Titre : Les Annales coloniales : organe de la "France coloniale moderne" / directeur : Marcel Ruedel
Auteur : France coloniale moderne. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1937-03-05
Contributeur : Ruedel, Marcel. Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 05 mars 1937 05 mars 1937
Description : 1937/03/05 (A38,N18). 1937/03/05 (A38,N18).
Description : Collection numérique : Bibliothèque Francophone... Collection numérique : Bibliothèque Francophone Numérique
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Description : Appartient à l’ensemble documentaire : RfnHisg1 Appartient à l’ensemble documentaire : RfnHisg1
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-LC12-252
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 31/01/2013
38e ANNEE. — N° 18. - VENDREDI (13 h. 30) 5 MARS 1937
JOURNAL SEMI-QUOTIDIEN
RUmctfu & Administration :
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PARIS (2e)
TÉL : RICHELIEU 73 OW
(2 lignes groupées)
Les Anna/es Coloniales
Fondateurs : Marcel RUEDEL - < - Diremer i Rmi MONMAMON
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CtianiM IN» ilop M*
Etr.., 24,. 125» no
Le Nimért : 30 centimat
On s'abonne sans frais 4ana
tous les bureaux de poste.
Paysannat français aux colonies
Diverses raisons tirées du cycle économi-
que et de l'évolution colonisatrice, celle-ci
placée sous le signe d'un humanisme géné-
reux, ont fait accorder au paysan de nos
colonies la considération et l'estime que
méritent sa fonction d'utilité et sa besogne
ingrate, courageusemenut acceptée.
La sympathie va, même dans les milieux
officiels, vers ces remueurs de terre et leur
programme officiel d'outre-mer.
On a mis en avant, pour justifier cette
sollicitude, l'argument de la solidarité en-
tre l'agriculteur de France et l'agriculteur
indigène. A notre avis, il semble que, ce
faisant, on ait un peu oublié ce groupe si
intéressant, bien que peu nombreux, des
paysans français aux colonies, à propos des-
quels le mot de « solidarité » avec l'indi-
gène s'applique a fortiori.
- Ces paysans français, qui se cachent sous
la désignation de colons, cultivent un do-
maine peu étendu et bien à eux. Ils sont
disséminés sous diverses latitudes. On les
trouve, en particulier, à Madagascar, en
Indochine et dans les colonies autonomes,
Nouvelle-Calédonie, Antilles, Réunion.
Que le colon exerce une fonction de pre-
mier plan, cela est témoigné par l'examen
des faits : il met en valeur des terres in-
cultes, qui, sans lui, seraient laissées à
l'abandon.
Marchant souvent en tête du progrès agri-
cole, il introduit des cultures industrielles
ou sélectives et, dans tous les cas, il se fait
le promoteur de la bienfaisante polyculture
là où elle est ignorée.
Le rôle social du coton n'est pas petit.
Attaché au pays qu'il habite, celui-ci en de-
vient l'éducateur au surplus, même sans le
vouloir, car les indigènes viennent prendre
chez lui des exemples et des leçons d'éco-
nomie rurale, poussés par la curiosité et
leur instinct d'imitation. Chaque exploita-
tion forme même un centre propagateur de
civilisation française.
Nous sommes de ceux qui pensons qu'il
importe de soutenir tous les intérêts agrico-
les coloniaux et surtout ceux du colon ou
planteur français.
En dehors des raisons qui viennent d'être
énoncées, il faut savoir apprecier ce qu'a
d'inestimable la présence permanente dans
telles colonies, dont le climat est peu pro-
pice au peuplement blanc, des gens de no-
.tre race qui, par leurs groupes essaimes,
facilitent la pénétration de l'influence fran-
çaise dans nos possessions.
Si nous plaidons en faveur de nos com-
patriotes travaillant à leur compte, c'est
qu'aussi nous voyons trop la colonisation
appliquée à la terre s'exprimer sous la for-
mule moderne, en vérité, souvent nécessaire,
de sociétés anonymes. organes de concentra-
tion capitaliste dont la relative utilité sociale
n'est pas assez compensée par les avantages
maténels qu'elle apporte au delà des mers.
Ici, aucun attachement au sol; tout pour
la firme et le siège social, direction chan-
geant souvent de tête, une âpreté au gain
génératrice de contrainte pour le travailleur
et parfois étalage éhonté d'improbité finan-
cière. De la part des indigènes, aucun sen-
timent de considération à l'égard des Com-
pagnies, le plus souvent des revendications
;t même des grèves.
On est bien loin ici de l'esprit patriar-
:al et familial qui règne dans les entre-
arises de la plupart des colons. Ce n'est
pas d'ailleurs d'aujourd'hui que le colon
français a fait connaître ses qualités.
Au Canada, se sont établis jadis des
nilliers de colons français qui ont conser-'
ré les traditions de travail de leur pro-
vince d'origine. Ceux-là ont donné Aoute
la mesure des possibilités de notre ter-
rien.
Or ce type de colon nous rappelle à
beaucoup d'égards son pareil dans nos co-
lonies. C'est un rural dans l'âme. Il
aime la terre et le lieu où il s'est fixé.
C'est un grand défricheur. Il s'adonne,
lui aussi, à la polyculture, ou tout au moins
ne se spécialise pas à l'excès. Il ne cherche
pas à s'enrichir en quelques années, niais
travaille simplement pour subvenir à ses
besoins limités, et s'il a des méthodes re-
lativement arriérées, il possède une grande
qualité, la patience, appuyée sur l'idée
qu'on ne fait rien de durable qu'avec le
temps. De si heureuses dispositions lui
permettent de résister à toutes les crises.
A côté de lui, le colon anglais qui prend
volontiers le genre américain offre un
exemple qui se rattacherait plutôt a la fa-
çon d'opérer de nos sociétés coloniales.
Certes, son outillage est parfait et ses
méthodes de culture ultra-modernes, mais
c'est un homme pressé, avide de recueil-
lir en quelques saisons de quoi vendre sa
ferme et s'établir ailleurs. Il ne cesse de
spéculer, l'esprit toujours tendu et agité,
mais, par contre, souvent enferré dans les
dettes, il sombre dans la misère avec la plus
grande facilité.
Dans nos colonies l'exploitant français,
avec son exploitation de petite étendue, est
le petit patron de l'artisanat paysan colo-
nial.
Or cette classe moyenne, peut-on dire,
en ce qu'elle occupe une place intermé-
diaire entre le paysan indigène et les gros-
Sb sociétés, mérite toute la bienveillance
active de l'Administration.
Les conditions dans lesquelles vivent ces
propriétaires sont souvent pérubles, parce
qu'ils n'ont pas les facilités de crédit des
grosses affaires auxquelles la concentration
assure un état de supériorité sur eux dans
la concurrence économique. Loin d'être,
comme on aurait tendance à le croire, des
exploiteurs et des gens qui s'enrichissent en
un tournemain, ils n'ont le plus souvent
qu'une situation à peine aisée, et, pour la
décade qui vient de s'écouler, ont traîné,
en Indochine, notamment, ce qu'on pourrait
appeler une misère dorée.
C'est le cas, par exemple, des planteurs
dî café du moyen Tonkin et des plateaux
de l'Annam. Certains out-ils vu trop grand
et ont-ils donné à leur culture une exten-
sion que ne permettaient pas leurs moyens fi-
nanciers ? D'autres ont-ils eu le tort de
s'installer sur un sol ingrat, rebelle à un
rendement normal ? Peut-être ces reproches
sont-ils fondés, dans une certaine mesure. ¡
Mais ces planteurs ont été parfois bien mal
secondés par des services techniques plus ou
moins compétents. Ils ont été aussi poussés
souvent à la dépense par les conseils inté-
ressés de certaines banques démarcheuses.
En tous cas, que leurs efforts soient per-
dus et que l'on voie ce spectacle affligeant
d'établissements de crédit et surtout de so-
ciétés anonymes évincer ces bons ouvriers
de l'œuvre française aux colonies, tout cela
serait bien regrettable.
L'envie ne pourra alors reprocher à ces
hommes d'être trop exigeants lorsqu'ils ex-
priment leur desiderata que lorsque leur
situation ne sera plus aussi incertaine et
aussi peu comprise. Le « fortunatos ni-
mium » de Virgile, c'est-à-dire un bonheur
cessif, n'a pas été jusqu'ici leur fait.
