Titre : Le Monde colonial illustré : revue mensuelle, commerciale, économique, financière et de défense des intérêts coloniaux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1935-01-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34459430v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 janvier 1935 01 janvier 1935
Description : 1935/01/01 (T12,A13,N138)-1935/12/31... 1935/01/01 (T12,A13,N138)-1935/12/31 (T12,A13,N149).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9746657b
Source : CIRAD, 2016-192274
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 03/10/2016
- Aller à la page de la table des matièresIII
- TABLE DES MATIÈRES
- AGRICULTURE
- ARTS
- AVIATION
- .......... Page(s) .......... 23
- .......... Page(s) .......... 50
- .......... Page(s) .......... 37
- .......... Page(s) .......... 122
- .......... Page(s) .......... 188
- .......... Page(s) .......... 206
- .......... Page(s) .......... 231
- .......... Page(s) .......... 234
- .......... Page(s) .......... 237
- .......... Page(s) .......... 238
- .......... Page(s) .......... 241
- .......... Page(s) .......... 245
- .......... Page(s) .......... 246
- .......... Page(s) .......... 247
- .......... Page(s) .......... 248
- .......... Page(s) .......... 251
- .......... Page(s) .......... 253
- .......... Page(s) .......... 254
- .......... Page(s) .......... 257
- .......... Page(s) .......... 258
- .......... Page(s) .......... 260
- CHASSES
- CHEMINS DE FER
- .......... Page(s) .......... 116
- CINÉMA
- .......... Page(s) .......... 123
- ETHNOGRAPHIE
- FOIRES ET EXPOSITIONS
- .......... Page(s) .......... 8
- .......... Page(s) .......... 27
- .......... Page(s) .......... 37
- .......... Page(s) .......... 79
- .......... Page(s) .......... 49
- .......... Page(s) .......... 63
- .......... Page(s) .......... 67
- .......... Page(s) .......... 133
- .......... Page(s) .......... 133
- .......... Page(s) .......... 133
- .......... Page(s) .......... 135
- .......... Page(s) .......... 148
- HISTOIRE
- MARINE
- MATIÈRES PREMIÈRES
- MÉDECINE ET HYGIÈNE
- MINES
- .......... Page(s) .......... 150
- NÉCROLOGIE
- .......... Page(s) .......... 41
- .......... Page(s) .......... 60
- .......... Page(s) .......... 63
- .......... Page(s) .......... 77
- .......... Page(s) .......... 61
- .......... Page(s) .......... 118
- .......... Page(s) .......... 228
- .......... Page(s) .......... 228
- .......... Page(s) .......... 228
- .......... Page(s) .......... 228
- POLITIQUE COLONIALE ÉTRANGÈRE
- POLITIQUE COLONIALE FRANÇAISE
- .......... Page(s) .......... 50
- .......... Page(s) .......... 58
- .......... Page(s) .......... 61
- .......... Page(s) .......... 70
- .......... Page(s) .......... 50
- .......... Page(s) .......... 57
- .......... Page(s) .......... 136
- .......... Page(s) .......... 194
- .......... Page(s) .......... 196
- .......... Page(s) .......... 213
- PORTS
- ROUTES
- .......... Page(s) .......... 195
- TOURISME ET SPORTS
- .......... Page(s) .......... 15
- .......... Page(s) .......... 24
- .......... Page(s) .......... 44
- .......... Page(s) .......... 50
- .......... Page(s) .......... 75
- .......... Page(s) .......... 76
- .......... Page(s) .......... 80
- .......... Page(s) .......... 90
- .......... Page(s) .......... 147
- .......... Page(s) .......... 151
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- .......... Page(s) .......... 154
- .......... Page(s) .......... 160
- .......... Page(s) .......... 224
- TRAVAUX PUBLICS
- VARIA
Ko 138. — JANVIER 1935. LE MONDE COLONIAL ILLUSTRE 3
EN REVENANT DU CONGO
par Georges R. MANUE
Pointe-Noire, octobre.
