Titre : Les Annales coloniales : organe de la "France coloniale moderne" / directeur : Marcel Ruedel
Auteur : France coloniale moderne. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1937-07-23
Contributeur : Ruedel, Marcel. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32693410p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 23 juillet 1937 23 juillet 1937
Description : 1937/07/23 (A38,N40). 1937/07/23 (A38,N40).
Description : Collection numérique : Bibliothèque Francophone... Collection numérique : Bibliothèque Francophone Numérique
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Description : Appartient à l’ensemble documentaire : RfnHisg1 Appartient à l’ensemble documentaire : RfnHisg1
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62654965
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-LC12-252
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 31/01/2013
3S* ANNEE. ~N'49.
-VENDREDI (13 h. 30) 23 JUILLET 1937.
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Les Annales CiDlcniaies
Fondateur : Marcel RUEDEL
Directeur : Raoul MONMARSON
ABONN EB ERTS
avec la Revus illustré*:
Dm '«'Ntii SIM*
France et
Colonies. 180» 100» M*
Etranger. 240a 125 » M »
Le Numéro 50 cutom
On s'abonne sans traII dans
tous les bureaux de poste.
Des dépotés jom fes colonies
-.
On peut être partisan ou adversaire- du
régime parlementaire. Le fait est qu'il est.
Tout député défend les intérêts de sa cir-
conscription auprès du gouvernement. Le
gouvernement dépend du député dans la
mesure où il a besoin de son vote, où l'ac-
tion de ce député peut s'exercer pour ou
contre lui.
Ne pas avoir de député, en régime parle-
mentaire, c'est donc pour: une région de
France être « infériorisée » par rapport aux
autres, c'est être désarmée dans la. lutte
autour du budget, donc dans la lutte pour
la vie.
Or les colonies sont la France. Officiel-,
lement, elles constituent la France d'outre-
mer. Puisque les Français d'outre-naer sont
plus loin du gouvernement que ceux de la
métropole ils ont, plus que ces derniers,
besoin d'être efficacement défendus. Ils
n'ont pas la ressource, comme le citoyen de
Tours, de Lyon ou de Marseil'e, de venir en
quelques heures à Paris plaider leur cause,
auprès des Pouvoirs publics. Il faut donc
encore plus que les autres, qu'ils aient leurs
députés.
"ë' "*** -~— - - .¡.r:.
Aujourd'hui ne sont représentées au Par-
lement que les vieilles colonies : a députés
pour la Martinique, 2 pour la Guadeloupe,
2 pour la Réunion, i pour l'Inde, i pour la
Guyane, i pour le Sénégal, lpourla Cochin-
chine (nous ne parlons naturellement pas de
l'Algérie), soit dix députés pour quelques
milliers de kilomètres carrés. Les millions
de kilomètres carrés qui constituent le res-
tant de la France sont défendus par des
délégués élus, noyés dans le Conseil supé-
rieur des colonies.
Voilà ce qui explique que souvent les élec-
teurs aient choisi comme délégué des parle-
mentaires en exercice. C'est là une méthode
inadmissible. La colonie a droit à son repré-
sentant, elle a le droit de ne pas entrer
& la Chambre, de biais, par la porte basse.
J'ai dit que son éloignement était pour
elle une raison de plus pour posséder un
mandataire officièl qui soit sur le même
pied que les autres représentants, du pe-.:;"e
français. J'ajoute que les Français luttant
en territoires neufs, qui sont à l'aube de leur
avenir; pat besoin d'appui, plus que, ..lés
autres. Ils risquent plus, ils peinent plus, ils
jouent leur saqité, leur vie; iîé-créent de la
vie, de la richesse française ; travaillant
pour eux, ils font uj)gj..c^|^6^iii(iemment
nationale : ils créent la plus grande France.
Enfin, dernier argument, et qui a sa valeur
au moment où des appétits coloniaux s'ai,
guisent chez tous les peuples : le fait d'être
représenté à la Chambre, affirme vraiment
qu'un territoire est partie intégrante de la
France.
i
La thèse que je défends ici n'est pas nou-
velle.
Je n'ai pas l'intention de faire l'histoire
de la représentation coloniale. Mais je tiens
à souligner que cette représentation est
conforme à la doctrine républicaine de
toujours.
Par décret des 22-23 août 1792, l'Assem-
blée législative attribua 34 députés aux colo-
nies dans la Convention : « Considérant,
déclara-t-elle en des termes que nous ferions
bien de reprendre littéralement pour notre
compte, considérant que les colonies font
partie intégrante de l'Empire français, que
tous les citoyens qui les habitent sont comme
ceux de la métropole appelés à la formation
jde la Convention nationale. »
ARTICLE 1 cr, — Les colonies et posses-
sions extérieures de l'Empire français sont
invités à concourir à la formation de la
Convention nationale de la manière et dans
les proportions suivantes : 34 députés. Le
nombre des suppléants sera la moitié de
celui des députés. Immédiatement après
la publication du présent acte, tous les
citoyens libres, de quelque état, condition ou
couleur qu'ils soient, domiciliés depuis un
an dans la colonie, à l'exception de ceux qui
sont en état de domesticité, se réuniront
pour procéder à l'élection, soit qu'ils soient
convoqués, ou non par le fonctionnaire public
déterminé par la loi. »
Plus tard, l'article 6 du Titre I de la
Constitution de l'an III-proclame : les colo-
nies- françaises sont partie intégrante de la
République et sont soumises' à la même loi
constitutionnelle. D'après l'article 7, elles
sont divisées en départements On leur attri-
bue un nombre-de députés constamment tenu
en rapport avec la population.
La représentation: coloniale, supprimée
sous l'Empire, la Restauration et Louis Phi-
lippe, fut rétablie, en 1843, par le gouver-
nement provisoire et supprimée à nouveau
après le coup d'état, de 1851 pour être
rétablie par la Troisième République par les
décrets-de 1870-1871. Depuis la loi du
28 juillet 1881, qui a donné un député à la
Cochinchine, c'est-à-dire depuis cinquantc-
,six ans, l'Empire français a pris la prodt-
gieuse extension qu'on-sait et il n'a pas un
représentant de plus!
( ;
C'est assez dire que je souhaite le vote
par la: Chambre, de la loi attribuant un dé-
puté à Madagascar et un député à la
Nouvelle Calédbnie.
Déjà l'année dernière la Commission du
Suffrage universel avait eu à discuter d'une
proposition de loi Candace donnant un
député à chacune des deux îles.
C'étaitau cours de la séance du 18 mars
19,16., J'appuyai cette proposition..J'en.dis
l'intérêt. Mais, je fis remarquer que d'autres
citoyens français, dans le Pacifique par
exemple, avaient droit a une représentation
soit-d'un point de vue local, afin de mieux
défendre leurs intérêts spéciaux, soit du
point de vue national et international, du
fait de la situation de leur pays sur les
grandes voies mondiales, où il forme un
point, d'escale: pour les navires de guerre ou
de commerce, un centre de rayonnement fran-
çais dans un Océan qui tend à prendre, dans
la vit universelle, une place de plus en plus
grande.
- Je fis remarquer que si la Nouvelle Calé-
donie avait droit a être représenté au. Par-
lement, il en allait de même pour les Eta-
blissements français d'Océanie.
Le; 27 mai suivant, je recevais ce télé-
gramme de Noyjnéa. ;
-<->. - V'^Goilsefl-Général se réjouit vos sentiments
représentation parlementaire tioorielie.ce..
léuoiiie. Remercie initiative et efforts, stol),
Au .nom 17.000 concitoyens, race blanche fi-
dèlement et respectueusement attachés mère
patrie nous demandons nous continuer ap-
pui pour faire aboutir représentation dès ou-
verture Chambre afin que population puisse
procéder élections le plus tôt possible, stop.
Vous signalons inconvénient lier sort Calé-
donie à Tahiti suivant suggestion député
Fribourg en raison éloignement considérable
des deux colonies treize jours mer et surtout
différence peuplement. intérêt ef organisa-
tion administrative et politique, stop. Nous
permettons vous rappeler. Calédonie déjà
parfaitement et légalement organisée matiè-
re électorale pour procéder scrutin immé-
diatement. stop Assurant mêmes charges,
remplissant mêmes devoir que concitoyens
métropole, demandons simplement mêmes
droits.
Revercé, Président du Conseil général
Le président du Conseil général avait été
mal informé de ma thèse. J'avais défendu le
principe de la représentation de toutes les
parties de l'Empire, en général, le principe
de la représentation des « départements
de la République *, comme dit la Constitu-
tion de l'an III ; donc, en particulier, la
représentation de la Nouvelle Calédonie
d'une part, des Etablissements d'Océanie
d'autre part.
