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ
No 202 .......... AVRIL 1940
FRANÇAIS
REMONTAIEN'
ET CONQUÉRAIEN
T 'AFRIQUE française est constituée par un ensemble de colonies bien sou-
dées et formant bloc compact; celles de la côte se raccordent en effet,
par leur arrière-pays, entre elles ou avec des colonies intérieures.
Ceux qui furent, sur ce continent, nos émules dans la pénétration et la prise
de possession de terres inconnues : les Anglais, les Espagnols, possèdent
seulement en Afrique occidentale des colonies côtières, enclavées dans le bloc
français.
Quelle est l'origine de ce fait historique et géographique ?
Henry Hubert nous l'explique dans les lignes qui suivent, en soulignant
le goût particulier des Français, qu'ils aient été missionnaires, explorateurs
ou commerçants, pour la remontée des fleuves. Il nous fait bien comprendre
que ce goût de l'aventure et de l'inconnu nous a valu non seulement une
A. 0. F., mais une Amérique française et aussi une Indochine, sinon un
établissement durable à Madagascar plus rapide que celui de nos rivaux.
ABANDONNANT le pour une fois la boussole et
le microscope, j'aborderai un problème
d'histoire coloniale. D'aucuns diront peut-
être que je développe ici un paradoxe... Le pro-
blème est le suivant : « Par quel mécanisme les
Français furent-ils souvent entraînés, à diverses
époques de leur histoire coloniale, à occuper de
très vastes régions continentales? »
Il ne s'agit pas d'infliger au lecteur un cours
d'histoire. On ne rappellera que les choses essen-
tielles à la thèse soutenue. Commençons par
l'Amérique.
Le 24 juillet 1574, le Malouin Jacques Cartier, qui,
vraisemblablement, cherchait de l'or, débarquait à
l'embouchure du Saint-Laurent. L'année suivante,
il remontait le fleuve et fondait deux forts sur les
rives, dont l'un, Montréal, à 700 kilomètres de la mer.
Soixante-quinze ans plus tard, une compagnie
privée, mais autorisée par un acte royal et orga-
nisée pour l'exploitation des pelleteries, s'installe
au Canada. L'agent le plus actif de la compagnie,
Champlain, cherche à développer son négoce. Il
pratique une politique d'association avec les indi-
gènes — déjà! —et, grâce à leur aide, il peut visiter
des régions nouvelles. Mais il le fait en remontant
le fleuve et en s'engageant dans la région des
grands lacs. Il occupe peu à peu les pays visités
et devient finalement gouverneur de la colonie.
En 1654, deux autres Français, des chasseurs de
fourrures, Radisson et Groseillers, vont à leur
tour de l'avant. Partis du lac Supérieur, ils dé-
couvrent les sources du Mississipi. A leur sujet,on
ne peut guère parler d'appui officiel, puisqu'ils
finirent par constituer une société... anglaise.
Cependant, les Pères Ménard, Allouez et Mar-
quette fondent, peu après, des missions sur les
rives même du lac. Puis Marquette, aidé du chas-
seur de fourrures Jolliet, un jésuite et un trappeur
— je ne dis pas un trappiste — descendent le
Mississipi sur plusieurs centaines de kilomètres.
Affaires de prosélytisme pour le premier, affaires
tout court pour le second et esprit d'aventure
chez tous les deux.
Enfin, en 1682, un jeune colon, Cavelier de la
Salle, renseigné par Jolliet, descend le Mississipi
jusqu'à son embouchure et prend possession, au
nom du roi de France, de tous les territoires qu'il a
visités.
Voilà donc des Français, d'origine et d'occu-
pations différentes, qui, dédaignant systématique-
ment la zone littorale où se fondait la Nouvelle-
Angleterre, ont construit l'armature d'un empire,
à l'intérieur du continent américain, cela en s'as-
treignant à la recherche des voies d'eau et en les
utilisant presque exclusivement sur plus de
2 000 kilomètres de parcours.
Qu'on ne dise pas surtout qu'eux et leurs suc-
cesseurs n'ont fait que passer sur ces voies d'eau.
Ils les ont exploitées aussi pour une occupation
durable. Et, aujourd'hui encore, le souvenir des
Français demeure vivace sur ces rives. Tandis
qu'on n'a retrouvé, sur les bords du lac Supérieur,
d'autres vestiges du séjour des Normands qu'une
pierre gravée et la carcasse d'un « drakkar », ili
a par là, aux États-Unis, des villes qui s'appellent
Marquette, Brûlé, du Luth, Fond-du-Lac, Prairie-
des-Chiens, etc. Et le chapelet continue versle
Sud où, parmi beaucoup d'autres, aux nomsfran-
çais, des agglomérations comme Des Moines,
Saint-Louis et la Nouvelle-Orléans, sont connues
de tous.
Nos ancêtres ont fait là-bas du beau travail-
Par la suite, une lourde incompréhension métro-
politaine a gâché tout cela.
Traversons l'Atlantique. En 1638, Lambert, de
la Compagnie Normande, installe une « habita-
tion » qui, elle aussi, est à l'embouchure d'un
fleuve, le Sénégal. Peu après, un fort — Saint-
Louis — est construit dans le voisinage. Il protège
le commerce de nos compatriotes.
Ceux-ci auraient pu s'en tenir là. Attendez.*®
1685, Charbonneau remonte le premier loin dans le
fleuve. Il atteint Bakel. D'autres suivent. En 1*
Brue fonde le fort Saint-Joseph, le pendante
celui de Saint-Louis, mais à 900 kilomètres,
l'embouchure. Et le Sénégal, dont nous ne pos
dons pas les rives, devient cependant, gra#
l'occupation de ces deux points un fleuve
çais. Brue essaie de même la remontée
Gambie, puis de la Casamance, mais, par là,on
va pas loin en embarcation...
Stagnation pendant cent soixante-quinze >
Puis de Médine, point extrême de la navigaM
sur le Sénégal, notre activité recommence à bc*
geonner. Un seul objectif est envisagé : unWj
encore, le Niger. C'est bien l'histoire de l'Amène
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LE MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ
No 202 .......... AVRIL 1940
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