La sériciculture existe en Annam depuis un temps immémorial; il est fait mention de la soie et du mûrier dans les plus anciens ouvra- ges. Un vieux texte dit : « On taille le mûrier pour fabriquer l'ins- trument de musique des trente-six cordes. » Des récits légendaires attribuent, d'autre part, l'invention de cet instrument à l'empe- reur chinois Phuc-Hi, qui vivait il y a quelques quatre mille ans.
Les traditions annamites et les écrits anciens confirment l'anti- quité de cette industrie. Les livres Man-sû disent, en effet, que les mûriers et les vers à soie ont été importés de Chine en Annam depuis la création du ciel et de la terre. D'autres ouvrages parlent du roi Huinh-Dè, de la dynastie chinoise qui régnait 2700 ans avant notre ère. Il ordonna, disent-ils, d'apprendre au peuple l'art d'élever les vers à soie. La reine Loa-Tô-Nguyèn-Phi, sa femme, était char- gée, dans le palais, d'élever les vers et de tisser les vêtements de son mari. Cette reine fut divinisée à sa mort et consacrée déesse de la sériciculture par le peuple reconnaissant.
Il est donc plus que probable que le ver à soie et le mûrier ont été importés de Chine en Annam, soit par des immigrants chinois, soit par les Chams, qui étaient en relations avec le Céleste Empire.
Ce qui milite en faveur de cette opinion, c'est que l'on ne ren- contre nulle part, ni dans la montagne, ni dans la plaine, le mûrier à l'état sauvage ou poussant naturellement. Un arbuste, existant en assez grande quantité sur quelques coteaux élevés, s'en rapproche un peu, il est vrai, par sa forme ; mais il devient beaucoup plus grand et beaucoup plus fort que le mûrier cultivé, il produit des fruits cinq ou six fois plus gros, et sa feuille est dédaignée des vers à soie.
D'autre part, on a constaté l'existence, dans un coin du plateau de Van-Hoa, province du Phu-Yên, entre 5 et 600 mètres d'altitude, de trois mûriers chinois ayant poussé en arbres, dont les troncs atteignent 15 centimètres de diamètre au moins ; de l'avis des indigènes, cette espèce est de beaucoup supérieure aux différentes
(1) D'après les rapports de MM. les Résidents de France au Phu-Yên et à Qui- Nhon, en Annam.
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