Tous les Français de la métropole, ou
d'outre-mer, égaqx en droits, doivent pou-
voir être entendus par l'organe de leurs
représentants, dans l'enceinte où sont votées
les lois de la France, où s'explique, le gou-
vernement de la France. Qu'on donne donc
aujourd'hui des représentants à la Nouvelle
Calédonie et à Madagascar et, demain, au
reste des citoyens de l'Empire français.
André Fribourg,
Ancien vice-président de la Commission
, des Alfaires étrangères
de la Chambre des Députés,
ancien membre du Conseil supérieur
des Colonies.
An Ministère des Colonies
Le nouveau sous-directeur
des services militaires
Par décret en date du 19 juillet 1937, le
colonel d'infanterie coloniale breveté d'état-
major Edgard Cornet, a été nommé sous-direc-
teur à la direction des services militaires du
ministère des Colonies.
—!— > <
Au Ministère
des Affaires étrangères
Une conférence avec M. Marius Moutet
M. Yvon Delbos, ministre des Affaires
étrangères; a conféré avant-hier avec MM. Ma-
rius Moutet, ministre, des Colonies, et Mistler,
président de la commission des Affaires étran-
gères de la Chambre.
MM. Delbos et Moutet ont examiné cer-
taines importantes question qui intéressait à des:
titres différents le rai Y et les Colonies,
notamment le problème de la sécurité des com- l
munications avec ia France d outre-mer et 'la I
situation en Extrême-Orient.
le barrage un Day
al Tonkin a été Inauguré
Le 7 juillet, M. Châtel, Résident supérieur
au Tonkin, représentant le Gouverneur général
Brévié; a inauguré le barrage du Day, qui, avec
ses 7 portes de 34 mètres, est le plus considé-
rable au monde des ouvrages de cette catégorie,
dite « à toit ».
Ce barrage permet dès à présent l'assèche-
ment du. territoire dit casier Hadong-Phuly,
d'une superficie de 50.000 hectares, qui était
auparavant inondé pendant la saison des pluies,
et donnera à l'avenir une seconde récolte an-
nuelle évaluée à un million de quintaux - de -- riz.
Cette belle réalisation technique permettra de
décongestionner le delta surpeuplé du Tonkin,
et d'assurer l'existence de plus de 300.000 in-
dividus.
Des aménagements ultérieurs complémentaires
au barrage du Dày, et notamment la construction
d'un barrage sur le canal de Nam-Ding permet-
tront ultérieurement - l'aménagement des ca-
siers de Nam-Dinh-Nord, et casier de Nho-
Quan, qui représentent une superficie de 75.000
et 15.000 hectares.
Le commerce allemand
1 en Extrême-Orient
A
VANT la guerre, l'Alle-
magne avait acquis en
-Extrême-Orient une si.
tuation économique de
premier ordre. Elle oc-
cupait en Chine des
territoires riches qui
pouvaient servir de base à une activité commer-
ciale considérable, en même temps qu'elle portait
ses efforts sur les îles et les archipels du Pacifi-
que.
La guerre avait ruiné ces entreprises. Mais la
tenacité allemande ne tint pas cette défaite
pour définitive et aujourd'hui une enquête menée
par les soins du gouvernement japonais nous ap.
prend que le Reich est en train de reconquérir ra-
pidement la position économique et commerciale
qu'elle avait perdue au lendemain de la défaite.
Un journal américain de Tokio, le Japon Adver-
tiser nous donne le résumé de cette enquête.
Renonçant aux méthodes d'avant-guerre, l'Al-
lemagne, nous dit cet organe, a inauguré en Ex-
trême-Orient une ère de négociations habiles et
amicales. Nous pourrions, de notre côté, ajouter
qu'elle n'a pas réservé cette tactique à cette
partie du monde. Elle l'applique avec succès dans
les Balkans et dans le Proche-Orient sinon ail-
leurs. Quoi qu'il en soit, elle lui a permis d'éta-
blir de nouveau son emprise sur les.. riVes du Pa-
cifique. Les représentants du Reich s'attachent
en effet à convaincre les nations asiatiques qui
tendent à l'indépendance industrielle que celui-ci
est leur ami politique naturel et leur allié écono.
mique tout indiqué. Ils évitent tout heurt, tout
froissement et mettent leurs soins à ménager les
sentiments de chaque pays.
Cette activité se heurte forcément à celle des
puissantes sociétés américaines comme Ford, Ge-
neral Motors, etc., qui occupent des situations
fort importantes. La lutte contre elles est diffi.
cile. Mais l'Allemagne, pour les faire reculer, si-
non pour les vaincre, a adopté une méthode in-
génieuse. Les investissements des sociétés améri-
caines sont complètement entre les mains de
leurs nationaux et elles sont exclusivement diri-
gées par eux. Les affaires que créent les Alle-
mands sont au contraire des entreprises mixtes
fondées avec le concours des Japonais, des Chi-
nois, des habitants des Indes Néerlandaises. Les
Allemands apportent l'outillage, les brevets, l'or-
ganisation technique, alors que leurs associés
asiatiques fournissent le terrain, la main-d'œuvre
et le capital. Mais les actions se répartissent de
telle façon que la prépondérance des citoyens du
Reich est assurée et que le contrôle de l'affaire
leur appartient. « Grâce à ce système, écrit le
Japon Advertiser, le manque de capitaux, loin
de gêner la cause allemande, la sert doublement,
par là fourniture des marchandises qu'elle ne peut
pas-placer ailleurs et par l'expansior. de ses mé-
thodes scientifiques, donc de son influence. »
Quelques chiffres permettent de marquer les
progrès de l'expansion allemande. Pendant le pre-
mier" semestre de 1934, les exportations germa-
niques "en Chine s'élevaient à 37.000.OUO de
reichmarks ; elles étaient passées à 65.000.000
pour la période correspondante de 1936. A
l'heure présente, on estime que dans les impor-
tations totales en Chine, la part de l'Allemagne
est de 16 alors que deux ans auparavant elle
était de 11 L'Allemagne vient donc au troi-
sième rang après les Etats-Unis et le Japon. Elle
se place immédiatement avant la Grande-Breta-
gne. Ainsi elle reprend peu à peu dans le Paci-
fique sa position économique d'avant-guerre. Ce
n'est pas, il est vrai, sur ce seul point du globe
que nous avons à constater le redressement de sa
puissance économique et politique.
Henry Fontanier.
Ancien député.
Agrégé de l'Université
— )
Les mesures de redressement financier
sont applicables à l'Algérie
Un décret du 22 juillet, étend à l'Algérie
les modalités d'application des mesures de re-
dressement financier décidées en vertu des ré-
cents décrets-lois pris en Conseil des minis-
tres.
> -t» <:
| Un institut de recherches
sahariennes est créé à Alger
Par décret en date du 20 juillet 1937, il a
été créé un institut de recherches sahariennes
à l'Université d'Alger.
) e.. (
La France
devant le Siam
Une conférence à Bangkok
Lundi dernier, de 9 heures à 13 heures, a
eu lieu, au ministère des Affaires étrangères
du Siam, une première conférence entre la
délégation française, composée de MM. Geor-
ges Picot, chargé d'affaires; Eutrope. Rési-
dent supérieur du Laos; Prats, directeur des
douanes de l'Indochine ; Plion, consul de
France, d'une partJ et les ministres des Affai-
res étrangères, des, Finances et des Affaires
économiques du Siam; les princes Varu Vai-
dyakara et Viwat Bolbeare, conseillers dit gou-
vernement siamois, et Réève, conseiller des
douanes, d'autre part. I
SYMBOLES
,..C" Une manifestation :
, 1 manifestation <.f',~:
à Pondichéry
Le leader du mouvement ouvrier
de l'Inde française, Subbiah, est de retour
Par avion, Pondichéry, 11 juillet.
Dès que CI Bernardin de Saint-Pierre Il qui
a amené Subbiah de France dans la claire
après-midi du 6 juillet 1937, mouillait la ra-
de de Pondichéry, une émotion indescriptible
s'emparait de tous les cœurs de la population.
Les ouvriers des trois usines de Ponâtchi-
ry voulurent pour t'après-midi du 6 juillet
!937 prendre une demi-journée de congé de
leurs patrons pour aller saluer de bonne lieu-
re à la plage même de Pondichéry, le camara-
de Subbiah et l'amener en. procession.
