Titre : Les Annales coloniales : organe de la "France coloniale moderne" / directeur : Marcel Ruedel
Auteur : France coloniale moderne. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1924-12-31
Contributeur : Ruedel, Marcel. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32693410p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 31 décembre 1924 31 décembre 1924
Description : 1924/12/31. 1924/12/31.
Description : Collection numérique : Bibliothèque Francophone... Collection numérique : Bibliothèque Francophone Numérique
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-LC12-252
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 31/01/2013
- LES ANNALES - COLONIALES - 3
- - - - - - - - - - -
« plus forts rendements. Cette productivité
« élevée se maintient également pendant le
« mois de janvier et de février (au début de
« la saison sèche).
« Les outils adoptés pour la saignée doi-
« vent être aussi simples que possible. Le
« couteau à lame recourbée en gouttière (soit
k fixe soit démontable) et la gorge étroite
« sont actuellement les plus en faveur.
« Le bon saigneur s'habitue vite à manier
« avec dextérité et rapidité, l'outil qu'on le
« force à adopter une fois pour toutes, mais
0 le changera ensuite fort difficilement con-
« tre un autre outil d'un mode différent,
« car un nouvel entraînement lui est alors
« nécessaire pour obtenir la même rapidité
« de travail qu'auparavant. Les bons ou-
« vriers arrivent facilement à saigner 400
« arbres et peuvent même souvent atteindre
« 500 et 600 arbres par jour. Ces arbres
« sont toujours saignés, chaque matin, de
« 5 heures à 5 h. 30 à 8 h. ou 9 heures,
« et le même lot est toujours réservé au
« même ouvrier, ce qui facilitç le contrôle
« du travail. »
M. Morange préconise donc l'incision ré -
duite qui est d'ailleurs pratiquée sur toutes
les plantations.
La saignée comme nous venons de le voir
est une opération très délicate qui demande
beaucoup de soins et une grande pratique.
Elle nécessite des ouvriers adroits et expé-
rimentés car c'est d'eux que dépendent le
plus souvent le bon entretien et la conser-
vation des arbres. Nous verrons plus loin
que, d'une façon générale, les Annamites
réussissent très bien dans ce genre de travail.
Coagulation du latex
On emploie en général l'acide acétique
pour la coagulation du latex dans Ma pro-
portion d'un gramme environ par litre de
latex. On le dilue préalablement dans l'eau.
Ce procédé est simple, pratique et peu coû-
teux. C'est la fumée qui est employée pour
la coagulation dans Quelques plantations.
Enfin, on doit signaler un procédé nouveau
qui a été inventé par M. Magen, inspecteur
des services agricoles. Le latex est coagulé
au moyen des produits recueillis dans la dis.
tillation du bois, après séparation plus ou
moins complète de l'acide acétique et de
l'alcool méthylique. C'est la « fumée li-
quide » dont l'invention a fait l'objet d'un
brevet. Il est préparé et vendu par la So-
ciété La Bienhoa Industrielle et Forestière.
Il peut présenter un certain intérêt.
Enfin, l'Institut Pasteur poursuit à Nha.
traus et à Saïgon, sous la direction du Di
Yersin, des recherches sur de nouveaux mo-
des de préparation par voie biologique, par
coagulation naturelle ou à l'aide du sucre.
Ces recherches ne manqueront pas, nous en
sommes persuadés, d'aboutir bientôt à des
Provinces Superficie plantée (bectarei) Nombre d'arbres piaules Nombre d'arbres en saignée
-.
1922 1921 1920 1922 1921 1922 1921
- - - - -- - -
Bariu l.GU 1.041 1.330 329.00U 329.000 104.000 104.000
Bienhoa i>.550 8.532 8.002 1.600.000 1.600,000 550.000 550.000
Gluiudoc 2 » » 400 » » »
t'holon 40 40 » S.000 S. 000 »
tîiadinli 5.970 5.965 5.9W 1.035.000 1.035.000 593.000 593.000
Hutien 301 270 321 10.000 70.000 10.000 20.000
Tunan 800 800 850 50.000 230.000 » »
Tayninh 2.703 2.553 2.453 820.000 760,000 180.000 180.000
Thudaumot. 13.216 13.216 13.400 3,669,000 3.669.000 3.000.000 669.000
33.292 33.026 32.310 8,121.400 8.301.000 4.437.000 2.116,000
résultats pratiques qui permettront aux plan-
teurs de réaliser dans l'avenir de notables
économies.
Il n'est pas douteux, d'autre part, que
le caoutchouc préparé sans l'intervention des
acides serait de bien meilleure qualité.
Le latex coagulé est préparé en feuilles
fumées, en crêpes ou en boules, selon les
plantations. La feuille fumée paraît pré-
senter plus d'avantages en raison de la fa-
cilité de sa préparation, du matériel simple
qu'elle exige et du meilleur accueil que lui
font les industriels. Elle présente aussi cette
supériorité sur les crèpes ou les blocs irré-
guliers d'occuper à poids égal un plus faible
volume et de nécessiter un fret moins élevé.
Nous mentionnerons qu'à Suzannah et
dans la plupart des grandes plantations on
fabrique le first latex en feuilles qui sont sé-
chées dans un appareil à air chaud. D'après
M. Girard la qualité des feuilles ainsi pré-
parées serait due à la présence préalable
dans le coagulum de certaines substances
qui seraient entraînées par les grands lava-
ges que l'on fait subir aux crêpes.
Pour toutes ces opérations, les plantations
ont aménagées des usines plus ou moins im-
portantes renfermant tout le matériel indus-
triel indispensable à la coagulation du latex,
à la préparation et au séchage du caoutchouc
et à son emballage.
Classement des plantations
Toutes ces considérations plaident en fa-
veur des exploitations de caoutchouc en Co-
chinri. juo et ne peuvent qu'encourager de
nouveaux efforts.
Ces plantations ont été, en général, clas.
sées en trois groupes :
1° Les modestes plantations - faites sur
leurs économies par les petits fonctionnaires,
employés de commerce ou d'industrie, qui
ont été les premiers initiateurs de l'oeuvre et
ont ainsi contribué par leur ardeur et leur
persévérance au développement de la colo-
nie. Ces plantations dans lesquelles on doit
compter, en première ligne, celle de M. Bel-
land, ont pu être établies sur des terrains
iiicultes, dénudés, mais situés dans des ré-
gions salubres autour des centres agricoles
indigènes, qui n'avaient aucune valeur avant
ces plantations. Ils ont d'ailleurs été imités
par de nombreux Annamites. On les trouve
dans les environs de Saïgon, province de
Giadinh, de Tanan, de Cholon.
20 Les Sociétés qui se sont installées dans
des régions plus éloignées, sur les terres rou-
ges en partie déboisées, mais en tous cas cou-
vertes de brousse ou d'herbes qui nécessi-
taient des travaux de défrichement préala-
bles, parfois .assez coûteux. Ces plantations se
trouvent surtout du côté de Bienhoa, à pro-
5 ximité du chemin de fer ou des grandes rou-
tes qui rayonnent vers l'Annam. On em- 1
ploie là les grands procédés de culture : les
dessoucheuses, les défonceuses et les trac-
teurs divers à vapeur, en s'inspirant des mé-
thodes suivies dans les Etats Malais. Signa-
lons parmi celles-ci les plantations de Suzan-
nah et d'Anloc, qui ont eu à se préoccuper
d'organiser des campements salubres au mi-
lieu de cette zone infectée de paludisme.
-.. :.. entreprises constituées en 1910 ou
après, entreprises importantes s'appuyant sur
de gros, capitaux, dans lesquelles il convient
de comprendre en première ligne : la Société
des caoutchoucs de l'Indochine, constituée
avec le concours de banques métropolitaines
et de la Banque de l'Indochine, qui assure
le contrôle effectif sur place et la plantation
du groupe Hallet, à Xacan. Ces entrepri-
ses ont suivi, en général, pour l'établisse-
ment des plantations, les méthodes malaisea.