C'EST le terme du voyage, le moment où l'allé-
gresse, l'élan fléchissent. On est partagé entre
tout ce qui vous a tenté, séduit, passionné,
et ce retour dont le bateau tirant sur son ancre
précise l'imminence. Peut-être vaut-il la peine de
profiter de cet état lucide pour faire le point? Dans
cette Afrique Equatoriale Française, j'ai beaucoup
vu, beaucoup écouté. J'ai rencontré les hommes de
chez nous, les fonctionnaires et les colons, et les
commerçants. J'ai entendu mainte plainte, tant de
reproches dont j'avais souvent le sentiment que ma
présence seule, mon caractère de passant, les déter-
minent, parce qu'aucune conversation, pour amer,
désabusé qu'ait paru mon interlocuteur, ne s'est
achevée sans qu'il ait ajouté : « Tout ça n'empêche
pas de travailler ». Et de repartir avec ce mouve-
ment de l'épaule qui déplace le fardeau, mais ne le
rejette pas. Moi, je les quittais, parfois triste,
regrettant de ne pouvoir rien escompter d'une
Métropole qui s'éveille à peine à l'idée impériale,
souvent réconfortée par la dernière poignée de
mains, le dernier mot : « Nous tenons le coup ».
J'ai rencontré des fonctionnaires, administra-
teurs ou adjoints ou commis des services civils.
Ils ont bon esprit, et même lorsqu'ils murmurent :
« On nous décourage », je sais bien qu'il suffit d'ai-
guiller la conversation vers leur métier : la route
qu'ils tracent, la plantation qu'ils surveillent, le
village qu'ils assainissent, pour que le feu renaisse.
L'action qui les prend, chaque matin, à bras le
corps, elle les nourrit. Qu'on allège un peu le far-
deau de papier dont une Administration tradition-
nelle les écrase, et ils donneront à l'action toutes
ces heures vaines où les murs du bureau les accablent.
Ensuite, il les faut bien payer. On l'avait compris,
il y a peu d'années, et voici qu'en revient aux com-
pressions. Ils étaient les derniers à devoir être réduits.
Oh ! ce ne sont pas des héros. La colonie ne les
tue plus à coup sûr. On y vit normalement.
Mais, en échange, il y a le sacrifice de ce qui pour-
tant fait l'agrément d'une vie, son délassement : le
concert, le théâtre, le cinéma, les amitiés anciennes,
la famille. Cela mérite d'être compensé.
Les Français, installés là-bas pour commercer,
planter ou transporter, sont pour la plupart des
audacieux et des tenaces. Sinon, ils seraient ail-
leurs. Ils se plaignent naturellement de l'Adminis-
tration qui, elle, les critique. Dispute banale que la
courtoisie remet dans ses justes limites. Mais, dans
les revendications des « privés », tout n'est pas abu-
sif, exagéré. Ils veulent être compris, encouragés,
étayés. Et à qui demanderaient-ils tout cela, sinon
à l'Administration tutélaire ? S'agit-il d'intérêts
irrémédiablement opposés ? Je ne le crois pas. D'ail-
leurs, quand deux catégories d'êtres sont animés
par la même foi, on peut trouver chez les uns et
les autres des terrains d'entente. Une reprise des
affaires arrangerait pas mal de choses. Quand l'ar-
gent est nombreux, facile, que tout le monde,
blancs et indigènes, en gagne, les problèmes perdent
de leurs angles. Mais la reprise en Afrique elle ne
dépend pas de l'Afrique, pas de ceux qui y travail-
lent, mais de la Métropole.
A trois ans d'intervalle, j'avais retrouvé une
Afrique Equatoriale Française très différente de
celle qui restait fixée dans ma mémoire par cent
paysages et mille aspects de l'activité blanche.
Ce Congo-Océan, dont l'achèvement était alors
encore mis en doute, et par des gens de l'Afrique
Equatoriale Française, je l'ai revu, terminé. J'en
ai parcouru les sections, celle de la plaine, celle de la
montagne, celle de l'autre plaine, mais en quelques
heures seulement. J'avais peine à restituer au
Mayombe le spectacle de ses tranchées béantes, des
viaducs jetés sur les rivières noires, et cette vie
intense des chantiers. Déjà la forêt a repris son
avance. Elle masque ravins et rocs. La mousse enva-
hit la base des ponts, et le ciment, par l'humidité,
Estacade de la « Galtransaf », à Brazzaville.
s'est recouvert d'une teinte grisâtre. Tout ce gigan-
tesque travail, on a peine à penser qu'il est d'hier,
de l'an dernier. Les gares, coquettes, et leurs par-
terres de fleurs, leurs esquisses d'ombrages, ont
seules un air de nouveauté.