Le Gouverneur Crocicchia donna l'ordre
formel aux patrons deStlsÍlles de ne pas doit-
ner, aux ouvriers, même tine heure de congé.
Il pensait certes, par ce moyen empêcher
toute manifestation. C'est là un calcul sour-
nois où le Gouverneur Crocicchia a pieu-
sement échoué.
De tous les coins du territoire de Pondi-
chéry, la foule affluait et à 17 heures on
comptait déjà une cinquantaine de milliers
de personnes sur la place DuPlei:rJ à proxi-
mité de la plage.
Le camarade Subbialt descendait avec du
tiLKSonnalilés qui sont allées le prendre à
bord. Des cris frénétiques de « Vive le ca-
marade Subbiah, vive le mouvement o!,-
vrier », retentirent longtemps dans l'assis-
tance.
Jamais dans les Annales de Pondichéryt
on voyait une foule aussi dense : fonction-
uaires commerçants, agriculteurs, ouvriers.
hommes et lemmes, tous y étaient représen-
tés et d'innombrables guirlandes mtourèn nt
le cou du camarade Subbiah à la place Du-
pleix d'où 011 allait CIl, procession au jardin
Calvi. Là, le Comité ouvrier de l'Inde 'rin-
çaise avait fait des arrangements spj.iaux
pour recevoir son président, absent de son
sein depuis trois mois.
Des centaines de volontaires assuraient ad-
mirablement avec leur uniforme impeccable,
le service d'ordre.
Les syndicats des usines Rodier, Savana,
la Fédération de la Jeunesse, la Salle de
lecture de Sri Ramakrishma ,les Associatiuns
des employés de commerce, des tisserands,
des agriculteurs, etc., adressèrent au cama.
rade Subbiah leurs souhaits de bienvenue.
Le président du Comité ouvrier de l'bzde
française doiiiiiiaiit toute l'émotion qtu l'étrei-
guait, remercia la foule des sentiments de
cordialité exprimés au notit de chaque grau-
pement.
Ati cours de son discours, il déclara notam-
ment :
honneur que vous me [ailes aujour-
u luu doit aller. tln grande partie aux mern.
uies du Comité" ouvrier de l'Inde française
qui puissamment ont facilité ma tâche eu
l'lance et qui e.-e IIIUIt absence, ont su main-
tenir parlllt vous cette' uuiuH si indispensable
et qui fait aujourd'hui notre ioie et notre
jorce communes.
,, a ia vente de mon départ pour ta France,
le gouverneur Crocicchia malgré les signa-
tures que j'ai apposées dans son cabinet et
en sa présence dans divers arbitrages entre
puhvns et ouvriers, m'a fait savoir que ie n'ai
aucune qualité pour me mêler de la question
ouvrière. Aujourd'hui, par votre présence ef-
licace et si nombreuse, vous donnez publique.
ment un démenti aux désagréables observa-
tions dun gouverneur qui, trahissant la con-
fiance de toute la population particulièrement
de la population ouvrière, se trouve tombé
sous la coupe d'une infdme coterie.
Durant mon séjour à Paris, j'ai étudié avec
grand intérêt les diverses questions sociales.
M. Savarinadin et moi, nous avons égale-
ment p-is la parole sur toutes les tribunes
qui nous ont été complaisamment ouvertes.
Les braves Français de France si sympa.
thiques pour notre cause s'étonnent des abus
qui se commettent si impunément dans l'Inde
française.
Je vous en prie : ne jugez pas la France
de Jaurès par ces certains fonctionnaires qui
vont chez nous pour nous. créer une vie d'en.
fer. Ce sont là des « parvenus. dont l'unique
désir est de ramasser toujours de l'argent
sans se soucier, des nobles principes de la
colonisation.
La manifestation d'aujourd'hui est une
grande leçon à la police ele l'Inde française
qui, à la différence de-la police de la Métro-
pole, croit qu'elle pourrait étouffer le mou-
vement ouvrier en semant la terreur parmi
la population par le fer et le sang.
Mais songez qu'au-dessus de tout il y a la
France toujours disposée à accueillir favora-
blement nos. doléances et aussi un ministre
(les Colonies qui répond à nos aspirations et
dont le nom seul est synonyme de droiture et
de probité et qui prend à cœur les affaires de
la colonie de l'Inde. »
Des salves d'applaudissements mirent fin
aux paroles du camarade Subbiah qui ren-
trait chez lui en procession vers 20 heures.
Nous avons publié cette correspondance
sans en modifier un mot. Nos lecteurs con-
naissent notre sentiment, exprimé il y a
deux ans lors de notre séjour dans l'Inde.
Le prain a germe. L'Inde, malgré le voyage
de M. Justin Godart, qui n'a pas porté re-
mède aux honteuses pratiques politiques,
et qui ne les a même pas condamnées.
demeure une terre de protestation fervente
dont. la France aura un jour à connaître
— et non dans les conditions où elle le
désirerait.
A un collaborateur du Petit Journal qui l'interrogeait, Marcel Sau-
vage, dont on sait qu'il fut en A.E.F. et qu'il vient de publier-un livre
sur l'Afrique noire, a déclaré :
Je l'ai écrit et répété dans des conférences : notre empire colonial est au bord
de l'abhne. Il y dérive depuis des années sans qu'aucun gouvernement ait tenté de
redresser une situation qui fait que nos possessions d'outre-mer sont guettées comme
des proies par nos ennemis et quelques-uns de nos bons amis. Mais il ne faut pas
accuser nos coloniaux à la légère. Ils ne sont pas les premiers coupables. Mais bien
de certains chefs irresponsables et incompétents de la métropole qui abandonnent
dans les lointaines solitudes des hommes sans prestige.
Nous ne connaissons pas M. Marcel Sauvage. Nous constatons seu-
lement que les journalistes indépendants, dont la tâche première est de
savoir voir, juger, exposer, hors de tout intérêt personnel, en témoins
impartiaux, s'accordent à reconnaître que si nous voulons conserver
l'Empire, il importe, de toute urgence, avec une passion et une grandeur
désintéressées, de le construire enfin 1
Bavant FEmrSMud
S. À. R. l'Emir Saoud, prince héritier du
u Royaume d'Arabie MOtJtenne H, qui a quitté
Paris hier. au soir a donné mercredi une récep-
tion, comme Elle en avait donné une, il y a
deux ans, en les Salons de l'Hôtel.Crillon.
Nous avons donc à nouveau dévisagé celui
qui portera demain, sans doute, sur ses épaules
le lourd fardeau d'une partie de l'Empire
arabe. Une société nombreuse se pressait autour
de ce prince héritier, — et pas seulement euro-
péenne. De S. E. Si-Kaddour ben Ghabrit à
M. Galandou Diouf, député du Sénégal, venu
dans le costume de ses pères, à de grandes nota-
bilités algériennes ou marocaines, nous avons
assisté à la jonction de ces éléments musulmans
naguère dispersés, et qui rejoignent aujourd'hui
les voies d'une haute, et' presque sacrée, colla-
boration. ",
La Grande-Bretagne a forgé des fers qui
pourraient fort bien demain la blesser. Dans ie
soin attentif qu'elle a pris d'organiser ses pro-
pres relais sur la route des Indes, elle n'a pas
toujours calculé qu'une grande idée suffit à
créer des peuples, et que ceux-ci édifient par la
suite très souvent de grandes nations. Le Hed-
iaz n'est très familier à l'Europe. Il est cepen-
dant le coffret qui' contient l'urne sacrée: la
Mecque. Il est la tene sainte. entre toutes, et
nom avons, il y a deux ans, donné par curiosité
le tableau de ce qu'élaient naguère, et à cette
époque, les liaisons DjeJdah-La Mecque. A
pas de géants, un grand Empire se constitue,
dont feu le colonel Lawrence découvrirait peut-
être avec effroi toute la puissance dont il dis-
posera demain.
m
* *
La haute silhouette de S.A.R. le prince héri-
iier nous attachait donc. En notre siècle d'ania-
gonismes, nous nous posions la question : pour
ou contre la Grande-Bretagne ? Pour ou contre
l'Europe ? On voulut bien nous assurer qu'il
n'en était point question, et qu'il n'y avait dam
la politique d'aujourdhui, comme il n'y aurait
dans celle de demain, ni « pour » ni « contre »,
mais des relations de bon voisinage, mais des
relations toutes de cordialité. Nous le croyons
aisément.