J. Luquot,
Député de la Gironde,
Membre de la Commission
de la marine marchande.
AUDIENCES
A L'ELYSEE
Mfl Lebrun, président de la République a
reçu avant-hier M. Viénot, sous-secrétaire
d'Etat aux Affaires étrangères, retour de Tu-
nisie.
Il a aussi reçu Me Larrouy, avocat au bar-
reau de Fez et Mc Le Cesne, avocat à la cour
de Paris, venus l' entretenir du recours en grâce
formé par Jidnikoff, dit Modivonoff, condamné
à mort par le tribunal militaire de Meknès.
AU QUAI D'ORSAY
M. Viénot, sous-secrétaire d'Etat aux Af-
faires étrangères, a reçu hier matin le général
Noguès, Résident général au Maroc.
-—————————— ) -*OE» (
Le Destour
et le Front populaire
M. Habib Bourguiba, leader du Parti cons-
titutionnel de Tunisie, actuellement à Paris
où il semble devoir se fixer, a, lundi dernier,
au cours d'une réunion privée, exposé la si-
tuation tunisienne à un certain nombre de
personnalités du Front populaire. On notait
outre les représentants des partis radical,
S.F.I.O. et de la C.G.T., M. Maurice Thorez
pour le parti communiste et M. Charles Lau,
rent, de la Fédération des fonctionnaires.
Prenant la parole après l'expose de M.
Habib Bourguiba, M. Maurice Thorez a
d'abord rappelé la grande sympathie des
communistes pour )Ps peuples colonisés puis
il s'est félicité que le desiour juge insépara-
ble le sort de la Tunisie et de la France dé-
mocratique dans la lutte pour la Paix contre
le fascisme international.
Il t a souligné aussi la nécessité de faire
droit rapidement aux modestes et légitimes
revendications du peuple tunisien.
Un député pour l'Indochine
La loi du 28 juillet 1881, relative à la
représentation au Parlement de l'Algérie et des
colonies a accordé un siège de député à la
Cochincnine.
A cette époque, le nombre des Français ins-
tallés dans les quatre autres pays de l'Union
était trop peu important pour qu une représen-
tation au parlement fût envisagée. Depuis,
l'Union s'étant formée et développée; on
compte cinq mille électeurs en Annam, Ton-
kin, Cambodge et Laos.
Ce nombre ne paraissant pas suffisant pour
permettre la création d'un nouveau siège de
député, un projet de loi vient d'être déposé
pour 'que le député de la Cochinchine devien-
ne le député de l'Indochine en joignant, pour
l'élection, tous les Français résidant actuelle-
ment dans la péninsule asiatique.
L'idée est excellente, les cinq pays de
l'Union étant alors représentés à la Chambre,
mais l' on ne voit pas très bien comment les
candidats pourront prendre contact avec leurs
électeurs au cours de la campagne électorale,
— à moins d'avoir un avion continuellement à
leur disposition.
Pour le Haut Comité
méditerranéen
Après le général Noguès, Résident général
au Maroc, M. Le Beau, Gouverneur général
de l'Afrique, est arrivé ce matin en gare d'Or-
say, venant d'Alger par El-Kantara, courrier
de Port- Vendres..
M, Guililon, Résident général en Tunisie
s'est embarqué sur le Gouverneur-Général-Jon-
nart. Il sera à Paris dans la soirée.
Les intérêts de h France
en Afrique orientale -',
ES meilleurs discours ne
sont pas toujours les
plus longs. L'autre
jour, à l'issue de l'in-
terpellation de M. Plai-
sant, M. Hachette, sé-
nateur 4e l'Aisne, en
a prononcé un, d'une
concision voulue, mais
substantiel à souhait.
Il a su, en quel-
ques mots. indiouer.
avec une netteté parfaite, quelle est la situation
actuelle de la France, sur les confins de l'Ethio-
pie.
La France, qui a créé, il y a 37 ans, et de
toutes pièces le port et la ville de Djibouti, « bi-
jou de la colonisation française », contrôle tou-
jours Je chemin de fer franco-éthiopien, qui est
une de ses grandes créations.
Naturellement, elle n'entend pas renoncer à
ses droits. Bien au contraire.
D'un côté, le ministre des Colonies se propose
d'agrandir le port. Et d'importants travaux vien-
nent d'être mis en adjudication, car on veut équi.
per Djibouti à la moderne et lui donner des ins-
tallations nouvelles. De telles améliorations sont
absolument nécessaires, et doivent être réalisées
sans retard.
Mais, en outre, notre chemin de fer est tâchas,
surtout à cette heyre, un « atout » merveilleux,
dont nous devons nous servir. Très loyalement,
nous l'avons mis, quand il a fallu, à la disposi-
tion des Italiens, auxquels il a rendu et rend des
services signalés. Ils n'hésitent pas d'ailleurs à
le reconnaître eux-mêmes.
Il est évident que l'Italie, soit pour le port,
soit pour le chemin de fer, va devenir un de nos
meilleurs clients, un client de choix qu'il impor-
te de soigner.
C'est pour cela que nous devons dès mainte-
nant songer à la révision de nos tarifs douaniers,
qui sont beaucoup trop lourds.
Nous avons à les adapter et à nous adapter
nous-mêmes aux circonstances exceptionnelles
que nous traversons.
Il n'est que de le vouloir énergiquement.
« Quod vis, nimium velis. Nam, leviter velle,
nolle est ». Que de fois la France a vérifié, à
son plus grand dam, l'exactitude du vieil adage I j
Le moment est venu pour nous de le faire
mentir et de donner à notre belle colonie d'Afri-
que orientale la prospérité qu'elle mérite.
Nous remercions notre collègue M. Hachette
de nous l'avoir rappelé, avec compétence et avec
talent.
Jean Philip,
.Sénateur du Gers,
membre de la Commission des-
Finances, membre de la Comma..
sion des Colonies.
————————— ) -.- ( ——————————
Elections au Conseil supérieur
de la France d'outre-mer
En Cochinchine
L'élection de M. Bui Quang Chieu en qua-
lité de délégué représentant les populations au-
tochtones a été ratifiée.
————————— ) - ( —————————
Que se passe-t-il à la Fédération
française des coloniaux et
anciens coloniaux"?
Le « Syndicat (en formation) de Défense des
intérêts des oeuvres de la Fédération française
des coloniaux et anciens coloniaux », 24, rue
La Condamine, Paris, nous communique la note
suivante :
Un scandale d'importance est sua- le point
d'éclater à la Fédération française des co-
loniaux et anciens coloniaux, 40, rue de
Châteaiudun, ù Paris, au sujet des dixièmes
de la Loterie nationale, dont les Pouvoirs
.publics viennent de lui interdire l'émission
et la vente et ont ordonné une enquête à la
suite d'émission d'un chèque sans provi-
sion.
Un groupe de Défense des intérêts des
œuvres de la fédération française des co-
loniaux et anciens coloniaux vient de se
constituer. Il a déjà réuni un grand nombre
de camarades adhérents qui, indignés de la
gestion personnelle et inconsidérée du pré-
sident fédéral, demandent à M. le ministre
des Colonies saisi d'un rapport d'enquête,
de prendre d urgence vis-à-vis des dirigeants
responsables les mesures d'assainissement
qui s'imposent.
Un prochain communiqué donnem la
constitution du bureau provisoire.
Nous ne pouvons pas ne pas insérer cette
note. Ceci sous toutes les réserves d'usage. Si
M. Marius Moutet, ministre des Colonies, est
saisi d'un rapport d'enquête, la réalité ne tar-
dera pas à nous être connue.
) ..e (
AUTOUR DU SANDJAK
D'ALEXANDRETTE
La Mission de la S.D.N.
Les observateurs de la Société des nations
venant dit Sandjak d'Alexandrette sont ar-
rivés hier à Ankara. Ils rentreront directe-
ment à Genève via IStamboul.
—
Une délégation commerciale
allemande à la Foire de Tripoli
Une délégation commerciale allemande,
conduite par le professeur Car Luer, chef
de la Fédération du commerce du Rcich, est
attendue à Rome la semaine prochaine.
