Titre : La Dépêche coloniale illustrée
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-02-15
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327559237
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 15 février 1906 15 février 1906
Description : 1906/02/15 (A6,N3). 1906/02/15 (A6,N3).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9743191q
Source : CIRAD, 2016-191284
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/09/2016
LA DÉPÊCHE COLONIALE ILLUSTRÉE 29
- e) Captifs, — Le ;Coran: reconnaît l'esclavage
comme licite;.cette institution était un rouage
ndispensable de la société antique ; le Prophète
recommandé de traiter ! avec bonté et bienveil-
lance les captifs. Un .musulman ne peut être
réduit en esclavage. Cependant l'esclave peut
devenir musulman sans cesser .d'être esclave ;
mais libérer son esclave est un acte de parti-
culière pitié, et les affranchis abondent dans les
pays de l'Islam.
Il y avait en Mauritanie deux sortes de cap-
tifs : le captif de tente appelé
nanema et le captif de traite, prin-,
cipal objet du trafic des. caravanes
entre le Soudan et l'Afrique du
nord. Ce dernier a complètement
disparu. Le Nanema, né dans une
famille qui l'a élevé avec ses enfants
et l'a considéré comme l'un d'entre
eux, s'estime membre de cette
famille et ne la quitterait pour rien
au monde. Dans certaines tribus,
lors de la récolte de la gomme ou
de la cueillette des dattes, le captif
avait le droit de. travailler un jour
ou deux par semaine à son profit.
JlutoritJs de la tribu. — Le pouvoir
est détenu dans la tribu guerrière
par un cheik héréditaire, assisté
par une djemaâ. Dans la tribu
maraboutique, le pouvoir du cheik
est exceptionnel ; c'est la djemaâ,
ou réunion des notables, qui traite
et règle.les affaires. Le cheik est
son mandataire.
Dans chaque tribu de Hassane,
une des plus nobles familles a la
gardé, héréditaire du tambour de
guerre, une autre famille a la garde
héréditaire du drapeau (l'usage du
drapeau n'existe ni dans l'Adrar ni
dans le Tagant). Chez les Ouled
Bou Sbâa, c'est un captif renommé par son
courage qui porte le drapeau.
Dans chaque tribu mirabouticrue, le vieillard
le plus âgé et la fa-
mille dont l'ascen-
dance connue est la
plus ancienne reçoi-
vent des honneurs
particuliers (par
exemple quand, un
mouton est égorgé, il
est convenable de
leur envoyer des mor-
ceaux de choix).
Des groupements
qu'on ne peut rat-
tacher par aucun lien
ethnique à la société
féodale maurita- -
nienne vagabondent
dans la brousse et le
long des côtes. Leurs
moeurs sont spéciale-
ment farouches.Dan s
le Tagant et dans le
Hodh nomadisent les
Nemadi et les Ida
boujellen, tribus de
race blanche vivant
uniquement de
chasse.
Sur les côtes errent
les Imeraguen, qui
organisent de vraies battues au poisson der-
rière la barre de la côte.
Ces peuplades semblent être le dernier vestige
d une population très ancienne.
La politique française en Mauritanie.
La France, pendant longtemps, toute à la
conquête du Soudan, ne s'occupait point de la
rive droite du Sénégal qu'on lui représentait
comme infertile, déserte et à jamais sauvage.
Elle consentit à payer elle-même les tributs
exigés par les chefs Maures pour ^assurer la
sécurité de la navigation fluviale. Ce fut, à la
vérité, un spectacle bizarre que celui d'une
grande nation soumise aux volontés cupides de
roitelets en guenilles, leur versant des contri-
butions annuelles, à leur grande satisfaction,
car ces versements, devenus administratifs, leur
étaient faits avec une régularité bureaucratique.
Et qu'on ne s'y trompe pas : les Maures ne
considéraient pas ces remises d'argent comme
des cadeaux d'amitié, ils y voyaient un vrai
tribut. Quand. on annonça au vieux Bakar, roi
des Edouaïch, que nous refusions de continuer
à payer les sommes qu'il nous extorquait, il
s'exclama : « Comment ! les chrétiens se révol-
tent ? mais je vais aller les châtier! » Nous
étions pour lui un peuple soumis; et, comme
nous payions tribut à des musulmans, nous
I. PALMIERS DE LA GORGE D'EL HAOUSSINIÀ
2. GORGES D'EL HAOUSSINIA
3. PAYSAGE PRÈS D'EL HAOUSSINIA
avions mauvaise
grâce à annoncer
à l'univers que
nous désirions
réaliser l'hégé-
monie de la France sur l'Afrique septentrionale
musulmane.
Pareille situation ne pouvait se prolonger
sans diminuer notre influence dans le monde
islamique. Le Soudan était pacifié et solidement
organisé, des travaux publics considérables
étaient entrepris un peu de toutes parts ; dans
l'Extrême-Sud algérien, l'annexion des oasis
sahariennes s'était faite presque sans coup férir,
on pressentait déjà qu'un jour prochain la
France aurait les mains libres au Maroc. Le
moment était donc favorable pour modifier en
Mauritanie un ordre de choses difficilement
tolérable.
