Titre : La Dépêche coloniale illustrée
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-03-15
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327559237
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 15 mars 1906 15 mars 1906
Description : 1906/03/15 (A6,N5). 1906/03/15 (A6,N5).
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9743189n
Source : CIRAD, 2016-191284
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/09/2016
La Dépêche Coloniale
- ILLUSTRÉE
15 Mars 1906 (6* Année) N° 5
Adresse télégraphique : DeponiaIe-Paris
Code : A Z français
Directeur : J.-PAUL TROUILLET
Bureaux :
12, Rue Saint-Georges, Paris
Téléphone : 157-47
Les pêtes de la Crémation de J^otfodotn 1
PEU $01 DU CAMBODGE
[texte_manquant]
E divin Norodom, Préa Bat Samdach
Norodom, a voulu que des fêtes d'une
somptuosité sans égale dans l'histoire
moderne du Cambodere Drésidassent à
son envolée sous forme de petits nuages vers
les célestes régions : 450,000 piastres, soit près
de 1,250,000 francs, turent affectés par ses dis-
positions testamentaires aux réjouissances qui
doivent, pendant plusieurs semaines, faire tres-
saillir d'aise la population de la capitale cam-
bodgienne.
Tout à la joie ! Tel pourrait être le cri des
organisateurs de cérémonies mortuaires en la
vallée du Mékong. II faut que chacun des
assistants s'ébau-
disse, loue en son for
intérieur ce défunt à
l'âme bonne et chari-
table qui, même après
sa disparition de ce
monde, songe à lui
procurer plaisir, à lui
distribuer largesses.
Prenant le parti le
plus sage, Norodom,
résolu à laisser un
étincelant souvenir de
sa disparition, fixa
lui-même la somme à
dépenser.. Il la! prit
dans sa cassette per-
sonnelle abondam-
ment garnie, opulente
comme il n'en sera
certes plus de seconde
à l'avenir, les listes
civiles suivant rare-
ment une progression
ascendante sous ré-
gime de protectorat.
Assistons donc aux
dernières des fêtes
somptueuses qui sedé-
rouleront en ce pays.
La veillée
mortuaire.
Un Cambodgien,
comme un Laotien de
rang, ne saurait dis-
paraître de la scène du monde aussitôt après
sa mort. S'il était mis en terre ou incinéré dès
le fatal événement, bientôt s'évanouirait son
souvenir, et ces vaniteux entendent jouer leur
rôle dans la comédie humaine le plus long-
temps possible.
Les mandarins de tout rang, les gens de for-
tune ou de simple aisance sont mis en bière,
puis exposés sur un catafalque. Près d'eux, la
famille veille; les parents, les amis, les voisins
se réunissent pour entendre chanter les louan-
ges du défunt, qu'on finit par livrer aux flammes
en un jour de rabelaisiennes ripailles.
Norodom devait donc être exposé avant de
faire connaissance avec le" bûcher. L'on pro-
céda, selon les rites, à sa momification par le
mercure, qui fût introduit, au moyen d'un en-
tonnoir, par la bouche du défunt; chaque soir,
pendant les premières journées qui suivirent la
mort, l'on recueillait en un vase d'or les détritus
qu'abandonnait le cadavre et, solennellement,
les graves personnages de la cour allaient jeter
dans les eaux sacrées du Mékong, paquet par
paquet, une partie des restes de leur ancien
maître.
Puis Norodom fut accroupi, recroquevillé
sur lui-même, emboîté dans uu cylindre d'or
pur et exposé à l'intérieur du Palais, dans le
pavillon Préa Aloha Monti.
L'historiographe de la cour rédigea pour les
Annales du Royaume les quelques lignes ci-
dessous reproduites, où le lecteur pourra re-
\
FEMMES DE NORODOM SE RENDANT A LA VEILLÉE FUNÈBRE
trouver la concision qui fiL de Tacite un histo-
rien modèle :
c Né à Mongkol Borey, province de Battam-
bong, le samedi douzième jour de la lune crois-
sante du troisième mois de Méachtom de l'ère
chollassakrach 1197, de l'année du Bouc c Momé
Sappassak :8 à 3 heures et 10 minutes de l'après-
midi (février 1884), Sa Majesté Préa Bat Sam-
dach, connu pendant sa minorité sous le
nom de Chraleng et de Reachea Votdey,
était fils. aîné de Sa Majesté Préa Bat Sam-
dach Préa Hariseac Réaméa Essara Thippedey
Préa An-Duong, roi du Cambodge, et de la
reine Samg-dach Préa Vareach Chini Pou,
décédée à Oudong le 27 juin 1895, à l'âge de
82 ans.