Sur l'invitation du président de la Confé-
dération fasciste du commerce, cette déléga-
tion se rendra à Tripolij où elle assistera
à l'inauguration de la fotre, par. M. MttsSO-
lini.
De quelles réformes
=ta Tunisie a-t-elle besoin?
Le mal « sérieux » dont souffre la Tunisie,
il importe qu'il soit précisé, la sûreté du dia-
gnostic étant, à notre avis, indispensable pour
appliquer un remède efficace.
La situation actuelle, aussi sombre qu'on
puisse l'estimer, n'est pas Le fait d'une longue
suite d'erreurs politiques et administratives,
comme on s'est plu un peu trop à le dire —
sans jamais le prouver d'ailleurs — eUe est
seulement consécutive à la crise mondiale qui
a frappé également colonies et métropole; mais
pour la Tunisie le destin a voulu qu'au moment
où les mesures de sauvetage et de redressement
devaient donner leur plein effet, une période
de sécheresse exceptionnelle vînt s' abattre sur
le pays tout entier, le replongeant dans la dé-
tresse de laquelle il se préparait à sortir.
Voilà la vérité, il n' y en a point d'autre.
Et la preuve, c'est que les budgets tunisiens
jusqu' en 1929 se sont toujours soldés avec des
excédents importants qui ont permis de créer un
outillage économique et social de premier ordre,
sans recourir à une fiscalité excessive, en faisant
appel très modérément à l'emprunt.
Cette gestion financière et administrative, qui
a pu être citée comme modèle, démontre com-
bien la politique du protectorat, qui a toujours
er > à travers les événements et les hommes,
le reflet fidèle de la politique de la France, a
été sage et bienfaisante. Nous devons donc, les
uns et les autres, reconnaître et proclamer la
pérennité de l' œuvre française, ses traditions
de libéralisme et de fermeté qui s'insèrent dans
les faits, dès les débuts mêmes du protectorat.
Ce qui a fait la force de La politique fran-
çaise jusqu'à présent — et nous souhaitons
qu elle le fasse dans l'avenir — c est qu'elle a
su et pu dégager, au fur et à mesure que s'ac-
complissaient les améliorations, dans l'orare éco-
nomique, les conditions nécessaires à une évolu-
tion libérale et démocratique des institutions,
Représentons-nous les difficultés de la tâche :
une société humaine à structure religieuse et
féodale, tirant sa maigre subsistance d'une terre
pauvrement outillée, qu'il a fallu faire glisser
peu à peu sur le plan d'un pays moderne, sans
pour cela toucher à ses assises morales fonda-
mentales. - En un demi-siècle, ce tour de force
a été réalisé. Je ne dis pas pleinement réalisé,
car il reste encore beaucoup à faire dans tous
les domaines, le protectorat français étant parti
de très bas du point de vue économique et poli-
tique. Mais ce qu'il reste à faire doit être
accompli avec ce sens de la mesure et de l'op-
portunité qui a été jusqu'à présent la marque
de l'orgoezbWort-France, si je puis dire.
Pour aussi urgentes que soient les réformes
qu en haut lieu on se propose de réaliser, nous
aimerions qu'on se plût avant tout à en faire
la discrimination et en établir le degré d'ur-
gence. Nous continuons à penaer, malgré tout
le mal que certains se donnent pour nous faire
croire te contraire, que le malaise tunisien étant
d' origine économique, c'est bien dans le do-
maine de l'économie qu'il convient d'agir au
plus vite. Deux millions et demi d'indigènes
vivent de la terre et sont dans la détresste quand
la terre ne produit pas ou pas assez, l'essentiel
du problème est là, il n'est pas ailleurs.
Revaloriser la terre, permettre à l'homme
de s' élever au moyen du travail de la terre,
c'est la solution du problème. Solution qui im-
plique l'assainissement du régime foncier, l'or-
ganisation du crédit agricole, l'amélioration de
la technique et des cultures, le développement
de l'enseignement rural, l'aménagement des
forces hydrauliques, la décentralisation admi-
nistrative, et d' autres mesures qui, toutes, doi-
vent tendre à assurer un minimum de stabilité
dans la production agricole, et d'une manière
générale dans la vie économique du pays. C'est
seulement lorsque l'équilibre entre le pouvoir
de production et les besoins de la consomma-
tion sera réalisé bon an mal an, que l'on pourra
passer au programme politique, qui consiste
pour d'aucuns à placer au préalable des urnes
dans tous les douars et cheikhats I.
Au surplus, une agitation électorale n'est
actuellement pas souhaitable. Nous sommes en-
core trop près de certains événements pour
espérer que les passions politiques ne réveille-
ront pas des rancœurs et des haines qui s'étei-
Quand on fait appel à la collaboration de
tous et quand on a le légitime espoir d'y comp-
ter pour le présent et plus encore pour l'avenir,
il est indispensable d'agir avec méthode, pon-
dération et fermeté, et surtout de prendre son
point d'appui dans l'œuvre qui a été accom-
plie dans le passé et dont nul ne peut contester
la grandeur et la solidité.
Ce sont là quelques vérités d'évidence que
nous tenions à rappeler à travers notre expé-
rience des hommes et des choses de ce pays,
au moment où celui-ci peut être engagé dans
une voie (bien que choisie avec les Meilleures
intentions) qui ne corresponde pas à son véri-
table destin.
Arthur Pellegrin.
r Délégué au Grand Conseil dé la Tunisie.
Après le voyage en Tunisie
de M. Viénot
A son arrivée à Marignane, mardi matin,
M. Pierre Viénot. sous-secrétaire d'Etat aux
Affaires étrangères, venant de Tunisie, à fait
les déclarations suivantes :
En accomplissant ce voyage, j'ai voulu mar-
quer tout d'abord le grand intérêt que porte à
a Tunisie le gouvernement français et t impor-
tance qu'il attache aux problèmes que pose pour
la France l'accomplissement de sa mission en
Afrique du Nord.
En Tunisie comme dans le reste du monde,
notre pays ne fondera rien sur la contrainte,
même s'il devait l'employer pour un pouvoir
durable.
Le communisme
devant l'Afrique du Nord
L'Agence Radio a lancé de Séville, le
2 mars, le télégramme suioant:
Parmi les papiers et les documents d'ori-
gine russe trouvés le long de la côte, près
de Malaga, on a découvert des plans et
des feuilles imprimées en arabe, en espa-
gnol et en français, en vue de la libération
du Maroc.
Des tracts et des brochures illustrées de
la même. organisation ont été trouvés dans
de grandes malles cachées dans des caNes.
Les milieux nationalistes pensent se trou-
ver en présence d'un vaste programme de
propagande communiste en Afrique, qui
commencerait par le Maroc espagnol et le
Maroc français.
De grandes cartes géographiques de la ré-
gion nord-africaine s'étendant jusqu'au dé-
sert de Lybie, indiquent qu'il s'agit là d'un
plan de grande envergure.
A la suite du passage au Maroc de notre
directeur, nous avions annoncé — et notam-
ment le 22 janvier, dans notre article Le Tri-
dent qui menace le Maroc — que la propa-
gande communiste était entrée dans une phase
extrêmement active, et qu'il serait urgent que
le gouvernement s'en inquiétât.
La question est, une fois de plus, très nette-
ment posée.
Les masses indigènes sont nerveuses et irri-
tables. Sensibles à l'excès, elles réagissent de
suite et sont capables des actes les plus irré-
fléchis. Est-ce leur bonheur, leur bien-être,
leur prospérité, que défend le communisme ?
Il nous semble que ce sont là les mêmes préoc-
cupations que les nôires. Les voies n'en sont
même pas différentes. Le communisme, pas
plu* que n'importe quelle formule politique, ne
peut, à l'heure actuelle, modifier les condi-
tions économiques du monde. Il les a, bien au
contraire, par son inexpérience ou ses calculs,
singulièrement aggravées. Le produit alimen-
taire, avant la guerre, était mieux distribué
qu'il ne l'est aujourd'hui, et cependant l'être
humain, avant d'être parfois une intelligence
ou tout au moins un cerveau, est un animal qui
doit vivre comme tous les animaux.
