Titre : Les Annales coloniales : organe de la "France coloniale moderne" / directeur : Marcel Ruedel
Auteur : France coloniale moderne. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1929-08-31
Contributeur : Ruedel, Marcel. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32693410p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 11726 Nombre total de vues : 11726
Description : 31 août 1929 31 août 1929
Description : 1929/08/31 (A30,N130). 1929/08/31 (A30,N130).
Description : Collection numérique : Bibliothèque Francophone... Collection numérique : Bibliothèque Francophone Numérique
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Appartient à l’ensemble documentaire : RfnHisg1 Appartient à l’ensemble documentaire : RfnHisg1
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62806051
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-LC12-252
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 16/01/2013
TRENTIEME ANNEE. Ne 130.
LE NUMERO : 90 CENTIMES
SAMEDI SOI1V-ÎÎ AOtJT 196N.
MMML OUOTtDtM
1 Rédaction &Administration s
M, .R -.
PARIS O-)
TIlUPH. 1 LOUVHIIMT
RI CHILI BU1744
Les Annales Coloniales
LM annonces et réclames sont reçues att
bureau du jeumal.
DIRECTEUR-FONDATEUR : Marcel RUEDEL
Tous les articles publiés dans noire iournal ne peuvent
être reproduits qu'en citant les Arnalcs COLOIIALU.
ABONNEMENTS -
tlNe la Revue mensuelle :
U. la MCJÍ~ S'M.il
- - -
Franc. et
Colonies 1M e 100 » 50..
ttrancer' - 240 » 126 r 70*
On s'abonna sans fraii dm
tous les bureaux db poste.
LE CANAL DE NAVIGATION
1 ET LES IRRIGATIONS DU SONC-CAD
r -.a.:a
Le 14 juin dernier a été inauguré par
11. le Gouverneur Général Pasquier le canal
de navigation du Song-Cau.
Il y a quelque 30 ans, ainsi que le rappe-
lait M. le Résident Supérieur Robin, cette
partie du Tonkin, que traverse le Song-Cau,
était la dernière province civile de notre co-
lonie, région délaissée où la piraterie exer-
çait ses ravages. La piraterie y était deve-
Due. une sorte d'institution régulière, pil-
alant et rançonnant, obligeant les villages,
« s'ils voulaient détourner la dévastation et
eéviter le massacre, à fournir eux-mêmes
a des recrues aux chefs de bandes, chefs re-
a doutés dont le nom et les exploits sont
a encore dans toutes les mémoires. *
Seuls, quelques hardis prospecteurs étaient
venus s'y établir, au prix de quelles peines.
pour rechercher le minerai et le charbon
dont le sous-sol est particulièrement riche.
Une rare population indigène, tenace et la-
borieuse, s'y était peu à peu installée, dans
des agglomérations misérables, à mesure que
la Garde Indigène y ramenait la sécurité.
Mais les efforts des premiers colons y
étaient paralysés par l'absence de voies dl'
tommunication et les indigènes ne pouvaient
y trouver leur subsistance, la terre, faute
d'une irrigation suffisante, étant impropre
aux riz du cinquième mois et ne pouvant
qu avec peine porter la récolte du dixième
JUOIS.
Aujourd'hui, cette région déshéritée est en
passe de devenir une CI Hollande prospère P,
sillonnée de lourdes péniches, exploitée jus-
que dans le tréfonds de son sol, couverte de
rizières verdoyantes. Ce miracle, semblable
à celui que la tradition attribue à la verge
de Moïse, c'est l'exécution du canal du Song-
Cau. Le miracle de l'eau sera toujours, dans
tous les âges et sous toutes les latitudes brÎl-
Jantes, l'origine de 1 œuvre de vie et de civi-
lisation.
Les études en lurent commencées en 1905.
M'ais à cette époque, les ressources linanciè-
tes firent défaut, Puis vint la guerre. C'est
en 1922 que furent entrepris les travaux du
«tanal principal.
Les difficultés à vaincre furent considéra-
Iles, tenant à la nature du sol, qui nécessita
J'emploi d'un matériel perfectionné, (trains
Pecauville, outillage mécanique), aux crues
annuelles qui obligeaient d'interrompre le
creusement pendant plusieurs mois, à l'in-
tolubrité de la région, où le service de Santé
mal fort à faire pour préserver les travail-
leurs du paludisme.
Aujourd'hui achevé, le canal du SOng-Cau,
long de 53 km., est le plus long canal à
écluses existant en Indochine. Il a nécessité
trois millions de mètres cubes de terrasse-
ments. l'révu tout d'aljord avec 9 mètres
de plafond et 1 m. 70 de tirant d'eau, on a
été amené par la suite à lui donner 10 mètres
de plafond, 2 m. 40 de tirant d'eau et des
rayons de 300 mètres. Huit écluses, dont
deux de garde, le divisent en 7 biefs, p(>r-
mettant la descente des i>éniehes de in cote
21 à la cote O. Etablies pour des péniches
de 300 tonnes, elles ont au minimum 50
mètres de longueur de sas et laissent entre
murs de tête un passage libre de 6 mètres
de longueur.
Les principaux ouvrages sont : les bar-
rages de Tac-Oun, avec son pont en béton ar-
mé, et du Da-Gan; l'ouvrage de prise, qui
comporte 10 ouvertures de 1 m. 30 fermées
par des vannes à galets placées dans le corps
de l'ouvrage et pouvant être maœuvrées de
la plate-forme du remblai ; les écluses du
Song-Cau et du Song-Thuong, cette dernière
munie de deux systèmes de portes, l'un
utilisé pour la navigation, l'autre pour la dé-
fense contre les crues de la rivière ; et le
siphon de Van-Cia qui assure sous le canal
le passage d'un important ruisseau. IEn de-
hors de ces ouvrages, il faut également men-
tionner six écluses de navigation, trois dé-
versoirs de superficie, quatre siphons en bé-
ton armé avec deux aqueducs en maçonne-
rie et huit ponts-levis établis à la traversée
des routes et dont la manœuvre rapide peut
Itre aisément assurée par un seul coolie.
Parallèlement au canal de navigation sera
établi un réseau d'irrigation d'un dévelop-
pement total de 192 kilomètres. Il comporte-
ra 7 artères, dont une artère de flottage, et
12 sous-artères. Les artérioles non encore
étudiées auront une longueur proportionnée
à celle du réseau (2.000 kilomètres environ).
Les dépenses engagées sont de 2.330.000
piastres pour le canal de navigation. Pour
le réseau d'irrigation, les prévisions qui
étaient de 700.000 $ seront dépassés par
suite de l'augmentation du prix de la main-
d'œuvre et des matières premières. La dé-
pense totale s'élèvera vraisemblablement pour
le réseau complet à 4 millions de piastres.
Le trafic maximum possible sur le canal
de navigation, en supposant un va-et-vient
contraire de chalands de 300 tonnes chaque
•jour pendant 12 heures, atteindrait 2.600.000
tonnes par an, tonnage qui exigerait une
totte de 143 chalands. Ce trafic pourrait
même être doublé en plaçant en même temps
deux bateaux dans chaque écluse, ainsi que
le permettent les dimensions de ces ouvra-
ses.
En pratique, le trafic sera surtout alimenté
par les produits miniers et agricoles de la
région. Dès maintenant, les mines de char-
bon de Phan-Me peuvent fournir une produc-
tion annuelle de 50.000 tonnes, susceptible
de doubler d'ici trois ans. Vers la même épo-
que, des mines de fer pourront donner de
100 à 200.000 tonnes de minerai par an.
On peut estimer à 50.000 tonnes les pro-
duits agricoles et d'autres produits miniers.
En 1935, on peut compter sur une augmen-
tation de la production minière et agricole
qui permettrait d'atteindre 700.000 tonnes.
En outre, des trains de bois et des radeaux
de bambous emprunteront à certains moments
de l'année le canal jusqu'au kilomètre 22,
puis l'artère 3 et la sous-artère 1, pour re-
joindre ensuite le Song-Cau à la hauteur
de Cam-Bao.
Ainsi le canal de navigation mettra en
relations directes les centres miniers de la
province avec le port de Haï-Phong et le
système d'irrigation permettra, suivant l'ex-
pression même du Gouverneur Général « de
a déverser sur 34 mille hectares par les
c ouvrages de prise et les mailles d'un ré-
« seau d'artères et d'artérioles, l'eau fécon-
« dante et lourde du Song-Cau, transfoimanl
t une région jadis pauvre et délaissée en
« une plaine où ondulera pendant deux sai-
« sons le riz indispensable à la vie de l'An-
« namite. •
Georgea JVottefle,
Député de Saône-et-Loire, vice-président
de la Commission des Colonies,
membre de la t'ommission des
Mines.
Dépêches de l'Indochine
Au Cambodge
Avant de clore ses travaur, l'assemblée
consultative indigène du Cambodge a
adressé au Gouverneur (;énérat les assu-
rances de son dévouement et de sa gratt-
tude pour les nombreuses marques de solli-
citude données au Cambodge.
L'assemblée prie le Gouverneur Général
de transmettre au l'résident de la Ilépubli-
que et au ministre des Colonies la déférente
expression du fidèle attachement et du
loyalisme absolu du Cambodge.
