Titre : Le Monde colonial illustré : revue mensuelle, commerciale, économique, financière et de défense des intérêts coloniaux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1933-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34459430v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1933 01 janvier 1933
Description : 1933/01/01 (T10,A11,N113)-1933/12/31... 1933/01/01 (T10,A11,N113)-1933/12/31 (T10,A11,N124).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97459557
Source : CIRAD, 2016-192274
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/09/2016
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86 LE MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ N° 118.— JUIN 1933
arriva à Galabat, fort anglais sur la frontière, en
face du poste abyssin de Metama, endroit célèbre
où le roi Jean fut tué au cours de l'attaque des der-
viches.
L'Abyssinie fait partie de la Société des Nations ;
malgré cela, les choses ne se passent pas comme
ailleurs. Pendant 50 jours, la Mission dut attendre le
bon vouloir des autorités locales, alors que le Gouver-
nement central avait donné toutes les autorisations.
Ce dernier ne voulait pas cependant l'autoriser à
prendre avec elle le moteur du bateau démontable
qui devait permettre de naviguer sur le lac Tana
et d'étudier dans les îles les populations riveraines,
particulièrement les « Wohitos » que l'on croit être
les populations autochtones appelées les « mangeurs
d'hippopotames ».
Puis, au moment d'arriver au lac, le Gouverne-
ment fit savoir que, pour aller plus loin, il fallait lui
donner une lettre le déchargeant de toute responsa-
bilité ! Qu'était-ce à dire ? Le chef de la Mission,
devant cette carence de protection, préféra aban-
donner ce doux pays et se porta sur Gondar, sur
l'aimable invitation du consul italien qui avait
entendu parler de la Mission. Elle y resta six mois
et y fit un travail considérable et fructueux.
Elle y fit une étude approfondie des « Zar »
(génies ) :
Organisation de l'institution des Zar : nomencla-
ture, hiérarchie, caractéristiques de chaque génie;
Culte du Zar : sectes de malades et guérisseurs
(initiation, rites, transes, danses, invocations,
langue spéciale) ;
Position des adeptes vis-à-vis du christianisme,
de l'islamisme, du judaïsme ;
A gauche : Soudan
Égyptien. — Un jeune
Shillouk à Kodok, sur le
Nil. Kodok, où se trou-
vait l'expédition du
Commandant Mar-
chand est plus connu en
France sous le nom de
Fachoda.
Magie blanche, magie noire (évocation, malé-
fice) ;
Maladies données par le Zar : manières diverses
de les contracter, symptômes, méthodes de traite-
ment (prières, offrandes, sacrifices, amulettes,
ablutions, etc.), inoculation d'un génie protecteur,
déplacement de la maladie.
La Mission se livra également à une enquête sur
la religion et certaines coutumes des « falacha »
israélites, et des « qemant » qui sont des sémites,
comme la population abyssine, mais païens.
Son effort s'est porté aussi sur les manuscrits et
les peintures abyssines. Elle a rapporté la totalité
des peintures de l'église Antonios de Gondar. Ces
peintures qui, développées, occupent un espace de
29 mètres de long sur 2 mètres de large, soit 60 mè-
tres carrés, dont 50 en excellent état, datent de
la fondation de l'église (début du XVIIIe siècle)
et constituent un document unique pour l'étude de
la peinture abyssine. La Mission n'a pu acquérir
ces œuvres qu'en les remplaçant par une surface
égale de peintures exécutées par elle ; le déma-
rouflage et le marouflage ont demandé de longs et
minutieux efforts et le peintre G.-L. Roux a rendu
à cette occasion les plus signalés services.
Ces peintures comptent vraisemblablement par-
mi les plus anciennes de ce pays. Elles sont d'ail-
leurs fort rares, car les églises abyssines, étant donné
leur mode de construction, sont des édifices de peu
de durée et on ne peut y assurer la plus élémentaire
protection des peintures, en admettant même que le
clergé, contrairement à son habitude, se préoccu-
pât de cette question.
La Mission a acheté à des prêtres et à des clercs
de nombreux livres, livres religieux, livres de magie,
livres d'histoire, manuscrits. Les livres abyssins ont
été confiés à Mgr Grébaut qui en déterminera la
valeur.