Nous ne sommes pas les ennemis de la révo-
lution sociale — loin de là! Nous applaudis-
sons à celle que la France, au point de vue in-
digène, favorise à l'heure actuelle en Afrique
noire. Mais comme nous sommes l'ennemi du
sang versé, et que le communisme entraîne
l'Afrique du Nord à la révolte sanglante, nous
accomplissons notre modeste devoir d'informa-
teur en stipulant que la France, dans cette
bagarre sociale, risque de perdre aussi bien
l'Algérie que la Tunisie et le Maroc.
Vers l'abolition des Colonies
; Par les voies détournées de Genève
On mène grand bruit, il y a grosses palabres
et grand tam-tam, autour des revendications
coloniales de l'Allemagne ou de la Pologne.
D éminent* hommes rl EÚJt. el Londres comme
à Paris, affirment avec une force pcrsaùsioe
qu'à aucun moment leurs Etats n'abandonneront
un mètre carré de leurs possessions d'oatre-mer.
Le peuple. malgré les réponses et les hargnes
de Berlin, de Leipzig ou de Varsovie, s'en *a
content. On le rassure : il ne demande qu'à
être rassuré.
Mais, prenant dans la guerre des enseigne-
ments féconds, la politique des revendications
mène un travail de sape. Ne découvrirons-nous
les mines qu'à f instant où nous sauterons ? A
côté de la scène politique, destinée à amuser
le chaland, il y a, derrière la cloilon, dans
l'arène, la bataille qui se prépare : elle com-
mencera lundi à Genève, dès la première réu-
nion de la Conférence internationale des Ma-
tières premières.
C'est le cheval de Troie. L'unique danger
est là. Nue, dépouillée de toute vaine décla-
mation, de tout appel sentimental, la question
coloniale est posée avec une netteté surprenante.
On nous demandera de nous démettre, ou de
nous loumettre. Qui défendra nos droits ? Nos
colonies sont absentes de ce débat.
Voici, extraits du mémoire analysant les di-
verses propositions ou suggestions qui seront dé-
battues à la conférence, deux postes de dis-
cussion :
D) un préconisé a autre part ia. ëcut-'<~
tion dans tous les domaines coloniaux d'un ré-
gime de porte ouverte (tel le régime existant
par suite d'obligations contractuelles dans
le bassin conventionnel du Congo, au Maroc,
en Afrique Occidentale française), ainsi que
dans les territoires sous mandat A et B
ou encore le régime d'égalité commerciale
librement consenti qui existait jadis dans
l'empire colonial britannique et qui subsiste
encore — sauf quelques contingentements
— dans les Indes néerlandaises.
c) La transformation des colonies en pays
sous mandat, ou bien le transfert de l'ad-
ministration des colonies, à. un organisme
international, est également représenté com-
me une solution possible.
Le sort des nations coloniales, que nul ne
croyait encore engagé à ce point, va se jouer
ainsi à Genève. La France ne sera représentée
à cette conférence que par un Gouverneur ho-
noraire de la Banque de France, M. Charles
Rist.
Le ministère des Colonies ne pourrait-il dé-
léguer un ou plusieurs de ses hauts fonction-
naires ?
Il nous semble que cela en vaut la peine :
c'est la vie même de nos colonies qui est en
jeu.
Le nouveau visage
de l'Afrique
VI. — La Guinée drapée de torpeur et de beauté
par Raoul Monmarson.
Dalaba, 15 février 1937.
Les dernières montagnes de Man se sont
effacées. Celles de N'Zérékoré commencent.
Une harmonie est dans l'atmosphère. C'est
ce bleuté irréel, cette tendre pudeur des som-
mets, cette immobile attente dans réternel,
durant que sur la route pleine de feu la savane,
sèche comme des acrimonies de vieille femme,
exhale son odeur fade et brûlante.
La Haute-Guinée s' est ainsi présentée. Ce
n'est plus la Côte d' Ivoire, ce n'est pas en-
core le Soudan. Des lambeaux de forêt trai-
nent, à l'abandon, comme des débris de la
Grande Armée durent s'échelonner au retour
de Moscou. La route n 'a pas, ici, attiré les
villages. Ils conservent contre elle un écran,
quelques centaines de mètres de brousse. Plus
de circulation intense, bariolée, pittoresque,
comme sur les latérites de la Côte d'Ivoire.
Suspendues dans l'air, des montagnes bleu-
tées. Massés sans discipline, des ramassis d'ar-
bres puissants. De temps à autre, une savane
boisée, qui semble pleine d'électricité. Par-
fois la savane nue, qui se consume d'impuis-
sance et de rage sous le soleil. A quelques en-
cablures, les fonds du Liberia.
Plus tard, nous aborderons le poste de
Guéckédou, au confluent des trois frontières :
Guinée française, Liberia, Sierra-Leone. Les
cercles de N'Zérékoré et de Macenta sont donc
sous commandement militaire. Entre eux, une
splendeur, une trentaine de kilomètres de mon-
tagne, croulant sous une forêt sombre et dense,
avec une route difficile. Aspects majestueux,
pleins de mystère et de grandeur, que le
Mayumbe nous fit connaitre, de M'Vouti à
Monzi.
•%
Nous retrouvons, dans sa formule de na-
guère. la « colonie », la brousse sans Euro-
péens, presque sans vie, sur laquelle cepen-
dant le miracle humain a tracé ses routes. On
songe que Konakry a dû balancer par-dessus
son épaule ces fonds de territoires, si nette-
ment hors de son axe ferroviaire, et de ses
préoccupations maritimes ou soudanaises. Ce
sont les réserves que la baguette magique tou-
çhera un jour. Beyla, Kissidougou en sont
les postes avancés. Kankan, terminus de la
voie ferrée, en est l'état-major.
Il faut monter à Siguiri pour comprendre que
toute cette région est soudanaise, et que Bamako
commence à exercer sur elle un singulier attrait.
Une obscure rivalité s engage. Est-ce le fait
que la taxe sur le chiffre d' affaires est moins
élevée au Soudan qu'en Guinée (presque du
simple au double), les commerçants se ravi-
taillent de préférence par Bamako. Le placer de
Kolegniagbé, dans lequel, suivant le régime
des eaux, 30.000 ou 60.000 indigènes creusent
leurs puits d' or, cohue compacte, grouillante,
chantante, désordonnée, ramassée sur 4 ou
5 kilomètres carrés, est à mi-chemin entre
Kankan et Bamako. Toutes les races y tra-
vaillent, et non plus seulement guinéennes.
Cette excroissance paradoxale, dont un ro-
mancier à la Paul Adam tirerait des images
sauvages et puissantes, semble rattachée à la
Guinée uniquement par les fantaisies oolitiaues
de l'époque. Le Soudan absorbera ce cercle
un jour ou l'autre. Le Soudan est d'abord comme
un offertoire de l'épopée africaine. Le poste
de Siguiri fera tomber dans les pièces de son
Musée les logements de Gallieni et de Man-
gm.
Siguiri se défend de Kankan par la traversée
du Niger, romantique comme celle de rEu-
phrate entre Mossoul et Kirkouk. Il est de plus
gardé encore, à 6 kilomètres, par le Tinkisso.
Deux bacs, dont l' un est interminable, une
population active. éveillée, en indéniable puis-
sance de progression. Il n'en faudra pas plus
pour que' Siguiri compense, pour le Soudan,
la perte, au profit de la Côte d'Ivoire, de Sikaa-
so et de Fada N'Gourma.
♦%
Nous poumons de suite entamer la discus-
sion de ce qui formera la conclusion de ces
articles. Nous allons, à Dalaba et Mamou,
abandonner la Guinée soudanaise pour péné-
trer dans < la région où la colonisation euro-
péenne s 'essouffle. Le problème des basses
côtes, des terre-pleins d' exportation, va être
à nouveau posé. Attendons donc que ce second
exemple s' ajoute à notre argumentation.
Nous songeons à l'homme qui dirigea durant
de si longues années les destinées de la Gui-
née : au gouverneur Poiret. Le premier, roman-
tiquement attaché aux images - de Millet, il
songea au paysan noir. Il le voulut courbé sur
la terre, ajoutant les uns aux autres, comme
les fils d' une immense trame, les sillons aux
sillons. Ces horizons immenses, veloutés, im-
matériels comme les paysages de Puvis de
Chavannes, lui permettaient de faire ce rêve.