Elles sont situées fort loin de Saïgon, dans
les provinces de Bienhoa et de Thudaumot
j sur les frontières de l'Annam, du Laos ou
du Cambodge.
Superficie totale des plantations
Superficie plantée Nombre d arbres
Afin de bien faire comprendre l'importan-
ce de l'effort qui a été fait en Indochine de-
puis vingt ans, nous dirons que, d'après les
statistiques, le nombre de plantations qui
existent aujourd'hui dans notre grande colo-
nie dépasse deux cent cinquante. Elles se ré-
partissent dans les provinces de Baria, de
Bienhoa, de Cholon, de Giadinh, de Tanan,
de Tayninh, de Thudaumot, dans l'île de
Phu Quoc, au Cambodge et dans le sud-An-
nam.
En voici la récapitulation d'après un ta-
bleau emprunté à un des derniers bulletins
du Syndicat des Planteurs de caoutchouc de
F Indochine :
Désignation Superficie Superficie Nombre d'hévéas
des provinces totale plaotéc en place
Baria 7,338 L.502 345.000
Bienhoa 28.577 0.505 1.3-48.239
Cholon , 3; 37 8.000
Giadinh 7.78S 5.339 1.600.225
Tanan 1.150 825 200.000
Tayninh 4.721 3.049 763.000
Thudaumol 35.439 11.764 1.570.982
lie de Phu Quoc 2.089 153 61.200
Cambodge. 18.032 2.018 6.400
Sud Annam 2.9Î5 720 238.900
Total général.. 108.716 3-4.912 6.208.586
Les tableaux qui suivent permettront d'éta-
blir la progression qui s'est produite depuis
(920.
A cette époque, M. Rheinardt, inspecteur
des Colonies, donnait, dans un rapport offi-
ciel sur la Cochinchine, les indications sui-
vantes pour 1918, sur le nombre, la superfi.
cie et l'importance relative des exploita-
tions.
En 1922, à l'occasion de l'Exposition de
Marseille, le Syndicat des Planteurs de
caoutchouc de l'Indochine avait également
fourni une statistique détaillée, que nous
trouverons ci-dessous.
Superficie totale
Nombre complantéc
d'exploitations en Hevea
Hectares
Explll de plus de 1.000 hte" 23 15.721
de 500 Ù 1.000 - 2 1.045
de 200 à 500 - 25 4.473
de 100 à 200 - 17 2.203
de 500 à 100 - 16 1.020
de 25 à 50 - 26 1.008
au-dessous de 25 30 409
Totaux. 139 25.879
Enfin, plus tard2 à la fin de 1922, nous
trouvons aussi dans le Rapport économique
de la Cochinchine, un tableau qui, sans con-
corder absolument avec le précédent, permet
cependant de se rendre compte de l'augmen-
tation très sensible chaque année, non seu-
lement des superficies implantées en heveas,
mais aussi du nombre des pieds mis en place
et surtout de celles des arbres soumis à la
saignée.
Nombw Superficio Nombre Nombre
de plantée en de pieds de pieds
plan- Hevea en en saignée
Provinces tations (hectares) place fin 1921
- - - - -
Baria 18 2.034 388.838 58.037
Bienhoa 60 6.058 1.238.550 585.900
'Giadinh 78 5.141 T.54i7.370 470.440
Tayninh 7 2.262 622.900 200.000
Tayninh 7 2 -
Tanan 2 777 206.000 »
Thudaumot 57 11.727 2.704.460 614.100
Ile de Phu-Quoc 1 230 65.000 6.383
Annam.,. 6 686 231.900 61.983
Cambodge S 18 6.400 »
Totaux
pour 1921. 231 28.933 7.011.418 2.002.843
Exportation des caoutchoucs
d'Indochine
Quant aux sorties de caoutchouc de l'In-
dochine, elles se sont aussi développées d'une
façon tout à fait remarquable depuis 1907,
comme en fait preuve le tableau des expor-
tations de ce produit à partir de cette épo-
que avec les moyennes quinquennales (en
tonnes). Si, dans les premières années, il
s'agit de caoutchouc de cueillette, issu des
lianes ou des arbres forestiers indigènes, en
1908 commence la première exportation de
caoutchouc de plantation, et celle-ci, en
1915, t commence à s'accentuer d'une façon
fort intéressante, le caoutchouc sauvage ne
comptant pour ainsi dire plus dans les en-
vois.
FRANCE ÉTRANGER 10TAUX
1907 212 Il 212
1908 37 J) 37
1909 , 32 3 35
1910 170 5 175
1911 227 18 245
-
Moyenne. 136 5 ui
1912 226 6 232
1913 169 45 214
1914 147 4S 195
1915 ..,. an » 377
1916 5is » 54-8
Moyenne 203 20 313
1917 031 » 931
1918 538 Il 538
J910. 2.784 JGU 2.950
1920 2.297 81 j 3.1-Î2
1921 2.173 901. 3.650
Moyenne 1.745 282 2,212
l'J22 3.107 1.285 4.452
1923 3.712 1.258 4.970
Les exportations de caoutchouc de l'Indo-
chine atteignent ainsi près de 5 mille tonnes
Benca-Thudaumot, Séchage et emballage dté crêpés de caoutchouc
à la fin de 1923 et ce chiffre représente à
peu près la production totale de la colonie,
car il n'y en a, pour le moment, qu'une très
petite quantité qui est manufacturée sur pla-
ce par la Compagnie du caoutchouc, manu-
facture qui a son siège social et son usine
i Saigon
Il n'est pas douteux que dans les prochai-
nes années la production va s'accentuer très
rapidement, le plus grand nombre des hévéas
plantés dans ces dernières années ne devant
pas avoir leur plein rendement avant 1926.
On peut, sans la moindre éxagération, es-
compter bientôt à 10 mille tonnes le chiffre
des exportations. Celui-ci sera encore bien
loin d'absorber la consommation française,
qui atteignait, en 1923, 30.000 tonnes, quan-
tité qui sera certainement doublée dans 3
ou 4 ans.
Les chiffres que nous venons de donner,
tant pour l'étendue des superficies mises en
valeur pour la culture des hevéas que par
par la production incessante du caoutchouc
et son exportation en Europe sont éloquents.
ris indiquent le chemin qui a été parcouru
depuis quelques années et les résultats que
l'or, a le droit d'escompter bientôt. Après
une période de travaux, de fatigues et
d'épreuves, les planteurs de caoutchouc ont
le droit d'espérer bientôt une 'juste rému-
nération de leurs sacrifices.
Aperçu de quelques plantations
1.1 n'est pas possible d'énumérer en détail
toutes les plantations de caoutchouc qui.
dans une période aussi brève, se sont créées
en Cochinchine et dans le Sud-Annam. Avec
des particularités qui sont inhérentes à. cha-
cune d'elles, elles constituent aujourd'hui
Mri ensemble que ceux qui s'intéressent a
cette question si pleine d'actualité, en ce mo-
ment, peuvent visiter avec plaisir et intérêt.
Ils verront que la, comme partout, nos
compatriotes ont su imprimer à ce qu'ils
ont fait, leur caractère personnel et, tout
en. se préoccupant des conditions scientifiques
et pratiques, leur donner le confort et l'jagré-
ment qui les rendent si attrayantes. Ils ont
totalement modifié l'état du pays et trans-
formé de la façon la plus heureuse des ré-
gions qui étaient incultes, malsaines et dé-
Benca-Thudaumot. Fabrication des crêpes de caoutchouc.
laissées. Ils ont mis de la vie et de la fer-
tilité où il n'y avait autrefois que de la so-
litude et du silence. Non seulement ils ont
créé de vastes domaines qui deviennent, cha-
que jour, des centres de production et de ri-
chesse, mais ils ont su y installer, à côté
des logements des travailleurs, des habita-
tions bien comprises pour eux-mêmes, et
aussi des magasins ou des usines dans les-
quelles ils peuvent se livrer sur place à toutes
les manipulations du latex. Enfin, par eux-
mêmes ou d'accord avec l'administration, ils
ont OUVelt. des voies d'accès qui mettent en
communication facile leurs plantations avec
Saïgon ou les principaux centres voisins. 11
y a partout de fort bonnes et fort belles
routes qui sont accessibles à la circulation
des automobiles et qui permettent ainsi, fa-
cilement, aux autres moyens de transport
,.l'écouler sur le port d'embarquement les
produits de la récolte. La nouvelle exploi-
tation agricole, en dehors des effets écono-
miques qu'elle aura et qu'elle a déjà sur la
prospérité de la colonie, a déjà aussi, comme
on le voit, exercé une très grande influence
dans le pays.