Des études démographiques approfondies ont
été effectuées : monographies, recensements géné-
raux de plusieurs paroisses, recensement des possé-
dés de Gondar avec les noms des génies qui les pos-
sèdent, recensement des possédés guéris, etc.
Enfin la Mission étudia l'esclavage, étude qui ne
fut pas seulement théorique, mais concrète dans
les cas suivants :
A Galabat, la Mission avait accueilli un nègre
nommé Radda, sujet britannique qu'elle avait
engagé comme domestique. Deux mois après, un
prêtre abyssin crut le reconnaître comme un ancien
esclave qui s'était échappé voilà dix ans et le récla-
ma à la Mission. Un jugement lui ayant donné
tort, le prêtre fit appel au Gouverneur de la pro-
vince, le Dejazmach Wand Wousen Casa, qui lui
donna raison. Comme on refusait toujours de le
rendre, on apprit que le prêtre avait prévenu ses
parents et amis pour attaquer la Mission à son dé-
part. Pour éviter de gros ennuis, la Mission paya la
valeur de rachat de cet indigène, et dans l'acte de
rachat le propriétaire reconnut naïvement ce projet
d'attaque.
D'autre part, une esclave Arfazé, dit Goulba-
tié, à la suite de mauvais traitements subis, s'était
réfugiée dans le camp de la Mission ; son maître
vint la réclamer et la Mission dut payer son rachat.
Dans un recensement, on compta 1 400 esclaves
Au-dessus : Scène de la
vie courante à Tamba-
counda (Sénégal). Un
atelier de cordonnier.
sur 6 000 habitants. (Nous avons dit plus haut que
l'Éthiopie faisait partie de la Société des Nations).
De Gondar, la Mission gagnait Asmara en Ery-
thrée où elle fut extrêmement bien reçue par les
Italiens, atteignit Massaoua par un remarquable
chemin de fer qui descend d'une hauteur de
2400 mètres en 120 kilomètres, et parvint à Djibouti
terme de son voyage.
L. BUREAU.
Au-dessous : Une femme abyssine de Gondar.
Au bas de la page : Alaga Alamon, chef d'église abyssin
de Gondar, qui aida la Mission dans ses enquêtes.
86 LE MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ N° 118.— JUIN 1933
arriva à Galabat, fort anglais sur la frontière, en
face du poste abyssin de Metama, endroit célèbre
où le roi Jean fut tué au cours de l'attaque des der-
viches.
L'Abyssinie fait partie de la Société des Nations ;
malgré cela, les choses ne se passent pas comme
ailleurs. Pendant 50 jours, la Mission dut attendre le
bon vouloir des autorités locales, alors que le Gouver-
nement central avait donné toutes les autorisations.
Ce dernier ne voulait pas cependant l'autoriser à
prendre avec elle le moteur du bateau démontable
qui devait permettre de naviguer sur le lac Tana
et d'étudier dans les îles les populations riveraines,
particulièrement les « Wohitos » que l'on croit être
les populations autochtones appelées les « mangeurs
d'hippopotames ».
Puis, au moment d'arriver au lac, le Gouverne-
ment fit savoir que, pour aller plus loin, il fallait lui
donner une lettre le déchargeant de toute responsa-
bilité ! Qu'était-ce à dire ? Le chef de la Mission,
devant cette carence de protection, préféra aban-
donner ce doux pays et se porta sur Gondar, sur
l'aimable invitation du consul italien qui avait
entendu parler de la Mission. Elle y resta six mois
et y fit un travail considérable et fructueux.
Elle y fit une étude approfondie des « Zar »
(génies ) :
Organisation de l'institution des Zar : nomencla-
ture, hiérarchie, caractéristiques de chaque génie;
Culte du Zar : sectes de malades et guérisseurs
(initiation, rites, transes, danses, invocations,
langue spéciale) ;
Position des adeptes vis-à-vis du christianisme,
de l'islamisme, du judaïsme ;
A gauche : Soudan
Égyptien. — Un jeune
Shillouk à Kodok, sur le
Nil. Kodok, où se trou-
vait l'expédition du
Commandant Mar-
chand est plus connu en
France sous le nom de
Fachoda.