Mais le gouverneur Poiret est mort, et le pay-
san guinéen n'est pas né. Il bricole et subsiste
médiocrement, cependant que la basse côte,
au ventre vide. en appelle sans arrêt au ravi-
JOURNAL SEMI-QUOTIDIEN
RUmctfu & Administration :
lt 1h i» h lui
PARIS (2e)
TÉL : RICHELIEU 73 OW
(2 lignes groupées)
Les Anna/es Coloniales
Fondateurs : Marcel RUEDEL - < - Diremer i Rmi MONMAMON
IMRIEIMVS
mm lit Mmm tUtutris:
Wmm «M*
FraàMtf -
CtianiM IN» ilop M*
Etr.., 24,. 125» no
Le Nimért : 30 centimat
On s'abonne sans frais 4ana
tous les bureaux de poste.
Paysannat français aux colonies
Diverses raisons tirées du cycle économi-
que et de l'évolution colonisatrice, celle-ci
placée sous le signe d'un humanisme géné-
reux, ont fait accorder au paysan de nos
colonies la considération et l'estime que
méritent sa fonction d'utilité et sa besogne
ingrate, courageusemenut acceptée.
La sympathie va, même dans les milieux
officiels, vers ces remueurs de terre et leur
programme officiel d'outre-mer.
On a mis en avant, pour justifier cette
sollicitude, l'argument de la solidarité en-
tre l'agriculteur de France et l'agriculteur
indigène. A notre avis, il semble que, ce
faisant, on ait un peu oublié ce groupe si
intéressant, bien que peu nombreux, des
paysans français aux colonies, à propos des-
quels le mot de « solidarité » avec l'indi-
gène s'applique a fortiori.
- Ces paysans français, qui se cachent sous
la désignation de colons, cultivent un do-
maine peu étendu et bien à eux. Ils sont
disséminés sous diverses latitudes. On les
trouve, en particulier, à Madagascar, en
Indochine et dans les colonies autonomes,
Nouvelle-Calédonie, Antilles, Réunion.
Que le colon exerce une fonction de pre-
mier plan, cela est témoigné par l'examen
des faits : il met en valeur des terres in-
cultes, qui, sans lui, seraient laissées à
l'abandon.
Marchant souvent en tête du progrès agri-
cole, il introduit des cultures industrielles
ou sélectives et, dans tous les cas, il se fait
le promoteur de la bienfaisante polyculture
là où elle est ignorée.
Le rôle social du coton n'est pas petit.
Attaché au pays qu'il habite, celui-ci en de-
vient l'éducateur au surplus, même sans le
vouloir, car les indigènes viennent prendre
chez lui des exemples et des leçons d'éco-
nomie rurale, poussés par la curiosité et
leur instinct d'imitation. Chaque exploita-
tion forme même un centre propagateur de
civilisation française.
Nous sommes de ceux qui pensons qu'il
importe de soutenir tous les intérêts agrico-
les coloniaux et surtout ceux du colon ou
planteur français.
En dehors des raisons qui viennent d'être
énoncées, il faut savoir apprecier ce qu'a
d'inestimable la présence permanente dans
telles colonies, dont le climat est peu pro-
pice au peuplement blanc, des gens de no-
.tre race qui, par leurs groupes essaimes,
facilitent la pénétration de l'influence fran-
çaise dans nos possessions.
Si nous plaidons en faveur de nos com-
patriotes travaillant à leur compte, c'est
qu'aussi nous voyons trop la colonisation
appliquée à la terre s'exprimer sous la for-
mule moderne, en vérité, souvent nécessaire,
de sociétés anonymes. organes de concentra-
tion capitaliste dont la relative utilité sociale
n'est pas assez compensée par les avantages
maténels qu'elle apporte au delà des mers.
Ici, aucun attachement au sol; tout pour
la firme et le siège social, direction chan-
geant souvent de tête, une âpreté au gain
génératrice de contrainte pour le travailleur
et parfois étalage éhonté d'improbité finan-
cière. De la part des indigènes, aucun sen-
timent de considération à l'égard des Com-
pagnies, le plus souvent des revendications
;t même des grèves.
On est bien loin ici de l'esprit patriar-
:al et familial qui règne dans les entre-
arises de la plupart des colons. Ce n'est
pas d'ailleurs d'aujourd'hui que le colon
français a fait connaître ses qualités.
Au Canada, se sont établis jadis des
nilliers de colons français qui ont conser-'
ré les traditions de travail de leur pro-
vince d'origine. Ceux-là ont donné Aoute
la mesure des possibilités de notre ter-
rien.
Or ce type de colon nous rappelle à
beaucoup d'égards son pareil dans nos co-
lonies. C'est un rural dans l'âme. Il
aime la terre et le lieu où il s'est fixé.
C'est un grand défricheur. Il s'adonne,
lui aussi, à la polyculture, ou tout au moins
ne se spécialise pas à l'excès. Il ne cherche
pas à s'enrichir en quelques années, niais
travaille simplement pour subvenir à ses
besoins limités, et s'il a des méthodes re-
lativement arriérées, il possède une grande
qualité, la patience, appuyée sur l'idée
qu'on ne fait rien de durable qu'avec le
temps. De si heureuses dispositions lui
permettent de résister à toutes les crises.
A côté de lui, le colon anglais qui prend
volontiers le genre américain offre un
exemple qui se rattacherait plutôt a la fa-
çon d'opérer de nos sociétés coloniales.
Certes, son outillage est parfait et ses
méthodes de culture ultra-modernes, mais
c'est un homme pressé, avide de recueil-
lir en quelques saisons de quoi vendre sa
ferme et s'établir ailleurs. Il ne cesse de
spéculer, l'esprit toujours tendu et agité,
mais, par contre, souvent enferré dans les
dettes, il sombre dans la misère avec la plus
grande facilité.
Dans nos colonies l'exploitant français,
avec son exploitation de petite étendue, est
le petit patron de l'artisanat paysan colo-
nial.
Or cette classe moyenne, peut-on dire,
en ce qu'elle occupe une place intermé-
diaire entre le paysan indigène et les gros-
Sb sociétés, mérite toute la bienveillance
active de l'Administration.
Les conditions dans lesquelles vivent ces
propriétaires sont souvent pérubles, parce
qu'ils n'ont pas les facilités de crédit des
grosses affaires auxquelles la concentration
assure un état de supériorité sur eux dans
la concurrence économique. Loin d'être,
comme on aurait tendance à le croire, des
exploiteurs et des gens qui s'enrichissent en
un tournemain, ils n'ont le plus souvent
qu'une situation à peine aisée, et, pour la
décade qui vient de s'écouler, ont traîné,
en Indochine, notamment, ce qu'on pourrait
appeler une misère dorée.
C'est le cas, par exemple, des planteurs
dî café du moyen Tonkin et des plateaux
de l'Annam. Certains out-ils vu trop grand
et ont-ils donné à leur culture une exten-
sion que ne permettaient pas leurs moyens fi-
nanciers ? D'autres ont-ils eu le tort de
s'installer sur un sol ingrat, rebelle à un
rendement normal ? Peut-être ces reproches
sont-ils fondés, dans une certaine mesure. ¡
Mais ces planteurs ont été parfois bien mal
secondés par des services techniques plus ou
moins compétents. Ils ont été aussi poussés
souvent à la dépense par les conseils inté-
ressés de certaines banques démarcheuses.
En tous cas, que leurs efforts soient per-
dus et que l'on voie ce spectacle affligeant
d'établissements de crédit et surtout de so-
ciétés anonymes évincer ces bons ouvriers
de l'œuvre française aux colonies, tout cela
serait bien regrettable.
L'envie ne pourra alors reprocher à ces
hommes d'être trop exigeants lorsqu'ils ex-
priment leur desiderata que lorsque leur
situation ne sera plus aussi incertaine et
aussi peu comprise. Le « fortunatos ni-
mium » de Virgile, c'est-à-dire un bonheur
cessif, n'a pas été jusqu'ici leur fait.
J. Luquot,
Député de la Gironde,
Membre de la Commission
de la marine marchande.