Au Yunnan
Le Directoire provincial a reçu de Nankim
l'ordre d'organiser le service militaire obli-
gatoire. les hommes seront soumis aux
lois de recrutement de 18 à 45 ans.
On annonce qu'à la suite de combats en-
tre les chefs militaires locaux, la ville de
Kouci-Yang, capitale de la province de
Kouei-Tchéou. a été incendiée en partie.
Le délégué envoyé par Nankin pour réor-
ganiser la province, le général Ly-Siao-Ya,
et qui est arrivé appuyé par les troupes
yunnanaises a été chassé de Kouci-Tchéou.
Le gouvernement central a désigné deux
autres fonctionnaires pour le remplacer.
Les cours du change sont en amélioration
sensible. 740 dollars uunnanais valent 100
dollars 1. C.
q-_.-,.. -. -. (Indopacifi.)
La santé du roi de Siam
Suivant des nouvelles reçues de Batavia, le
roi de Siam, qui faisait un voyage aux In-
des néerlandaises, est tombé malade le
27 août à Wonosobo, à la suite d'un accès
de fièvre paludéenne. Les visites qu'il de-
vait faire à Solo et à Djocja ont été ajour-
nées respectivement au ior et 5 septembre.
Un prince siamois à Paris
ses
Le général Purachatra, prince de Kam-
baeng et frère du roi de Siam, accompagné
de sa fille, la princesse Mayuchatra, vient
d'arriver à l'ans. Il avait débarqué avant-
hier a Cherbourg venant de New-York. Il a
été salué au port par M. Luchaire, sous-pré-
fet, au nom du Gouvernement, et est parti
1 pour - Paris en automobile.
Les correspondances pour l'Extrême-Orient
Atin d'éviter les long.;;- retards dims les cor-
respondances destinées aux marins embarqués
sur les Lrtitiments détachés dans les forces
navales tI'Exh'{\mc-Orirnt, il ('A"'t recoïnmnndé.
aux familles d'adresser leur correspondance
par le bureau « Puris-Etrnnaer ».
Exemple : M, X. r.imnier-maître éloetri-
cien à bord du Waldeclc-lioussmu, force
navale d'Extrême-Orient, par « PUTis-Elrun-
ger ».
Une excellente idée
Le voyage de M. Maginot a appelé l'at-
tention de toute la France sur l'A. O. F. et
.0 F. et
particulièrement sur le port de Dakar. Rare-
ment vit-on un essor aussi rapide, lisons-nous
dans la France Coloniale de Dakar.
Ce port a surgi sur une côte déserte en face
de la petite ile de Gorée. Aujourd'hui il a
atteint un tonnage stupéfiant de 2 millions de
tonnes, si bien que les entrées et les sorties
dépassent celles de Bordeaux. Actuellement
on approfondit la rade dans la partie sud ;
on construit une grande digue ; un vaste terre-
plein est en voie d'achèvement.
A Dakar, la marine de l'Etat possède une
vaste cale qu'elle prête à l'occasion au com-
merce privé.
Or le commerce international s'accroit sans
cesse car Dakar est un point de relâche obli-
gatoire pour les navires qui vont d'Europe en
Amérique du Sud et de très grosses dépenses
sont à envisager.
Et notre confrère- de faire cette réflexion :
La France ne pourrait-elle pas faire pour Da-
kar ce que l'Angleterre est en train de faire
pour Tokoradi.
Là, en effet, le gouvernement britannique
s'est substitué à la colonie. Il a dépensé plus
d'un milliard pour creuser un port qui per-
mettra à la Gold Coast d'exploiter des quan-
tités énormes de manganèse.
L'importance de Dakar, port national, exige
que la France prenne à sa charge les dépenses
urgentes et fructueuses qui contribueront à la
splendeur de l'A. O. F.
Littérature coloniale
0
Il est tellement rare dans l'ac-
tuelle littérature de trouver un hom-
mage à Vœuvre de ceux qui ont fait
-------- - ---- - t ,
la France coloniale qu tl nous a été agreaùle
de lire dans le livre de M. René de la Porte
« Nés de la Guerre. le jugement -juste et
èlogieux qu'il forte sur les coloniaux fran-
çais.
Ce livre résume l'état d'âme de la géné-
ration de la guerre. Il dépeint la décep-
tion de ceux qui avaient cru, parce qu'ils
avaient participé à la grande tourmente, que
dans la faix, ils garderaient, de l'admira-
tion exaltée qui leur avait été témoignée du-
rant la guerre, un droit à la reconnaissance
de ceux qui les avaient vu combattre.
Il serait très en dehors des questions qui
nous intéressent d'examiner l'ensemble de ce
remarquable ouvrage. Nous ne retiendrons
qu'un seul chapitre, dans lequel l'auteur
trouve une consolation et un apaisement à la
rancœur et aux espoirs déçus de la jeune gé-
nération, dans la grandeur de la France d'ou-
ITt-nur, dont l'Asie et l'Afrique témoignent
Ilalitement, fournissant une cause de légiti-
me orgueil à tout français, malgré les dé-
convenues d'une victoire improductrice.
Avec une très grande finesse d'observa-
tion et une très juste précision dans l'exa-
men de conscience du colonial, M. René de
la Porte explique la vocation coloniale par
le eoût de tartir. non -bas tour s'évader
mais pour satisfaire au besoin « d'aller à la
recherche de soi-même et de se retrouver à
dix mille ou vingt mille kilomètres de chez
soi, dans un monde nouveau et arangc,
mieux que dans une glace ». Pour lui, mal-
gré le paradoxe que semble révéler cette
idée, C pour fuir ou déserter son pays, il faut
rester a Paris » car lorsqu'on le quitte l'on
retrouve la trancc grande et aimable com-
me le souhaitent nos secrètes aspirations ci
C à chaque tour d'hélice on se rapproche
d'elle par le cœur. Un pas en avant, deux
pas fil arrière ».
Suivant l'idée directrice qui domine cet
ouvrage, l état d'âme de Ici jeune généra-
lion des anciens combattants, i'auteur com-
pare le combattant et le colonial et dit, avec
raison, « que les non-combattants et les non-
coloniaux se jont des combattants et des co-
loniaux une image pareillement grossière P.
Il est ainsi conduit à une comparaison en-
tre les sentiments, la mOl/alité, les aspira-
tions du combattant et du colonial : « la vie
de ce dernier, dit-il, sc déroule sur le plan
de la victoire. Elle est une victoire à notre
manière, une lutte de tous les instants, un
ressaut d'énergie morale et mentale. sous
l'attaque de forces brutes, une sérénité in-
térieure où les souvenirs aimés chantent à
travers l'espace, un grand excitateur des
facultés de méditation et d'observation, un
triomphe sur nos nerfs, qui les exhausse au-
dessus de la nature rNive, des bêtes et des
gens subjugués. »
Dans les buts qui animent le colonial, l'au-
teur voit même une inspiration fins noble
parce que faite de sentiments plus humains
car « le colonial vit une vie plus pure que
le combattant, son destin ne l'obligeant pas
à causer des souf frances à d'autres êtres
humains. L'âme triomphe de la c hair, l'es-
prit domine par l'imagination, et la wl-ontê,
le déchaînement des forces coalisées, mais
triomphe et domination s'accomplissent sans
ruines ni douleurs ».
L auteur qui, successivement, a vécu en
Extrême-Orient et en Afrique retire de sa
vie coloniale l'impression réconfortante de la
grandeur de l'oeuvre qu'il a pu comprendre
et voit dans la vie outre-mer une grande
école d'énergie et le vaste champ d'action
réclamé par les jeunes générations.
Il termine, en effet, en déclarant « qu'il
lui suffit de dire aux jeunes hommes que
tente la vie coloniale qu'il ne ftlltl pas en
attendre la fortune et les loisirs amollis-
sants, mais qu'il n'est pas de meilleure
école pour apprendre à tenir la tête haute
et à aimer son pays ». Quand on est Fran-
çais, conclut-il, courir le monde, c'est
grandir la France à ses propres yeux.
Preuve, l'Asie et VAfrique françaises.
Clk. E~&<~~-,
Sénateur du Nord. membre
de la Commission des Affaires
Etrangères.
060,
Syrie et Palestine
A Beyrouth
Le calme le plus complet règne à Bey-
routh. La plupart des soûles et des bouti-
ques ont ouwrt de nouveau.
La population désire de toute évidence
le maintien de la paix.
Au Djebel Druse
La région du niehel Druse esi également
calme. On signale quelques incidents sans
gravité A IIorna et à Deraha
Cependant, à la frontière.
Le Colonial Office, cependant, communi-
quait hier soir aux journaux de tendres :
« On apprend que des forces considéra-
bles d'Arabes ont ce matin, vendredi, tra-
versé la frontière de Syrie et sont entrées
en Palestine. Des escadrilles d'avions
sont parties pour arrêter l'avance (le ces
forces. Il
Dans les milieux diplomatiques à Txtn-
dres, cette nouvelle est considérée comme
de nature à aggraver singulièrement la si-
tuation, car les Drus es sont des guerriers
beaucoup plus redoutables que les Arabes
de Palestine ou de Transjordanie.