« Nommé Obbarach en 1856 à Bangkok, où
il fut ordonné bonze Phuk (deuxième degré}
dans la pagode Préa Baroniivès, il monta sur le
trône à l'âge de 24 à 25 ans.
« Couronné à Oudong, capitale du royaume,
le vendredi 3 juin 1864, à l'âge de 30 ans, Sa
Majesté Norodom habita depuis Pnom-Penh.
« Elle est décédée à l'âge de 70 ans des suites
d'un cancer à la mâchoire dans son palais royal
« Pavillon Préa Monti », au milieu de sa famille,
des principales autorités du protectorat et des
grands dixième dignitaires du royaume, le dimanche
ixième jour de la lune croissante de l'ère
chollassakrach 1266, de l'année du Dragon, dite
Rougchhassak (24 avril 1904) à 5 heures 5 mi-
Dutes du s oir, après 45 ans de règne. »
Peu après, l'urne
fut exposée dans la
Préa Thom Sangvèk
ou Chapelle des
Prières Miséricor-
dieuses. Depuis la
mort, près de 21 mois
se sont écoulés; cha-
cun de ces jours,
chacune de ces nuits
on t entendu les lamen-
tations des pleureuses
et les prières des
bonzes, venus en ba-
taillons serrés de
tous les coins du
royaume. Dès le lever
du jour, Norodom eût
trouvé à portée de sa
main, s'il avait quitté
l'urne, tous les bijoux
d'or ciselé qui forment
le merveilleux trésor
de la couronne des
Khmers. Dans les
vases, des fleurs par-
fumées; dans les étuis
des feuilles de bétel
fraîchement cueillies,
de la chaux et de la
cire renouvelées
chaque matin, des ci-
garettes roulées par
les mains des concu-
bines favorites ; de
l'eau fraîche dans les
aiguières, la mèche en
fibre de coco tressé pour allumer les impériales
de Manille,.cigares habituels du roi ; ses cannes,
d une merveilleuse richesse, dont les pommeaux
sont d'énormes pierres précieuses... Que sais-je
encore?
De jolies filles du harem se renouvelaient
d heure en heure pour la veille platonique
auprès du Maître.
GEui! OEuï! OEuï! cent fois OEuï! Tel était
le cri lamentable poussé rituellement de demi-
heure en demi-heure par les belles désolées.
Soixante-dix était leur nombre, correspon-
dant au chiffre des années du défunt. Elles com-
mençaient leurs lamentations à sept heures du
matin, lorsque les seize bonzes de garde avaient
récité la prière de l'aurore.. A neuf heures, un
repas était servi aux ministres du Bouddha, puis
à son ex-serviteur, le divin Norodom.
- ILLUSTRÉE
15 Mars 1906 (6* Année) N° 5
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Directeur : J.-PAUL TROUILLET
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Les pêtes de la Crémation de J^otfodotn 1
PEU $01 DU CAMBODGE
[texte_manquant]
E divin Norodom, Préa Bat Samdach
Norodom, a voulu que des fêtes d'une
somptuosité sans égale dans l'histoire
moderne du Cambodere Drésidassent à
son envolée sous forme de petits nuages vers
les célestes régions : 450,000 piastres, soit près
de 1,250,000 francs, turent affectés par ses dis-
positions testamentaires aux réjouissances qui
doivent, pendant plusieurs semaines, faire tres-
saillir d'aise la population de la capitale cam-
bodgienne.
Tout à la joie ! Tel pourrait être le cri des
organisateurs de cérémonies mortuaires en la
vallée du Mékong. II faut que chacun des
assistants s'ébau-
disse, loue en son for
intérieur ce défunt à
l'âme bonne et chari-
table qui, même après
sa disparition de ce
monde, songe à lui
procurer plaisir, à lui
distribuer largesses.
Prenant le parti le
plus sage, Norodom,
résolu à laisser un
étincelant souvenir de
sa disparition, fixa
lui-même la somme à
dépenser.. Il la! prit
dans sa cassette per-
sonnelle abondam-
ment garnie, opulente
comme il n'en sera
certes plus de seconde
à l'avenir, les listes
civiles suivant rare-
ment une progression
ascendante sous ré-
gime de protectorat.
Assistons donc aux
dernières des fêtes
somptueuses qui sedé-
rouleront en ce pays.
La veillée
mortuaire.
Un Cambodgien,
comme un Laotien de
rang, ne saurait dis-
paraître de la scène du monde aussitôt après
sa mort. S'il était mis en terre ou incinéré dès
le fatal événement, bientôt s'évanouirait son
souvenir, et ces vaniteux entendent jouer leur
rôle dans la comédie humaine le plus long-
temps possible.