Tout le monde était d'accord sur ce point.
Mais, pour réaliser ces désirs, il fallait procéder
avec prudence ; car une brusque suppression
des coutumes pouvait amener, par représailles,
l'embargo des chefs maures sur l'es caravanes et
empêcher toute traite, pendant une période de
temps indéterminée.
En réalité, dès le premier jour se posa la
question de l'annexion. Les insolences des roi-
telets de la rive droite étaient devenus insup-
portables, et la mainmise administrative de.
notre pays sur ces territoires s'imposait pour
compléter l'œuvre immense de la France en
Afrique. Deux voies s'offraient à nous pour
atteindre ce but. L'une comportait l'emploi de
I la manière forte, c'était une expédition mili-
taire. L'autre, peut-
être plus lente, et
certes moins coû-
teuse, demandait
seulement patience
et diplomatie.
Ce fut la seconde
voie qui fut adop-
tée et avec raison.
Uneexpédit,ion mi-
litaire n'avait au-
c un e chance
d'aboutir à un ré-
sultat pratique
dans les contrées
immenses, dont on
ignorait les res-
sources en vivres
et en eau ; et où la
population extrê-
mementmobile fui-
rait sans cesse de-
van t. nos colonnes
pour se rabattre sur nos convois et les inter-
cepter ; la moindre catastrophe nous attirerait
d'infinis désagréments. Et ces éventualités
désagréables n'étaient rien à côté des sommes
énormes à engloutir dans une conquête dont
l'issue serait peut-être sans rapports avec
les moyens employés pour l'obtenir. La voie
diplomatique était moins dangereuse ; elle
rencontra pourtant des détracteurs et dut, dans
une forte mesure, tenir compte de l'opposition
de ceux mêmes auxquels la suppression des
coutumes devait profiter en libérant à l'avenir
le commerce de ses entraves.
C'est Coppolani qui fut l'inaugurateur de
cette politique, si conforme à l'esprit moderne.
Les termes paradoxaux de conquête pacifique,
qui semblent s'opposer l'un à l'autre, la carac-
térisent cependant. Il n'y a pas conquête à
proprement parler, car il n'y a pas d'ennemis à
vaincre, il n'y a que des intérêts à convaincre.
Ce point obtenu, il ne s'agit plus que d'assurer
la sécurité aux populations venues à nous parce
que leur intérêt fut de venir à nous.
Ce fut dans ces conditions que Coppolani
- e) Captifs, — Le ;Coran: reconnaît l'esclavage
comme licite;.cette institution était un rouage
ndispensable de la société antique ; le Prophète
recommandé de traiter ! avec bonté et bienveil-
lance les captifs. Un .musulman ne peut être
réduit en esclavage. Cependant l'esclave peut
devenir musulman sans cesser .d'être esclave ;
mais libérer son esclave est un acte de parti-
culière pitié, et les affranchis abondent dans les
pays de l'Islam.
Il y avait en Mauritanie deux sortes de cap-
tifs : le captif de tente appelé
nanema et le captif de traite, prin-,
cipal objet du trafic des. caravanes
entre le Soudan et l'Afrique du
nord. Ce dernier a complètement
disparu. Le Nanema, né dans une
famille qui l'a élevé avec ses enfants
et l'a considéré comme l'un d'entre
eux, s'estime membre de cette
famille et ne la quitterait pour rien
au monde. Dans certaines tribus,
lors de la récolte de la gomme ou
de la cueillette des dattes, le captif
avait le droit de. travailler un jour
ou deux par semaine à son profit.
JlutoritJs de la tribu. — Le pouvoir
est détenu dans la tribu guerrière
par un cheik héréditaire, assisté
par une djemaâ. Dans la tribu
maraboutique, le pouvoir du cheik
est exceptionnel ; c'est la djemaâ,
ou réunion des notables, qui traite
et règle.les affaires. Le cheik est
son mandataire.
Dans chaque tribu de Hassane,
une des plus nobles familles a la
gardé, héréditaire du tambour de
guerre, une autre famille a la garde
héréditaire du drapeau (l'usage du
drapeau n'existe ni dans l'Adrar ni
dans le Tagant). Chez les Ouled
Bou Sbâa, c'est un captif renommé par son
courage qui porte le drapeau.
Dans chaque tribu mirabouticrue, le vieillard
le plus âgé et la fa-
mille dont l'ascen-
dance connue est la
plus ancienne reçoi-
vent des honneurs
particuliers (par
exemple quand, un
mouton est égorgé, il
est convenable de
leur envoyer des mor-
ceaux de choix).