Mais qui peut désormais répondre de l'Eu-
rope, qui peut même faire fond sur sa politi-
que ? La question juive n'est-elle pas à nou-
veau, après des millénaires, posée, par le fait
que la Palestine Va permettre à deux races de
s'affronter et de se combattre ? 1
Ce sera peut-être pour notre génération un
amer privilège de mesurer le degré d'abaisse-
ment de l'Europe par rapport au degré d'éléva-
tion de l'Empire arabe.
La libre-pensée, qui a sans doute créé des in-
dividualités remarquables, favorisé des créations
miraculeuses dans tous les domaines de la re-
cherche et de l'esprit humain, s'avérera impuis-
sante: devant la pièce capitale de toute construc-
tion nationale : la religion. Nous avons détruit
nos Dieux, et critiquons ce qu'il en reste, tout
en en saccageant les ruines: La religion musul-
mane qui réunit de l'Iran au Sénégal, des Indes
au Maroc, un peuple innombrable, cherche ses
nommes maintenant qu'elle a réunit ses peuples.
S.A.R. l'Emir Saoud serait-Elle parmi ceux-
là P Le sourire énigmatique, la correction par-
laite, le regard net, et qui cherche à fasciner
autre chose que les froides politesses, ne nom
ont point permis de répondre encore à cette inter-
rogation.
>
VERS LA COLONISATION
Etablissement d'une colonie de peuplement
en Indochine
Le Résident de Yên-Bay envisage l'établis-
sement d'une colonie de peuplement à proxi-
mité de Nghia Lô, sur le territoire du village
de Phu Nham" où des terrains incultes se-
raient susceptibles d'être, mis en- valeur par
les Annamites des provinces surpeuplées du
delta.
L'Afrique du Nord
eonire la France
Par un hasard, sans doute dû à l'uniforme dû
générai Noguès, le Maroc est, de nos trois-ter-
ritoires nord-africains, le seul à ne pas besogner-
en ce moment ouvertement, contre la France.
Mais l'Algérie
Mais la Tunisie ?
Nous serons, encore une fois, pessimistes.. On
voudra bien convenir que, depuis une année, les
événements prévisibles que nous avons définis, à
longueur de journée depuis 1933, se réalisent
avec une netteté, une précision, une ampleur qui
effraient juaqu'aux inspirateurs, mêmes de'la pa-
nique. Ils n'imaginaient pas que le feu, allumé
par eux, dépasserait le but qu'ils lui avaient as*
signé. :'
Si l'Algérie, si la Tunisienne sont pas., d'ici
quelques semaines, matées par des hommes, elles
échapperont' à la France. Et l'on voudra bien
imaginer que dans la guerre mondiale qui s'en-
gage — '( fascisme » contre communisme —
l'Italie et l'A llemagne ne laisseront pas échap-
per l'occasion de diminuer ou d'abattre la
France.
*
* *
Nous admirons les bavards impénitents, so-
lennels phonographes qui, loin des travaux obs-
curs et du rôle effacé des penseurs, se prodi-
guent, jasent, gonflent le col et laissent tomber
leurs arrêts en se croyant quelqu'un. Nous admi-
rons de même les optimistes résotus, dont l'igno-
rance est si grande que les chefs politiques, liés
à eux par des pactes personnels dtentr' aide, ne
la décèlent point. Les torturés de l'ambition"
des honneurs et de la boutonnière nous retiennent
tout autant : c'est cette misère intellectuelle do-
rée qui est en train de faire crever la France
N'importe qui étant bon à n'importe quoi, et les
postes de direction ne devant être accordés
qu'aux coteries ajfiliées, on se soucie peu de la
Fronce. Contre la tradition, contre l'éternité
d'ime grande nation, l'étroite et brève existence
d'une personnalité humaine seule prévaut. Pé-
risse la France, pourvu que soit pleinement satis-
faite l'ardente ambition personnelle l
*
» »
C'est ainsi que l'Algérie et la Tunisie se
désagrègent avec une rapidité qui dépasse les
prévisions 1 A la faveur de l'idéalisme Front
populaire, abondant dans son sens alors qu'il
était incapable, par manque de lentes et longues
études, de déceler leur duplicité, les agitateurs
s'en sont donné à cœur-joie. Ils ont cànàtniït
leur propre situation sur la candeur, sur l'ardeur,
sur la passion de ceux qui ont cru en eux. Ils ont
une force, à l'instant où la Grande-Bretagne
perd, depuis quelques mois, son !n//uencC ~t
puissance dans le Proche-Orient, c'est :d~'êtrc)
appuyés par la lumineuse et ample ascension de
l'Empire arabe. La Méditerranée est en mtit.
che, contre l'Europe. La libération de l'Egypte,
les traités franco-syrien et franco-libanais, la ma-
ladresse de la Grande-Bretagne dans la ques-
tion de la Palestine, la surenchère démagogique
— vis-à-vis de l'indigène 1 — de la France en
Afrique du Nord, autant de gages mis entre les
pattes de quelques malins, gens du milieu, sou-
pies, arrogants, ambitieux, dont la syphilis politi-
que est telle qu'elle a contaminé même les cœurs
et les cerceaux acquis à la France.
*
* *
Nous avons maintenant fait notre deuil de la
générosité, et de la « collaboration ». Nous som-
mes dans la position des témoins qui savent la
catczirophe inévitable et prochaine. Notre seule
ressource sera, sans passion, et peut-être -nous
l'espérons — sans haine, de nous reporter à la
collection des Annales Coloniales et de montrer
aux responsables, dont le cœur est si léger et la
pensée si vide, tout le drame qu'ils ont, volon-
tairement, et au profit de leur pire ennemi le
fascisme — ils veulent bien tout au moins le pré-
tendre — déclenché sur la France afin qu'elle,
crève, et que sur ses ruines des Nations dirigées
et commandées puissent construire la puissance
d'une Europe nouvelle.
14 JUILLET, A TUNIS
.', par Pierre Le Verbe.
l, Depuis longtemps, nous suivons dans ces
colonnes l'évolution de la situation tuui.
sienne. Aussi objectivement que passible,
nous avons toujours rendu compte des infor-
mations que nous recevions, nous défendant
de tout parti pris, soulignant seulement, lors-
que les faits étaient par @ trop nets, n.ïiie in-
quiétude devant une expérience qui apparais-
sait bien hazardeuse.
Maintenant, on ne saurait se leurrer phi!!
longtemps': l'expérience démagogique de li
béralisme aveugle qui vient d'être tentée dans
la Régence a fait faillite. Et la France avec
elle. Il faut le dire : nous en sommes au stade
de l'insurrection.
Jusqu'alors, dans une certaine mesure, la
propagande antifrançaise se maquillait; elle
se cachait derrière le Front populaire. Les
émeutes que. nous dûmes enregistrer pou-
vaient, à-la rigueur, passer pour des convul-
sions sociales avec les grèves pour prétextes.
Maintenant le masque est définitivement jeté:
les nationalistes réclament hautement J'indé-
pendance, prêchent la xénophobie; plus n'est
besoin de grèves pour faire naître l'émeute ;
elle naît maintenant spontanément.
* *
C'est ce qui est arrivé le 14 juillet. Peu:
une fête nationale, ce fut bien une fêts natio-
nale : celle des nationalistes tunisiens. Les
Français en ont fait les frais.
Il n'est pas exagéré de dire que, le 14 et le
15, Tunis a connu deux journées d'émeute
faites de cortèe-es chantant l'Internationale et
criant « Vive l'Indépendance! », « A bas les
Français! x, de bagarres, d'agressions, de
mises à sac. Un commandant qui revenait de
la revue, au cours de laquelle il avait été dé-
coré, a vu sa voiture arrêtée, sa famille me-
nacée; il dut dégainer pour faire fa-e aux
manifestants. Des femmes furent assail.ies
aux terrasses des cafés, lapidées aux balcons
des restaurants. La permanence du P.P.F.
fut saccagée; des soldats isolés roués t'e
coups.
Ce n'était pas une émeute, c'était une insm-
rection. Et cela dura tard dans la nuit pour
recommencer le lendemain. On compte une
soixantaine, de blessés.
Epilogue : un communiqué de la Rési-
dence, qui regrette ces « incidents » et inter-
dit toutes manifestations politiques (le t*. P. F.
avant voulu contre- manifester devant les dé-
combres de sa permanence).
* *
*
Les raisons de tout cela? Notre faiblesse,
qui permet la propagande communiste et. sur-
tout, les excitations de la propagande natio-
naliste.
