Titre : Les Annales coloniales : revue mensuelle illustrée / directeur-fondateur Marcel Ruedel
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1931-03-01
Contributeur : Ruedel, Marcel. Directeur de publication
Contributeur : Monmarson, Raoul (1895-1976). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb326934111
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 mars 1931 01 mars 1931
Description : 1931/03/01 (A32,N3)-1931/03/31. 1931/03/01 (A32,N3)-1931/03/31.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k9742758v
Source : CIRAD, 2016-191112
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/09/2016
Page 4
Les Annales Coloniales !
DÉCOUVERTE DE L'ALGÉRIE
PAR JEAN VIGNAUD
Comme tant d'écrivains, comme tant de Français, j'avais
d'abord fait mon petit tour d'Orient, sans daigner jeter le moindre
regard sur notre Algérie. C'est que pendant longtemps, trop long-
temps, romanciers et voyageurs, suivant les vieilles routes roman-
tiques, s'en sont allés vers Constantinople et Jérusalem pour retrou-
ver les traces de Lamartine et de Renan et aussi, il faut bien en
convenir, parce que la Turquie était alors à la mode. Quand on
voudra bien y réfléchir, plus tard, on sera surpris de l'admiration,
de l'enthousiasme qu'ont toujours suscité les Turcs parmi les chré-
tiens. Il faut que les chrétiens aient la mémoire courte. Cette Médi-
terranée aujourd'hui pacifique, avec ses côtes couronnées de mos-
quées et de temples, ployant pour ainsi dire sous le faix de ses
figuiers et de ses vignes, cette Mare Nostrum de Blasco Ibanez,
mer de l'ordre où se décideront demain les guerres de l'intelligence,
les grands combats spirituels, fut pendant des siècles la mer bar-
bare, la mer de la piraterie et de l'esclavage. On oublie trop que
saint Vincent de Paul et Regnard, le premier enlevé devant Mar-
seille, le second devant Naples, furent' vendus à Tunis et à Alger
comme esclaves par les pirates turcs; mais il y eut des milliers
d'autres Français victimes de la cruauté barbaresque; ils étaient si
nombreux aux XVII" et XVIIIe siècles que des prêtres bretons, les
Frères de la Merci, vinrent s'installer à Alger, au péril de leur vie,
dans le but de servir d'intermédiaires entre les esclaves et leurs
familles restées dans le Royaume et d'obtenir d'elles des subsides,
ou les sommes nécessaires au rachat des prisonniers. Cela n'a pas
empêché la littérature française d'étre turcophile, à. la suite de
Loti, par amour de l'orientalisme, par goût dè cet exotisme de
bazar qui en a profité pour nous inonder de ses turqueries, les
plus laides choses du monde.
C'est par hasard, pour des raisons de famille, que je me rendis
en Algérie en mai 1913, et je me rappellerai toujours ma décou-
verte. Le goût du romanesque, le désir de consacrer un livre à
Alger n'y étaient pour rien et le trimardeur des routes méditerra-
néennes que j'étais ne revenait pas de sa surprise. Le port que
j'avais sous les yeux, avec sa rade encombrée de navires, cargos,
voiliers de pêche; son mouvement bariolé, sa main-d'œuvre mi-euro-
péenne mi-indigène; l'activité de ses dockers, de ses charbonniers;
avec ses quais assiégés de tonneaux, de wagons, de murs de bri-
quettes, de pyramides d'anthracite; ce port remuant, vivant,
bigarré, assourdi de coups de sifflets, d'appels de sirènes, de son-
nailles de mules, ne ressemblait à aucun autre. Dans aucun autre,
je n'avais vu cette activité, cette entente. Entente, voilà le mot.
Les races, ici, étaient fondues, unies par cette grande loi de
l'effort. L'Union, c'était cela encore. L'Algérie, terre d'entente
et d'union. Telle je la vis au premier regard, telle je l'ai partout
retrouvée, dans la suite, à Oran comme à Constantine, dans chaque
capitale de chacun des départements qui composent le magnifique
joyau de l'Afrique du Nord.
Je me rappellerai toute ma vie ma première nuit passée à Oran.