Dans les cercles militaires de Londres,
on déclare que l'aviation peut réussir d re-
tarder l'avance de ces Arabes, mais qu'il
est fort improbable qu'elle puisse seule
repousser les. envahisseurs. Pour cela, il
faudrait envoyer sur la frontière d'impor-
1 tants détachements de troupes et de chars
d'assaut. (Par dépêche.)
Une belle soirée
à Rabat
à Que l'on est loin des troubles lamentables
dé' Palestine et de la turbulence de tous ces
petits pays du fond de la Méditerranée, et
comme le monde musulman assagi au con-
tact bienveillant et amical de la France
offre à tous le spectacle réconfortant de
l'union et de la fraternité dans la paix et le
bonheur de tout un peuple en liesse !
Quelle heureuse initiative que d'avoir as-
socié le public français aux fêtes du Mouloud
des musulmans qui se sont déroulées à Ra-
bat, dans le cadre enchanteur du Jardin des
Oudayas ! 1
Laissez-nous évoquer ces heures de douce
mélodie où fût donnée la comédie, pour
prouver au monde que l'Islam aspire à la
paix et à la concorde et que les trouble-fête
seuls doivent subir les conséquences de leur
action coupable.
Sous la lumière adoucie par les voûtes de
verdure, dans un cadre d'énormes figuiers
aux troncs tordus, où des gradins s'éth.if-
faudaient harmonieusement, l'auditoire
s'émut aux claires musettes et aux poésies
andalouses qu'un gheyyat aveugle lançait
dans la nuit claire. du haut des remparts de
l'antique Casbah.
Un luthiste nègre, à la voix de ténor juste
et nette, chanta la langueur et la douceur
des nuits d'Espagne dont rien n'effacera le
souvenir mélancolique :
Y a akhigoumtara n-Jlasima Altla : 0 mon
.J.cère, lève-toi et viens respirer le zéphyr aux
effluves parfumés !.
Un rebab exalta les matins printaniers
dans les jardins fleuris d'amandiers, dont le
vent effeuille les blancs pétales en une pluie
de dirhem. A ce spectacle le poète s'écrie :
Salit houmoumek, oiui rvti ânnek l'iftikar :
te Chasse tes soucis et rejette au loin tes
préoccupations. » Le c lurur des voix homo-
gène et puissant s'enflammait de lyrisme aux
évocations de l'innocence printannière.
nes chikhat réputées se répondirent en
chu-ut en de longues gacidat, en d'élégants
nouai où se donna carrière sans mesure la
fantaisie des artistes, en de savantes âita,
sorte d'invocations développées, en forme
d'ouverture à l'italienne.
La voix douce et mélodieuse des chanteu-
ses de Marrakech soudain se tut pour laisser
parler un bouffon.
Hammam ben Guir, un Plaute ou un Mo-
lière marocain, mima, avec un comique
bonhomme et burlesque, lardé de coq-ft-l'àne,
un brave savetier du Souk qui, sur l'invite
d'un collecteur d'impôts à payer CI patente »,
(datante) croit entendre qu'on lui reproche
« d'avoir découché » (mbaUit), d'où un col-
loque très drôle et des protestations énergi-
ques du brave savetier qui se défend de la
chose. Suivent des scènes du Souk, dès ta-
bleaux de famille, une imitation des-rapports
entre Français et Indigènes; un chaouch
blessé de guerre algérien, plein de morgue
et de mépris pour le vulgaire administré,
mais aisément corruptible à la première offre
de labor (faveur); un percepteur français
bon enfant et conciliant, qui s'éponge le
front et s écarte des vaines discussions ; une
commère digne et compassée qui morigène sa
gamine de strur, une chanteuse de café-
concert qui chante « de la tète », un apprenti
cordonnier, sorte de petit « poulbot » criard
et efflanqué, un Chleuli qui baye aux cor-
neilles, tous ces types mis en scène par l'au-
teur-comédien obtiennent un succès enthou-
siaste.
Cette bonne entente joyeuse et noble ne
met-elle pas davantage en relief la mauvaise
volonté et la culpabilité de ceux qui, au
loin, se livrent à des scènes de carnage et
changent la douce vision d'Orient en une
horreur de représailles impies et d'hécatom-
bes inexpiables ?
Honte et anathème sui eux, qui, parmi les
efforts universels d'apaisement et d'union,
renouvellent de vieilles querelles et des
mœurs abolies! Mais tirons le rideau sur cet
r •
enfer !
Ici se poursuivent l'allégresse et les spec-
tacles mervei lleux : des danseurs soussis
exécutent leur ballet-chœur aux mélodies rau-
ques, aux pas rythmés, aux attitudes on-
doyantes, à la musique lancinante d'un re-
I)ab monocorde (le qu.
bab monocorde, de quadruples castagnettes
de cuivre s'entre-martelant sans cesse, avec
la persistance du cri-cri d'un grillon in-
fernal.
0 charme rare et attirant de ces cérémo-
nies variées, d'un air tantôt primitif, tantôt
raffiné, Orient qui fait vibrer la plus pro-
fonde et la plus secrète sensibilité humaine,
puisses-tu quelque jour prochain offrir sur
les lieux où tu règnes le spectacle d'une
générale et éternelle accalmie où ne se don-
neront désormais carrière que la fantaisie de
tes artistes, le goût délicat et fin de tes
amateurs et de tes lettrés, l'amour et l'atti-
rance de ceux que tu charmes et que tu cap-
tives !
Roland fillMo-ilffials,
L'ALGÉRIE A LA FOIRE DU DANUBE
t 81 1
La (f Foire Internationale du Danube, à
Bratislava, a été inaugurée le 25 août par le
ministre du Commerce de Tchécoslovaquie,
accompagné du président de la Chambre de
Commerce et d'Industrie, des consuls étran-
gers, des représentants de l'Administration
de Slovaquie et de la ville de Bratislava, du
directeur de la Foire, etc.
Le cortège officiel s'est rendu dans la sec-
tion de l'Algérie organisée par le Gouverne-
ment général avec la collaboration des
Chambres de commerce algériennes. Les
honneurs du stand de l'Algérie ont été faits
par M. Berthoud, délégué officiel des expo-
sants.
Le stand renferme un échantillonnage des
produits bruts susceptibles d'intéresser la
Slovaquie. En outre une section spéciale a
été réservée aux ouvroirs de tapis algériens
dont l'exposition est particulièrement im-
portante, ainsi qu'au tourisme, offrant aux
visiteurs, pour cette dernière industrie, une
documentation complète sur les principaux
sites de la colonie, les voies de communica-
tion et les conditions du voyage.
-
TAUX DE LA PIASTRE
1'
A la dnte du 2'.i août, le taux de la piastre,
à Snïgon, était de 11 fr. 35.
Le Centenaire de l'Algérie
»♦»
M. Bordes, Gouverneur général de l'Algé-
rie, accompagné de M. Mercier, commissaire
général du Centenaire, fera à Marseille le
29 septembre une conférence officielle sur le
programme des fêtes du Centenaire de l'Algé-
rie.
.t.
L'ANTENNE COLONIALE
Radio-Alger 3.000 kms
Alger vient d'être doté du nouveau poste
très puissant de radiophonie, de 12 kilowaftts-
antenne, d'une portée de 3.000 kms dont
nous avions annoncé déjà l'élaboration. Son
rayon s'étend au Maroc, à la Tunisie, à la
Tripolitaine, atteint des postes du Sahara et
d' A.O. F., de France,, d Italie, d'Allemagne
et des autres Etats centre-européens.
Des conférences sur l'agriculture, le com-
merce et la Bourse alterneront avec des cau-
series en français et en arabe sur des sujets
d'ordre pratique.
La Société d'El Moutribia d'Alger, ainsi
1 que nous le signalions dernièrement, don-
nera de fréquents concerts de musique arabe.
CINÉMA COLONIAL
En Algérie
On va tourner un film intitulé Un drame
là-bas, d'après un roman de M. Léty-Cour-
bières, œuvre dont l'action a l'Algérie pour
cadre.
Iseo
Théâtres d'Algérie
Les théAlros d'Algérie vont commencer
bientôt leur Raison d'hiver et Ica engage-
ments d'artistes parisiens sont faits. Mllo
Lueicntie Band, qui vient de signer un
contrat pour l'Alluunbru d'Alger, partira
bientôt.
44 L'EI-Go&éa
l'
Hier matin est arrivé à Marseille, venant
de La Seyne, où il a été construit, un nou-
veau paquebot, r El-Goléa, destiné au service
Port- Vendres-Al ger.
Jaugeant 3.639 tonnes, ce paquebot a 116
mètres de long, 16 mètres de large et a réalisé
la vitesse de 19 nœuds. Les cales à marchan-
dises ont 2.400 mètres cubes.
Les aménagements pour passagers ont été
décorés dans un goût moderne, ils sont prévus
pour 96 passagers de luxe ou de première
classe, 140 de seconde et 98 de troisième.