AUDIENCES
A L'ELYSEE
Mfl Lebrun, président de la République a
reçu avant-hier M. Viénot, sous-secrétaire
d'Etat aux Affaires étrangères, retour de Tu-
nisie.
Il a aussi reçu Me Larrouy, avocat au bar-
reau de Fez et Mc Le Cesne, avocat à la cour
de Paris, venus l' entretenir du recours en grâce
formé par Jidnikoff, dit Modivonoff, condamné
à mort par le tribunal militaire de Meknès.
AU QUAI D'ORSAY
M. Viénot, sous-secrétaire d'Etat aux Af-
faires étrangères, a reçu hier matin le général
Noguès, Résident général au Maroc.
-—————————— ) -*OE» (
Le Destour
et le Front populaire
M. Habib Bourguiba, leader du Parti cons-
titutionnel de Tunisie, actuellement à Paris
où il semble devoir se fixer, a, lundi dernier,
au cours d'une réunion privée, exposé la si-
tuation tunisienne à un certain nombre de
personnalités du Front populaire. On notait
outre les représentants des partis radical,
S.F.I.O. et de la C.G.T., M. Maurice Thorez
pour le parti communiste et M. Charles Lau,
rent, de la Fédération des fonctionnaires.
Prenant la parole après l'expose de M.
Habib Bourguiba, M. Maurice Thorez a
d'abord rappelé la grande sympathie des
communistes pour )Ps peuples colonisés puis
il s'est félicité que le desiour juge insépara-
ble le sort de la Tunisie et de la France dé-
mocratique dans la lutte pour la Paix contre
le fascisme international.
Il t a souligné aussi la nécessité de faire
droit rapidement aux modestes et légitimes
revendications du peuple tunisien.
Un député pour l'Indochine
La loi du 28 juillet 1881, relative à la
représentation au Parlement de l'Algérie et des
colonies a accordé un siège de député à la
Cochincnine.
A cette époque, le nombre des Français ins-
tallés dans les quatre autres pays de l'Union
était trop peu important pour qu une représen-
tation au parlement fût envisagée. Depuis,
l'Union s'étant formée et développée; on
compte cinq mille électeurs en Annam, Ton-
kin, Cambodge et Laos.
Ce nombre ne paraissant pas suffisant pour
permettre la création d'un nouveau siège de
député, un projet de loi vient d'être déposé
pour 'que le député de la Cochinchine devien-
ne le député de l'Indochine en joignant, pour
l'élection, tous les Français résidant actuelle-
ment dans la péninsule asiatique.
L'idée est excellente, les cinq pays de
l'Union étant alors représentés à la Chambre,
mais l' on ne voit pas très bien comment les
candidats pourront prendre contact avec leurs
électeurs au cours de la campagne électorale,
— à moins d'avoir un avion continuellement à
leur disposition.
Pour le Haut Comité
méditerranéen
Après le général Noguès, Résident général
au Maroc, M. Le Beau, Gouverneur général
de l'Afrique, est arrivé ce matin en gare d'Or-
say, venant d'Alger par El-Kantara, courrier
de Port- Vendres..
M, Guililon, Résident général en Tunisie
s'est embarqué sur le Gouverneur-Général-Jon-
nart. Il sera à Paris dans la soirée.
Les intérêts de h France
en Afrique orientale -',
ES meilleurs discours ne
sont pas toujours les
plus longs. L'autre
jour, à l'issue de l'in-
terpellation de M. Plai-
sant, M. Hachette, sé-
nateur 4e l'Aisne, en
a prononcé un, d'une
concision voulue, mais
substantiel à souhait.
Il a su, en quel-
ques mots. indiouer.
avec une netteté parfaite, quelle est la situation
actuelle de la France, sur les confins de l'Ethio-
pie.
La France, qui a créé, il y a 37 ans, et de
toutes pièces le port et la ville de Djibouti, « bi-
jou de la colonisation française », contrôle tou-
jours Je chemin de fer franco-éthiopien, qui est
une de ses grandes créations.
Naturellement, elle n'entend pas renoncer à
ses droits. Bien au contraire.
D'un côté, le ministre des Colonies se propose
d'agrandir le port. Et d'importants travaux vien-
nent d'être mis en adjudication, car on veut équi.
per Djibouti à la moderne et lui donner des ins-
tallations nouvelles. De telles améliorations sont
absolument nécessaires, et doivent être réalisées
sans retard.
Mais, en outre, notre chemin de fer est tâchas,
surtout à cette heyre, un « atout » merveilleux,
dont nous devons nous servir. Très loyalement,
nous l'avons mis, quand il a fallu, à la disposi-
tion des Italiens, auxquels il a rendu et rend des
services signalés. Ils n'hésitent pas d'ailleurs à
le reconnaître eux-mêmes.
Il est évident que l'Italie, soit pour le port,
soit pour le chemin de fer, va devenir un de nos
meilleurs clients, un client de choix qu'il impor-
te de soigner.
C'est pour cela que nous devons dès mainte-
nant songer à la révision de nos tarifs douaniers,
qui sont beaucoup trop lourds.
Nous avons à les adapter et à nous adapter
nous-mêmes aux circonstances exceptionnelles
que nous traversons.
Il n'est que de le vouloir énergiquement.
« Quod vis, nimium velis. Nam, leviter velle,
nolle est ». Que de fois la France a vérifié, à
son plus grand dam, l'exactitude du vieil adage I j
Le moment est venu pour nous de le faire
mentir et de donner à notre belle colonie d'Afri-
que orientale la prospérité qu'elle mérite.
Nous remercions notre collègue M. Hachette
de nous l'avoir rappelé, avec compétence et avec
talent.
Jean Philip,
.Sénateur du Gers,
membre de la Commission des-
Finances, membre de la Comma..
sion des Colonies.
————————— ) -.- ( ——————————
Elections au Conseil supérieur
de la France d'outre-mer
En Cochinchine
L'élection de M. Bui Quang Chieu en qua-
lité de délégué représentant les populations au-
tochtones a été ratifiée.
————————— ) - ( —————————
Que se passe-t-il à la Fédération
française des coloniaux et
anciens coloniaux"?
Le « Syndicat (en formation) de Défense des
intérêts des oeuvres de la Fédération française
des coloniaux et anciens coloniaux », 24, rue
La Condamine, Paris, nous communique la note
suivante :
Un scandale d'importance est sua- le point
d'éclater à la Fédération française des co-
loniaux et anciens coloniaux, 40, rue de
Châteaiudun, ù Paris, au sujet des dixièmes
de la Loterie nationale, dont les Pouvoirs
.publics viennent de lui interdire l'émission
et la vente et ont ordonné une enquête à la
suite d'émission d'un chèque sans provi-
sion.
Un groupe de Défense des intérêts des
œuvres de la fédération française des co-
loniaux et anciens coloniaux vient de se
constituer. Il a déjà réuni un grand nombre
de camarades adhérents qui, indignés de la
gestion personnelle et inconsidérée du pré-
sident fédéral, demandent à M. le ministre
des Colonies saisi d'un rapport d'enquête,
de prendre d urgence vis-à-vis des dirigeants
responsables les mesures d'assainissement
qui s'imposent.
Un prochain communiqué donnem la
constitution du bureau provisoire.
Nous ne pouvons pas ne pas insérer cette
note. Ceci sous toutes les réserves d'usage. Si
M. Marius Moutet, ministre des Colonies, est
saisi d'un rapport d'enquête, la réalité ne tar-
dera pas à nous être connue.
) ..e (
AUTOUR DU SANDJAK
D'ALEXANDRETTE
La Mission de la S.D.N.
Les observateurs de la Société des nations
venant dit Sandjak d'Alexandrette sont ar-
rivés hier à Ankara. Ils rentreront directe-
ment à Genève via IStamboul.
—
Une délégation commerciale
allemande à la Foire de Tripoli
Une délégation commerciale allemande,
conduite par le professeur Car Luer, chef
de la Fédération du commerce du Rcich, est
attendue à Rome la semaine prochaine.
Sur l'invitation du président de la Confé-
dération fasciste du commerce, cette déléga-
tion se rendra à Tripolij où elle assistera
à l'inauguration de la fotre, par. M. MttsSO-
lini.
De quelles réformes
=ta Tunisie a-t-elle besoin?