Nous citerons cependant, avant de termi-
ner cette étude, quelques plantations qui mé-
ritent d'être spécialement mentionnées.
Celle de Suzannah, la plus ancienne en
date apiès.celle de M. Belland. Elle a été
i -Créée' £ n 1*904, par M. Cazeau, en pleine ré-
gion des terres rouges, à proximité de la li-
gne de chemin de 1er allant vers Phanrang.
Cestiflà que fut oiganisée une des premiè-
res pépinières de caoutchoucs, avec des grai
nes achetées à Singapour. C'est là aussi où,
après de multiples expériences, furent adap-
tés les meilleurs procédés de culture utilisés
en Cochinchine. Transformée en Société ano-
nyme au capital de 2,500.000 francs, Suzan-
nah est restée le type parfait d'exploitation
et malgré l'élévation anormale du taux de la
piastre, donne aujourd'hui de fort beaux di-
videndes à ses actionnaires.
La plantation de Xatrach, créée en 1907
par M. Jacques, négociant, à été aussi trans-
formée en Société anonyme. La plantation
couvre environ 2.000 hectares en terres rou-
ges, dans la province de Thudannet, dont
plus de 1.000 sont cultivés et produisent dé-
jà environ 500 tonnes de caoutchouc par an.
C'est une des mieux organisées.
La plantation d'An Loc, dans la province
de Bien hoa, où la culture mécanique a été
réalisée pour la première fois en Indochine.
Elle a une superficie de 4.500 hectares, dont
un peu plus de mille sont cultivés en hevéas
et fait aussi partie d'une Société anonyme.
Elle possède une main-d'œuvre annamite de
Cochinchine et du Tonkin, et a produit, en
1923, environ 350 tonnes de caoutchouc.
C'est à Anloc qu'à côte de la plantation
d'hevéas il a été réservé d'importantes cul-
turcs de cocotiers, de caféiers et même de
théiers et d'arbres à fruits.
La Société anonyme des plantations de
Phu Quoc, dans la province d'Haben, où a
été fait le premier essai d'introduction de
main-d'œuvre javanaise, est intéressante à ci-
ter car elle constitue un groupe à part. Sui
2.600 hectares, elle ne compte guère que 150
hectares plantés en hevéas et n'a encore pro.
duit, en 1923, que 40.000 kilogs de caout-
chouc. A côté des hévéas, se trouve une plan-
tation d'envi ron 180 hectares de cocotiers
et de 15 hectares d'arequiers.
La plantation de Xuan Lor. dans la pro-
vince de Bienhoa, d'une superficie de 2.363
hectares, dont 525 plantés en hévéas. Créée
en 1910, elle produit actuellement 190 ton-
nes par an.
La plantation de la Soudière, dans la pro-
vince de Bienhoa, mais à proximité de Sai.
gon. La superficie plantée en hevéas est de
700 hectares et comptr T -:.. ooo arbres, dont
70.000 sont déjà saigi. v.jtuellement. Cet-
te plantation a donné 100 tonnes de caout-
chouc en 1923.
La plantation de' caoutchouc de l'Indo-
chine, constituée sous les auspices des ban-
ques métropolitaines et de la Banque de l'In-
dochine compte parmi les plus importantes.
Elle comprend plus de 10.000 hectares, dont
3.000 sont actuellement cultivés. Créée en
19II au capital de dix millions de francs,
elle occupe une nombreuse main-d'œuvre an-
namite, tonkinoise et javanaise, estimée a
2.500 coolies et répartie en 11 villages.
C'est le type par excellence de la grande
exploitation. Bien soutenue, admirablement
dirigée, elle entre à peine dans la période
des réalisations, mais aura bientôt un rénde-
ment considérable.
Le rôle et l'intervention de l'Administra-
tion dans la production caoutchou-
tière de l'Indochine.
L'Administration de l'Indochine, comme
nous l'avons vu, ne s'est pas beaucoup préoc-
cupée de la question du caoutchouc lorsque
les états voisins faisaient diligence pour
créer la production de la précieuse gomme et
s'en assurer presque le monopole. Elle s'est
montrée assez indifférente aux efforts qui
1 1 -
etaient tentes a cet en et dans les états ma-
tais et dans les Indes néerlandaises et n'a
presque rien fait pour inciter nos colons à
entrer eux-mêmes dans cette voie. Mais nous
devons lui rendre cette justice que dès le
gland courant que nous avons signalé en Co-
chinchine se fut manifesté, elle a aussitôt
compris les devoirs qui lui incombaient. Elle
s'est alors associée sous les formes les plus
diverses aux travaux de ses administrés et,
en aucune circonstance, elle ne leur a mar-
chandé sa sollicitude et son assistance. Elle
s'est montrée très large et très libérale dans
l'aliénation des terrains domaniaux, com-
me nous avons pu nous en rendre compte,
et extrêmement tolérante dans l'application
1 ,.
(les taxes hscales, lle s est ingéniée aussi,
par tous les moyens dont elle pouvait dis-
poser, à faciliter la bonne mise en valeur des
terres'. Non seulement elle a envoyé des mis-
sions pour aller étudier au dehors ce qui
avait été fait et fournir à nos planteurs ce
dont ils pouvaient avoir besoin, mais encore
elle a créé des jardins d'essais ou des sta-
tions agricoles qui, bientôt, ont pu répondre
à toutes les demandes de semences ou de
plants. Elle a, de plus, efficacement favorisé
les entreprises de nos colons en ouvrant en
tous sens des voies de pénétration et de com-
mimication au travers de régions incultes
et accidentées, grâce auxquelles les planta-
tions ont pu être efficacement desservies et
protégées. Elle a aussi, en vue de leur com-
modité et de leurs convenances, engagé des
capitaux importants dont elle ne pouvait es-
pérer tirer aucun profit immédiat. Elle a
même, dans certains cas, participé, dans de
fortes proportions, à l'exécution de certains
travaux qui auraient pu rester entièrement
à la charge des intéressés. Elle s'est aussi
entremise dans la question de la main-d'œu-
vre pour en faciliter le recrutement et le
transfert et veiller aux engagements qui
avaient été pris. Enfin, directement, ou par
l'intermédiaire de ses agents, dans les pro-
vinces ou dans les villages, elle n'a négligé
aucune occasion de manifester sa bienveil-
lance et sa protection en faveur de l'exploi.
tation nouvelle.
Mais là où son rôle s'est particulièrement
fait sentir, c'est lorsque, pendant et immé-
diatement après la guerre, les plantations
cb caoutchouc se sont trouvées dans une si-
tuation très difficile. Lorsque le conflit a
éclaté, les planteurs de caoutchouc avaient
tous fait de gros sacrifices et épuisé leurs
movens financiers, mais ils étaient, pour la
plupart, sur le point d'entrer dans la pé-
riode des réalisations et des bénéfices. La
guerre d'abord, qui a entraîné l'effondrement
des cours du caoutchouc, ensuite la hausse
de la piastre ont déçu toutes leurs espé-
rances. Au cours de cette période critique
qui s'étend de 1917 à 1922, plusieurs entre-
prises durent cesser leurs travaux de plan-
tation, ou négliger l'entretien des arbres qui
étaient déjà en pleine croissance.
