N°7— JANV. 1902 JOURNAL D'AGRICULTURE TROPICALE 17
Qu'il s'agisse de caoutchouc ou de camphre,
deux tendances se dessinent nettement :
MM. TRABUT, CORNU, CHEVAUER (et, par sa bou-
che, MM. WARBURG et SCHWEINFURTH) incriminent
l'espèce, la variété botanique, la race, tandis que
MM. CH. RIVIÈRE et HILGARD voient, dans l'impro-
ductivité industrielle des caoutchoutiers et cam-
phriers d'Alger et de Californie, un effet du cli-
mat. M. VAN ROMBURGH, chef de la station agro-
nomique du Jardin de Buitenzorg, dans sa réponse
à notre questionnaire d'août, insérée plus loin,
se range du côté des deux derniers savants et ap-
porte comme preuve un fait nouveau eoncernant
le Mascarenhasia elastica : cet arbre à caoutchouc
de Dar-es-Salam, introduit à Java, n'y produit
seulement pas de latex, pareil en ceci aux Ficus
elastica examinés par M. HILGARD en Californie.
On peut opposer à M. VAN ROMBURGH la même
objection que les savants cités plus haut font à
propos du Ficus elastica et du camphrier : rien ne
prouve que l'on n'ait affaire à des variétés ou races
différentes, malgré l'absence de caractères exté-
rieurs bien saillants. Les descriptions mêmes des
auteurs allemands, citées par M. VAN ROMBURGH,
signalent que, dans sa patrie, le Mascarenhasia
elastica se présente sous un certain nombre de
formes dont la valeur industrielle n'a d'ailleurs fait
l'objet d'aucune étude comparative.
Quoi qu'il en soit, la discussion de la question
primordiale qui est au fond de toutes les notes et
communications énurpérées, menace de s'éterniser
si l'on ne se décide pas à quelques expériences
directes d'expatriation dont nous avons défini les
conditions avec M. CH. RIVIÈRE, dans notre article
du mois d'août 1901 ; elles nous apparaissent abso-
lument indispensables, particulièrement dans l'in-
térêt des planteurs qui se proposent de cultiver,
dans un but industriel, le Ficus elastica.
L'échange, base des expériences à faire, pour-
rait avoir lieu utilement entre Algèr d'urie part et
Buitenzorg, la Réunion ou le Caire d'autre part ;
peut-être même suffirait-il de procéder à l'échange,
plus faaile, entre Alger et Paierme ; toutefois, avant
de s'arrêter à cette dernière ville, il serait bon de
contrôler l'origine de l'information concernant
l'existence de caoutchouc dans les Ficus elastica
de Paierme ; M. TRABUT nous obligerait beaucoup
en nous fixant à cet égard ; il serait même préfé-
rable de se procurer un échantillon du caeutchouc
en question, afin de pouvoir le faire apprécier par
les hommes du métier, comme nous l'avons fait
pour le caoutchouc de Ficus de la Réunion (voir
le « Journal d'Agriculture Tropicale » de novem-
bre 1901).
Voici les passages essentiels de la lettre de
M. TRABUT (datée du 3 janvier,) :
Lettre de M. le professeur Trabut. —
« Je vous adresse deux rameaux de Cam-
phrier. L'un appartient à une espèce ne con-
tenant pas trace de camphre; c'est le Cam-
phora inUllcta, déjà signalé au Jardin d'Al-
ger par M. HARDY. L'autre est le vrai cam-
phrier, dont les ramilles donnent de o,5 à
1 o/o de camphre, quand on les chauffe un
moment à la vapeur. Les deux sont très
voisines.
« Si M. RIVIÈRE n'a pas trouvé du cam-
phre dans les camphriers d'Algérie, c'est
qu'il n'a pas expérimenté sur le Camphora
ofjicinalis vrai.
« Pour le caoutchouc du Ficus elastica,
c'est la même chose. Ce printemps, avec
M. SCHWEINFURTH, j'ai retiré de faibles quan-
tités de latex de quelques Ficus elastica vrais;
ce latex, par simple dessiccation, devenait
un caoutchouc paraissant de bonne qualité;
je reprendrai cette question et vous verrez
alors qu'ici, comme en Egypte, le Ficus
elastica produit du caoutchouc; il en pro-
duit aussi à Palerme.
« Le Ficus macrophyl/a et le F. magno-
lioides ne donnent par contre qu'une ma-
tière résineuse; mais tel est leur cas sous
tous les climats. Ce sont des espèces diffé-
rentes du F. elastica, producteur de caout-
chouc. »
Les Mascarenhasia elastica de Buiten-
zorg et les Ficus elastica d'Alger (Extrait
de la note de M. van Romburgh, parue dans
le numéro d'octobre-novembre du « Teys-
mannia », année 1901). — « C'est en 1899
que. le Jardin de Buitenzorg reçut des graines
de Mascarenhasia elastica, provenant du
Jardin de Dar-es-Salam (Afrique allemande
de l'Est). Dès Je premier âge des plantes
qui en résultèrent, je fus frappé par l'ab-
sence de caoutchouc dans leurs tissus;
j'en arrivai à me demander s'il n'y avait pas
eu erreur d'étiquetage. Cependant, il y a
quelques mois, les plus avancés de nos su-
jets ont fleuri et fructifié, ayant 3m à 3"4 de
haut et II à 13 cm. de circonférence à la
base. Le Dr VALETON, botaniste attaché à la
VIIE division du Jardin de Buitenzorg, put
ainsi reprendre la détermination de l'es-
pèce. et la reconnut identique au Masca-
renhasia elastica K. SCHUI. Les plantes ne