Le mal « sérieux » dont souffre la Tunisie,
il importe qu'il soit précisé, la sûreté du dia-
gnostic étant, à notre avis, indispensable pour
appliquer un remède efficace.
La situation actuelle, aussi sombre qu'on
puisse l'estimer, n'est pas Le fait d'une longue
suite d'erreurs politiques et administratives,
comme on s'est plu un peu trop à le dire —
sans jamais le prouver d'ailleurs — eUe est
seulement consécutive à la crise mondiale qui
a frappé également colonies et métropole; mais
pour la Tunisie le destin a voulu qu'au moment
où les mesures de sauvetage et de redressement
devaient donner leur plein effet, une période
de sécheresse exceptionnelle vînt s' abattre sur
le pays tout entier, le replongeant dans la dé-
tresse de laquelle il se préparait à sortir.
Voilà la vérité, il n' y en a point d'autre.
Et la preuve, c'est que les budgets tunisiens
jusqu' en 1929 se sont toujours soldés avec des
excédents importants qui ont permis de créer un
outillage économique et social de premier ordre,
sans recourir à une fiscalité excessive, en faisant
appel très modérément à l'emprunt.
Cette gestion financière et administrative, qui
a pu être citée comme modèle, démontre com-
bien la politique du protectorat, qui a toujours
er > à travers les événements et les hommes,
le reflet fidèle de la politique de la France, a
été sage et bienfaisante. Nous devons donc, les
uns et les autres, reconnaître et proclamer la
pérennité de l' œuvre française, ses traditions
de libéralisme et de fermeté qui s'insèrent dans
les faits, dès les débuts mêmes du protectorat.
Ce qui a fait la force de La politique fran-
çaise jusqu'à présent — et nous souhaitons
qu elle le fasse dans l'avenir — c est qu'elle a
su et pu dégager, au fur et à mesure que s'ac-
complissaient les améliorations, dans l'orare éco-
nomique, les conditions nécessaires à une évolu-
tion libérale et démocratique des institutions,
Représentons-nous les difficultés de la tâche :
une société humaine à structure religieuse et
féodale, tirant sa maigre subsistance d'une terre
pauvrement outillée, qu'il a fallu faire glisser
peu à peu sur le plan d'un pays moderne, sans
pour cela toucher à ses assises morales fonda-
mentales. - En un demi-siècle, ce tour de force
a été réalisé. Je ne dis pas pleinement réalisé,
car il reste encore beaucoup à faire dans tous
les domaines, le protectorat français étant parti
de très bas du point de vue économique et poli-
tique. Mais ce qu'il reste à faire doit être
accompli avec ce sens de la mesure et de l'op-
portunité qui a été jusqu'à présent la marque
de l'orgoezbWort-France, si je puis dire.
Pour aussi urgentes que soient les réformes
qu en haut lieu on se propose de réaliser, nous
aimerions qu'on se plût avant tout à en faire
la discrimination et en établir le degré d'ur-
gence. Nous continuons à penaer, malgré tout
le mal que certains se donnent pour nous faire
croire te contraire, que le malaise tunisien étant
d' origine économique, c'est bien dans le do-
maine de l'économie qu'il convient d'agir au
plus vite. Deux millions et demi d'indigènes
vivent de la terre et sont dans la détresste quand
la terre ne produit pas ou pas assez, l'essentiel
du problème est là, il n'est pas ailleurs.
Revaloriser la terre, permettre à l'homme
de s' élever au moyen du travail de la terre,
c'est la solution du problème. Solution qui im-
plique l'assainissement du régime foncier, l'or-
ganisation du crédit agricole, l'amélioration de
la technique et des cultures, le développement
de l'enseignement rural, l'aménagement des
forces hydrauliques, la décentralisation admi-
nistrative, et d' autres mesures qui, toutes, doi-
vent tendre à assurer un minimum de stabilité
dans la production agricole, et d'une manière
générale dans la vie économique du pays. C'est
seulement lorsque l'équilibre entre le pouvoir
de production et les besoins de la consomma-
tion sera réalisé bon an mal an, que l'on pourra
passer au programme politique, qui consiste
pour d'aucuns à placer au préalable des urnes
dans tous les douars et cheikhats I.
Au surplus, une agitation électorale n'est
actuellement pas souhaitable. Nous sommes en-
core trop près de certains événements pour
espérer que les passions politiques ne réveille-
ront pas des rancœurs et des haines qui s'étei-
Quand on fait appel à la collaboration de
tous et quand on a le légitime espoir d'y comp-
ter pour le présent et plus encore pour l'avenir,
il est indispensable d'agir avec méthode, pon-
dération et fermeté, et surtout de prendre son
point d'appui dans l'œuvre qui a été accom-
plie dans le passé et dont nul ne peut contester
la grandeur et la solidité.
Ce sont là quelques vérités d'évidence que
nous tenions à rappeler à travers notre expé-
rience des hommes et des choses de ce pays,
au moment où celui-ci peut être engagé dans
une voie (bien que choisie avec les Meilleures
intentions) qui ne corresponde pas à son véri-
table destin.
Arthur Pellegrin.
r Délégué au Grand Conseil dé la Tunisie.
Après le voyage en Tunisie
de M. Viénot
A son arrivée à Marignane, mardi matin,
M. Pierre Viénot. sous-secrétaire d'Etat aux
Affaires étrangères, venant de Tunisie, à fait
les déclarations suivantes :
En accomplissant ce voyage, j'ai voulu mar-
quer tout d'abord le grand intérêt que porte à
a Tunisie le gouvernement français et t impor-
tance qu'il attache aux problèmes que pose pour
la France l'accomplissement de sa mission en
Afrique du Nord.
En Tunisie comme dans le reste du monde,
notre pays ne fondera rien sur la contrainte,
même s'il devait l'employer pour un pouvoir
durable.
Le communisme
devant l'Afrique du Nord
L'Agence Radio a lancé de Séville, le
2 mars, le télégramme suioant:
Parmi les papiers et les documents d'ori-
gine russe trouvés le long de la côte, près
de Malaga, on a découvert des plans et
des feuilles imprimées en arabe, en espa-
gnol et en français, en vue de la libération
du Maroc.
Des tracts et des brochures illustrées de
la même. organisation ont été trouvés dans
de grandes malles cachées dans des caNes.
Les milieux nationalistes pensent se trou-
ver en présence d'un vaste programme de
propagande communiste en Afrique, qui
commencerait par le Maroc espagnol et le
Maroc français.
De grandes cartes géographiques de la ré-
gion nord-africaine s'étendant jusqu'au dé-
sert de Lybie, indiquent qu'il s'agit là d'un
plan de grande envergure.
A la suite du passage au Maroc de notre
directeur, nous avions annoncé — et notam-
ment le 22 janvier, dans notre article Le Tri-
dent qui menace le Maroc — que la propa-
gande communiste était entrée dans une phase
extrêmement active, et qu'il serait urgent que
le gouvernement s'en inquiétât.
La question est, une fois de plus, très nette-
ment posée.
Les masses indigènes sont nerveuses et irri-
tables. Sensibles à l'excès, elles réagissent de
suite et sont capables des actes les plus irré-
fléchis. Est-ce leur bonheur, leur bien-être,
leur prospérité, que défend le communisme ?
Il nous semble que ce sont là les mêmes préoc-
cupations que les nôires. Les voies n'en sont
même pas différentes. Le communisme, pas
plu* que n'importe quelle formule politique, ne
peut, à l'heure actuelle, modifier les condi-
tions économiques du monde. Il les a, bien au
contraire, par son inexpérience ou ses calculs,
singulièrement aggravées. Le produit alimen-
taire, avant la guerre, était mieux distribué
qu'il ne l'est aujourd'hui, et cependant l'être
humain, avant d'être parfois une intelligence
ou tout au moins un cerveau, est un animal qui
doit vivre comme tous les animaux.
Nous ne sommes pas les ennemis de la révo-
lution sociale — loin de là! Nous applaudis-
sons à celle que la France, au point de vue in-
digène, favorise à l'heure actuelle en Afrique
noire. Mais comme nous sommes l'ennemi du
sang versé, et que le communisme entraîne
l'Afrique du Nord à la révolte sanglante, nous
accomplissons notre modeste devoir d'informa-
teur en stipulant que la France, dans cette
bagarre sociale, risque de perdre aussi bien
l'Algérie que la Tunisie et le Maroc.