L'Ef-Goféa entrera en service en septembre.
n ̃̃ 1 - - 1
Echouase en Gironde
Par suite d'une avarie de machine, le pa-
quebot de la Compagnie Générale Transatlan.
tique Volubilis, courrier du Maroc, s'est échoué
en Gironde. Il a dû être ramené à Bordeauj
par des remorqueurs. Le paquebot Pérou
venant de Saint-Nazaire, va être dérouté d4
sa ligne Saint-Nazaire-Antilles-Colon pou
prendre à son bord les passagers du Volubili
et les emmener à Casablanca.
La protection des caoutchoucs
-
Je me souviens qu'au temps où je com-
mandais la circonscription de Mobaye, dans
le Haut-Oubangui, je m'élevais contre les
plantations de caoutchouc: (d'Ireli, en parti-
culier) faites, en dépit du bon sens, par les
concessionnaires, pour répondre aux exi-
gences du cahier des charges de 1899. Au
moment où ces lrelis atteignaient l'âge de
production, le moindre vent les anéantis-
sait.
Au Congo belge, des agents de culture in-
diquaient aux colons les emplacements fa-
vorables à la culture des Irelis. Chez nous,
rien de tout cela, pourvu que le colon ait
planté un nombre de pieds proportionnel à
la production de caoutchouc, tout était pour
le mieux, peu importait les résultats de
ces plantations. Et le colon n'étant pas in-
génieur agronome, plantait n'importe où.
L'Institut national agronomique dont les
études ne sont pas suffisamment connues du
monde colonial, vient de publier dans son
Bulletin de juin 1020 une notice sur les
plantes de couverture dans la culture dit
caoutchouc.
Afin de conserver à la terre son humus que
le défrichage a fait disparaître, M. E. L.
préconise de semer des plantes rampantes
qui couvrent le sol d'une couche épaisse
comme un matelas et préservent la terre con-
tre le soleil et contre le lavage des pluies
torrentielles. Les racines des igna Dolichos
llosei) Centrosoma pubesccns, et Centro-
sema rlumieri) rendent le sol plus meuble
et plus perméable à l'air. M. E. L. conseille
aussi l'emploi de la Tefhrosia et de variétés
d'/lIdigofertl. en appliquant les mêmes mé-
thodes qu'aux plantes cultivées en Europe
comme engrais vert.
Trouvant un terrain favorable à ses raci-
nes, le caoutchouc résistera mieux aux vents
et se développera normalement, c'est donc
une précieuse indication que nous a fournie
l'auteur de la notice.
fiugéne De vaux.
Les P. T. T. ignorent la géographie coloniale
Pour une lettre recommandée de 25 gram-
mes à destination de Tahiti (Etablissements
français d'Océanie) un bureau de poste du
quartier de la Concorde fait payer 3 fr. 90
d'affranchissement alors qu'un bureau voisin
(quartier de la place Vendôme) ne fait payer
que 1 fr. 60 d'affranchissement. Taux normal
puisque les Etablissements français d'Océanie
sont Colonies françaises.
Cette remarque se passe de commentaires.
1
unE F.N SKC.ON1M-. l'A (.F -
L'aviation coloniale.
Dépêches du Maroc.
Alger en deuil
en
Une catastrophe qui, sclolt les dernières
informations, aurait fait plus de quatre.
vingts victimes, s'est produite à Alger, où
un immeuble de quatre étages, habité par
vingt-deux familles d'ouvriers, s'est effondré.
rue des Consuls.
Cette rue des Consuls est située dans le
quartier de la Marine, quartier de Vancienne
Préfecture, qui fait partie de la vieille znlle,
avec le quartier Bab-el-Oued. Dans tous ces
vieux quartiers dont le vieux Marseille peut
donner une idée analogue, d'étroites rues
serpentent où deux voitures ne pourraient se
croiser. En façade de ces rues minuscules
s'élèvent des maisons, dont un grand nombre
ont été construites au lendemaill de l'occu.
pation française et qui mériteraient d'être
démolies. Déjà il y a quatre mois, une mai-
son s'est écroulée à la Casbah. Elles sont
d'ailleurs appelées à disparaître et la calas.
trophe aura sans doute pour effet de hâter
Vexécution rapide de te projet édilitaire. Le
Conseil municipal a adopté le projet de M.
de Redolt qui a pour objet d'assainir et de
mieux aérer cette partie de la tille en dé-
molissant de vieilles bâtisses sur l'emplace-
ment desquelles serll établie une large artère
qui facilitera les communications avec le
port.
Il était près de minuit lorsqu'un bruit
effroyable de pierres éboulées rh'eilla le
quartier endormi. L'immeuble de quatre éta-
ges venait de s'effondrer. !Je cet limas de
décombres s'élevaient des cris d'enfants ter-
rifiés, des gémissements de blessés et, à
peine distincts, des râles de mOlmmts.
Les locataires de l'immeuble sont pour la
plupart des italiens ou t'spagllols, et des
israélites, dont les chefs de famille et les fils
aines exercent la profession de l'êclleurs. Il
sera très difficile, dans ces conditions. de
savoir exactement le nombre de victimes,
bon nombre d'entre les habitants pouvant se
trouver en mer.
Aussitôt l'alarme donnée, la rue se peupla
de la foule sans cesse accrue des habitants
des maisons voisines réveilles par le bruit.
La police et les pom piers furent alertés et
se rendirent aussitôt sur les lieux de l'ac-
cident. D'après les ingénieurs des ponts et
chaussées. cet effondrement serait au à un
pilier central qui aurait cédé. Mais les voi-
sins affirment toutefois que la maison se lé-
zardait depuis plusieurs semaines.
Les premières recherches
Petit à petit on découvre des objets fami-
liers t/ui sont déposés par les soins des
agents éi l'école de la rue des Consuls : un
réveille-matin marquant minuit 30; quelques
bijoux, des boites de savon, des boites d'allu-
mdto, des effets de lingerie que l'on extrait
difficilement des armoires écrasées.
Puis l'enlèvement d'un plancher met à dé-
couvert un lit sur lequel repose un cadavre.
Il faut mille précautions pour le dégager et
le même spectacle navrait t se déroule don-
nant lieu à des scènes déchirantes.
Une femme venue aux renseignements
apprend la disparition île ses pnrnlls. lille
s'évanouit dans la rue Général-Laperrine où
stationnent les ambulances de la ville. Des
scènes des plus déchirantes se sont dérou-
lées. des mères réclamant leur enfant, des
femmes pleurant leur mari. Dans la rue ce
ne sont que cris d'horreur et de désespoir.
La catastrophe était connue de la population
algéroise avant même la parution des jour-
naux dit matin. Une foule considérable était
maintenue par des cordons de troupes avec
toutes les peines du monde pour Vempêcher
de déborder jusqu'à la rue des ('onsuls.
Au café ( orsica, situé dans la même rue,
d'autres personnes attendent dans l'angoisse
le résultat des recherches. M. Car mol o Fa~
nerone, tumlilcur. est assis sur une chaise,
prostré. Le soir même il était allé au
cinéma. A son retour, il trouvait la mai-
son effondrée : sa femme t'l, ses trois t'lt-
fants étaient ensevelis.
L'archevêque d'Alger s'enquiert
des nouvelles
A () h. 30, Mgr Collomb et deux vicaires
de la cathédrale viennent. au nom de l'ar-
chevêque, se rendre com ptt? de la catastro-
phe. Ils sont reçus par M. Villeneuve, con-
seiller général et M. Laget, adjoint au
maire.
M. Joseph Polverelli qui a échappé à la
catastra phe allait pénétrer chez lui, rue
Jfrueys, lorsqu'il eut l'idée d'entrer pour se
rafraîchir au café Corsica, qui était encore
ouvert à cette heure. Aussitôt après un épou-
vantable fracas se faisait entendre et un
épais tourbillon de poussière s'élevait de la
rue. M. Polverelli crut à un tremblement de
terre, mais bientôt il se rendit compte de
la catastrophe et fut un des premiers à se-
courir les dctimes.
Ou parvint, au premier moment, à sauver
de leur pénible situation les locataires du
quatrième étage, qui avaient été les moins
éProuvés.
Quel ques m inutes avant l'écroulement, un
tirailleur s'était assis sur le seuil de r~~-
cerie mosabitr, située au rez-de-chaussée ; il
fi
est certainement parmi les victimes.
Les premiers cadavres
M. Polverelli découvrit au milieu de la con-
fusion générale, des premiers cadavres, ce-
lui d'une jeune femme, Mme Anna Cifone,
âgée de vingt-deux ans, et de son bébé, âgé
de huit mois, qui tenait encore son biberon
à la main.
« Entre temps, dit M. Polverelli, les pom-
piers, les autorités civiles et militaires, ainsi
que ht population a-,'aient été alertés et
malgré l'obscurité un service d'ordre com-
mençait à fonctionner. » Il faut rendre un
hommage reconnaissant à tous ceux qui, de-
puis la première heure, sans arrêt, sans ma-
nifester la moindre fatigue, procèdent aux
travaitv. Ll police municipale, malgré les
difficultés que présente la topographie des
lieur, avait organisé un service d'ordre di-
rigé par M. Tristelt, commissaire central,
M. Maury et le commissariat de Varrondis-
sement.