L'air était rempli de piétinements de moutons, de cris de pâtres :
troupeaux descendus des hauts plateaux pour être engouffrés dans
les cargos en train de haleter dans le port. Le jour, j'avais vu les
charrois de vin et de blé tirés par des attelages de douze à quinze
chevaux se diriger vers les quais et j'avais été frappé par ce pas-
Vue du port d 'Alger. (Dessin inédit do )I
Les Annales Coloniales !
DÉCOUVERTE DE L'ALGÉRIE
PAR JEAN VIGNAUD
Comme tant d'écrivains, comme tant de Français, j'avais
d'abord fait mon petit tour d'Orient, sans daigner jeter le moindre
regard sur notre Algérie. C'est que pendant longtemps, trop long-
temps, romanciers et voyageurs, suivant les vieilles routes roman-
tiques, s'en sont allés vers Constantinople et Jérusalem pour retrou-
ver les traces de Lamartine et de Renan et aussi, il faut bien en
convenir, parce que la Turquie était alors à la mode. Quand on
voudra bien y réfléchir, plus tard, on sera surpris de l'admiration,
de l'enthousiasme qu'ont toujours suscité les Turcs parmi les chré-
tiens. Il faut que les chrétiens aient la mémoire courte. Cette Médi-
terranée aujourd'hui pacifique, avec ses côtes couronnées de mos-
quées et de temples, ployant pour ainsi dire sous le faix de ses
figuiers et de ses vignes, cette Mare Nostrum de Blasco Ibanez,
mer de l'ordre où se décideront demain les guerres de l'intelligence,
les grands combats spirituels, fut pendant des siècles la mer bar-
bare, la mer de la piraterie et de l'esclavage. On oublie trop que
saint Vincent de Paul et Regnard, le premier enlevé devant Mar-
seille, le second devant Naples, furent' vendus à Tunis et à Alger
comme esclaves par les pirates turcs; mais il y eut des milliers
d'autres Français victimes de la cruauté barbaresque; ils étaient si
nombreux aux XVII" et XVIIIe siècles que des prêtres bretons, les
Frères de la Merci, vinrent s'installer à Alger, au péril de leur vie,
dans le but de servir d'intermédiaires entre les esclaves et leurs
familles restées dans le Royaume et d'obtenir d'elles des subsides,
ou les sommes nécessaires au rachat des prisonniers. Cela n'a pas
empêché la littérature française d'étre turcophile, à. la suite de
Loti, par amour de l'orientalisme, par goût dè cet exotisme de
bazar qui en a profité pour nous inonder de ses turqueries, les
plus laides choses du monde.
C'est par hasard, pour des raisons de famille, que je me rendis
en Algérie en mai 1913, et je me rappellerai toujours ma décou-
verte. Le goût du romanesque, le désir de consacrer un livre à
Alger n'y étaient pour rien et le trimardeur des routes méditerra-
néennes que j'étais ne revenait pas de sa surprise. Le port que
j'avais sous les yeux, avec sa rade encombrée de navires, cargos,
voiliers de pêche; son mouvement bariolé, sa main-d'œuvre mi-euro-
péenne mi-indigène; l'activité de ses dockers, de ses charbonniers;
avec ses quais assiégés de tonneaux, de wagons, de murs de bri-
quettes, de pyramides d'anthracite; ce port remuant, vivant,
bigarré, assourdi de coups de sifflets, d'appels de sirènes, de son-
nailles de mules, ne ressemblait à aucun autre. Dans aucun autre,
je n'avais vu cette activité, cette entente. Entente, voilà le mot.
Les races, ici, étaient fondues, unies par cette grande loi de
l'effort. L'Union, c'était cela encore. L'Algérie, terre d'entente
et d'union. Telle je la vis au premier regard, telle je l'ai partout
retrouvée, dans la suite, à Oran comme à Constantine, dans chaque
capitale de chacun des départements qui composent le magnifique
joyau de l'Afrique du Nord.
Je me rappellerai toute ma vie ma première nuit passée à Oran.
L'air était rempli de piétinements de moutons, de cris de pâtres :
troupeaux descendus des hauts plateaux pour être engouffrés dans
les cargos en train de haleter dans le port. Le jour, j'avais vu les
charrois de vin et de blé tirés par des attelages de douze à quinze
chevaux se diriger vers les quais et j'avais été frappé par ce pas-
Vue du port d 'Alger. (Dessin inédit do )I
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