Sans remonter bien loin, seulement au dé*
but du mois, récapitulons :
Un journal destourien, Tunis-nationaliste,
dans une déclaration, « conteste Vautorité
française dans les affaires intérieures du
pays Il et préconise « la réalisation PAR TOUS
LES- MOYENS de l'indépendance complète de la
Tunisie x.
Devant une telle profession de foi. sous le
-VENDREDI (13 h. 30) 23 JUILLET 1937.
J06HNAL SEShOttOTIMCa 1-
Riiéftton &A dmsnisirotin:
-le:",","
", - PARIS -m •
TÉL. « unemalmu 7MI.
.- (t.,.)
Les Annales CiDlcniaies
Fondateur : Marcel RUEDEL
Directeur : Raoul MONMARSON
ABONN EB ERTS
avec la Revus illustré*:
Dm '«'Ntii SIM*
France et
Colonies. 180» 100» M*
Etranger. 240a 125 » M »
Le Numéro 50 cutom
On s'abonne sans traII dans
tous les bureaux de poste.
Des dépotés jom fes colonies
-.
On peut être partisan ou adversaire- du
régime parlementaire. Le fait est qu'il est.
Tout député défend les intérêts de sa cir-
conscription auprès du gouvernement. Le
gouvernement dépend du député dans la
mesure où il a besoin de son vote, où l'ac-
tion de ce député peut s'exercer pour ou
contre lui.
Ne pas avoir de député, en régime parle-
mentaire, c'est donc pour: une région de
France être « infériorisée » par rapport aux
autres, c'est être désarmée dans la. lutte
autour du budget, donc dans la lutte pour
la vie.
Or les colonies sont la France. Officiel-,
lement, elles constituent la France d'outre-
mer. Puisque les Français d'outre-naer sont
plus loin du gouvernement que ceux de la
métropole ils ont, plus que ces derniers,
besoin d'être efficacement défendus. Ils
n'ont pas la ressource, comme le citoyen de
Tours, de Lyon ou de Marseil'e, de venir en
quelques heures à Paris plaider leur cause,
auprès des Pouvoirs publics. Il faut donc
encore plus que les autres, qu'ils aient leurs
députés.
"ë' "*** -~— - - .¡.r:.
Aujourd'hui ne sont représentées au Par-
lement que les vieilles colonies : a députés
pour la Martinique, 2 pour la Guadeloupe,
2 pour la Réunion, i pour l'Inde, i pour la
Guyane, i pour le Sénégal, lpourla Cochin-
chine (nous ne parlons naturellement pas de
l'Algérie), soit dix députés pour quelques
milliers de kilomètres carrés. Les millions
de kilomètres carrés qui constituent le res-
tant de la France sont défendus par des
délégués élus, noyés dans le Conseil supé-
rieur des colonies.
Voilà ce qui explique que souvent les élec-
teurs aient choisi comme délégué des parle-
mentaires en exercice. C'est là une méthode
inadmissible. La colonie a droit à son repré-
sentant, elle a le droit de ne pas entrer
& la Chambre, de biais, par la porte basse.
J'ai dit que son éloignement était pour
elle une raison de plus pour posséder un
mandataire officièl qui soit sur le même
pied que les autres représentants, du pe-.:;"e
français. J'ajoute que les Français luttant
en territoires neufs, qui sont à l'aube de leur
avenir; pat besoin d'appui, plus que, ..lés
autres. Ils risquent plus, ils peinent plus, ils
jouent leur saqité, leur vie; iîé-créent de la
vie, de la richesse française ; travaillant
pour eux, ils font uj)gj..c^|^6^iii(iemment
nationale : ils créent la plus grande France.
Enfin, dernier argument, et qui a sa valeur
au moment où des appétits coloniaux s'ai,
guisent chez tous les peuples : le fait d'être
représenté à la Chambre, affirme vraiment
qu'un territoire est partie intégrante de la
France.
i
La thèse que je défends ici n'est pas nou-
velle.
Je n'ai pas l'intention de faire l'histoire
de la représentation coloniale. Mais je tiens
à souligner que cette représentation est
conforme à la doctrine républicaine de
toujours.
Par décret des 22-23 août 1792, l'Assem-
blée législative attribua 34 députés aux colo-
nies dans la Convention : « Considérant,
déclara-t-elle en des termes que nous ferions
bien de reprendre littéralement pour notre
compte, considérant que les colonies font
partie intégrante de l'Empire français, que
tous les citoyens qui les habitent sont comme
ceux de la métropole appelés à la formation
jde la Convention nationale. »
ARTICLE 1 cr, — Les colonies et posses-
sions extérieures de l'Empire français sont
invités à concourir à la formation de la
Convention nationale de la manière et dans
les proportions suivantes : 34 députés. Le
nombre des suppléants sera la moitié de
celui des députés. Immédiatement après
la publication du présent acte, tous les
citoyens libres, de quelque état, condition ou
couleur qu'ils soient, domiciliés depuis un
an dans la colonie, à l'exception de ceux qui
sont en état de domesticité, se réuniront
pour procéder à l'élection, soit qu'ils soient
convoqués, ou non par le fonctionnaire public
déterminé par la loi. »
Plus tard, l'article 6 du Titre I de la
Constitution de l'an III-proclame : les colo-
nies- françaises sont partie intégrante de la
République et sont soumises' à la même loi
constitutionnelle. D'après l'article 7, elles
sont divisées en départements On leur attri-
bue un nombre-de députés constamment tenu
en rapport avec la population.
La représentation: coloniale, supprimée
sous l'Empire, la Restauration et Louis Phi-
lippe, fut rétablie, en 1843, par le gouver-
nement provisoire et supprimée à nouveau
après le coup d'état, de 1851 pour être
rétablie par la Troisième République par les
décrets-de 1870-1871. Depuis la loi du
28 juillet 1881, qui a donné un député à la
Cochinchine, c'est-à-dire depuis cinquantc-
,six ans, l'Empire français a pris la prodt-
gieuse extension qu'on-sait et il n'a pas un
représentant de plus!
( ;
C'est assez dire que je souhaite le vote
par la: Chambre, de la loi attribuant un dé-
puté à Madagascar et un député à la
Nouvelle Calédbnie.
Déjà l'année dernière la Commission du
Suffrage universel avait eu à discuter d'une
proposition de loi Candace donnant un
député à chacune des deux îles.
C'étaitau cours de la séance du 18 mars
19,16., J'appuyai cette proposition..J'en.dis
l'intérêt. Mais, je fis remarquer que d'autres
citoyens français, dans le Pacifique par
exemple, avaient droit a une représentation
soit-d'un point de vue local, afin de mieux
défendre leurs intérêts spéciaux, soit du
point de vue national et international, du
fait de la situation de leur pays sur les
grandes voies mondiales, où il forme un
point, d'escale: pour les navires de guerre ou
de commerce, un centre de rayonnement fran-
çais dans un Océan qui tend à prendre, dans
la vit universelle, une place de plus en plus
grande.
- Je fis remarquer que si la Nouvelle Calé-
donie avait droit a être représenté au. Par-
lement, il en allait de même pour les Eta-
blissements français d'Océanie.
Le; 27 mai suivant, je recevais ce télé-
gramme de Noyjnéa. ;
-<->. - V'^Goilsefl-Général se réjouit vos sentiments
représentation parlementaire tioorielie.ce..
léuoiiie. Remercie initiative et efforts, stol),
Au .nom 17.000 concitoyens, race blanche fi-
dèlement et respectueusement attachés mère
patrie nous demandons nous continuer ap-
pui pour faire aboutir représentation dès ou-
verture Chambre afin que population puisse
procéder élections le plus tôt possible, stop.
Vous signalons inconvénient lier sort Calé-
donie à Tahiti suivant suggestion député
Fribourg en raison éloignement considérable
des deux colonies treize jours mer et surtout
différence peuplement. intérêt ef organisa-
tion administrative et politique, stop. Nous
permettons vous rappeler. Calédonie déjà
parfaitement et légalement organisée matiè-
re électorale pour procéder scrutin immé-
diatement. stop Assurant mêmes charges,
remplissant mêmes devoir que concitoyens
métropole, demandons simplement mêmes
droits.
Revercé, Président du Conseil général
Le président du Conseil général avait été
mal informé de ma thèse. J'avais défendu le
principe de la représentation de toutes les
parties de l'Empire, en général, le principe
de la représentation des « départements
de la République *, comme dit la Constitu-
tion de l'an III ; donc, en particulier, la
représentation de la Nouvelle Calédonie
d'une part, des Etablissements d'Océanie
d'autre part.