C'était l'abandon de l'oeuvre ou la ruine
de beaucoup d'exploitants, si, en 1919, l'Ad-
ministration, en présence des difficultés que
rencontraient les planteurs à exporter leurs
produits, par suite de la crise des frets,
n'était intervenue entre eux et les consomma-
teurs de la métropole, c'est-à-dire les gran-
des administrations militaires -- pour - l'achat
d'un stock de 900 tonnes de caoutchouc.
L'intention était très bonne et si elle n'a
pas été suivie de son plein effet, c'est que
les circonstances de l'époque : pénurie de
fret, débarquement sans abri, le retard dans
les livraisons et la hausse ae la piastre au
moment du paiement ont causé aux vendeurs
un préjudice qu'ils ont évalué à 370.000
piastres.. --
Mais où l'intervention de l'Administration
'est encore manifestée d'une façon beau-
coup plus nette, c'est lorsqu'elle s'est déci-
dée à accorder aux planteurs des prêts im-
portants, sous différentes formes.
Ce furent d'abord, jusqu'en 1918, des
prêts dits « prêts de guerre D, qui furent
consentis à un certain nombre de plantations
par la Banque de l'Indochine, avec la garan-
tie de la colonie. Ils portaient intérêt à 5 0/0
l'an et étaient garantis par une hypothèque
de premier rang- sur les plantations.
Ces prêts se sont élevés à 643.200 francs.
Ce furent ensuite des prêts accordés, en
IQ20, aux plantations non productives. Ces
prêts ont été accordés à des plantations
n'ayant pas encore atteint la période de pro-
duction. Ils furent calculés d'après l'âge et
la superficie des lots plantés., Ils étaient ex-
clusifs des prêts de guerre. Consentis dans
les mêmes conditions que précédemment par
la Banque de l'Indochine, ils s'élèvent en-
viron à 140.000 piastres.
Enfin, les « prêts primes », accordés en
vertu de l'arrêté du 14 septembre 1919 aux
plantations productives. Ces prêts ont été
faits sur les fonds du budget général. Ils
ont été calculés d'après une double échelle
fixant, suivant l'âge de chaque lot exploité,
la production par hectare qui serait admise
au prêt et la prime par kilograinme qui se-
rait allouée, cette prime étant d'autant plus
forte que la plantation était plus récente et,
par conséquent, le prix de revient supprimé
plus élevé. Ces prêts, qui n'étaient garantis
par aucune hypothèque, et productifs d'inté-
rêt de 3 0/0 l'an, étaient remboursables à
l'expiration d'un délai de 5 ans, soit en
1925. Ils se sont élevés à 496.000 piastres.
En 1920, comme la situation des planta-
tions s'était encore aggravée, de nouvelles
primes à la sortie, non remboursables, fu-
rent accordées au caoutchouc exporté du
lcr avril 1920 au Ier avril 1921. Leur total
s'éleva à 322.000 piastres. De plus, un ar-
rêté du 13 avril 1922 accorda une subven-
tion globale de 2001.000 piastres à répartir
entre toutes les plantations faites antérieu-
rement au ier janvier 1920- et convenable-
ment entretenues au prorata de la supern-
cie complantée et en raison de 5 parts pour
les plantations créées avant le Ier janvier
1917 et de 5 parts pour celles établies enne
cette date et le ior janvier 1920.
Ces dernières primes ou subventions sont
accordées sur les fonds du budget général
et local dans la proportion de 3/4 pour le
premier et de 1/4 pour la Cochinchine.
On se rend compte dans quelle proportion
s'est exercée l'intervention des pouvoirs pu-
blics en faveur de l'exploitation du caout.
chouc, qui était alors très gravement mena-
cée en Cochinchine. Dans une première pé-
riode, cette intervention s'est produite pour
fournir aux entreprises les ressources suf-
fisantes afin de continuer et de mener
à bien l'effort commencé. Dans la se-
conde, qui s'étend après la guerre, l'aide
officielle eut pour but de permettre aux
plantations de vivre et de ne pas disparaî-
tre, alors que l'effondrement des cours, coïn-
cidant avec la hausse de la piastre, les mit
dans une situation désepérée.
Ainsi un crédit de 1.800.000 piastres, ce
qui représente, au taux actuel de la piastre,
un peu plus de dix-huit millions de francs.
a été ouvert directement ou indirectement par
la colonie en quelques années .Le geste qu'elle
a fait affirme toute la, sollicitude qu'elle por-
tait aux planteurs de caoutchouc, mais aussi
l'intérêt qu'elle attache à cette nouvelle ex-
ploitation, qu'elle considère à juste titre
comme une œuvre sociale et économique de
premier ordre.. Elle a senti qu'elle ne pouvait
pas laisser péricliter une entreprise comme
celle-là, qui, après tant de peines et de sa-
crifices et aussi tant de capitaux engagés,
était sur le point d'aboutir et que le sort du
pays était un peu lié à sa destinée.
Les cours et l'avenir du caoutchouc
En réalité, dans ces dernières années, les
planteurs de caoutchouc en Cochinchine ont
subi les conséquences d'événements tout a
fait accidentels et imprévus. La guerre,
d'abord, qui non seulement a entraîné l'ef-
fondrement des cours, mais encore raréfié les
moyens de transport et rendu les transac-
tions à peu près impossibles. La hausse de
la piastre ensuite, qui a totalement modifié
Ici rapports qui existaient entre la produc-
tion et la vente et bouleversé les prévisions
les mieux établies.
L'effondrement des cours a été dû, en
grande partie, aux événements qui se sont
déroulés en Europe; cependant, s'il a per-
sisté après la guerre, c'est qu'il y avait des
stocks considérables de caoutchouc à écouler
et que la production s'était accrue, d'autre
part, dans des proportions qui n'étaient plus
en rapport avec la consommation mondiale.
Mais c'était là un fait momentané qui ne
devait pas donner lieu à de très vives ap-
préhensions. Cependant, il a suffisamment
inquiété les producteurs anglais pour que
ceux-ci aient cru devoir se concerter pour res-
treindre la production du caoutchouc dans les
Straits Settlements et dans l'Inde britanni-
que. L'effet des mesures qu'ils ont alors pri-
ses en 1923 connues sous le nom de « Plan
Stevenson », ont modifié immédiatement les
conditions du marché. La livre poids de
caoutchouc qui, en janvier 1920, atteignait
34 pences, mais était descendu en octobre
1922 à 8 pences seulement, remontait immé-
diatement à 14 pences. Les transactions de
caoutchouc ont fait preuve alors d'une très
giande activité, et les actions des grandes
Sociétés se sont relevées avec une telle rapi-
dité qu'elles ont donné lieu à un mouvement
d'affaires extrêmement intéressant. La Co-
chinchine a fort heureusement bénéficié de
cette reprise, car si elle a pu écouler dans des
conditions assez avantageuses les réserves de
gomme qu'elle avait dû accumuler depuis
quelques années, ses plantations ont aussi at-
tiré l'attention et fait l'objet d "off-res fort
tentantes de plusieurs syndicats européens.
Quelques colons ont pu trouyer là une rému-
nération fort appréciable de leurs efforts et
de leurs sacrifices pécuniaires.
Assurément, la hausse de la piastre, qui,
après avoir atteint le cours de 16 francs, se
maintient encore autour de 10 francs, con-
trarie sensiblement l'exploitation caoutchou-'
tière, mais son influence se fait surtout sen-
tir dans les rapports. de la Cochinchine avec
la métropole dont la monnaie se trouve ac-
tuellement tout à fait dépréciée. Elle ne peut
avoir aucun effet sur les marchés étrangers
qui dominent les cours, marchés de Londres
et de New-York qui possèdent, au contraire,
une monnaie saine. C'est dans cette monnaie
que sont établis les prix du caoutchouc, et
quand ils sont rémunérateurs pour nos con-
currents, ils le sont également pour nos plan-
teurs. La hausse de la piastre gêne surtout
les Sociétés qui se sont constituées avec des
capitaux français sur des prévisions d'avant-
guerre, et dont les frais dans la colonie se
trouvent considérablement accrus. Mais lors-
que la production se régularisera et augmen-
tera, les bénéfices alors réalisés compenseront
les pertes subies.