Un trafic, qui croît de mois en mois, s'est installé,
apportant une première justification à celui qui,
contre tant d'adversaires, a voulu ce rail. Il serait
enfantin d'escompter, de l'ouverture récente de ce
chemin de fer,, une amélioration immédiate de la
situation économique de l'Afrique Equatoriale
Française. Laissons aux discours officiels ces anti-
cipations qui se jouent du temps et des lois écono-
miques. Il nous suffit que de Brazzaville, terminus
du Congo navigable, à Pointe-Noire, port naissant
dont la rade, maintenant, abrite des pavillons de
quatre ou cinq nations, un rail existe.
Tout naturellement, à une cadence que la crise
sans doute n'aura pas manqué de ralentir, mais qui
dans cet avenir proche dont nous attendons un
nouveau démarrage de l'Afrique, doit s'accélérer,
le trafic ira croissant. J'ai rencontré, en Afrique
Equatoriale Française, trop d'hommes courageux,
opiniâtres dans leur résistance à la crise, pour être
inquiet sur l'avenir du pays. Ils méritent qu'on les
soutienne.
Et si nous avons regretté de ne point voir, dans
les programmes de la Conférence, une commission
de la colonisation, nous ne laissons pas d'espérer
que ce problème essentiel, dont dépend la durée de
notre installation en Afrique, sera étudié et résolu.
Un paysannat blanc, un paysannat noir, deux
formules qui doivent, parallèlement, féconder le
continent noir. A la condition que les Gouvernements,
à l'exemple de ce qui a été fait dans certaines
régions de l'Afrique du Nord, prennent à leur
charge l'équipement des régions propices à la petite
colonisation, et aussi les essais touchant la qualité
des sols, le choix des cultures, la sélection des variétés.
A la condition encore que les petits colons blancs
soient des agriculteurs, de bons praticiens, prudents
et compétents. Nous ne pouvons recommencer en
Citadins de Poto-Poto à Brazzaville.
Afrique Equatoriale Française la fâcheuse expé-
rience qui grève le budget marocain des 500 mil-
lions de la colonisation officielle. L'intervention de
l'État doit être strictement limitée à ce rôle d'amé-
nagement de régions et de recherches techniques
qui éviteront aux colons de coûteuses tèntatives.
Mais, pour ce qui est du travail de la plantation,
Dans l'Oubangui, on plante le café avec enthou-
siasme. Un transporteur, un entrepreneur, un com-
merçant investissent dans la terre le bénéfice yde
leur entreprise.
Cela vaudra à la France, dans trois ou quatre ans,
un beau tonnage de
café. Produire est une
chose ; vendre une
autre, singulièrement
plus difficile. Les con-
tingements, les protec-
tions ne sauraient suffire
pour créer la vogue
d'un produit national.
Il lui faut la qualité et
l'homogénéité. On peut
espérer que les plan-
teurs de l'Oubangui,
imitant leurs collègues
du Maroc et de l'Algérie,
sauront se plier aux
lois de la standardisa-
tion, afin que le label
Oubangui couvre une
marchandise qui ne cau-
sera aucune surprise
fâcheuse à l'acheteur.
Affaire de discipline et
d'intérêt clairement
vu.
J'ai traversé aussi les
champs de coton. On
en fait un peu partout : ce qui est sans doute une
erreur. Le coton exige de l'indigène des soins minu-
tieux,échelonnés sur la longueur de l'année. Si la récolte
n'atteint pas 400 ou 500 kilogrammes à l'hectare, le
gain du planteur est trop médiocre. Il ne rémunère
pas décemment un effort aussi soutenu. Donc, ne
faire du coton que dans des terres particulièrement
favorables, et dans des régions situées au maximum
à 400 kilomètres de l'embarquement fluvial. Au de-
là, le prix du transport par camion écrase le produit.
Il appartient à l'Administration de choisir ces zones
efficaces. Ailleurs, que le noir fasse ses cultures
vivrières, qu'il mange à sa faim, ce sera déjà une
victoire.
J'ai visité les exploitations aurifères sur la rivière
Lavage de graviers aurifères dans le « Sluice Il.
