Titre : Les Annales coloniales : revue mensuelle illustrée / directeur-fondateur Marcel Ruedel
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1931-02-01
Contributeur : Ruedel, Marcel. Directeur de publication
Contributeur : Monmarson, Raoul (1895-1976). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb326934111
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 février 1931 01 février 1931
Description : 1931/02/01 (A32,N2)-1931/02/28. 1931/02/01 (A32,N2)-1931/02/28.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97427598
Source : CIRAD, 2016-191112
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/09/2016
Les Annales Coloniales
Page 3
LA DIPLOMATIE FRANÇAISE
ET LA TUNISIE (1880-1897)
PAR GABRIEL HANOTAUX
L'occupation de la Régence de Tunis par la
France présente un triple caractère qui la dis-
tingue de toute autre initiative analogue :
Elle pose la première pierre de l'édifice colo-
nial élevé par la Troisième République ;
La décision a été prise non dans un esprit de
conquête, ni même par un dessein concerté, mais
en raison d'une série de circonstances en quelque
sorte fatales, et à l'instigation même de l'a puis-
sance, qui, par ailleurs, a tout fait pour nous
écarter de l'Algérie et de la plupart des terres
où devait s'épanouir notre grandeur coloniale ;
Enfin, cet établissement est le résultat d'un
travail plein de patience, de savoir-faire, de
tact, — œuvre diplomatique par excellence, —
conforme aux traditions séculaires de la France,
qui ne s'agrège les peuples que pour les élever et
améliorer leur sort, — en un mot, les « proté-
ger D.
Mcllicclcs suivies
dans l'aHa:... tunisienne
Cela ne s'est pas fait tout seul, comme on dit :
il y a fallu, — ainsi qu'il le faut toujours en
histoire, — la rencontre des circonstances et
d'un homme, les circonstances saisissant l'homme,
et l'homme saisissant les circonstances. Mais cette
rencontre avant eu lieu, et le fait s'étant accom-
pli, il s'est accompli dans les conditions les plus
faciles et les plus douces ; il n'a provoqué ni
discussion, ni réclamation, ni revendication, ni
violences, ni longues suites désastreuses.
Tout s'est passé en douceur et, l'assentiment
universel s'offrant de lui-même, on a eu l'art de
le saisir sans bruit et de le confirmer sans re-
tard. Cette politique adroite et coulante, sans hâte
et sans vain éclat, s'est trouvée consacrée par
l'aréopage des puissances, à peine surprises, au
début, toujours bienveillantes et, finalement ad-
miratrices.
Système politique, système économique, paci-
fication, collaboration intime, prospérité, cet
ensemble est devenu, par le succès, une sorte de
chef-d'œuvre qui, depuis, a servi d'exemple,
d'encouragement et d'appui aux entreprises ana-
logues.
Aussi n'est-il pas inutile, au moment où la
France passe en revue et expose devant le monde
l'ensemble de. ses réalisations coloniales, de rap-
peler par quelles méthodes intellectuelles et aussi
sentimentales, puisées dans le fond même du ca-
ractère national, ce grand acte colonial) s'est
accompli avec les suites et les conséquences que
l'on sait, à l'infini.
Origine de l'alla:.e tunisienne
Tout nous poussait à ne pas laisser la Tunisie
entre les mains vraiment incapables, trop sou
vent disqualifiées, qui la détenaient et l'exploi-
taient. Le miracle est que nous ayons su attendre.
voulu attendre, pu attendre, que nous ayons sup
porté pendant des siècles; — et, au xix" siècle,
après la conquête de l'Algérie, pendant des années
encore, — tant d'offenses, tant de périls, tant
d'avanies, tant de risques avec une telle patience,
endurance et longanimité.
Depuis le roi Saint Louis, depuis que Charles-
Quint avait failli s'établir sur cette côte, face à
Marseille, pour y achever l'encerclement dont la
maison d'Autriche nous menaçait ; depuis que
les Gênois avaient tenu caché, dans l'île de
Djerba, un véritable nid de pirates, visant aussi
bien les vaisseaux chrétiens que lies vaisseaux
musulmans ; alors que la navigation de Marseille
et de nos ports du Levant était mise en coupe
réglée par tous les aventuriers de l'Islam, —
convertis ou non, — ayant attache sur oette
même côte ; alors que l'Angleterre, fixée à Malt"
et à Gibraltar, puis à Cor fou et en Egypte, fai-
sait, de la navigation dans la mer intérieure, une
véritable course d'obstacles, c'était le comble de
la bonne volonté, — beaucoup disaient de la
pusillanimité — de prétendre ignorer tout, de
nous refuser à toute velléité d'action et de réac-
tion selon la fameuse politique de Guizot : ne
rien faire ênergiquement, et de laisser couler
ainsi, devant nous, les événements qui finalement
tournaient toujours contre nous.
Chose extraordinaire, il a fallu l'initiative de
l'Angleterre, au congrès de Berlin, pour nous
avertir, nous ouvrir les yeux et nous faire voir,
clair comme le jour, que, si nous n'agissions pas,
nous serions agis ; que, si nous ne bougions pas,
d'autres bougeraient; qu'en tout cas, les cho-
ses ne pouvaient rester dans l'état, et qu'il fallait
que la France, patiente depuis dix siècles, se
prononçât à la fin et sût ce qu'elle voulait.