Ce qu'il importe aujourd'hui, d'après les
calculs qui ont été établis, pour que l'exploi-
tation des plantations de caoutchouc ne soir
pas déficitaire et puisse * même couvrir les
frais de production et l'amortissement 'des
charges qui pèsent sur le planteur, c'est que
le cours du produit exprimé en monnaie lo-
cale demeure sensiblement au-dessus d'une
piastre le kilog. Or, si en 1921 et 1922 il
s'est abaissé jusqu'à o 52 le kilog, ce qui a
justifié l'alarme qui s'est produite à partir
de janvier 1923, il s'est sensiblement main-
tenu au-dessus d'une, piastre.
t fr. 20 en janvier 1923; 1 fr. 15 en juil-
let 1923; 1 fr.. 28 en octobre 1923; 1 fr. 10
en janvier 1924.
Ces derniers cours sont de nature à rassu-
rer nos planteurs de caoutchouc. La période
critique semble finie pour eux. Ils peuvent
envisager le remboursement de leurs dettes
et bientôt une rémunération. légitime de leurs
efforts et de leurs dépenses.
- - - - - - - - - - -
« plus forts rendements. Cette productivité
« élevée se maintient également pendant le
« mois de janvier et de février (au début de
« la saison sèche).
« Les outils adoptés pour la saignée doi-
« vent être aussi simples que possible. Le
« couteau à lame recourbée en gouttière (soit
k fixe soit démontable) et la gorge étroite
« sont actuellement les plus en faveur.
« Le bon saigneur s'habitue vite à manier
« avec dextérité et rapidité, l'outil qu'on le
« force à adopter une fois pour toutes, mais
0 le changera ensuite fort difficilement con-
« tre un autre outil d'un mode différent,
« car un nouvel entraînement lui est alors
« nécessaire pour obtenir la même rapidité
« de travail qu'auparavant. Les bons ou-
« vriers arrivent facilement à saigner 400
« arbres et peuvent même souvent atteindre
« 500 et 600 arbres par jour. Ces arbres
« sont toujours saignés, chaque matin, de
« 5 heures à 5 h. 30 à 8 h. ou 9 heures,
« et le même lot est toujours réservé au
« même ouvrier, ce qui facilitç le contrôle
« du travail. »
M. Morange préconise donc l'incision ré -
duite qui est d'ailleurs pratiquée sur toutes
les plantations.
La saignée comme nous venons de le voir
est une opération très délicate qui demande
beaucoup de soins et une grande pratique.
Elle nécessite des ouvriers adroits et expé-
rimentés car c'est d'eux que dépendent le
plus souvent le bon entretien et la conser-
vation des arbres. Nous verrons plus loin
que, d'une façon générale, les Annamites
réussissent très bien dans ce genre de travail.
Coagulation du latex
On emploie en général l'acide acétique
pour la coagulation du latex dans Ma pro-
portion d'un gramme environ par litre de
latex. On le dilue préalablement dans l'eau.
Ce procédé est simple, pratique et peu coû-
teux. C'est la fumée qui est employée pour
la coagulation dans Quelques plantations.
Enfin, on doit signaler un procédé nouveau
qui a été inventé par M. Magen, inspecteur
des services agricoles. Le latex est coagulé
au moyen des produits recueillis dans la dis.
tillation du bois, après séparation plus ou
moins complète de l'acide acétique et de
l'alcool méthylique. C'est la « fumée li-
quide » dont l'invention a fait l'objet d'un
brevet. Il est préparé et vendu par la So-
ciété La Bienhoa Industrielle et Forestière.
Il peut présenter un certain intérêt.
Enfin, l'Institut Pasteur poursuit à Nha.
traus et à Saïgon, sous la direction du Di
Yersin, des recherches sur de nouveaux mo-
des de préparation par voie biologique, par
coagulation naturelle ou à l'aide du sucre.
Ces recherches ne manqueront pas, nous en
sommes persuadés, d'aboutir bientôt à des
Provinces Superficie plantée (bectarei) Nombre d'arbres piaules Nombre d'arbres en saignée
-.
1922 1921 1920 1922 1921 1922 1921
- - - - -- - -
Bariu l.GU 1.041 1.330 329.00U 329.000 104.000 104.000
Bienhoa i>.550 8.532 8.002 1.600.000 1.600,000 550.000 550.000
Gluiudoc 2 » » 400 » » »
t'holon 40 40 » S.000 S. 000 »
tîiadinli 5.970 5.965 5.9W 1.035.000 1.035.000 593.000 593.000
Hutien 301 270 321 10.000 70.000 10.000 20.000
Tunan 800 800 850 50.000 230.000 » »
Tayninh 2.703 2.553 2.453 820.000 760,000 180.000 180.000
Thudaumot. 13.216 13.216 13.400 3,669,000 3.669.000 3.000.000 669.000
33.292 33.026 32.310 8,121.400 8.301.000 4.437.000 2.116,000
résultats pratiques qui permettront aux plan-
teurs de réaliser dans l'avenir de notables
économies.
Il n'est pas douteux, d'autre part, que
le caoutchouc préparé sans l'intervention des
acides serait de bien meilleure qualité.
Le latex coagulé est préparé en feuilles
fumées, en crêpes ou en boules, selon les
plantations. La feuille fumée paraît pré-
senter plus d'avantages en raison de la fa-
cilité de sa préparation, du matériel simple
qu'elle exige et du meilleur accueil que lui
font les industriels. Elle présente aussi cette
supériorité sur les crèpes ou les blocs irré-
guliers d'occuper à poids égal un plus faible
volume et de nécessiter un fret moins élevé.
Nous mentionnerons qu'à Suzannah et
dans la plupart des grandes plantations on
fabrique le first latex en feuilles qui sont sé-
chées dans un appareil à air chaud. D'après
M. Girard la qualité des feuilles ainsi pré-
parées serait due à la présence préalable
dans le coagulum de certaines substances
qui seraient entraînées par les grands lava-
ges que l'on fait subir aux crêpes.
Pour toutes ces opérations, les plantations
ont aménagées des usines plus ou moins im-
portantes renfermant tout le matériel indus-
triel indispensable à la coagulation du latex,
à la préparation et au séchage du caoutchouc
et à son emballage.
Classement des plantations
Toutes ces considérations plaident en fa-
veur des exploitations de caoutchouc en Co-
chinri. juo et ne peuvent qu'encourager de
nouveaux efforts.
Ces plantations ont été, en général, clas.
sées en trois groupes :
1° Les modestes plantations - faites sur
leurs économies par les petits fonctionnaires,
employés de commerce ou d'industrie, qui
ont été les premiers initiateurs de l'oeuvre et
ont ainsi contribué par leur ardeur et leur
persévérance au développement de la colo-
nie. Ces plantations dans lesquelles on doit
compter, en première ligne, celle de M. Bel-
land, ont pu être établies sur des terrains
iiicultes, dénudés, mais situés dans des ré-
gions salubres autour des centres agricoles
indigènes, qui n'avaient aucune valeur avant
ces plantations. Ils ont d'ailleurs été imités
par de nombreux Annamites. On les trouve
dans les environs de Saïgon, province de
Giadinh, de Tanan, de Cholon.
20 Les Sociétés qui se sont installées dans
des régions plus éloignées, sur les terres rou-
ges en partie déboisées, mais en tous cas cou-
vertes de brousse ou d'herbes qui nécessi-
taient des travaux de défrichement préala-
bles, parfois .assez coûteux. Ces plantations se
trouvent surtout du côté de Bienhoa, à pro-
5 ximité du chemin de fer ou des grandes rou-
tes qui rayonnent vers l'Annam. On em- 1
ploie là les grands procédés de culture : les
dessoucheuses, les défonceuses et les trac-
teurs divers à vapeur, en s'inspirant des mé-
thodes suivies dans les Etats Malais. Signa-
lons parmi celles-ci les plantations de Suzan-
nah et d'Anloc, qui ont eu à se préoccuper
d'organiser des campements salubres au mi-
lieu de cette zone infectée de paludisme.