Pouloubou. La teneur en or des graviers est faible.
Mais le coût de la main-d'œuvre est modique,
encore que cette modicité — à notre échelle — soit,
pour les quelques milliers d'indigènes employés
sur les chantiers, presque la richesse, en tout cas
le bien-être.
Dans ces exploitations, les installations sont
simples, les services généraux réduits. La crise aura
eu ce mérite de ramener à la raison mainte entre-
prise, grisée par l'euphorie des années 25.
En résumé, que faut-il à l'Afrique Equatoriale
Française pour que cette fédération continue de
prospérer, d'évoluer ? De l'argent. D'abord, de
l'argent officiel, de quoi améliorer le réseau routier,
transformer les ponts dont la limite de charge'
atteint 3 tonnes, en ponts ouverts aux remorques
de 8 à 10 tonnes, c'est-à-dire abaisser de 30 p. 100,
le coût du fret, et encore de l'argent officiel pour
amplifier l'effort d'assistance médical, le soutien à
la production.
Puis de l'argent « privé » pour redonner de l'ai-
sance à ce qui, en dépit de la crise, vit encore, pour
créer de nouvelles entreprises, adaptées à des
T~ — - - ••• ■- - — -
La « Micheline » en service sur le Congo-Océan.
besoins nouveaux, à des exigences nouvelles.
De l'argent : le bas de laine français en contient
des dizaines de milliards, que sollicitent dix pays
étrangers où, par une tradition de bêtise, nos épar-
gnants iront investir des capitaux, au bénéfice
d'oeuvres qui non seulement ne leur appartiendront
jamais, mais qui ne paieront pas toujours les inté-
rêts des emprunts.
Tandis que nous avons un Empire où tout ce qui
se fait, se crée, s'élargit, appartient aux Français,
fait vivre des Français, enrichit des Français, dans
la Métropole et à la colonie.
L'argent français saura-t-il choisir ?
Georges R. MANUE.
EN REVENANT DU CONGO
par Georges R. MANUE
Pointe-Noire, octobre.
C'EST le terme du voyage, le moment où l'allé-
gresse, l'élan fléchissent. On est partagé entre
tout ce qui vous a tenté, séduit, passionné,
et ce retour dont le bateau tirant sur son ancre
précise l'imminence. Peut-être vaut-il la peine de
profiter de cet état lucide pour faire le point? Dans
cette Afrique Equatoriale Française, j'ai beaucoup
vu, beaucoup écouté. J'ai rencontré les hommes de
chez nous, les fonctionnaires et les colons, et les
commerçants. J'ai entendu mainte plainte, tant de
reproches dont j'avais souvent le sentiment que ma
présence seule, mon caractère de passant, les déter-
minent, parce qu'aucune conversation, pour amer,
désabusé qu'ait paru mon interlocuteur, ne s'est
achevée sans qu'il ait ajouté : « Tout ça n'empêche
pas de travailler ». Et de repartir avec ce mouve-
ment de l'épaule qui déplace le fardeau, mais ne le
rejette pas. Moi, je les quittais, parfois triste,
regrettant de ne pouvoir rien escompter d'une
Métropole qui s'éveille à peine à l'idée impériale,
souvent réconfortée par la dernière poignée de
mains, le dernier mot : « Nous tenons le coup ».
J'ai rencontré des fonctionnaires, administra-
teurs ou adjoints ou commis des services civils.
Ils ont bon esprit, et même lorsqu'ils murmurent :
« On nous décourage », je sais bien qu'il suffit d'ai-
guiller la conversation vers leur métier : la route
qu'ils tracent, la plantation qu'ils surveillent, le
village qu'ils assainissent, pour que le feu renaisse.
L'action qui les prend, chaque matin, à bras le
corps, elle les nourrit. Qu'on allège un peu le far-
deau de papier dont une Administration tradition-
nelle les écrase, et ils donneront à l'action toutes
ces heures vaines où les murs du bureau les accablent.
Ensuite, il les faut bien payer. On l'avait compris,
il y a peu d'années, et voici qu'en revient aux com-
pressions. Ils étaient les derniers à devoir être réduits.
Oh ! ce ne sont pas des héros. La colonie ne les
tue plus à coup sûr. On y vit normalement.