Les mandarins de tout rang, les gens de for-
tune ou de simple aisance sont mis en bière,
puis exposés sur un catafalque. Près d'eux, la
famille veille; les parents, les amis, les voisins
se réunissent pour entendre chanter les louan-
ges du défunt, qu'on finit par livrer aux flammes
en un jour de rabelaisiennes ripailles.
Norodom devait donc être exposé avant de
faire connaissance avec le" bûcher. L'on pro-
céda, selon les rites, à sa momification par le
mercure, qui fût introduit, au moyen d'un en-
tonnoir, par la bouche du défunt; chaque soir,
pendant les premières journées qui suivirent la
mort, l'on recueillait en un vase d'or les détritus
qu'abandonnait le cadavre et, solennellement,
les graves personnages de la cour allaient jeter
dans les eaux sacrées du Mékong, paquet par
paquet, une partie des restes de leur ancien
maître.
Puis Norodom fut accroupi, recroquevillé
sur lui-même, emboîté dans uu cylindre d'or
pur et exposé à l'intérieur du Palais, dans le
pavillon Préa Aloha Monti.
L'historiographe de la cour rédigea pour les
Annales du Royaume les quelques lignes ci-
dessous reproduites, où le lecteur pourra re-
\
FEMMES DE NORODOM SE RENDANT A LA VEILLÉE FUNÈBRE
trouver la concision qui fiL de Tacite un histo-
rien modèle :
c Né à Mongkol Borey, province de Battam-
bong, le samedi douzième jour de la lune crois-
sante du troisième mois de Méachtom de l'ère
chollassakrach 1197, de l'année du Bouc c Momé
Sappassak :8 à 3 heures et 10 minutes de l'après-
midi (février 1884), Sa Majesté Préa Bat Sam-
dach, connu pendant sa minorité sous le
nom de Chraleng et de Reachea Votdey,
était fils. aîné de Sa Majesté Préa Bat Sam-
dach Préa Hariseac Réaméa Essara Thippedey
Préa An-Duong, roi du Cambodge, et de la
reine Samg-dach Préa Vareach Chini Pou,
décédée à Oudong le 27 juin 1895, à l'âge de
82 ans.
« Nommé Obbarach en 1856 à Bangkok, où
il fut ordonné bonze Phuk (deuxième degré}
dans la pagode Préa Baroniivès, il monta sur le
trône à l'âge de 24 à 25 ans.
« Couronné à Oudong, capitale du royaume,
le vendredi 3 juin 1864, à l'âge de 30 ans, Sa
Majesté Norodom habita depuis Pnom-Penh.
« Elle est décédée à l'âge de 70 ans des suites
d'un cancer à la mâchoire dans son palais royal
« Pavillon Préa Monti », au milieu de sa famille,
des principales autorités du protectorat et des
grands dixième dignitaires du royaume, le dimanche
ixième jour de la lune croissante de l'ère
chollassakrach 1266, de l'année du Dragon, dite
Rougchhassak (24 avril 1904) à 5 heures 5 mi-
Dutes du s oir, après 45 ans de règne. »
Peu après, l'urne
fut exposée dans la
Préa Thom Sangvèk
ou Chapelle des
Prières Miséricor-
dieuses. Depuis la
mort, près de 21 mois
se sont écoulés; cha-
cun de ces jours,
chacune de ces nuits
on t entendu les lamen-
tations des pleureuses
et les prières des
bonzes, venus en ba-
taillons serrés de
tous les coins du
royaume. Dès le lever
du jour, Norodom eût
trouvé à portée de sa
main, s'il avait quitté
l'urne, tous les bijoux
d'or ciselé qui forment
le merveilleux trésor
de la couronne des
Khmers. Dans les
vases, des fleurs par-
fumées; dans les étuis
des feuilles de bétel
fraîchement cueillies,
de la chaux et de la
cire renouvelées
chaque matin, des ci-
garettes roulées par
les mains des concu-
bines favorites ; de
l'eau fraîche dans les
aiguières, la mèche en
fibre de coco tressé pour allumer les impériales
de Manille,.cigares habituels du roi ; ses cannes,
d une merveilleuse richesse, dont les pommeaux
sont d'énormes pierres précieuses... Que sais-je
encore?
De jolies filles du harem se renouvelaient
d heure en heure pour la veille platonique
auprès du Maître.
GEui! OEuï! OEuï! cent fois OEuï! Tel était
le cri lamentable poussé rituellement de demi-
heure en demi-heure par les belles désolées.
Soixante-dix était leur nombre, correspon-
dant au chiffre des années du défunt. Elles com-
mençaient leurs lamentations à sept heures du
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