-.. :.. entreprises constituées en 1910 ou
après, entreprises importantes s'appuyant sur
de gros, capitaux, dans lesquelles il convient
de comprendre en première ligne : la Société
des caoutchoucs de l'Indochine, constituée
avec le concours de banques métropolitaines
et de la Banque de l'Indochine, qui assure
le contrôle effectif sur place et la plantation
du groupe Hallet, à Xacan. Ces entrepri-
ses ont suivi, en général, pour l'établisse-
ment des plantations, les méthodes malaisea.
Elles sont situées fort loin de Saïgon, dans
les provinces de Bienhoa et de Thudaumot
j sur les frontières de l'Annam, du Laos ou
du Cambodge.
Superficie totale des plantations
Superficie plantée Nombre d arbres
Afin de bien faire comprendre l'importan-
ce de l'effort qui a été fait en Indochine de-
puis vingt ans, nous dirons que, d'après les
statistiques, le nombre de plantations qui
existent aujourd'hui dans notre grande colo-
nie dépasse deux cent cinquante. Elles se ré-
partissent dans les provinces de Baria, de
Bienhoa, de Cholon, de Giadinh, de Tanan,
de Tayninh, de Thudaumot, dans l'île de
Phu Quoc, au Cambodge et dans le sud-An-
nam.
En voici la récapitulation d'après un ta-
bleau emprunté à un des derniers bulletins
du Syndicat des Planteurs de caoutchouc de
F Indochine :
Désignation Superficie Superficie Nombre d'hévéas
des provinces totale plaotéc en place
Baria 7,338 L.502 345.000
Bienhoa 28.577 0.505 1.3-48.239
Cholon , 3; 37 8.000
Giadinh 7.78S 5.339 1.600.225
Tanan 1.150 825 200.000
Tayninh 4.721 3.049 763.000
Thudaumol 35.439 11.764 1.570.982
lie de Phu Quoc 2.089 153 61.200
Cambodge. 18.032 2.018 6.400
Sud Annam 2.9Î5 720 238.900
Total général.. 108.716 3-4.912 6.208.586
Les tableaux qui suivent permettront d'éta-
blir la progression qui s'est produite depuis
(920.
A cette époque, M. Rheinardt, inspecteur
des Colonies, donnait, dans un rapport offi-
ciel sur la Cochinchine, les indications sui-
vantes pour 1918, sur le nombre, la superfi.
cie et l'importance relative des exploita-
tions.
En 1922, à l'occasion de l'Exposition de
Marseille, le Syndicat des Planteurs de
caoutchouc de l'Indochine avait également
fourni une statistique détaillée, que nous
trouverons ci-dessous.
Superficie totale
Nombre complantéc
d'exploitations en Hevea
Hectares
Explll de plus de 1.000 hte" 23 15.721
de 500 Ù 1.000 - 2 1.045
de 200 à 500 - 25 4.473
de 100 à 200 - 17 2.203
de 500 à 100 - 16 1.020
de 25 à 50 - 26 1.008
au-dessous de 25 30 409
Totaux. 139 25.879
Enfin, plus tard2 à la fin de 1922, nous
trouvons aussi dans le Rapport économique
de la Cochinchine, un tableau qui, sans con-
corder absolument avec le précédent, permet
cependant de se rendre compte de l'augmen-
tation très sensible chaque année, non seu-
lement des superficies implantées en heveas,
mais aussi du nombre des pieds mis en place
et surtout de celles des arbres soumis à la
saignée.
Nombw Superficio Nombre Nombre
de plantée en de pieds de pieds
plan- Hevea en en saignée
Provinces tations (hectares) place fin 1921
- - - - -
Baria 18 2.034 388.838 58.037
Bienhoa 60 6.058 1.238.550 585.900
'Giadinh 78 5.141 T.54i7.370 470.440
Tayninh 7 2.262 622.900 200.000
Tayninh 7 2 -
Tanan 2 777 206.000 »
Thudaumot 57 11.727 2.704.460 614.100
Ile de Phu-Quoc 1 230 65.000 6.383
Annam.,. 6 686 231.900 61.983
Cambodge S 18 6.400 »
Totaux
pour 1921. 231 28.933 7.011.418 2.002.843
Exportation des caoutchoucs
d'Indochine
Quant aux sorties de caoutchouc de l'In-
dochine, elles se sont aussi développées d'une
façon tout à fait remarquable depuis 1907,
comme en fait preuve le tableau des expor-
tations de ce produit à partir de cette épo-
que avec les moyennes quinquennales (en
tonnes). Si, dans les premières années, il
s'agit de caoutchouc de cueillette, issu des
lianes ou des arbres forestiers indigènes, en
1908 commence la première exportation de
caoutchouc de plantation, et celle-ci, en
1915, t commence à s'accentuer d'une façon
fort intéressante, le caoutchouc sauvage ne
comptant pour ainsi dire plus dans les en-
vois.
FRANCE ÉTRANGER 10TAUX
1907 212 Il 212
1908 37 J) 37
1909 , 32 3 35
1910 170 5 175
1911 227 18 245
-
Moyenne. 136 5 ui
1912 226 6 232
1913 169 45 214
1914 147 4S 195
1915 ..,. an » 377
1916 5is » 54-8
Moyenne 203 20 313
1917 031 » 931
1918 538 Il 538
J910. 2.784 JGU 2.950
1920 2.297 81 j 3.1-Î2
1921 2.173 901. 3.650
Moyenne 1.745 282 2,212
l'J22 3.107 1.285 4.452
1923 3.712 1.258 4.970
Les exportations de caoutchouc de l'Indo-
chine atteignent ainsi près de 5 mille tonnes
Benca-Thudaumot, Séchage et emballage dté crêpés de caoutchouc
à la fin de 1923 et ce chiffre représente à
peu près la production totale de la colonie,
car il n'y en a, pour le moment, qu'une très
petite quantité qui est manufacturée sur pla-
ce par la Compagnie du caoutchouc, manu-
facture qui a son siège social et son usine
i Saigon
Il n'est pas douteux que dans les prochai-
nes années la production va s'accentuer très
rapidement, le plus grand nombre des hévéas
plantés dans ces dernières années ne devant
pas avoir leur plein rendement avant 1926.
On peut, sans la moindre éxagération, es-
compter bientôt à 10 mille tonnes le chiffre
des exportations. Celui-ci sera encore bien
loin d'absorber la consommation française,
qui atteignait, en 1923, 30.000 tonnes, quan-
tité qui sera certainement doublée dans 3
ou 4 ans.
Les chiffres que nous venons de donner,
tant pour l'étendue des superficies mises en
valeur pour la culture des hevéas que par
par la production incessante du caoutchouc
et son exportation en Europe sont éloquents.
ris indiquent le chemin qui a été parcouru
depuis quelques années et les résultats que
l'or, a le droit d'escompter bientôt. Après
une période de travaux, de fatigues et
d'épreuves, les planteurs de caoutchouc ont
le droit d'espérer bientôt une 'juste rému-
nération de leurs sacrifices.
Aperçu de quelques plantations
1.1 n'est pas possible d'énumérer en détail
toutes les plantations de caoutchouc qui.
dans une période aussi brève, se sont créées
en Cochinchine et dans le Sud-Annam. Avec
des particularités qui sont inhérentes à. cha-
cune d'elles, elles constituent aujourd'hui
Mri ensemble que ceux qui s'intéressent a
cette question si pleine d'actualité, en ce mo-
ment, peuvent visiter avec plaisir et intérêt.