Pour en finir avec la dangereuse sagesse de
cette abstention volontaire, il convient de ne pas
oublier, comme trait final, qu'alors que M. Wad-
dington avait « dans sa poche » le fameux
La mosquée de Bab-el-Djazira et la rue El Bechir (d'après une aquarelle de Ch. Lallemand).
Page 3
LA DIPLOMATIE FRANÇAISE
ET LA TUNISIE (1880-1897)
PAR GABRIEL HANOTAUX
L'occupation de la Régence de Tunis par la
France présente un triple caractère qui la dis-
tingue de toute autre initiative analogue :
Elle pose la première pierre de l'édifice colo-
nial élevé par la Troisième République ;
La décision a été prise non dans un esprit de
conquête, ni même par un dessein concerté, mais
en raison d'une série de circonstances en quelque
sorte fatales, et à l'instigation même de l'a puis-
sance, qui, par ailleurs, a tout fait pour nous
écarter de l'Algérie et de la plupart des terres
où devait s'épanouir notre grandeur coloniale ;
Enfin, cet établissement est le résultat d'un
travail plein de patience, de savoir-faire, de
tact, — œuvre diplomatique par excellence, —
conforme aux traditions séculaires de la France,
qui ne s'agrège les peuples que pour les élever et
améliorer leur sort, — en un mot, les « proté-
ger D.
Mcllicclcs suivies
dans l'aHa:... tunisienne
Cela ne s'est pas fait tout seul, comme on dit :
il y a fallu, — ainsi qu'il le faut toujours en
histoire, — la rencontre des circonstances et
d'un homme, les circonstances saisissant l'homme,
et l'homme saisissant les circonstances. Mais cette
rencontre avant eu lieu, et le fait s'étant accom-
pli, il s'est accompli dans les conditions les plus
faciles et les plus douces ; il n'a provoqué ni
discussion, ni réclamation, ni revendication, ni
violences, ni longues suites désastreuses.
Tout s'est passé en douceur et, l'assentiment
universel s'offrant de lui-même, on a eu l'art de
le saisir sans bruit et de le confirmer sans re-
tard. Cette politique adroite et coulante, sans hâte
et sans vain éclat, s'est trouvée consacrée par
l'aréopage des puissances, à peine surprises, au
début, toujours bienveillantes et, finalement ad-
miratrices.
Système politique, système économique, paci-
fication, collaboration intime, prospérité, cet
ensemble est devenu, par le succès, une sorte de
chef-d'œuvre qui, depuis, a servi d'exemple,
d'encouragement et d'appui aux entreprises ana-
logues.
Aussi n'est-il pas inutile, au moment où la
France passe en revue et expose devant le monde
l'ensemble de. ses réalisations coloniales, de rap-
peler par quelles méthodes intellectuelles et aussi
sentimentales, puisées dans le fond même du ca-
ractère national, ce grand acte colonial) s'est
accompli avec les suites et les conséquences que
l'on sait, à l'infini.
Origine de l'alla:.e tunisienne
Tout nous poussait à ne pas laisser la Tunisie
entre les mains vraiment incapables, trop sou
vent disqualifiées, qui la détenaient et l'exploi-
taient. Le miracle est que nous ayons su attendre.
voulu attendre, pu attendre, que nous ayons sup
porté pendant des siècles; — et, au xix" siècle,
après la conquête de l'Algérie, pendant des années
encore, — tant d'offenses, tant de périls, tant
d'avanies, tant de risques avec une telle patience,
endurance et longanimité.
Depuis le roi Saint Louis, depuis que Charles-
Quint avait failli s'établir sur cette côte, face à
Marseille, pour y achever l'encerclement dont la
maison d'Autriche nous menaçait ; depuis que
les Gênois avaient tenu caché, dans l'île de
Djerba, un véritable nid de pirates, visant aussi
bien les vaisseaux chrétiens que lies vaisseaux
musulmans ; alors que la navigation de Marseille
et de nos ports du Levant était mise en coupe
réglée par tous les aventuriers de l'Islam, —
convertis ou non, — ayant attache sur oette
même côte ; alors que l'Angleterre, fixée à Malt"
et à Gibraltar, puis à Cor fou et en Egypte, fai-
sait, de la navigation dans la mer intérieure, une
véritable course d'obstacles, c'était le comble de
la bonne volonté, — beaucoup disaient de la
pusillanimité — de prétendre ignorer tout, de
nous refuser à toute velléité d'action et de réac-
tion selon la fameuse politique de Guizot : ne
rien faire ênergiquement, et de laisser couler
ainsi, devant nous, les événements qui finalement
tournaient toujours contre nous.
Chose extraordinaire, il a fallu l'initiative de
l'Angleterre, au congrès de Berlin, pour nous
avertir, nous ouvrir les yeux et nous faire voir,
clair comme le jour, que, si nous n'agissions pas,
nous serions agis ; que, si nous ne bougions pas,
d'autres bougeraient; qu'en tout cas, les cho-
ses ne pouvaient rester dans l'état, et qu'il fallait
que la France, patiente depuis dix siècles, se
prononçât à la fin et sût ce qu'elle voulait.
Pour en finir avec la dangereuse sagesse de
cette abstention volontaire, il convient de ne pas
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La mosquée de Bab-el-Djazira et la rue El Bechir (d'après une aquarelle de Ch. Lallemand).
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