On voit qu'en ce qui regarde la zone tempérée du Nord de l'Indochine les problèmes que devra résoudre le service d'Agriculture rationnellement constitué dont parle M. Chevalier, ont d'autant plus d'importance qu'ils paraissent plus faciles à résoudre.
CH. LEMARIÉ, Directeur des Services Agricoles et Commerciaux du Tonkin.
* * * Les raisins de table au Tonkin. — Depuis longtemps, de nombreuses tentatives ont été faites, soit par les particuliers, soit par le Service de l'Agriculture, pour obtenir, au Tonkin, des raisins de table.
Jusqu'à ce jour, aucun résultat vraiment satisfaisant n'a pu être obtenu. On a pu, à maintes reprises, manger des raisins très vantés par leurs propriétaires, mais qui ne ressemblaient aux raisins d'Europe que grâce à la puissance d'imagination des intéressés.
Cette année, pour la première fois depuis 15 ans, il m'a été donné de constater l'existence, à Hanoi, de 2 treilles qui ont produit quelques raisins blancs, dont quelques-uns d'un volume considérable, et tous d'excellente qualité.
La première treille est située dans la cour de la maison de Luong-van-Huê, sculpteur sur bois, 48-50, rue du Cuivre à Hanoi.
Le pied de vigne qui la compose date de 15 ou 16 ans, d'après son propriétaire.
Les rameaux, très vigoureux, couvrent toute la superficie de la cour qui sert d'atelier aux ouvriers de Luong-van-Huê. La tige s'élève à 4 mètres environ au-dessus du sol. Cette année, ce pied de vigne a donné une dizaine de raisins dont un pesait 900 grammes. Celui que j'ai goûté pesait 400 grammes. La maturité s'est produite de la façon la plus régulière et la plus complète. Les grains, de forme ovoïde, de couleur ambrée, transparents, étaient très développés. La pulpe était juteuse, très sucrée, de goût très parfumé. La peau était fine et tondante. Aucune trace d'insecte ni de pourriture. Le dernier grain était aussi mûr que le premier. Si ces raisins avaient été soumis au cisellement pratiqué à Thomery, ils auraient, bien certainement, donné des résultats presqu'aussi beaux que dans cette localité qui est renommée, à juste titre, pour la production des raisins de table. En un mot, ces raisins pou- vaient soutenir la comparaison avec ceux des bonnes variétés d'Europe. Luong-van-Huê n'a pu donner aucune indication sur l'origine de ce cépage, qui m'a paru ressembler au Mauzat blanc cultivé dans le Gers, le Lot-et-Garonne, le Tarn-et-Garonne. Malheureusement ce cépage est sujet à la couture.
Quelle que soit la variété ou l'origine de ce cépage, il sera possible d'obtenir des boutures que Luong-van-Huê mettra, au moment de la taille, à notre disposition. D'après ce dernier, c'est la 2e fois depuis quinze ou seize ans qu'il a obtenu un résultat semblable.
Les années précédentes, il a fait les mêmes constatations que l'on a pu faire au sujet des vignes du Tonkin : Floraison irrégulière: veraison défectueuse ; les rares grains subsistant mûrissent mal, très irrégulièrement, pourrissent, et deviennent la proie de nombreux insectes qui, en même temps, ne laissent subsister des feuilles que les nervures.
Le deuxième pied de vigne se trouve dans la cour de la maison occupée, rue Paul-Bert, par M. d'Escodeca, négociant en vins et conserves.
La bouture dont il provient lui a été donnée par M. Chassagne, pharmacien, actuellement en France, qui pourra peut-être, à son retour dans la colonie, donner des renseignements.
Ce pied de vigne, à sa 2e feuille, a donné 8 raisins, dont un pesait 800 grammes. Ils ressem- blent beaucoup à ceux de Luong-van-Huê et paraissent appartenir à la même variété. mais ils sont loin d'être aussi bons que ceux de Luong-van-Huê. La peau est épaisse, un peu âpre et amère, alors que celle des maisons de la rue du Cuivre est fine, fondante et sucrée. t'éan- moins, mais dans des proportions moindres, la maturité s'est produite assez régulièrement, ces différences proviennent sans doute du jeune âge du pied de vigne de M. d'Escodeca.
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