Les actes de sauvetage
Grâce aux mesures prises, les équipes ont
pu travailler à l'aise et avec méthode, La
section active des pompiers fait l'admiration
de tous ceux qui l'ont vue à l'œuvre. Enfin
la troupe, divisée en piquets qui se r,,/(lient,
Prête un concours précieux.
Dans la foule, contenue par les cordons
LE NUMERO : 90 CENTIMES
SAMEDI SOI1V-ÎÎ AOtJT 196N.
MMML OUOTtDtM
1 Rédaction &Administration s
M, .R -.
PARIS O-)
TIlUPH. 1 LOUVHIIMT
RI CHILI BU1744
Les Annales Coloniales
LM annonces et réclames sont reçues att
bureau du jeumal.
DIRECTEUR-FONDATEUR : Marcel RUEDEL
Tous les articles publiés dans noire iournal ne peuvent
être reproduits qu'en citant les Arnalcs COLOIIALU.
ABONNEMENTS -
tlNe la Revue mensuelle :
U. la MCJÍ~ S'M.il
- - -
Franc. et
Colonies 1M e 100 » 50..
ttrancer' - 240 » 126 r 70*
On s'abonna sans fraii dm
tous les bureaux db poste.
LE CANAL DE NAVIGATION
1 ET LES IRRIGATIONS DU SONC-CAD
r -.a.:a
Le 14 juin dernier a été inauguré par
11. le Gouverneur Général Pasquier le canal
de navigation du Song-Cau.
Il y a quelque 30 ans, ainsi que le rappe-
lait M. le Résident Supérieur Robin, cette
partie du Tonkin, que traverse le Song-Cau,
était la dernière province civile de notre co-
lonie, région délaissée où la piraterie exer-
çait ses ravages. La piraterie y était deve-
Due. une sorte d'institution régulière, pil-
alant et rançonnant, obligeant les villages,
« s'ils voulaient détourner la dévastation et
eéviter le massacre, à fournir eux-mêmes
a des recrues aux chefs de bandes, chefs re-
a doutés dont le nom et les exploits sont
a encore dans toutes les mémoires. *
Seuls, quelques hardis prospecteurs étaient
venus s'y établir, au prix de quelles peines.
pour rechercher le minerai et le charbon
dont le sous-sol est particulièrement riche.
Une rare population indigène, tenace et la-
borieuse, s'y était peu à peu installée, dans
des agglomérations misérables, à mesure que
la Garde Indigène y ramenait la sécurité.
Mais les efforts des premiers colons y
étaient paralysés par l'absence de voies dl'
tommunication et les indigènes ne pouvaient
y trouver leur subsistance, la terre, faute
d'une irrigation suffisante, étant impropre
aux riz du cinquième mois et ne pouvant
qu avec peine porter la récolte du dixième
JUOIS.
Aujourd'hui, cette région déshéritée est en
passe de devenir une CI Hollande prospère P,
sillonnée de lourdes péniches, exploitée jus-
que dans le tréfonds de son sol, couverte de
rizières verdoyantes. Ce miracle, semblable
à celui que la tradition attribue à la verge
de Moïse, c'est l'exécution du canal du Song-
Cau. Le miracle de l'eau sera toujours, dans
tous les âges et sous toutes les latitudes brÎl-
Jantes, l'origine de 1 œuvre de vie et de civi-
lisation.
Les études en lurent commencées en 1905.
M'ais à cette époque, les ressources linanciè-
tes firent défaut, Puis vint la guerre. C'est
en 1922 que furent entrepris les travaux du
«tanal principal.
Les difficultés à vaincre furent considéra-
Iles, tenant à la nature du sol, qui nécessita
J'emploi d'un matériel perfectionné, (trains
Pecauville, outillage mécanique), aux crues
annuelles qui obligeaient d'interrompre le
creusement pendant plusieurs mois, à l'in-
tolubrité de la région, où le service de Santé
mal fort à faire pour préserver les travail-
leurs du paludisme.
Aujourd'hui achevé, le canal du SOng-Cau,
long de 53 km., est le plus long canal à
écluses existant en Indochine. Il a nécessité
trois millions de mètres cubes de terrasse-
ments. l'révu tout d'aljord avec 9 mètres
de plafond et 1 m. 70 de tirant d'eau, on a
été amené par la suite à lui donner 10 mètres
de plafond, 2 m. 40 de tirant d'eau et des
rayons de 300 mètres. Huit écluses, dont
deux de garde, le divisent en 7 biefs, p(>r-
mettant la descente des i>éniehes de in cote
21 à la cote O. Etablies pour des péniches
de 300 tonnes, elles ont au minimum 50
mètres de longueur de sas et laissent entre
murs de tête un passage libre de 6 mètres
de longueur.
Les principaux ouvrages sont : les bar-
rages de Tac-Oun, avec son pont en béton ar-
mé, et du Da-Gan; l'ouvrage de prise, qui
comporte 10 ouvertures de 1 m. 30 fermées
par des vannes à galets placées dans le corps
de l'ouvrage et pouvant être maœuvrées de
la plate-forme du remblai ; les écluses du
Song-Cau et du Song-Thuong, cette dernière
munie de deux systèmes de portes, l'un
utilisé pour la navigation, l'autre pour la dé-
fense contre les crues de la rivière ; et le
siphon de Van-Cia qui assure sous le canal
le passage d'un important ruisseau. IEn de-
hors de ces ouvrages, il faut également men-
tionner six écluses de navigation, trois dé-
versoirs de superficie, quatre siphons en bé-
ton armé avec deux aqueducs en maçonne-
rie et huit ponts-levis établis à la traversée
des routes et dont la manœuvre rapide peut
Itre aisément assurée par un seul coolie.
Parallèlement au canal de navigation sera
établi un réseau d'irrigation d'un dévelop-
pement total de 192 kilomètres. Il comporte-
ra 7 artères, dont une artère de flottage, et
12 sous-artères. Les artérioles non encore
étudiées auront une longueur proportionnée
à celle du réseau (2.000 kilomètres environ).
Les dépenses engagées sont de 2.330.000
piastres pour le canal de navigation. Pour
le réseau d'irrigation, les prévisions qui
étaient de 700.000 $ seront dépassés par
suite de l'augmentation du prix de la main-
d'œuvre et des matières premières. La dé-
pense totale s'élèvera vraisemblablement pour
le réseau complet à 4 millions de piastres.
Le trafic maximum possible sur le canal
de navigation, en supposant un va-et-vient
contraire de chalands de 300 tonnes chaque
•jour pendant 12 heures, atteindrait 2.600.000
tonnes par an, tonnage qui exigerait une
totte de 143 chalands. Ce trafic pourrait
même être doublé en plaçant en même temps
deux bateaux dans chaque écluse, ainsi que
le permettent les dimensions de ces ouvra-
ses.
En pratique, le trafic sera surtout alimenté
par les produits miniers et agricoles de la
région. Dès maintenant, les mines de char-
bon de Phan-Me peuvent fournir une produc-
tion annuelle de 50.000 tonnes, susceptible
de doubler d'ici trois ans. Vers la même épo-
que, des mines de fer pourront donner de
100 à 200.000 tonnes de minerai par an.
On peut estimer à 50.000 tonnes les pro-
duits agricoles et d'autres produits miniers.
En 1935, on peut compter sur une augmen-
tation de la production minière et agricole
qui permettrait d'atteindre 700.000 tonnes.
En outre, des trains de bois et des radeaux
de bambous emprunteront à certains moments
de l'année le canal jusqu'au kilomètre 22,
puis l'artère 3 et la sous-artère 1, pour re-
joindre ensuite le Song-Cau à la hauteur
de Cam-Bao.
Ainsi le canal de navigation mettra en
relations directes les centres miniers de la
province avec le port de Haï-Phong et le
système d'irrigation permettra, suivant l'ex-
pression même du Gouverneur Général « de
a déverser sur 34 mille hectares par les
c ouvrages de prise et les mailles d'un ré-
« seau d'artères et d'artérioles, l'eau fécon-
« dante et lourde du Song-Cau, transfoimanl
t une région jadis pauvre et délaissée en
« une plaine où ondulera pendant deux sai-
« sons le riz indispensable à la vie de l'An-
« namite. •
Georgea JVottefle,
Député de Saône-et-Loire, vice-président
de la Commission des Colonies,
membre de la t'ommission des
Mines.
Dépêches de l'Indochine
Au Cambodge
Avant de clore ses travaur, l'assemblée
consultative indigène du Cambodge a
adressé au Gouverneur (;énérat les assu-
rances de son dévouement et de sa gratt-
tude pour les nombreuses marques de solli-
citude données au Cambodge.
L'assemblée prie le Gouverneur Général
de transmettre au l'résident de la Ilépubli-
que et au ministre des Colonies la déférente
expression du fidèle attachement et du
loyalisme absolu du Cambodge.
Au Yunnan
Le Directoire provincial a reçu de Nankim
l'ordre d'organiser le service militaire obli-
gatoire. les hommes seront soumis aux
lois de recrutement de 18 à 45 ans.
On annonce qu'à la suite de combats en-
tre les chefs militaires locaux, la ville de
Kouci-Yang, capitale de la province de
Kouei-Tchéou. a été incendiée en partie.