Tous les Français de la métropole, ou
d'outre-mer, égaqx en droits, doivent pou-
voir être entendus par l'organe de leurs
représentants, dans l'enceinte où sont votées
les lois de la France, où s'explique, le gou-
vernement de la France. Qu'on donne donc
aujourd'hui des représentants à la Nouvelle
Calédonie et à Madagascar et, demain, au
reste des citoyens de l'Empire français.
André Fribourg,
Ancien vice-président de la Commission
, des Alfaires étrangères
de la Chambre des Députés,
ancien membre du Conseil supérieur
des Colonies.
An Ministère des Colonies
Le nouveau sous-directeur
des services militaires
Par décret en date du 19 juillet 1937, le
colonel d'infanterie coloniale breveté d'état-
major Edgard Cornet, a été nommé sous-direc-
teur à la direction des services militaires du
ministère des Colonies.
—!— > <
Au Ministère
des Affaires étrangères
Une conférence avec M. Marius Moutet
M. Yvon Delbos, ministre des Affaires
étrangères; a conféré avant-hier avec MM. Ma-
rius Moutet, ministre, des Colonies, et Mistler,
président de la commission des Affaires étran-
gères de la Chambre.
MM. Delbos et Moutet ont examiné cer-
taines importantes question qui intéressait à des:
titres différents le rai Y et les Colonies,
notamment le problème de la sécurité des com- l
munications avec ia France d outre-mer et 'la I
situation en Extrême-Orient.
le barrage un Day
al Tonkin a été Inauguré
Le 7 juillet, M. Châtel, Résident supérieur
au Tonkin, représentant le Gouverneur général
Brévié; a inauguré le barrage du Day, qui, avec
ses 7 portes de 34 mètres, est le plus considé-
rable au monde des ouvrages de cette catégorie,
dite « à toit ».
Ce barrage permet dès à présent l'assèche-
ment du. territoire dit casier Hadong-Phuly,
d'une superficie de 50.000 hectares, qui était
auparavant inondé pendant la saison des pluies,
et donnera à l'avenir une seconde récolte an-
nuelle évaluée à un million de quintaux - de -- riz.
Cette belle réalisation technique permettra de
décongestionner le delta surpeuplé du Tonkin,
et d'assurer l'existence de plus de 300.000 in-
dividus.
Des aménagements ultérieurs complémentaires
au barrage du Dày, et notamment la construction
d'un barrage sur le canal de Nam-Ding permet-
tront ultérieurement - l'aménagement des ca-
siers de Nam-Dinh-Nord, et casier de Nho-
Quan, qui représentent une superficie de 75.000
et 15.000 hectares.
Le commerce allemand
1 en Extrême-Orient
A
VANT la guerre, l'Alle-
magne avait acquis en
-Extrême-Orient une si.
tuation économique de
premier ordre. Elle oc-
cupait en Chine des
territoires riches qui
pouvaient servir de base à une activité commer-
ciale considérable, en même temps qu'elle portait
ses efforts sur les îles et les archipels du Pacifi-
que.
La guerre avait ruiné ces entreprises. Mais la
tenacité allemande ne tint pas cette défaite
pour définitive et aujourd'hui une enquête menée
par les soins du gouvernement japonais nous ap.
prend que le Reich est en train de reconquérir ra-
pidement la position économique et commerciale
qu'elle avait perdue au lendemain de la défaite.
Un journal américain de Tokio, le Japon Adver-
tiser nous donne le résumé de cette enquête.
Renonçant aux méthodes d'avant-guerre, l'Al-
lemagne, nous dit cet organe, a inauguré en Ex-
trême-Orient une ère de négociations habiles et
amicales. Nous pourrions, de notre côté, ajouter
qu'elle n'a pas réservé cette tactique à cette
partie du monde. Elle l'applique avec succès dans
les Balkans et dans le Proche-Orient sinon ail-
leurs. Quoi qu'il en soit, elle lui a permis d'éta-
blir de nouveau son emprise sur les.. riVes du Pa-
cifique. Les représentants du Reich s'attachent
en effet à convaincre les nations asiatiques qui
tendent à l'indépendance industrielle que celui-ci
est leur ami politique naturel et leur allié écono.
mique tout indiqué. Ils évitent tout heurt, tout
froissement et mettent leurs soins à ménager les
sentiments de chaque pays.
Cette activité se heurte forcément à celle des
puissantes sociétés américaines comme Ford, Ge-
neral Motors, etc., qui occupent des situations
fort importantes. La lutte contre elles est diffi.
cile. Mais l'Allemagne, pour les faire reculer, si-
non pour les vaincre, a adopté une méthode in-
génieuse. Les investissements des sociétés améri-
caines sont complètement entre les mains de
leurs nationaux et elles sont exclusivement diri-
gées par eux. Les affaires que créent les Alle-
mands sont au contraire des entreprises mixtes
fondées avec le concours des Japonais, des Chi-
nois, des habitants des Indes Néerlandaises. Les
Allemands apportent l'outillage, les brevets, l'or-
ganisation technique, alors que leurs associés
asiatiques fournissent le terrain, la main-d'œuvre
et le capital. Mais les actions se répartissent de
telle façon que la prépondérance des citoyens du
Reich est assurée et que le contrôle de l'affaire
leur appartient. « Grâce à ce système, écrit le
Japon Advertiser, le manque de capitaux, loin
de gêner la cause allemande, la sert doublement,
par là fourniture des marchandises qu'elle ne peut
pas-placer ailleurs et par l'expansior. de ses mé-
thodes scientifiques, donc de son influence. »
Quelques chiffres permettent de marquer les
progrès de l'expansion allemande. Pendant le pre-
mier" semestre de 1934, les exportations germa-
niques "en Chine s'élevaient à 37.000.OUO de
reichmarks ; elles étaient passées à 65.000.000
pour la période correspondante de 1936. A
l'heure présente, on estime que dans les impor-
tations totales en Chine, la part de l'Allemagne
est de 16 alors que deux ans auparavant elle
était de 11 L'Allemagne vient donc au troi-
sième rang après les Etats-Unis et le Japon. Elle
se place immédiatement avant la Grande-Breta-
gne. Ainsi elle reprend peu à peu dans le Paci-
fique sa position économique d'avant-guerre. Ce
n'est pas, il est vrai, sur ce seul point du globe
que nous avons à constater le redressement de sa
puissance économique et politique.
Henry Fontanier.
Ancien député.
Agrégé de l'Université
— )
Les mesures de redressement financier
sont applicables à l'Algérie
Un décret du 22 juillet, étend à l'Algérie
les modalités d'application des mesures de re-
dressement financier décidées en vertu des ré-
cents décrets-lois pris en Conseil des minis-
tres.
> -t» <:
| Un institut de recherches
sahariennes est créé à Alger
Par décret en date du 20 juillet 1937, il a
été créé un institut de recherches sahariennes
à l'Université d'Alger.
) e.. (
La France
devant le Siam
Une conférence à Bangkok
Lundi dernier, de 9 heures à 13 heures, a
eu lieu, au ministère des Affaires étrangères
du Siam, une première conférence entre la
délégation française, composée de MM. Geor-
ges Picot, chargé d'affaires; Eutrope. Rési-
dent supérieur du Laos; Prats, directeur des
douanes de l'Indochine ; Plion, consul de
France, d'une partJ et les ministres des Affai-
res étrangères, des, Finances et des Affaires
économiques du Siam; les princes Varu Vai-
dyakara et Viwat Bolbeare, conseillers dit gou-
vernement siamois, et Réève, conseiller des
douanes, d'autre part. I
SYMBOLES
,..C" Une manifestation :
, 1 manifestation <.f',~:
à Pondichéry
Le leader du mouvement ouvrier
de l'Inde française, Subbiah, est de retour
Par avion, Pondichéry, 11 juillet.
Dès que CI Bernardin de Saint-Pierre Il qui
a amené Subbiah de France dans la claire
après-midi du 6 juillet 1937, mouillait la ra-
de de Pondichéry, une émotion indescriptible
s'emparait de tous les cœurs de la population.
Les ouvriers des trois usines de Ponâtchi-
ry voulurent pour t'après-midi du 6 juillet
!937 prendre une demi-journée de congé de
leurs patrons pour aller saluer de bonne lieu-
re à la plage même de Pondichéry, le camara-
de Subbiah et l'amener en. procession.
Le Gouverneur Crocicchia donna l'ordre
formel aux patrons deStlsÍlles de ne pas doit-
ner, aux ouvriers, même tine heure de congé.