Mais, en échange, il y a le sacrifice de ce qui pour-
tant fait l'agrément d'une vie, son délassement : le
concert, le théâtre, le cinéma, les amitiés anciennes,
la famille. Cela mérite d'être compensé.
Les Français, installés là-bas pour commercer,
planter ou transporter, sont pour la plupart des
audacieux et des tenaces. Sinon, ils seraient ail-
leurs. Ils se plaignent naturellement de l'Adminis-
tration qui, elle, les critique. Dispute banale que la
courtoisie remet dans ses justes limites. Mais, dans
les revendications des « privés », tout n'est pas abu-
sif, exagéré. Ils veulent être compris, encouragés,
étayés. Et à qui demanderaient-ils tout cela, sinon
à l'Administration tutélaire ? S'agit-il d'intérêts
irrémédiablement opposés ? Je ne le crois pas. D'ail-
leurs, quand deux catégories d'êtres sont animés
par la même foi, on peut trouver chez les uns et
les autres des terrains d'entente. Une reprise des
affaires arrangerait pas mal de choses. Quand l'ar-
gent est nombreux, facile, que tout le monde,
blancs et indigènes, en gagne, les problèmes perdent
de leurs angles. Mais la reprise en Afrique elle ne
dépend pas de l'Afrique, pas de ceux qui y travail-
lent, mais de la Métropole.
A trois ans d'intervalle, j'avais retrouvé une
Afrique Equatoriale Française très différente de
celle qui restait fixée dans ma mémoire par cent
paysages et mille aspects de l'activité blanche.
Ce Congo-Océan, dont l'achèvement était alors
encore mis en doute, et par des gens de l'Afrique
Equatoriale Française, je l'ai revu, terminé. J'en
ai parcouru les sections, celle de la plaine, celle de la
montagne, celle de l'autre plaine, mais en quelques
heures seulement. J'avais peine à restituer au
Mayombe le spectacle de ses tranchées béantes, des
viaducs jetés sur les rivières noires, et cette vie
intense des chantiers. Déjà la forêt a repris son
avance. Elle masque ravins et rocs. La mousse enva-
hit la base des ponts, et le ciment, par l'humidité,
Estacade de la « Galtransaf », à Brazzaville.
s'est recouvert d'une teinte grisâtre. Tout ce gigan-
tesque travail, on a peine à penser qu'il est d'hier,
de l'an dernier. Les gares, coquettes, et leurs par-
terres de fleurs, leurs esquisses d'ombrages, ont
seules un air de nouveauté.
Un trafic, qui croît de mois en mois, s'est installé,
apportant une première justification à celui qui,
contre tant d'adversaires, a voulu ce rail. Il serait
enfantin d'escompter, de l'ouverture récente de ce
chemin de fer,, une amélioration immédiate de la
situation économique de l'Afrique Equatoriale
Française. Laissons aux discours officiels ces anti-
cipations qui se jouent du temps et des lois écono-
miques. Il nous suffit que de Brazzaville, terminus
du Congo navigable, à Pointe-Noire, port naissant
dont la rade, maintenant, abrite des pavillons de
quatre ou cinq nations, un rail existe.
Tout naturellement, à une cadence que la crise
sans doute n'aura pas manqué de ralentir, mais qui
dans cet avenir proche dont nous attendons un
nouveau démarrage de l'Afrique, doit s'accélérer,
le trafic ira croissant. J'ai rencontré, en Afrique
Equatoriale Française, trop d'hommes courageux,
opiniâtres dans leur résistance à la crise, pour être
inquiet sur l'avenir du pays. Ils méritent qu'on les
soutienne.
Et si nous avons regretté de ne point voir, dans
les programmes de la Conférence, une commission
de la colonisation, nous ne laissons pas d'espérer
que ce problème essentiel, dont dépend la durée de
notre installation en Afrique, sera étudié et résolu.
Un paysannat blanc, un paysannat noir, deux
formules qui doivent, parallèlement, féconder le
continent noir. A la condition que les Gouvernements,
à l'exemple de ce qui a été fait dans certaines
régions de l'Afrique du Nord, prennent à leur
charge l'équipement des régions propices à la petite
colonisation, et aussi les essais touchant la qualité
des sols, le choix des cultures, la sélection des variétés.