Le délégué envoyé par Nankin pour réor-
ganiser la province, le général Ly-Siao-Ya,
et qui est arrivé appuyé par les troupes
yunnanaises a été chassé de Kouci-Tchéou.
Le gouvernement central a désigné deux
autres fonctionnaires pour le remplacer.
Les cours du change sont en amélioration
sensible. 740 dollars uunnanais valent 100
dollars 1. C.
q-_.-,.. -. -. (Indopacifi.)
La santé du roi de Siam
Suivant des nouvelles reçues de Batavia, le
roi de Siam, qui faisait un voyage aux In-
des néerlandaises, est tombé malade le
27 août à Wonosobo, à la suite d'un accès
de fièvre paludéenne. Les visites qu'il de-
vait faire à Solo et à Djocja ont été ajour-
nées respectivement au ior et 5 septembre.
Un prince siamois à Paris
ses
Le général Purachatra, prince de Kam-
baeng et frère du roi de Siam, accompagné
de sa fille, la princesse Mayuchatra, vient
d'arriver à l'ans. Il avait débarqué avant-
hier a Cherbourg venant de New-York. Il a
été salué au port par M. Luchaire, sous-pré-
fet, au nom du Gouvernement, et est parti
1 pour - Paris en automobile.
Les correspondances pour l'Extrême-Orient
Atin d'éviter les long.;;- retards dims les cor-
respondances destinées aux marins embarqués
sur les Lrtitiments détachés dans les forces
navales tI'Exh'{\mc-Orirnt, il ('A"'t recoïnmnndé.
aux familles d'adresser leur correspondance
par le bureau « Puris-Etrnnaer ».
Exemple : M, X. r.imnier-maître éloetri-
cien à bord du Waldeclc-lioussmu, force
navale d'Extrême-Orient, par « PUTis-Elrun-
ger ».
Une excellente idée
Le voyage de M. Maginot a appelé l'at-
tention de toute la France sur l'A. O. F. et
.0 F. et
particulièrement sur le port de Dakar. Rare-
ment vit-on un essor aussi rapide, lisons-nous
dans la France Coloniale de Dakar.
Ce port a surgi sur une côte déserte en face
de la petite ile de Gorée. Aujourd'hui il a
atteint un tonnage stupéfiant de 2 millions de
tonnes, si bien que les entrées et les sorties
dépassent celles de Bordeaux. Actuellement
on approfondit la rade dans la partie sud ;
on construit une grande digue ; un vaste terre-
plein est en voie d'achèvement.
A Dakar, la marine de l'Etat possède une
vaste cale qu'elle prête à l'occasion au com-
merce privé.
Or le commerce international s'accroit sans
cesse car Dakar est un point de relâche obli-
gatoire pour les navires qui vont d'Europe en
Amérique du Sud et de très grosses dépenses
sont à envisager.
Et notre confrère- de faire cette réflexion :
La France ne pourrait-elle pas faire pour Da-
kar ce que l'Angleterre est en train de faire
pour Tokoradi.
Là, en effet, le gouvernement britannique
s'est substitué à la colonie. Il a dépensé plus
d'un milliard pour creuser un port qui per-
mettra à la Gold Coast d'exploiter des quan-
tités énormes de manganèse.
L'importance de Dakar, port national, exige
que la France prenne à sa charge les dépenses
urgentes et fructueuses qui contribueront à la
splendeur de l'A. O. F.
Littérature coloniale
0
Il est tellement rare dans l'ac-
tuelle littérature de trouver un hom-
mage à Vœuvre de ceux qui ont fait
-------- - ---- - t ,
la France coloniale qu tl nous a été agreaùle
de lire dans le livre de M. René de la Porte
« Nés de la Guerre. le jugement -juste et
èlogieux qu'il forte sur les coloniaux fran-
çais.
Ce livre résume l'état d'âme de la géné-
ration de la guerre. Il dépeint la décep-
tion de ceux qui avaient cru, parce qu'ils
avaient participé à la grande tourmente, que
dans la faix, ils garderaient, de l'admira-
tion exaltée qui leur avait été témoignée du-
rant la guerre, un droit à la reconnaissance
de ceux qui les avaient vu combattre.
Il serait très en dehors des questions qui
nous intéressent d'examiner l'ensemble de ce
remarquable ouvrage. Nous ne retiendrons
qu'un seul chapitre, dans lequel l'auteur
trouve une consolation et un apaisement à la
rancœur et aux espoirs déçus de la jeune gé-
nération, dans la grandeur de la France d'ou-
ITt-nur, dont l'Asie et l'Afrique témoignent
Ilalitement, fournissant une cause de légiti-
me orgueil à tout français, malgré les dé-
convenues d'une victoire improductrice.
Avec une très grande finesse d'observa-
tion et une très juste précision dans l'exa-
men de conscience du colonial, M. René de
la Porte explique la vocation coloniale par
le eoût de tartir. non -bas tour s'évader
mais pour satisfaire au besoin « d'aller à la
recherche de soi-même et de se retrouver à
dix mille ou vingt mille kilomètres de chez
soi, dans un monde nouveau et arangc,
mieux que dans une glace ». Pour lui, mal-
gré le paradoxe que semble révéler cette
idée, C pour fuir ou déserter son pays, il faut
rester a Paris » car lorsqu'on le quitte l'on
retrouve la trancc grande et aimable com-
me le souhaitent nos secrètes aspirations ci
C à chaque tour d'hélice on se rapproche
d'elle par le cœur. Un pas en avant, deux
pas fil arrière ».
Suivant l'idée directrice qui domine cet
ouvrage, l état d'âme de Ici jeune généra-
lion des anciens combattants, i'auteur com-
pare le combattant et le colonial et dit, avec
raison, « que les non-combattants et les non-
coloniaux se jont des combattants et des co-
loniaux une image pareillement grossière P.
Il est ainsi conduit à une comparaison en-
tre les sentiments, la mOl/alité, les aspira-
tions du combattant et du colonial : « la vie
de ce dernier, dit-il, sc déroule sur le plan
de la victoire. Elle est une victoire à notre
manière, une lutte de tous les instants, un
ressaut d'énergie morale et mentale. sous
l'attaque de forces brutes, une sérénité in-
térieure où les souvenirs aimés chantent à
travers l'espace, un grand excitateur des
facultés de méditation et d'observation, un
triomphe sur nos nerfs, qui les exhausse au-
dessus de la nature rNive, des bêtes et des
gens subjugués. »
Dans les buts qui animent le colonial, l'au-
teur voit même une inspiration fins noble
parce que faite de sentiments plus humains
car « le colonial vit une vie plus pure que
le combattant, son destin ne l'obligeant pas
à causer des souf frances à d'autres êtres
humains. L'âme triomphe de la c hair, l'es-
prit domine par l'imagination, et la wl-ontê,
le déchaînement des forces coalisées, mais
triomphe et domination s'accomplissent sans
ruines ni douleurs ».
L auteur qui, successivement, a vécu en
Extrême-Orient et en Afrique retire de sa
vie coloniale l'impression réconfortante de la
grandeur de l'oeuvre qu'il a pu comprendre
et voit dans la vie outre-mer une grande
école d'énergie et le vaste champ d'action
réclamé par les jeunes générations.
Il termine, en effet, en déclarant « qu'il
lui suffit de dire aux jeunes hommes que
tente la vie coloniale qu'il ne ftlltl pas en
attendre la fortune et les loisirs amollis-
sants, mais qu'il n'est pas de meilleure
école pour apprendre à tenir la tête haute
et à aimer son pays ». Quand on est Fran-
çais, conclut-il, courir le monde, c'est
grandir la France à ses propres yeux.
Preuve, l'Asie et VAfrique françaises.
Clk. E~&<~~-,
Sénateur du Nord. membre
de la Commission des Affaires
Etrangères.
060,
Syrie et Palestine
A Beyrouth
Le calme le plus complet règne à Bey-
routh. La plupart des soûles et des bouti-
ques ont ouwrt de nouveau.
La population désire de toute évidence
le maintien de la paix.
Au Djebel Druse
La région du niehel Druse esi également
calme. On signale quelques incidents sans
gravité A IIorna et à Deraha
Cependant, à la frontière.
Le Colonial Office, cependant, communi-
quait hier soir aux journaux de tendres :
« On apprend que des forces considéra-
bles d'Arabes ont ce matin, vendredi, tra-
versé la frontière de Syrie et sont entrées
en Palestine. Des escadrilles d'avions
sont parties pour arrêter l'avance (le ces
forces. Il
Dans les milieux diplomatiques à Txtn-
dres, cette nouvelle est considérée comme
de nature à aggraver singulièrement la si-
tuation, car les Drus es sont des guerriers
beaucoup plus redoutables que les Arabes
de Palestine ou de Transjordanie.
Dans les cercles militaires de Londres,
on déclare que l'aviation peut réussir d re-
tarder l'avance de ces Arabes, mais qu'il
est fort improbable qu'elle puisse seule
repousser les. envahisseurs. Pour cela, il
faudrait envoyer sur la frontière d'impor-
1 tants détachements de troupes et de chars
d'assaut. (Par dépêche.)
