JNTO 73 — JUILLET 1907 JOURNAL D'AGRICULTURE TROPICALE 22L
je puis en parler, car je l'ai vue, j'ai con-
sommé son raisin sur place. J'en ai même
fait transporter une treille au poste des
Douanes du Vieux Port. En effet, habitant
de la Basse-Terre pendant deux ans, je
suis allé aux Saintes une demi-douzaine
de fois au moins. Les raisins, très connus
à la Basse-Terre, n'y sont même pas d'un
prix fou, étant donnée la précieuse frian-
dise qu'ils constituent pour l'Européen sous
les tropiques : 4 à 5 fr. le kg. Je parle, il est
vrai, d'il y a quinze ans.
La vigne se cultivait bien, comme l'in-
dique M. S. DE PUYnEREAU, en « berceaux ».
Ces « berceaux » étaient des carrés de
2 mètres au moins de côté, 4 ou 5 au plus,
formés par 4, 7 ou 8 forts poteaux de
2m;50 environ de haut. Les ceps se plan-
taient au pied, aux angles de préférence,
quelquefois aussi - sur les côtés, quand les
carrés étaient grands et les poteaux nom-
breux.
À 2 mètres environ de hauteur était
palissée, avec des bambous refendus, une
traverse horizontale destinée à donner
appui aux sarments pour former le « ber-
ceau » sous lequel doivent pendre, pour
se bien développer, les grappes de raisins.
Jusqu'ici rien que d'assez ordinaire, mais
la partie originale de l'installation était
celle-ci : tout autour du plafond à raisin,
décrit ci-dessus, courait une galerie en
bois, faite soit de douves de tonneaux, soit
de bonnes planches, solidement clouées et
bien jointes contre le haut des montants et
en faisant le tour complet.
Cette galerie, entourant le plafond du
berceau, descendait et montait de 40, 50,
60 centimètres (plus ou moins selon la
dimension du carré) au-dessous et au-dessus
de ce plafond, qui occupait donc le milieu,
en hauteur, de la galerie.
Le but de cet arrangement est de mettre
feuilles et fleurs à l'abri des vents du
large qui, les Saintes étant de petites îles,
viennent de tous les côtés horizontalement
et sont des plus nuisibles à la végétation
délicate de la vigne.
Derrière cet abri, la floraison, la fécon-
dation, la maturation s'opèrent tranquille-
ment.
Le résultat est magnifique : des grappes
énormes, bien formées, bien fournies,
abondantes; grains très gros, vert doré,
transparents ; raisin, en un mot, superbe.
et délicieux. La chair est ferme, et la saveur
ne le cède, certes, en rien, si elle ne lui -
est supérieure, à celle du meilleur muscat,
de France, car c'est un raisin muscat.
Je suis surpris que M. DE PRÉAUDET n'ait
point entendu parler de ce raisin à la
Basse Terre, car mes compatriotes de là-bas
sont très fiers de leur « raisin des Saintes »,
qui le mérite, au reste. Il ne se sera pas
trouvé là dans la saison propice.
J'ai parlé du Sénégal tout à l'heure à
propos du pêcher. J'en puis parler encore
à propos de raisin. Le chasselas y vient très
bien. Il donne de belles et bonnes grappes
dans les « patios », ou cours intérieures des
grandes maisons hispano-mauresques de
Saint-Louis. Il y en avait une treille magni-
fique dans le « patio » de la Recette générale
des Finances'.
Le trésorier d'alors, M. FRAPPIER, était
fort généreux de. son raisin, ce qui me
permet d'affirmer qu'il était excellent. Au
pied du cep s'étalait une corbeille de beaux
chrysanthèmes (très bien venus, ma foi,
quelques-uns même à grosse fleur), et de
pensées. -
Nous avons souvent songé à planter une
bordure de fraisiers autour de cette cor-
beille, mais l'instabilité coloniale nous en
empêcha. C'est dommage ! Je suis sûr qu'ils
eussent réussi.
E. MAINE,
'Ñ,.
Les plantations de thé du Caucase.
Statistique de M. WALTA.
Nous avons déjà parlé plusieurs fois, dans
ce Journal, des cultures de thé existant au
Caucase russe. M. V. WALTA leur consacre
un article très documenté, d'une vingtaine
de pages, dans le « Tropenpflanzer » de
décembre 1906. Il en fait l'historique, -
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