Il pensait certes, par ce moyen empêcher
toute manifestation. C'est là un calcul sour-
nois où le Gouverneur Crocicchia a pieu-
sement échoué.
De tous les coins du territoire de Pondi-
chéry, la foule affluait et à 17 heures on
comptait déjà une cinquantaine de milliers
de personnes sur la place DuPlei:rJ à proxi-
mité de la plage.
Le camarade Subbialt descendait avec du
tiLKSonnalilés qui sont allées le prendre à
bord. Des cris frénétiques de « Vive le ca-
marade Subbiah, vive le mouvement o!,-
vrier », retentirent longtemps dans l'assis-
tance.
Jamais dans les Annales de Pondichéryt
on voyait une foule aussi dense : fonction-
uaires commerçants, agriculteurs, ouvriers.
hommes et lemmes, tous y étaient représen-
tés et d'innombrables guirlandes mtourèn nt
le cou du camarade Subbiah à la place Du-
pleix d'où 011 allait CIl, procession au jardin
Calvi. Là, le Comité ouvrier de l'Inde 'rin-
çaise avait fait des arrangements spj.iaux
pour recevoir son président, absent de son
sein depuis trois mois.
Des centaines de volontaires assuraient ad-
mirablement avec leur uniforme impeccable,
le service d'ordre.
Les syndicats des usines Rodier, Savana,
la Fédération de la Jeunesse, la Salle de
lecture de Sri Ramakrishma ,les Associatiuns
des employés de commerce, des tisserands,
des agriculteurs, etc., adressèrent au cama.
rade Subbiah leurs souhaits de bienvenue.
Le président du Comité ouvrier de l'bzde
française doiiiiiiaiit toute l'émotion qtu l'étrei-
guait, remercia la foule des sentiments de
cordialité exprimés au notit de chaque grau-
pement.
Ati cours de son discours, il déclara notam-
ment :
honneur que vous me [ailes aujour-
u luu doit aller. tln grande partie aux mern.
uies du Comité" ouvrier de l'Inde française
qui puissamment ont facilité ma tâche eu
l'lance et qui e.-e IIIUIt absence, ont su main-
tenir parlllt vous cette' uuiuH si indispensable
et qui fait aujourd'hui notre ioie et notre
jorce communes.
,, a ia vente de mon départ pour ta France,
le gouverneur Crocicchia malgré les signa-
tures que j'ai apposées dans son cabinet et
en sa présence dans divers arbitrages entre
puhvns et ouvriers, m'a fait savoir que ie n'ai
aucune qualité pour me mêler de la question
ouvrière. Aujourd'hui, par votre présence ef-
licace et si nombreuse, vous donnez publique.
ment un démenti aux désagréables observa-
tions dun gouverneur qui, trahissant la con-
fiance de toute la population particulièrement
de la population ouvrière, se trouve tombé
sous la coupe d'une infdme coterie.
Durant mon séjour à Paris, j'ai étudié avec
grand intérêt les diverses questions sociales.
M. Savarinadin et moi, nous avons égale-
ment p-is la parole sur toutes les tribunes
qui nous ont été complaisamment ouvertes.
Les braves Français de France si sympa.
thiques pour notre cause s'étonnent des abus
qui se commettent si impunément dans l'Inde
française.
Je vous en prie : ne jugez pas la France
de Jaurès par ces certains fonctionnaires qui
vont chez nous pour nous. créer une vie d'en.
fer. Ce sont là des « parvenus. dont l'unique
désir est de ramasser toujours de l'argent
sans se soucier, des nobles principes de la
colonisation.
La manifestation d'aujourd'hui est une
grande leçon à la police ele l'Inde française
qui, à la différence de-la police de la Métro-
pole, croit qu'elle pourrait étouffer le mou-
vement ouvrier en semant la terreur parmi
la population par le fer et le sang.
Mais songez qu'au-dessus de tout il y a la
France toujours disposée à accueillir favora-
blement nos. doléances et aussi un ministre
(les Colonies qui répond à nos aspirations et
dont le nom seul est synonyme de droiture et
de probité et qui prend à cœur les affaires de
la colonie de l'Inde. »
Des salves d'applaudissements mirent fin
aux paroles du camarade Subbiah qui ren-
trait chez lui en procession vers 20 heures.
Nous avons publié cette correspondance
sans en modifier un mot. Nos lecteurs con-
naissent notre sentiment, exprimé il y a
deux ans lors de notre séjour dans l'Inde.
Le prain a germe. L'Inde, malgré le voyage
de M. Justin Godart, qui n'a pas porté re-
mède aux honteuses pratiques politiques,
et qui ne les a même pas condamnées.
demeure une terre de protestation fervente
dont. la France aura un jour à connaître
— et non dans les conditions où elle le
désirerait.
A un collaborateur du Petit Journal qui l'interrogeait, Marcel Sau-
vage, dont on sait qu'il fut en A.E.F. et qu'il vient de publier-un livre
sur l'Afrique noire, a déclaré :
Je l'ai écrit et répété dans des conférences : notre empire colonial est au bord
de l'abhne. Il y dérive depuis des années sans qu'aucun gouvernement ait tenté de
redresser une situation qui fait que nos possessions d'outre-mer sont guettées comme
des proies par nos ennemis et quelques-uns de nos bons amis. Mais il ne faut pas
accuser nos coloniaux à la légère. Ils ne sont pas les premiers coupables. Mais bien
de certains chefs irresponsables et incompétents de la métropole qui abandonnent
dans les lointaines solitudes des hommes sans prestige.
Nous ne connaissons pas M. Marcel Sauvage. Nous constatons seu-
lement que les journalistes indépendants, dont la tâche première est de
savoir voir, juger, exposer, hors de tout intérêt personnel, en témoins
impartiaux, s'accordent à reconnaître que si nous voulons conserver
l'Empire, il importe, de toute urgence, avec une passion et une grandeur
désintéressées, de le construire enfin 1
Bavant FEmrSMud
S. À. R. l'Emir Saoud, prince héritier du
u Royaume d'Arabie MOtJtenne H, qui a quitté
Paris hier. au soir a donné mercredi une récep-
tion, comme Elle en avait donné une, il y a
deux ans, en les Salons de l'Hôtel.Crillon.
Nous avons donc à nouveau dévisagé celui
qui portera demain, sans doute, sur ses épaules
le lourd fardeau d'une partie de l'Empire
arabe. Une société nombreuse se pressait autour
de ce prince héritier, — et pas seulement euro-
péenne. De S. E. Si-Kaddour ben Ghabrit à
M. Galandou Diouf, député du Sénégal, venu
dans le costume de ses pères, à de grandes nota-
bilités algériennes ou marocaines, nous avons
assisté à la jonction de ces éléments musulmans
naguère dispersés, et qui rejoignent aujourd'hui
les voies d'une haute, et' presque sacrée, colla-
boration. ",
La Grande-Bretagne a forgé des fers qui
pourraient fort bien demain la blesser. Dans ie
soin attentif qu'elle a pris d'organiser ses pro-
pres relais sur la route des Indes, elle n'a pas
toujours calculé qu'une grande idée suffit à
créer des peuples, et que ceux-ci édifient par la
suite très souvent de grandes nations. Le Hed-
iaz n'est très familier à l'Europe. Il est cepen-
dant le coffret qui' contient l'urne sacrée: la
Mecque. Il est la tene sainte. entre toutes, et
nom avons, il y a deux ans, donné par curiosité
le tableau de ce qu'élaient naguère, et à cette
époque, les liaisons DjeJdah-La Mecque. A
pas de géants, un grand Empire se constitue,
dont feu le colonel Lawrence découvrirait peut-
être avec effroi toute la puissance dont il dis-
posera demain.
m
* *
La haute silhouette de S.A.R. le prince héri-
iier nous attachait donc. En notre siècle d'ania-
gonismes, nous nous posions la question : pour
ou contre la Grande-Bretagne ? Pour ou contre
l'Europe ? On voulut bien nous assurer qu'il
n'en était point question, et qu'il n'y avait dam
la politique d'aujourdhui, comme il n'y aurait
dans celle de demain, ni « pour » ni « contre »,
mais des relations de bon voisinage, mais des
relations toutes de cordialité. Nous le croyons
aisément.
Mais qui peut désormais répondre de l'Eu-
rope, qui peut même faire fond sur sa politi-
que ? La question juive n'est-elle pas à nou-
veau, après des millénaires, posée, par le fait
que la Palestine Va permettre à deux races de
s'affronter et de se combattre ? 1
Ce sera peut-être pour notre génération un
amer privilège de mesurer le degré d'abaisse-
ment de l'Europe par rapport au degré d'éléva-
tion de l'Empire arabe.