A la condition encore que les petits colons blancs
soient des agriculteurs, de bons praticiens, prudents
et compétents. Nous ne pouvons recommencer en
Citadins de Poto-Poto à Brazzaville.
Afrique Equatoriale Française la fâcheuse expé-
rience qui grève le budget marocain des 500 mil-
lions de la colonisation officielle. L'intervention de
l'État doit être strictement limitée à ce rôle d'amé-
nagement de régions et de recherches techniques
qui éviteront aux colons de coûteuses tèntatives.
Mais, pour ce qui est du travail de la plantation,
Dans l'Oubangui, on plante le café avec enthou-
siasme. Un transporteur, un entrepreneur, un com-
merçant investissent dans la terre le bénéfice yde
leur entreprise.
Cela vaudra à la France, dans trois ou quatre ans,
un beau tonnage de
café. Produire est une
chose ; vendre une
autre, singulièrement
plus difficile. Les con-
tingements, les protec-
tions ne sauraient suffire
pour créer la vogue
d'un produit national.
Il lui faut la qualité et
l'homogénéité. On peut
espérer que les plan-
teurs de l'Oubangui,
imitant leurs collègues
du Maroc et de l'Algérie,
sauront se plier aux
lois de la standardisa-
tion, afin que le label
Oubangui couvre une
marchandise qui ne cau-
sera aucune surprise
fâcheuse à l'acheteur.
Affaire de discipline et
d'intérêt clairement
vu.
J'ai traversé aussi les
champs de coton. On
en fait un peu partout : ce qui est sans doute une
erreur. Le coton exige de l'indigène des soins minu-
tieux,échelonnés sur la longueur de l'année. Si la récolte
n'atteint pas 400 ou 500 kilogrammes à l'hectare, le
gain du planteur est trop médiocre. Il ne rémunère
pas décemment un effort aussi soutenu. Donc, ne
faire du coton que dans des terres particulièrement
favorables, et dans des régions situées au maximum
à 400 kilomètres de l'embarquement fluvial. Au de-
là, le prix du transport par camion écrase le produit.
Il appartient à l'Administration de choisir ces zones
efficaces. Ailleurs, que le noir fasse ses cultures
vivrières, qu'il mange à sa faim, ce sera déjà une
victoire.
J'ai visité les exploitations aurifères sur la rivière
Lavage de graviers aurifères dans le « Sluice Il.
Pouloubou. La teneur en or des graviers est faible.
Mais le coût de la main-d'œuvre est modique,
encore que cette modicité — à notre échelle — soit,
pour les quelques milliers d'indigènes employés
sur les chantiers, presque la richesse, en tout cas
le bien-être.
Dans ces exploitations, les installations sont
simples, les services généraux réduits. La crise aura
eu ce mérite de ramener à la raison mainte entre-
prise, grisée par l'euphorie des années 25.
En résumé, que faut-il à l'Afrique Equatoriale
Française pour que cette fédération continue de
prospérer, d'évoluer ? De l'argent. D'abord, de
l'argent officiel, de quoi améliorer le réseau routier,
transformer les ponts dont la limite de charge'
atteint 3 tonnes, en ponts ouverts aux remorques
de 8 à 10 tonnes, c'est-à-dire abaisser de 30 p. 100,
le coût du fret, et encore de l'argent officiel pour
amplifier l'effort d'assistance médical, le soutien à
la production.
Puis de l'argent « privé » pour redonner de l'ai-
sance à ce qui, en dépit de la crise, vit encore, pour
créer de nouvelles entreprises, adaptées à des
T~ — - - ••• ■- - — -
La « Micheline » en service sur le Congo-Océan.
besoins nouveaux, à des exigences nouvelles.
De l'argent : le bas de laine français en contient
des dizaines de milliards, que sollicitent dix pays
étrangers où, par une tradition de bêtise, nos épar-
gnants iront investir des capitaux, au bénéfice
d'oeuvres qui non seulement ne leur appartiendront
jamais, mais qui ne paieront pas toujours les inté-
rêts des emprunts.
Tandis que nous avons un Empire où tout ce qui
se fait, se crée, s'élargit, appartient aux Français,
fait vivre des Français, enrichit des Français, dans
la Métropole et à la colonie.
L'argent français saura-t-il choisir ?
Georges R. MANUE.
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