Une belle soirée
à Rabat
à Que l'on est loin des troubles lamentables
dé' Palestine et de la turbulence de tous ces
petits pays du fond de la Méditerranée, et
comme le monde musulman assagi au con-
tact bienveillant et amical de la France
offre à tous le spectacle réconfortant de
l'union et de la fraternité dans la paix et le
bonheur de tout un peuple en liesse !
Quelle heureuse initiative que d'avoir as-
socié le public français aux fêtes du Mouloud
des musulmans qui se sont déroulées à Ra-
bat, dans le cadre enchanteur du Jardin des
Oudayas ! 1
Laissez-nous évoquer ces heures de douce
mélodie où fût donnée la comédie, pour
prouver au monde que l'Islam aspire à la
paix et à la concorde et que les trouble-fête
seuls doivent subir les conséquences de leur
action coupable.
Sous la lumière adoucie par les voûtes de
verdure, dans un cadre d'énormes figuiers
aux troncs tordus, où des gradins s'éth.if-
faudaient harmonieusement, l'auditoire
s'émut aux claires musettes et aux poésies
andalouses qu'un gheyyat aveugle lançait
dans la nuit claire. du haut des remparts de
l'antique Casbah.
Un luthiste nègre, à la voix de ténor juste
et nette, chanta la langueur et la douceur
des nuits d'Espagne dont rien n'effacera le
souvenir mélancolique :
Y a akhigoumtara n-Jlasima Altla : 0 mon
.J.cère, lève-toi et viens respirer le zéphyr aux
effluves parfumés !.
Un rebab exalta les matins printaniers
dans les jardins fleuris d'amandiers, dont le
vent effeuille les blancs pétales en une pluie
de dirhem. A ce spectacle le poète s'écrie :
Salit houmoumek, oiui rvti ânnek l'iftikar :
te Chasse tes soucis et rejette au loin tes
préoccupations. » Le c lurur des voix homo-
gène et puissant s'enflammait de lyrisme aux
évocations de l'innocence printannière.
nes chikhat réputées se répondirent en
chu-ut en de longues gacidat, en d'élégants
nouai où se donna carrière sans mesure la
fantaisie des artistes, en de savantes âita,
sorte d'invocations développées, en forme
d'ouverture à l'italienne.
La voix douce et mélodieuse des chanteu-
ses de Marrakech soudain se tut pour laisser
parler un bouffon.
Hammam ben Guir, un Plaute ou un Mo-
lière marocain, mima, avec un comique
bonhomme et burlesque, lardé de coq-ft-l'àne,
un brave savetier du Souk qui, sur l'invite
d'un collecteur d'impôts à payer CI patente »,
(datante) croit entendre qu'on lui reproche
« d'avoir découché » (mbaUit), d'où un col-
loque très drôle et des protestations énergi-
ques du brave savetier qui se défend de la
chose. Suivent des scènes du Souk, dès ta-
bleaux de famille, une imitation des-rapports
entre Français et Indigènes; un chaouch
blessé de guerre algérien, plein de morgue
et de mépris pour le vulgaire administré,
mais aisément corruptible à la première offre
de labor (faveur); un percepteur français
bon enfant et conciliant, qui s'éponge le
front et s écarte des vaines discussions ; une
commère digne et compassée qui morigène sa
gamine de strur, une chanteuse de café-
concert qui chante « de la tète », un apprenti
cordonnier, sorte de petit « poulbot » criard
et efflanqué, un Chleuli qui baye aux cor-
neilles, tous ces types mis en scène par l'au-
teur-comédien obtiennent un succès enthou-
siaste.
Cette bonne entente joyeuse et noble ne
met-elle pas davantage en relief la mauvaise
volonté et la culpabilité de ceux qui, au
loin, se livrent à des scènes de carnage et
changent la douce vision d'Orient en une
horreur de représailles impies et d'hécatom-
bes inexpiables ?
Honte et anathème sui eux, qui, parmi les
efforts universels d'apaisement et d'union,
renouvellent de vieilles querelles et des
mœurs abolies! Mais tirons le rideau sur cet
r •
enfer !
Ici se poursuivent l'allégresse et les spec-
tacles mervei lleux : des danseurs soussis
exécutent leur ballet-chœur aux mélodies rau-
ques, aux pas rythmés, aux attitudes on-
doyantes, à la musique lancinante d'un re-
I)ab monocorde (le qu.
bab monocorde, de quadruples castagnettes
de cuivre s'entre-martelant sans cesse, avec
la persistance du cri-cri d'un grillon in-
fernal.
0 charme rare et attirant de ces cérémo-
nies variées, d'un air tantôt primitif, tantôt
raffiné, Orient qui fait vibrer la plus pro-
fonde et la plus secrète sensibilité humaine,
puisses-tu quelque jour prochain offrir sur
les lieux où tu règnes le spectacle d'une
générale et éternelle accalmie où ne se don-
neront désormais carrière que la fantaisie de
tes artistes, le goût délicat et fin de tes
amateurs et de tes lettrés, l'amour et l'atti-
rance de ceux que tu charmes et que tu cap-
tives !
Roland fillMo-ilffials,
L'ALGÉRIE A LA FOIRE DU DANUBE
t 81 1
La (f Foire Internationale du Danube, à
Bratislava, a été inaugurée le 25 août par le
ministre du Commerce de Tchécoslovaquie,
accompagné du président de la Chambre de
Commerce et d'Industrie, des consuls étran-
gers, des représentants de l'Administration
de Slovaquie et de la ville de Bratislava, du
directeur de la Foire, etc.
Le cortège officiel s'est rendu dans la sec-
tion de l'Algérie organisée par le Gouverne-
ment général avec la collaboration des
Chambres de commerce algériennes. Les
honneurs du stand de l'Algérie ont été faits
par M. Berthoud, délégué officiel des expo-
sants.
Le stand renferme un échantillonnage des
produits bruts susceptibles d'intéresser la
Slovaquie. En outre une section spéciale a
été réservée aux ouvroirs de tapis algériens
dont l'exposition est particulièrement im-
portante, ainsi qu'au tourisme, offrant aux
visiteurs, pour cette dernière industrie, une
documentation complète sur les principaux
sites de la colonie, les voies de communica-
tion et les conditions du voyage.
-
TAUX DE LA PIASTRE
1'
A la dnte du 2'.i août, le taux de la piastre,
à Snïgon, était de 11 fr. 35.
Le Centenaire de l'Algérie
»♦»
M. Bordes, Gouverneur général de l'Algé-
rie, accompagné de M. Mercier, commissaire
général du Centenaire, fera à Marseille le
29 septembre une conférence officielle sur le
programme des fêtes du Centenaire de l'Algé-
rie.
.t.
L'ANTENNE COLONIALE
Radio-Alger 3.000 kms
Alger vient d'être doté du nouveau poste
très puissant de radiophonie, de 12 kilowaftts-
antenne, d'une portée de 3.000 kms dont
nous avions annoncé déjà l'élaboration. Son
rayon s'étend au Maroc, à la Tunisie, à la
Tripolitaine, atteint des postes du Sahara et
d' A.O. F., de France,, d Italie, d'Allemagne
et des autres Etats centre-européens.
Des conférences sur l'agriculture, le com-
merce et la Bourse alterneront avec des cau-
series en français et en arabe sur des sujets
d'ordre pratique.
La Société d'El Moutribia d'Alger, ainsi
1 que nous le signalions dernièrement, don-
nera de fréquents concerts de musique arabe.
CINÉMA COLONIAL
En Algérie
On va tourner un film intitulé Un drame
là-bas, d'après un roman de M. Léty-Cour-
bières, œuvre dont l'action a l'Algérie pour
cadre.
Iseo
Théâtres d'Algérie
Les théAlros d'Algérie vont commencer
bientôt leur Raison d'hiver et Ica engage-
ments d'artistes parisiens sont faits. Mllo
Lueicntie Band, qui vient de signer un
contrat pour l'Alluunbru d'Alger, partira
bientôt.
44 L'EI-Go&éa
l'
Hier matin est arrivé à Marseille, venant
de La Seyne, où il a été construit, un nou-
veau paquebot, r El-Goléa, destiné au service
Port- Vendres-Al ger.
Jaugeant 3.639 tonnes, ce paquebot a 116
mètres de long, 16 mètres de large et a réalisé
la vitesse de 19 nœuds. Les cales à marchan-
dises ont 2.400 mètres cubes.
Les aménagements pour passagers ont été
décorés dans un goût moderne, ils sont prévus
pour 96 passagers de luxe ou de première
classe, 140 de seconde et 98 de troisième.
L'Ef-Goféa entrera en service en septembre.
n ̃̃ 1 - - 1
Echouase en Gironde
Par suite d'une avarie de machine, le pa-
quebot de la Compagnie Générale Transatlan.
tique Volubilis, courrier du Maroc, s'est échoué
en Gironde. Il a dû être ramené à Bordeauj
par des remorqueurs. Le paquebot Pérou
venant de Saint-Nazaire, va être dérouté d4
sa ligne Saint-Nazaire-Antilles-Colon pou
prendre à son bord les passagers du Volubili
et les emmener à Casablanca.
