le village de Hoàng-mai qui a pour spécialité de fabriquer des cercueils ; on laisse à droite le village de Tu ong-Mai, dont les gens sont conducteurs de brouettes et on arrive à Gip-Luc.
L'étain est acheté en lingots au prix de 140. 00 le picul (nov. 1917) ; il est fondu et coulé 6n lames minces dans des moules spéciaux; les moules sont cons- titués par deux tuiles, un peu plus fortes en surface et en épaisseur que la tuile annamite. Une des deux tuiles est munie d'un très petit rebord ; une légère dépression formant goulet ménage l'entrée de l'étain. Les tuiles sont soigneuse- ment garnies de papier annamite et mises à sécher avant l'emploi.
Les plaques d'étain obtenues sont découpées en lamelles de 0 m. 055 x 0m. 022.
Le travail commence avec 100 de ces lamelles empilées. L'atelier se compose de 3, 4 ou 5 ouvriers frappeurs, accroupis à terre et dont l'établi est constitué par une large pierre de calcaire dur encastrée dans le sol.
L'atelier est disposé sur une ligne, face au jour.
L'ouvrier tient son paquet de feuilles d'étain, posé sur la pierre, avec les doigts de la main gauche qui assurent l'ajustage des feuilles et frappe à grands coups mesurés. Le marteau dont il se sert est de forme carrée très ordinaire ; son poids est d'environ 1 kilog.
A chaque surface correspond un certain nombre de coups de marteau ; on devine une cadence immuable ; ces coups sont appliqués avec une grande préci- sion. Après chaque série de coups frappés, l'ouvrier replace ses feuilles, comme s'il coupait en jouant aux cartes.
Le travail de battage se continue pendant des journées et même, on peut dire, des semaines. Il faut, paraît-il, 15 jours à 5 ouvriers pour finir un lot de 10.000 feuilles. Le paquet de 100 lamelles est, en effet, successivement augmenté jusqu'au chiffre de 10.000. Les feuilles terminées mesurent alors 0 m. 54 x 0 m. 19.
Les ouvriers travaillent de nuit et les femmes décollent les feuilles au jour.
Ce travail doit exiger une grande dextérité, car les hommes se déclarent inca- pables de la mener à bien. Arrivée à une certaine épaisseur, l'opération du battage exige des précautions spéciales ; la frappe se fait entre des cartons et les feuilles d'étain sont enduites d'une poudre impalpable produite par la pierre « thach-lanh » (talc).
Les 10.000 feuilles se vendent 22 $00 aux fabricants d'objets votifs qui viennent s'approvisionner par 100 ou par 1.000 feuilles. Six ateliers fonctionnent au village de Giap-Luc.
L'industrie est venue de Chine, il y a fort longtemps ; mais les Chinois n'ont pas dévoilé tous les secrets de leur industrie ; ils savent fabriquer des feuilles d'étain qui sont brillantes et se vendent bien, tandis que les Annamites en sont toujours aux feuilles ternes qui se vendent mal.
lis me demandent un procédé, un « cai-thuoc», pour faire briller leurs feuilles. Il est bien probable que ce défaut provient de la mauvaise qualité de l'étain employé.
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