Des groupements
qu'on ne peut rat-
tacher par aucun lien
ethnique à la société
féodale maurita- -
nienne vagabondent
dans la brousse et le
long des côtes. Leurs
moeurs sont spéciale-
ment farouches.Dan s
le Tagant et dans le
Hodh nomadisent les
Nemadi et les Ida
boujellen, tribus de
race blanche vivant
uniquement de
chasse.
Sur les côtes errent
les Imeraguen, qui
organisent de vraies battues au poisson der-
rière la barre de la côte.
Ces peuplades semblent être le dernier vestige
d une population très ancienne.
La politique française en Mauritanie.
La France, pendant longtemps, toute à la
conquête du Soudan, ne s'occupait point de la
rive droite du Sénégal qu'on lui représentait
comme infertile, déserte et à jamais sauvage.
Elle consentit à payer elle-même les tributs
exigés par les chefs Maures pour ^assurer la
sécurité de la navigation fluviale. Ce fut, à la
vérité, un spectacle bizarre que celui d'une
grande nation soumise aux volontés cupides de
roitelets en guenilles, leur versant des contri-
butions annuelles, à leur grande satisfaction,
car ces versements, devenus administratifs, leur
étaient faits avec une régularité bureaucratique.
Et qu'on ne s'y trompe pas : les Maures ne
considéraient pas ces remises d'argent comme
des cadeaux d'amitié, ils y voyaient un vrai
tribut. Quand. on annonça au vieux Bakar, roi
des Edouaïch, que nous refusions de continuer
à payer les sommes qu'il nous extorquait, il
s'exclama : « Comment ! les chrétiens se révol-
tent ? mais je vais aller les châtier! » Nous
étions pour lui un peuple soumis; et, comme
nous payions tribut à des musulmans, nous
I. PALMIERS DE LA GORGE D'EL HAOUSSINIÀ
2. GORGES D'EL HAOUSSINIA
3. PAYSAGE PRÈS D'EL HAOUSSINIA
avions mauvaise
grâce à annoncer
à l'univers que
nous désirions
réaliser l'hégé-
monie de la France sur l'Afrique septentrionale
musulmane.
Pareille situation ne pouvait se prolonger
sans diminuer notre influence dans le monde
islamique. Le Soudan était pacifié et solidement
organisé, des travaux publics considérables
étaient entrepris un peu de toutes parts ; dans
l'Extrême-Sud algérien, l'annexion des oasis
sahariennes s'était faite presque sans coup férir,
on pressentait déjà qu'un jour prochain la
France aurait les mains libres au Maroc. Le
moment était donc favorable pour modifier en
Mauritanie un ordre de choses difficilement
tolérable.
Tout le monde était d'accord sur ce point.
Mais, pour réaliser ces désirs, il fallait procéder
avec prudence ; car une brusque suppression
des coutumes pouvait amener, par représailles,
l'embargo des chefs maures sur l'es caravanes et
empêcher toute traite, pendant une période de
temps indéterminée.
En réalité, dès le premier jour se posa la
question de l'annexion. Les insolences des roi-
telets de la rive droite étaient devenus insup-
portables, et la mainmise administrative de.
notre pays sur ces territoires s'imposait pour
compléter l'œuvre immense de la France en
Afrique. Deux voies s'offraient à nous pour
atteindre ce but. L'une comportait l'emploi de
I la manière forte, c'était une expédition mili-
taire. L'autre, peut-
être plus lente, et
certes moins coû-
teuse, demandait
seulement patience
et diplomatie.
Ce fut la seconde
voie qui fut adop-
tée et avec raison.
Uneexpédit,ion mi-
litaire n'avait au-
c un e chance
d'aboutir à un ré-
sultat pratique
dans les contrées
immenses, dont on
ignorait les res-
sources en vivres
et en eau ; et où la
population extrê-
mementmobile fui-
rait sans cesse de-
van t. nos colonnes
pour se rabattre sur nos convois et les inter-
cepter ; la moindre catastrophe nous attirerait
d'infinis désagréments. Et ces éventualités
désagréables n'étaient rien à côté des sommes
énormes à engloutir dans une conquête dont
l'issue serait peut-être sans rapports avec
les moyens employés pour l'obtenir. La voie
diplomatique était moins dangereuse ; elle
rencontra pourtant des détracteurs et dut, dans
une forte mesure, tenir compte de l'opposition
de ceux mêmes auxquels la suppression des
coutumes devait profiter en libérant à l'avenir
le commerce de ses entraves.
C'est Coppolani qui fut l'inaugurateur de
cette politique, si conforme à l'esprit moderne.
Les termes paradoxaux de conquête pacifique,
qui semblent s'opposer l'un à l'autre, la carac-
térisent cependant. Il n'y a pas conquête à
proprement parler, car il n'y a pas d'ennemis à
vaincre, il n'y a que des intérêts à convaincre.
Ce point obtenu, il ne s'agit plus que d'assurer
la sécurité aux populations venues à nous parce
que leur intérêt fut de venir à nous.
Ce fut dans ces conditions que Coppolani
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