La protection des caoutchoucs
-
Je me souviens qu'au temps où je com-
mandais la circonscription de Mobaye, dans
le Haut-Oubangui, je m'élevais contre les
plantations de caoutchouc: (d'Ireli, en parti-
culier) faites, en dépit du bon sens, par les
concessionnaires, pour répondre aux exi-
gences du cahier des charges de 1899. Au
moment où ces lrelis atteignaient l'âge de
production, le moindre vent les anéantis-
sait.
Au Congo belge, des agents de culture in-
diquaient aux colons les emplacements fa-
vorables à la culture des Irelis. Chez nous,
rien de tout cela, pourvu que le colon ait
planté un nombre de pieds proportionnel à
la production de caoutchouc, tout était pour
le mieux, peu importait les résultats de
ces plantations. Et le colon n'étant pas in-
génieur agronome, plantait n'importe où.
L'Institut national agronomique dont les
études ne sont pas suffisamment connues du
monde colonial, vient de publier dans son
Bulletin de juin 1020 une notice sur les
plantes de couverture dans la culture dit
caoutchouc.
Afin de conserver à la terre son humus que
le défrichage a fait disparaître, M. E. L.
préconise de semer des plantes rampantes
qui couvrent le sol d'une couche épaisse
comme un matelas et préservent la terre con-
tre le soleil et contre le lavage des pluies
torrentielles. Les racines des igna Dolichos
llosei) Centrosoma pubesccns, et Centro-
sema rlumieri) rendent le sol plus meuble
et plus perméable à l'air. M. E. L. conseille
aussi l'emploi de la Tefhrosia et de variétés
d'/lIdigofertl. en appliquant les mêmes mé-
thodes qu'aux plantes cultivées en Europe
comme engrais vert.
Trouvant un terrain favorable à ses raci-
nes, le caoutchouc résistera mieux aux vents
et se développera normalement, c'est donc
une précieuse indication que nous a fournie
l'auteur de la notice.
fiugéne De vaux.
Les P. T. T. ignorent la géographie coloniale
Pour une lettre recommandée de 25 gram-
mes à destination de Tahiti (Etablissements
français d'Océanie) un bureau de poste du
quartier de la Concorde fait payer 3 fr. 90
d'affranchissement alors qu'un bureau voisin
(quartier de la place Vendôme) ne fait payer
que 1 fr. 60 d'affranchissement. Taux normal
puisque les Etablissements français d'Océanie
sont Colonies françaises.
Cette remarque se passe de commentaires.
1
unE F.N SKC.ON1M-. l'A (.F -
L'aviation coloniale.
Dépêches du Maroc.
Alger en deuil
en
Une catastrophe qui, sclolt les dernières
informations, aurait fait plus de quatre.
vingts victimes, s'est produite à Alger, où
un immeuble de quatre étages, habité par
vingt-deux familles d'ouvriers, s'est effondré.
rue des Consuls.
Cette rue des Consuls est située dans le
quartier de la Marine, quartier de Vancienne
Préfecture, qui fait partie de la vieille znlle,
avec le quartier Bab-el-Oued. Dans tous ces
vieux quartiers dont le vieux Marseille peut
donner une idée analogue, d'étroites rues
serpentent où deux voitures ne pourraient se
croiser. En façade de ces rues minuscules
s'élèvent des maisons, dont un grand nombre
ont été construites au lendemaill de l'occu.
pation française et qui mériteraient d'être
démolies. Déjà il y a quatre mois, une mai-
son s'est écroulée à la Casbah. Elles sont
d'ailleurs appelées à disparaître et la calas.
trophe aura sans doute pour effet de hâter
Vexécution rapide de te projet édilitaire. Le
Conseil municipal a adopté le projet de M.
de Redolt qui a pour objet d'assainir et de
mieux aérer cette partie de la tille en dé-
molissant de vieilles bâtisses sur l'emplace-
ment desquelles serll établie une large artère
qui facilitera les communications avec le
port.
Il était près de minuit lorsqu'un bruit
effroyable de pierres éboulées rh'eilla le
quartier endormi. L'immeuble de quatre éta-
ges venait de s'effondrer. !Je cet limas de
décombres s'élevaient des cris d'enfants ter-
rifiés, des gémissements de blessés et, à
peine distincts, des râles de mOlmmts.
Les locataires de l'immeuble sont pour la
plupart des italiens ou t'spagllols, et des
israélites, dont les chefs de famille et les fils
aines exercent la profession de l'êclleurs. Il
sera très difficile, dans ces conditions. de
savoir exactement le nombre de victimes,
bon nombre d'entre les habitants pouvant se
trouver en mer.
Aussitôt l'alarme donnée, la rue se peupla
de la foule sans cesse accrue des habitants
des maisons voisines réveilles par le bruit.
La police et les pom piers furent alertés et
se rendirent aussitôt sur les lieux de l'ac-
cident. D'après les ingénieurs des ponts et
chaussées. cet effondrement serait au à un
pilier central qui aurait cédé. Mais les voi-
sins affirment toutefois que la maison se lé-
zardait depuis plusieurs semaines.
Les premières recherches
Petit à petit on découvre des objets fami-
liers t/ui sont déposés par les soins des
agents éi l'école de la rue des Consuls : un
réveille-matin marquant minuit 30; quelques
bijoux, des boites de savon, des boites d'allu-
mdto, des effets de lingerie que l'on extrait
difficilement des armoires écrasées.
Puis l'enlèvement d'un plancher met à dé-
couvert un lit sur lequel repose un cadavre.
Il faut mille précautions pour le dégager et
le même spectacle navrait t se déroule don-
nant lieu à des scènes déchirantes.
Une femme venue aux renseignements
apprend la disparition île ses pnrnlls. lille
s'évanouit dans la rue Général-Laperrine où
stationnent les ambulances de la ville. Des
scènes des plus déchirantes se sont dérou-
lées. des mères réclamant leur enfant, des
femmes pleurant leur mari. Dans la rue ce
ne sont que cris d'horreur et de désespoir.
La catastrophe était connue de la population
algéroise avant même la parution des jour-
naux dit matin. Une foule considérable était
maintenue par des cordons de troupes avec
toutes les peines du monde pour Vempêcher
de déborder jusqu'à la rue des ('onsuls.
Au café ( orsica, situé dans la même rue,
d'autres personnes attendent dans l'angoisse
le résultat des recherches. M. Car mol o Fa~
nerone, tumlilcur. est assis sur une chaise,
prostré. Le soir même il était allé au
cinéma. A son retour, il trouvait la mai-
son effondrée : sa femme t'l, ses trois t'lt-
fants étaient ensevelis.
L'archevêque d'Alger s'enquiert
des nouvelles
A () h. 30, Mgr Collomb et deux vicaires
de la cathédrale viennent. au nom de l'ar-
chevêque, se rendre com ptt? de la catastro-
phe. Ils sont reçus par M. Villeneuve, con-
seiller général et M. Laget, adjoint au
maire.
M. Joseph Polverelli qui a échappé à la
catastra phe allait pénétrer chez lui, rue
Jfrueys, lorsqu'il eut l'idée d'entrer pour se
rafraîchir au café Corsica, qui était encore
ouvert à cette heure. Aussitôt après un épou-
vantable fracas se faisait entendre et un
épais tourbillon de poussière s'élevait de la
rue. M. Polverelli crut à un tremblement de
terre, mais bientôt il se rendit compte de
la catastrophe et fut un des premiers à se-
courir les dctimes.
Ou parvint, au premier moment, à sauver
de leur pénible situation les locataires du
quatrième étage, qui avaient été les moins
éProuvés.
Quel ques m inutes avant l'écroulement, un
tirailleur s'était assis sur le seuil de r~~-
cerie mosabitr, située au rez-de-chaussée ; il
fi
est certainement parmi les victimes.
Les premiers cadavres
M. Polverelli découvrit au milieu de la con-
fusion générale, des premiers cadavres, ce-
lui d'une jeune femme, Mme Anna Cifone,
âgée de vingt-deux ans, et de son bébé, âgé
de huit mois, qui tenait encore son biberon
à la main.
« Entre temps, dit M. Polverelli, les pom-
piers, les autorités civiles et militaires, ainsi
que ht population a-,'aient été alertés et
malgré l'obscurité un service d'ordre com-
mençait à fonctionner. » Il faut rendre un
hommage reconnaissant à tous ceux qui, de-
puis la première heure, sans arrêt, sans ma-
nifester la moindre fatigue, procèdent aux
travaitv. Ll police municipale, malgré les
difficultés que présente la topographie des
lieur, avait organisé un service d'ordre di-
rigé par M. Tristelt, commissaire central,
M. Maury et le commissariat de Varrondis-
sement.
Les actes de sauvetage
Grâce aux mesures prises, les équipes ont
pu travailler à l'aise et avec méthode, La
section active des pompiers fait l'admiration
de tous ceux qui l'ont vue à l'œuvre. Enfin
la troupe, divisée en piquets qui se r,,/(lient,
Prête un concours précieux.
Dans la foule, contenue par les cordons
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 82.08%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 82.08%.
- Auteurs similaires Indochine française Indochine française /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Indochine française" or dc.contributor adj "Indochine française")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/2
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k62806051/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k62806051/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k62806051/f1.image
- Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k62806051
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://numba.cirad.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k62806051