Vers l'abolition des Colonies
; Par les voies détournées de Genève
On mène grand bruit, il y a grosses palabres
et grand tam-tam, autour des revendications
coloniales de l'Allemagne ou de la Pologne.
D éminent* hommes rl EÚJt. el Londres comme
à Paris, affirment avec une force pcrsaùsioe
qu'à aucun moment leurs Etats n'abandonneront
un mètre carré de leurs possessions d'oatre-mer.
Le peuple. malgré les réponses et les hargnes
de Berlin, de Leipzig ou de Varsovie, s'en *a
content. On le rassure : il ne demande qu'à
être rassuré.
Mais, prenant dans la guerre des enseigne-
ments féconds, la politique des revendications
mène un travail de sape. Ne découvrirons-nous
les mines qu'à f instant où nous sauterons ? A
côté de la scène politique, destinée à amuser
le chaland, il y a, derrière la cloilon, dans
l'arène, la bataille qui se prépare : elle com-
mencera lundi à Genève, dès la première réu-
nion de la Conférence internationale des Ma-
tières premières.
C'est le cheval de Troie. L'unique danger
est là. Nue, dépouillée de toute vaine décla-
mation, de tout appel sentimental, la question
coloniale est posée avec une netteté surprenante.
On nous demandera de nous démettre, ou de
nous loumettre. Qui défendra nos droits ? Nos
colonies sont absentes de ce débat.
Voici, extraits du mémoire analysant les di-
verses propositions ou suggestions qui seront dé-
battues à la conférence, deux postes de dis-
cussion :
D) un préconisé a autre part ia. ëcut-'<~
tion dans tous les domaines coloniaux d'un ré-
gime de porte ouverte (tel le régime existant
par suite d'obligations contractuelles dans
le bassin conventionnel du Congo, au Maroc,
en Afrique Occidentale française), ainsi que
dans les territoires sous mandat A et B
ou encore le régime d'égalité commerciale
librement consenti qui existait jadis dans
l'empire colonial britannique et qui subsiste
encore — sauf quelques contingentements
— dans les Indes néerlandaises.
c) La transformation des colonies en pays
sous mandat, ou bien le transfert de l'ad-
ministration des colonies, à. un organisme
international, est également représenté com-
me une solution possible.
Le sort des nations coloniales, que nul ne
croyait encore engagé à ce point, va se jouer
ainsi à Genève. La France ne sera représentée
à cette conférence que par un Gouverneur ho-
noraire de la Banque de France, M. Charles
Rist.
Le ministère des Colonies ne pourrait-il dé-
léguer un ou plusieurs de ses hauts fonction-
naires ?
Il nous semble que cela en vaut la peine :
c'est la vie même de nos colonies qui est en
jeu.
Le nouveau visage
de l'Afrique
VI. — La Guinée drapée de torpeur et de beauté
par Raoul Monmarson.
Dalaba, 15 février 1937.
Les dernières montagnes de Man se sont
effacées. Celles de N'Zérékoré commencent.
Une harmonie est dans l'atmosphère. C'est
ce bleuté irréel, cette tendre pudeur des som-
mets, cette immobile attente dans réternel,
durant que sur la route pleine de feu la savane,
sèche comme des acrimonies de vieille femme,
exhale son odeur fade et brûlante.
La Haute-Guinée s' est ainsi présentée. Ce
n'est plus la Côte d' Ivoire, ce n'est pas en-
core le Soudan. Des lambeaux de forêt trai-
nent, à l'abandon, comme des débris de la
Grande Armée durent s'échelonner au retour
de Moscou. La route n 'a pas, ici, attiré les
villages. Ils conservent contre elle un écran,
quelques centaines de mètres de brousse. Plus
de circulation intense, bariolée, pittoresque,
comme sur les latérites de la Côte d'Ivoire.
Suspendues dans l'air, des montagnes bleu-
tées. Massés sans discipline, des ramassis d'ar-
bres puissants. De temps à autre, une savane
boisée, qui semble pleine d'électricité. Par-
fois la savane nue, qui se consume d'impuis-
sance et de rage sous le soleil. A quelques en-
cablures, les fonds du Liberia.
Plus tard, nous aborderons le poste de
Guéckédou, au confluent des trois frontières :
Guinée française, Liberia, Sierra-Leone. Les
cercles de N'Zérékoré et de Macenta sont donc
sous commandement militaire. Entre eux, une
splendeur, une trentaine de kilomètres de mon-
tagne, croulant sous une forêt sombre et dense,
avec une route difficile. Aspects majestueux,
pleins de mystère et de grandeur, que le
Mayumbe nous fit connaitre, de M'Vouti à
Monzi.
•%
Nous retrouvons, dans sa formule de na-
guère. la « colonie », la brousse sans Euro-
péens, presque sans vie, sur laquelle cepen-
dant le miracle humain a tracé ses routes. On
songe que Konakry a dû balancer par-dessus
son épaule ces fonds de territoires, si nette-
ment hors de son axe ferroviaire, et de ses
préoccupations maritimes ou soudanaises. Ce
sont les réserves que la baguette magique tou-
çhera un jour. Beyla, Kissidougou en sont
les postes avancés. Kankan, terminus de la
voie ferrée, en est l'état-major.
Il faut monter à Siguiri pour comprendre que
toute cette région est soudanaise, et que Bamako
commence à exercer sur elle un singulier attrait.
Une obscure rivalité s engage. Est-ce le fait
que la taxe sur le chiffre d' affaires est moins
élevée au Soudan qu'en Guinée (presque du
simple au double), les commerçants se ravi-
taillent de préférence par Bamako. Le placer de
Kolegniagbé, dans lequel, suivant le régime
des eaux, 30.000 ou 60.000 indigènes creusent
leurs puits d' or, cohue compacte, grouillante,
chantante, désordonnée, ramassée sur 4 ou
5 kilomètres carrés, est à mi-chemin entre
Kankan et Bamako. Toutes les races y tra-
vaillent, et non plus seulement guinéennes.
Cette excroissance paradoxale, dont un ro-
mancier à la Paul Adam tirerait des images
sauvages et puissantes, semble rattachée à la
Guinée uniquement par les fantaisies oolitiaues
de l'époque. Le Soudan absorbera ce cercle
un jour ou l'autre. Le Soudan est d'abord comme
un offertoire de l'épopée africaine. Le poste
de Siguiri fera tomber dans les pièces de son
Musée les logements de Gallieni et de Man-
gm.
Siguiri se défend de Kankan par la traversée
du Niger, romantique comme celle de rEu-
phrate entre Mossoul et Kirkouk. Il est de plus
gardé encore, à 6 kilomètres, par le Tinkisso.
Deux bacs, dont l' un est interminable, une
population active. éveillée, en indéniable puis-
sance de progression. Il n'en faudra pas plus
pour que' Siguiri compense, pour le Soudan,
la perte, au profit de la Côte d'Ivoire, de Sikaa-
so et de Fada N'Gourma.
♦%
Nous poumons de suite entamer la discus-
sion de ce qui formera la conclusion de ces
articles. Nous allons, à Dalaba et Mamou,
abandonner la Guinée soudanaise pour péné-
trer dans < la région où la colonisation euro-
péenne s 'essouffle. Le problème des basses
côtes, des terre-pleins d' exportation, va être
à nouveau posé. Attendons donc que ce second
exemple s' ajoute à notre argumentation.
Nous songeons à l'homme qui dirigea durant
de si longues années les destinées de la Gui-
née : au gouverneur Poiret. Le premier, roman-
tiquement attaché aux images - de Millet, il
songea au paysan noir. Il le voulut courbé sur
la terre, ajoutant les uns aux autres, comme
les fils d' une immense trame, les sillons aux
sillons. Ces horizons immenses, veloutés, im-
matériels comme les paysages de Puvis de
Chavannes, lui permettaient de faire ce rêve.
Mais le gouverneur Poiret est mort, et le pay-
san guinéen n'est pas né. Il bricole et subsiste
médiocrement, cependant que la basse côte,
au ventre vide. en appelle sans arrêt au ravi-
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