MADAGASCAR
FORÊTS DE L'EST ET DE L'OUEST. REBOISEMENTS (1)
Forêts de l'Est
L'aspect général de la forêt est celui d'une futaie jardinée mais d'un genre tout
spécial. Il n'y a pas d'étage nettement distinct.
Les arbres de tous âges et de toutes grosseurs, tous les intermédiaires entre le
semis et la haute futaie sont confusément entremêlés.
Le sous-bois forme un inextricable fouillis de végétation dans lêquel disparaît
la base des arbres. On y rencontre de» fougères arborescentes, des pandanus, des
palmiers dont les plus beaux spécimens sont fournis par le Phlogi polystachia, le
Dup ii Thouarsiana, l'anivo [Rnvnea-, des bambous lianes dont les magnifiques
guirlandes entourent les troncs, entin une multitude d'arbrisseaux, d'arbustes et de
plantes épiphytes.
Mais ce qui attire particulièrement l'attention, c'est la prodigieuse variété des
espèces et leur grande dissémination. En Europe, un peuplement forestier est en
général constitué par un mélange de deux essences, chêne et hêtre, par exemple, il
peut même l'être par une seule essence. Tout autre est le peuplement malgache.
Les arbres qui le composent appartiennent à de nombreuses espèces qu'on peut,
pour une région donnée, évaluer à plusieurs centaines. D'autre part, ce n'est
qu'exceptionnellement qu'on trouve, cote à côte, deux sujets de la même plante.
Chaque arbre semble témoigner pour son congénère une certaine répulsion. Une
essence malgache ne caractérise point un peuplement. Il n'y a pas, par exemple, de
zones de palissandre, de l'acajou, du « nato » comme en France du sapin, de l'espicéa,
du mélèze et du pin maritime. Dans toutes les forêts, au nord comme au sud, à l'est
comme à l'ouest, dans les vallées comme sur les versants et les sommets, on trouve
en proportion plus ou moins grande, le palissandre, le nato et les autres essences
(le tapia, l'ébène, le bois de rose, le copalier et le palétuvier exceptés).
Quelles sont les causes de cette dispersion des espèces ? HésuHe-t-elle d'exigences
spéciales de la part des essences an point de vue de la fertilité du sol ? Nous ne
pensons pas que la composition du sol ait une grande influence. La terre malgache
est, en effet, trop pauvre pour nourrir un grand nombre de végétaux exigeants :
c'est partout la même latérite avec une faible couche de terreau de 25 à 30 centimè-
tres d'épaisseur. Les arbres, pour la plupart, donnent à profusion des semences
lourdes. Ils devraient, en conséquence, se rencontrer par bouquets an milieu des
peuplements. Il n'en est rien cependant. Ce ne sont donc pas les exigences des
arbres, ni leur tempérament, ni la nature de leurs graines qui influent dans la
dispersion des espèces arborescentes malgaches. Cet état semble plutôt dû : 1° à la
pauvreté du sol forestier ; 2° à la dissémination des graines par les oiseaux (perro-,
quets, pigeons, merles) ef¡Yctr les lémuriens. Il peut être encore le résultat de la lutte
pour la vie qui s'établit entre tous les végétaux. Chaque arbre se développe et vit
(1) Nous avons pensé qu'il serait intéressant, pour les lecteurs de la colonie et pour ceux de l'exté-
rieur, de publier au Bulletin des extraits de l'étude « Les forêts de Madagascar » qui vient de paraître
à l'Annuaire général de Madagascar et Dépendances, IIe partie, pp. 1813 à 20-1.
Nous devons ce travail à M. Louvel, inspecteur-adjoint des eaux et forêts, chef du service des forêts
à Madagascar.
E. J.