Ils verront que la, comme partout, nos
compatriotes ont su imprimer à ce qu'ils
ont fait, leur caractère personnel et, tout
en. se préoccupant des conditions scientifiques
et pratiques, leur donner le confort et l'jagré-
ment qui les rendent si attrayantes. Ils ont
totalement modifié l'état du pays et trans-
formé de la façon la plus heureuse des ré-
gions qui étaient incultes, malsaines et dé-
Benca-Thudaumot. Fabrication des crêpes de caoutchouc.
laissées. Ils ont mis de la vie et de la fer-
tilité où il n'y avait autrefois que de la so-
litude et du silence. Non seulement ils ont
créé de vastes domaines qui deviennent, cha-
que jour, des centres de production et de ri-
chesse, mais ils ont su y installer, à côté
des logements des travailleurs, des habita-
tions bien comprises pour eux-mêmes, et
aussi des magasins ou des usines dans les-
quelles ils peuvent se livrer sur place à toutes
les manipulations du latex. Enfin, par eux-
mêmes ou d'accord avec l'administration, ils
ont OUVelt. des voies d'accès qui mettent en
communication facile leurs plantations avec
Saïgon ou les principaux centres voisins. 11
y a partout de fort bonnes et fort belles
routes qui sont accessibles à la circulation
des automobiles et qui permettent ainsi, fa-
cilement, aux autres moyens de transport
,.l'écouler sur le port d'embarquement les
produits de la récolte. La nouvelle exploi-
tation agricole, en dehors des effets écono-
miques qu'elle aura et qu'elle a déjà sur la
prospérité de la colonie, a déjà aussi, comme
on le voit, exercé une très grande influence
dans le pays.
Nous citerons cependant, avant de termi-
ner cette étude, quelques plantations qui mé-
ritent d'être spécialement mentionnées.
Celle de Suzannah, la plus ancienne en
date apiès.celle de M. Belland. Elle a été
i -Créée' £ n 1*904, par M. Cazeau, en pleine ré-
gion des terres rouges, à proximité de la li-
gne de chemin de 1er allant vers Phanrang.
Cestiflà que fut oiganisée une des premiè-
res pépinières de caoutchoucs, avec des grai
nes achetées à Singapour. C'est là aussi où,
après de multiples expériences, furent adap-
tés les meilleurs procédés de culture utilisés
en Cochinchine. Transformée en Société ano-
nyme au capital de 2,500.000 francs, Suzan-
nah est restée le type parfait d'exploitation
et malgré l'élévation anormale du taux de la
piastre, donne aujourd'hui de fort beaux di-
videndes à ses actionnaires.
La plantation de Xatrach, créée en 1907
par M. Jacques, négociant, à été aussi trans-
formée en Société anonyme. La plantation
couvre environ 2.000 hectares en terres rou-
ges, dans la province de Thudannet, dont
plus de 1.000 sont cultivés et produisent dé-
jà environ 500 tonnes de caoutchouc par an.
C'est une des mieux organisées.
La plantation d'An Loc, dans la province
de Bien hoa, où la culture mécanique a été
réalisée pour la première fois en Indochine.
Elle a une superficie de 4.500 hectares, dont
un peu plus de mille sont cultivés en hevéas
et fait aussi partie d'une Société anonyme.
Elle possède une main-d'œuvre annamite de
Cochinchine et du Tonkin, et a produit, en
1923, environ 350 tonnes de caoutchouc.
C'est à Anloc qu'à côte de la plantation
d'hevéas il a été réservé d'importantes cul-
turcs de cocotiers, de caféiers et même de
théiers et d'arbres à fruits.
La Société anonyme des plantations de
Phu Quoc, dans la province d'Haben, où a
été fait le premier essai d'introduction de
main-d'œuvre javanaise, est intéressante à ci-
ter car elle constitue un groupe à part. Sui
2.600 hectares, elle ne compte guère que 150
hectares plantés en hevéas et n'a encore pro.
duit, en 1923, que 40.000 kilogs de caout-
chouc. A côté des hévéas, se trouve une plan-
tation d'envi ron 180 hectares de cocotiers
et de 15 hectares d'arequiers.
La plantation de Xuan Lor. dans la pro-
vince de Bienhoa, d'une superficie de 2.363
hectares, dont 525 plantés en hévéas. Créée
en 1910, elle produit actuellement 190 ton-
nes par an.
La plantation de la Soudière, dans la pro-
vince de Bienhoa, mais à proximité de Sai.
gon. La superficie plantée en hevéas est de
700 hectares et comptr T -:.. ooo arbres, dont
70.000 sont déjà saigi. v.jtuellement. Cet-
te plantation a donné 100 tonnes de caout-
chouc en 1923.
La plantation de' caoutchouc de l'Indo-
chine, constituée sous les auspices des ban-
ques métropolitaines et de la Banque de l'In-
dochine compte parmi les plus importantes.
Elle comprend plus de 10.000 hectares, dont
3.000 sont actuellement cultivés. Créée en
19II au capital de dix millions de francs,
elle occupe une nombreuse main-d'œuvre an-
namite, tonkinoise et javanaise, estimée a
2.500 coolies et répartie en 11 villages.
C'est le type par excellence de la grande
exploitation. Bien soutenue, admirablement
dirigée, elle entre à peine dans la période
des réalisations, mais aura bientôt un rénde-
ment considérable.
Le rôle et l'intervention de l'Administra-
tion dans la production caoutchou-
tière de l'Indochine.
L'Administration de l'Indochine, comme
nous l'avons vu, ne s'est pas beaucoup préoc-
cupée de la question du caoutchouc lorsque
les états voisins faisaient diligence pour
créer la production de la précieuse gomme et
s'en assurer presque le monopole. Elle s'est
montrée assez indifférente aux efforts qui
1 1 -
etaient tentes a cet en et dans les états ma-
tais et dans les Indes néerlandaises et n'a
presque rien fait pour inciter nos colons à
entrer eux-mêmes dans cette voie. Mais nous
devons lui rendre cette justice que dès le
gland courant que nous avons signalé en Co-
chinchine se fut manifesté, elle a aussitôt
compris les devoirs qui lui incombaient. Elle
s'est alors associée sous les formes les plus
diverses aux travaux de ses administrés et,
en aucune circonstance, elle ne leur a mar-
chandé sa sollicitude et son assistance. Elle
s'est montrée très large et très libérale dans
l'aliénation des terrains domaniaux, com-
me nous avons pu nous en rendre compte,
et extrêmement tolérante dans l'application
1 ,.
(les taxes hscales, lle s est ingéniée aussi,
par tous les moyens dont elle pouvait dis-
poser, à faciliter la bonne mise en valeur des
terres'. Non seulement elle a envoyé des mis-
sions pour aller étudier au dehors ce qui
avait été fait et fournir à nos planteurs ce
dont ils pouvaient avoir besoin, mais encore
elle a créé des jardins d'essais ou des sta-
tions agricoles qui, bientôt, ont pu répondre
à toutes les demandes de semences ou de
plants. Elle a, de plus, efficacement favorisé
les entreprises de nos colons en ouvrant en
tous sens des voies de pénétration et de com-
mimication au travers de régions incultes
et accidentées, grâce auxquelles les planta-
tions ont pu être efficacement desservies et
protégées. Elle a aussi, en vue de leur com-
modité et de leurs convenances, engagé des
capitaux importants dont elle ne pouvait es-
pérer tirer aucun profit immédiat. Elle a
même, dans certains cas, participé, dans de
fortes proportions, à l'exécution de certains
travaux qui auraient pu rester entièrement
à la charge des intéressés. Elle s'est aussi
entremise dans la question de la main-d'œu-
vre pour en faciliter le recrutement et le
transfert et veiller aux engagements qui
avaient été pris. Enfin, directement, ou par
l'intermédiaire de ses agents, dans les pro-
vinces ou dans les villages, elle n'a négligé
aucune occasion de manifester sa bienveil-
lance et sa protection en faveur de l'exploi.
tation nouvelle.