La libre-pensée, qui a sans doute créé des in-
dividualités remarquables, favorisé des créations
miraculeuses dans tous les domaines de la re-
cherche et de l'esprit humain, s'avérera impuis-
sante: devant la pièce capitale de toute construc-
tion nationale : la religion. Nous avons détruit
nos Dieux, et critiquons ce qu'il en reste, tout
en en saccageant les ruines: La religion musul-
mane qui réunit de l'Iran au Sénégal, des Indes
au Maroc, un peuple innombrable, cherche ses
nommes maintenant qu'elle a réunit ses peuples.
S.A.R. l'Emir Saoud serait-Elle parmi ceux-
là P Le sourire énigmatique, la correction par-
laite, le regard net, et qui cherche à fasciner
autre chose que les froides politesses, ne nom
ont point permis de répondre encore à cette inter-
rogation.
>
VERS LA COLONISATION
Etablissement d'une colonie de peuplement
en Indochine
Le Résident de Yên-Bay envisage l'établis-
sement d'une colonie de peuplement à proxi-
mité de Nghia Lô, sur le territoire du village
de Phu Nham" où des terrains incultes se-
raient susceptibles d'être, mis en- valeur par
les Annamites des provinces surpeuplées du
delta.
L'Afrique du Nord
eonire la France
Par un hasard, sans doute dû à l'uniforme dû
générai Noguès, le Maroc est, de nos trois-ter-
ritoires nord-africains, le seul à ne pas besogner-
en ce moment ouvertement, contre la France.
Mais l'Algérie
Mais la Tunisie ?
Nous serons, encore une fois, pessimistes.. On
voudra bien convenir que, depuis une année, les
événements prévisibles que nous avons définis, à
longueur de journée depuis 1933, se réalisent
avec une netteté, une précision, une ampleur qui
effraient juaqu'aux inspirateurs, mêmes de'la pa-
nique. Ils n'imaginaient pas que le feu, allumé
par eux, dépasserait le but qu'ils lui avaient as*
signé. :'
Si l'Algérie, si la Tunisienne sont pas., d'ici
quelques semaines, matées par des hommes, elles
échapperont' à la France. Et l'on voudra bien
imaginer que dans la guerre mondiale qui s'en-
gage — '( fascisme » contre communisme —
l'Italie et l'A llemagne ne laisseront pas échap-
per l'occasion de diminuer ou d'abattre la
France.
*
* *
Nous admirons les bavards impénitents, so-
lennels phonographes qui, loin des travaux obs-
curs et du rôle effacé des penseurs, se prodi-
guent, jasent, gonflent le col et laissent tomber
leurs arrêts en se croyant quelqu'un. Nous admi-
rons de même les optimistes résotus, dont l'igno-
rance est si grande que les chefs politiques, liés
à eux par des pactes personnels dtentr' aide, ne
la décèlent point. Les torturés de l'ambition"
des honneurs et de la boutonnière nous retiennent
tout autant : c'est cette misère intellectuelle do-
rée qui est en train de faire crever la France
N'importe qui étant bon à n'importe quoi, et les
postes de direction ne devant être accordés
qu'aux coteries ajfiliées, on se soucie peu de la
Fronce. Contre la tradition, contre l'éternité
d'ime grande nation, l'étroite et brève existence
d'une personnalité humaine seule prévaut. Pé-
risse la France, pourvu que soit pleinement satis-
faite l'ardente ambition personnelle l
*
» »
C'est ainsi que l'Algérie et la Tunisie se
désagrègent avec une rapidité qui dépasse les
prévisions 1 A la faveur de l'idéalisme Front
populaire, abondant dans son sens alors qu'il
était incapable, par manque de lentes et longues
études, de déceler leur duplicité, les agitateurs
s'en sont donné à cœur-joie. Ils ont cànàtniït
leur propre situation sur la candeur, sur l'ardeur,
sur la passion de ceux qui ont cru en eux. Ils ont
une force, à l'instant où la Grande-Bretagne
perd, depuis quelques mois, son !n//uencC ~t
puissance dans le Proche-Orient, c'est :d~'êtrc)
appuyés par la lumineuse et ample ascension de
l'Empire arabe. La Méditerranée est en mtit.
che, contre l'Europe. La libération de l'Egypte,
les traités franco-syrien et franco-libanais, la ma-
ladresse de la Grande-Bretagne dans la ques-
tion de la Palestine, la surenchère démagogique
— vis-à-vis de l'indigène 1 — de la France en
Afrique du Nord, autant de gages mis entre les
pattes de quelques malins, gens du milieu, sou-
pies, arrogants, ambitieux, dont la syphilis politi-
que est telle qu'elle a contaminé même les cœurs
et les cerceaux acquis à la France.
*
* *
Nous avons maintenant fait notre deuil de la
générosité, et de la « collaboration ». Nous som-
mes dans la position des témoins qui savent la
catczirophe inévitable et prochaine. Notre seule
ressource sera, sans passion, et peut-être -nous
l'espérons — sans haine, de nous reporter à la
collection des Annales Coloniales et de montrer
aux responsables, dont le cœur est si léger et la
pensée si vide, tout le drame qu'ils ont, volon-
tairement, et au profit de leur pire ennemi le
fascisme — ils veulent bien tout au moins le pré-
tendre — déclenché sur la France afin qu'elle,
crève, et que sur ses ruines des Nations dirigées
et commandées puissent construire la puissance
d'une Europe nouvelle.
14 JUILLET, A TUNIS
.', par Pierre Le Verbe.
l, Depuis longtemps, nous suivons dans ces
colonnes l'évolution de la situation tuui.
sienne. Aussi objectivement que passible,
nous avons toujours rendu compte des infor-
mations que nous recevions, nous défendant
de tout parti pris, soulignant seulement, lors-
que les faits étaient par @ trop nets, n.ïiie in-
quiétude devant une expérience qui apparais-
sait bien hazardeuse.
Maintenant, on ne saurait se leurrer phi!!
longtemps': l'expérience démagogique de li
béralisme aveugle qui vient d'être tentée dans
la Régence a fait faillite. Et la France avec
elle. Il faut le dire : nous en sommes au stade
de l'insurrection.
Jusqu'alors, dans une certaine mesure, la
propagande antifrançaise se maquillait; elle
se cachait derrière le Front populaire. Les
émeutes que. nous dûmes enregistrer pou-
vaient, à-la rigueur, passer pour des convul-
sions sociales avec les grèves pour prétextes.
Maintenant le masque est définitivement jeté:
les nationalistes réclament hautement J'indé-
pendance, prêchent la xénophobie; plus n'est
besoin de grèves pour faire naître l'émeute ;
elle naît maintenant spontanément.
* *
C'est ce qui est arrivé le 14 juillet. Peu:
une fête nationale, ce fut bien une fêts natio-
nale : celle des nationalistes tunisiens. Les
Français en ont fait les frais.
Il n'est pas exagéré de dire que, le 14 et le
15, Tunis a connu deux journées d'émeute
faites de cortèe-es chantant l'Internationale et
criant « Vive l'Indépendance! », « A bas les
Français! x, de bagarres, d'agressions, de
mises à sac. Un commandant qui revenait de
la revue, au cours de laquelle il avait été dé-
coré, a vu sa voiture arrêtée, sa famille me-
nacée; il dut dégainer pour faire fa-e aux
manifestants. Des femmes furent assail.ies
aux terrasses des cafés, lapidées aux balcons
des restaurants. La permanence du P.P.F.
fut saccagée; des soldats isolés roués t'e
coups.
Ce n'était pas une émeute, c'était une insm-
rection. Et cela dura tard dans la nuit pour
recommencer le lendemain. On compte une
soixantaine, de blessés.
Epilogue : un communiqué de la Rési-
dence, qui regrette ces « incidents » et inter-
dit toutes manifestations politiques (le t*. P. F.
avant voulu contre- manifester devant les dé-
combres de sa permanence).
* *
*
Les raisons de tout cela? Notre faiblesse,
qui permet la propagande communiste et. sur-
tout, les excitations de la propagande natio-
naliste.
Sans remonter bien loin, seulement au dé*
but du mois, récapitulons :
Un journal destourien, Tunis-nationaliste,
dans une déclaration, « conteste Vautorité
française dans les affaires intérieures du
pays Il et préconise « la réalisation PAR TOUS
LES- MOYENS de l'indépendance complète de la
Tunisie x.
Devant une telle profession de foi. sous le
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