N° 140—FÉVRIER 1913 JOURNAL D'AGRICULTURE TROPICALE 41
Le sirop de Sorgho
Par M. H. JUMELLE
Le « J. d'A. T. », dans son numéro de
décembre dernier, citait l'opinion émise par
M. PRINSEN GEERLIGS, au dernier Congrès
de Chimie appliquée tenu à New-York,
au sujet de la fabrication du sucre de maïs.
M. PRINSEN GEERLIGS n'encourage pas
cetle industrie, car, dit-il, le jus des tiges
de maïs contient, en plus du saccharose,
une forte proportion de gommes et d'ami-
don, et l'extraction du sucre des masses
cuites est très difficile. Rappelons à ce
sujet que, depuis quelque temps déjà, on
est arrivé à la même conclusion aux Etats-
Unis pour la préparation du sucre de sor-
gho. Les tiges de sorgho contiendraient
trop de sucre réducteur. Ces tiges, toute-
fois, sont aujourd'hui utilisées pour la
fabrication d'un sirop, qui est alors précisé-
ment recherché à cause de la saveur spé-
ciale due aux matières étrangères qui ac-
compagnent le saccharose. Et M. RAGH
BRYAN, dernièrement, dans un document
publié parle Département de l'Agriculture
(Sorghum Sirup Manufacture), à" fait l'his-
toire de ce sirop de sorgho, que nous trou-
vons résumée dans la « Sucrerie indigèrfe
et coloniale ».
Il ne faut, d'ailleurs, pas confondre le
sirop de sorgho avec la mélasse de sorgho ;
le sirop est le vesou concentré, avec ou sans
addition de matières clarifiantes, et la mé-
lasse est le sirop obtenu après le turbinage
du sucre de sorgho.
Il est intéressant de donner la richesse
saccharine pour 100 des tiges d'une variété
de sorgho, à divers moments du dévelop-
pement :
SUCRES
SACCHAROSE REDUCTEURS
Apparition des panicules 1,76 4,29
Epanouissement des panicules. 3,51 4,50
Floraison comptète. 5,13 4,15
Grains à l'état laiteux. 7,38 3.86
Grains commençant à s'affermir. 8,95 3,19
Grains fermes. 10,66 2,35
Grains durs 11,69 1,81
Pour la fabrication du sirop, c'est donc
au moment où la graine commence à s'af-
fermir que la tige est particulièrement pro-
pre à être traitée. On ne doit pas la broyer
plus de deux jours après la récolte.
D'après M. BRYAN, on peut admettre
comme rendement moyen de la plante par
hectare 22 t. La quantité de sirop obtenue
varie naturellement avec les procédés de
fabrication, ainsi qu'avec l'état de maturité
et avec la variété du sorgho. Avec un mou-
lin à trois cylindres, une tonne de tiges
(sans les panicules) donne 350 à 600 kg.
de jus et 40 à 150 kg. de sirop achevé,
selon la richesse du jus. Un hectare de
sorgho donnera, en d'autres termes, 270 à
à 1.350 litres de sirop, et on peut consi-
dérer, comme moyenne, 450 à 675 litres.
M. RAGH BRYAN cite de nombreuses ana-
lyses de variétés, parmi lesquelles nous
relevons celles-ci :
SUCRE TOTAL BAUlIIÉ- SACCHAROSE RÉDUCTEURS
- - - -
La Collier 1 9 13°7 18,39°/o Ô,61°/0
Orange. 17,67 12°7 15,53 2,14
Ked Amber.. 8,20 603 1,88 6,32
Id. 13,32 902 0,75 12,37
Les variations peuvent, on le voit, être
très grandes; il faut donc bien, dans ces
conditions, remarquer que les applications
pessimistes sur les possibilités- d'extraction.
du sucre peuvent être vraies pour- un grand
nombre, et peut-être pour la plupart des
variétés, mais cependant aussi ne pas s'ap-
pliquer aussi juslement à quelques-unes.
Nous avons entendu parler de projets d'ex-
traction du sucre de sorgho en Tunisie, et
c'est pourquoi nous croyons utile de signa-
ler l'opinion qui a cours sur ce sujet aux
États-Unis.
On ne saurait trop recommander aux
planteurs-fabricants de bien commencer
par s'assurer que la variété de sorgho choi-
sie est de celles, plutôt rares, dont la tige