Magie blanche, magie noire (évocation, malé-
fice) ;
Maladies données par le Zar : manières diverses
de les contracter, symptômes, méthodes de traite-
ment (prières, offrandes, sacrifices, amulettes,
ablutions, etc.), inoculation d'un génie protecteur,
déplacement de la maladie.
La Mission se livra également à une enquête sur
la religion et certaines coutumes des « falacha »
israélites, et des « qemant » qui sont des sémites,
comme la population abyssine, mais païens.
Son effort s'est porté aussi sur les manuscrits et
les peintures abyssines. Elle a rapporté la totalité
des peintures de l'église Antonios de Gondar. Ces
peintures qui, développées, occupent un espace de
29 mètres de long sur 2 mètres de large, soit 60 mè-
tres carrés, dont 50 en excellent état, datent de
la fondation de l'église (début du XVIIIe siècle)
et constituent un document unique pour l'étude de
la peinture abyssine. La Mission n'a pu acquérir
ces œuvres qu'en les remplaçant par une surface
égale de peintures exécutées par elle ; le déma-
rouflage et le marouflage ont demandé de longs et
minutieux efforts et le peintre G.-L. Roux a rendu
à cette occasion les plus signalés services.
Ces peintures comptent vraisemblablement par-
mi les plus anciennes de ce pays. Elles sont d'ail-
leurs fort rares, car les églises abyssines, étant donné
leur mode de construction, sont des édifices de peu
de durée et on ne peut y assurer la plus élémentaire
protection des peintures, en admettant même que le
clergé, contrairement à son habitude, se préoccu-
pât de cette question.
La Mission a acheté à des prêtres et à des clercs
de nombreux livres, livres religieux, livres de magie,
livres d'histoire, manuscrits. Les livres abyssins ont
été confiés à Mgr Grébaut qui en déterminera la
valeur.
Des études démographiques approfondies ont
été effectuées : monographies, recensements géné-
raux de plusieurs paroisses, recensement des possé-
dés de Gondar avec les noms des génies qui les pos-
sèdent, recensement des possédés guéris, etc.
Enfin la Mission étudia l'esclavage, étude qui ne
fut pas seulement théorique, mais concrète dans
les cas suivants :
A Galabat, la Mission avait accueilli un nègre
nommé Radda, sujet britannique qu'elle avait
engagé comme domestique. Deux mois après, un
prêtre abyssin crut le reconnaître comme un ancien
esclave qui s'était échappé voilà dix ans et le récla-
ma à la Mission. Un jugement lui ayant donné
tort, le prêtre fit appel au Gouverneur de la pro-
vince, le Dejazmach Wand Wousen Casa, qui lui
donna raison. Comme on refusait toujours de le
rendre, on apprit que le prêtre avait prévenu ses
parents et amis pour attaquer la Mission à son dé-
part. Pour éviter de gros ennuis, la Mission paya la
valeur de rachat de cet indigène, et dans l'acte de
rachat le propriétaire reconnut naïvement ce projet
d'attaque.
D'autre part, une esclave Arfazé, dit Goulba-
tié, à la suite de mauvais traitements subis, s'était
réfugiée dans le camp de la Mission ; son maître
vint la réclamer et la Mission dut payer son rachat.
Dans un recensement, on compta 1 400 esclaves
Au-dessus : Scène de la
vie courante à Tamba-
counda (Sénégal). Un
atelier de cordonnier.
sur 6 000 habitants. (Nous avons dit plus haut que
l'Éthiopie faisait partie de la Société des Nations).
De Gondar, la Mission gagnait Asmara en Ery-
thrée où elle fut extrêmement bien reçue par les
Italiens, atteignit Massaoua par un remarquable
chemin de fer qui descend d'une hauteur de
2400 mètres en 120 kilomètres, et parvint à Djibouti
terme de son voyage.
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Au bas de la page : Alaga Alamon, chef d'église abyssin
de Gondar, qui aida la Mission dans ses enquêtes.
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