Mais là où son rôle s'est particulièrement
fait sentir, c'est lorsque, pendant et immé-
diatement après la guerre, les plantations
cb caoutchouc se sont trouvées dans une si-
tuation très difficile. Lorsque le conflit a
éclaté, les planteurs de caoutchouc avaient
tous fait de gros sacrifices et épuisé leurs
movens financiers, mais ils étaient, pour la
plupart, sur le point d'entrer dans la pé-
riode des réalisations et des bénéfices. La
guerre d'abord, qui a entraîné l'effondrement
des cours du caoutchouc, ensuite la hausse
de la piastre ont déçu toutes leurs espé-
rances. Au cours de cette période critique
qui s'étend de 1917 à 1922, plusieurs entre-
prises durent cesser leurs travaux de plan-
tation, ou négliger l'entretien des arbres qui
étaient déjà en pleine croissance.
C'était l'abandon de l'oeuvre ou la ruine
de beaucoup d'exploitants, si, en 1919, l'Ad-
ministration, en présence des difficultés que
rencontraient les planteurs à exporter leurs
produits, par suite de la crise des frets,
n'était intervenue entre eux et les consomma-
teurs de la métropole, c'est-à-dire les gran-
des administrations militaires -- pour - l'achat
d'un stock de 900 tonnes de caoutchouc.
L'intention était très bonne et si elle n'a
pas été suivie de son plein effet, c'est que
les circonstances de l'époque : pénurie de
fret, débarquement sans abri, le retard dans
les livraisons et la hausse ae la piastre au
moment du paiement ont causé aux vendeurs
un préjudice qu'ils ont évalué à 370.000
piastres.. --
Mais où l'intervention de l'Administration
'est encore manifestée d'une façon beau-
coup plus nette, c'est lorsqu'elle s'est déci-
dée à accorder aux planteurs des prêts im-
portants, sous différentes formes.
Ce furent d'abord, jusqu'en 1918, des
prêts dits « prêts de guerre D, qui furent
consentis à un certain nombre de plantations
par la Banque de l'Indochine, avec la garan-
tie de la colonie. Ils portaient intérêt à 5 0/0
l'an et étaient garantis par une hypothèque
de premier rang- sur les plantations.
Ces prêts se sont élevés à 643.200 francs.
Ce furent ensuite des prêts accordés, en
IQ20, aux plantations non productives. Ces
prêts ont été accordés à des plantations
n'ayant pas encore atteint la période de pro-
duction. Ils furent calculés d'après l'âge et
la superficie des lots plantés., Ils étaient ex-
clusifs des prêts de guerre. Consentis dans
les mêmes conditions que précédemment par
la Banque de l'Indochine, ils s'élèvent en-
viron à 140.000 piastres.
Enfin, les « prêts primes », accordés en
vertu de l'arrêté du 14 septembre 1919 aux
plantations productives. Ces prêts ont été
faits sur les fonds du budget général. Ils
ont été calculés d'après une double échelle
fixant, suivant l'âge de chaque lot exploité,
la production par hectare qui serait admise
au prêt et la prime par kilograinme qui se-
rait allouée, cette prime étant d'autant plus
forte que la plantation était plus récente et,
par conséquent, le prix de revient supprimé
plus élevé. Ces prêts, qui n'étaient garantis
par aucune hypothèque, et productifs d'inté-
rêt de 3 0/0 l'an, étaient remboursables à
l'expiration d'un délai de 5 ans, soit en
1925. Ils se sont élevés à 496.000 piastres.
En 1920, comme la situation des planta-
tions s'était encore aggravée, de nouvelles
primes à la sortie, non remboursables, fu-
rent accordées au caoutchouc exporté du
lcr avril 1920 au Ier avril 1921. Leur total
s'éleva à 322.000 piastres. De plus, un ar-
rêté du 13 avril 1922 accorda une subven-
tion globale de 2001.000 piastres à répartir
entre toutes les plantations faites antérieu-
rement au ier janvier 1920- et convenable-
ment entretenues au prorata de la supern-
cie complantée et en raison de 5 parts pour
les plantations créées avant le Ier janvier
1917 et de 5 parts pour celles établies enne
cette date et le ior janvier 1920.
Ces dernières primes ou subventions sont
accordées sur les fonds du budget général
et local dans la proportion de 3/4 pour le
premier et de 1/4 pour la Cochinchine.
On se rend compte dans quelle proportion
s'est exercée l'intervention des pouvoirs pu-
blics en faveur de l'exploitation du caout.
chouc, qui était alors très gravement mena-
cée en Cochinchine. Dans une première pé-
riode, cette intervention s'est produite pour
fournir aux entreprises les ressources suf-
fisantes afin de continuer et de mener
à bien l'effort commencé. Dans la se-
conde, qui s'étend après la guerre, l'aide
officielle eut pour but de permettre aux
plantations de vivre et de ne pas disparaî-
tre, alors que l'effondrement des cours, coïn-
cidant avec la hausse de la piastre, les mit
dans une situation désepérée.
Ainsi un crédit de 1.800.000 piastres, ce
qui représente, au taux actuel de la piastre,
un peu plus de dix-huit millions de francs.
a été ouvert directement ou indirectement par
la colonie en quelques années .Le geste qu'elle
a fait affirme toute la, sollicitude qu'elle por-
tait aux planteurs de caoutchouc, mais aussi
l'intérêt qu'elle attache à cette nouvelle ex-
ploitation, qu'elle considère à juste titre
comme une œuvre sociale et économique de
premier ordre.. Elle a senti qu'elle ne pouvait
pas laisser péricliter une entreprise comme
celle-là, qui, après tant de peines et de sa-
crifices et aussi tant de capitaux engagés,
était sur le point d'aboutir et que le sort du
pays était un peu lié à sa destinée.
Les cours et l'avenir du caoutchouc
En réalité, dans ces dernières années, les
planteurs de caoutchouc en Cochinchine ont
subi les conséquences d'événements tout a
fait accidentels et imprévus. La guerre,
d'abord, qui non seulement a entraîné l'ef-
fondrement des cours, mais encore raréfié les
moyens de transport et rendu les transac-
tions à peu près impossibles. La hausse de
la piastre ensuite, qui a totalement modifié
Ici rapports qui existaient entre la produc-
tion et la vente et bouleversé les prévisions
les mieux établies.
L'effondrement des cours a été dû, en
grande partie, aux événements qui se sont
déroulés en Europe; cependant, s'il a per-
sisté après la guerre, c'est qu'il y avait des
stocks considérables de caoutchouc à écouler
et que la production s'était accrue, d'autre
part, dans des proportions qui n'étaient plus
en rapport avec la consommation mondiale.
Mais c'était là un fait momentané qui ne
devait pas donner lieu à de très vives ap-
préhensions. Cependant, il a suffisamment
inquiété les producteurs anglais pour que
ceux-ci aient cru devoir se concerter pour res-
treindre la production du caoutchouc dans les
Straits Settlements et dans l'Inde britanni-
que. L'effet des mesures qu'ils ont alors pri-
ses en 1923 connues sous le nom de « Plan
Stevenson », ont modifié immédiatement les
conditions du marché. La livre poids de
caoutchouc qui, en janvier 1920, atteignait
34 pences, mais était descendu en octobre
1922 à 8 pences seulement, remontait immé-
diatement à 14 pences. Les transactions de
caoutchouc ont fait preuve alors d'une très
giande activité, et les actions des grandes
Sociétés se sont relevées avec une telle rapi-
dité qu'elles ont donné lieu à un mouvement
d'affaires extrêmement intéressant. La Co-
chinchine a fort heureusement bénéficié de
cette reprise, car si elle a pu écouler dans des
conditions assez avantageuses les réserves de
gomme qu'elle avait dû accumuler depuis
quelques années, ses plantations ont aussi at-
tiré l'attention et fait l'objet d "off-res fort
tentantes de plusieurs syndicats européens.
Quelques colons ont pu trouyer là une rému-
nération fort appréciable de leurs efforts et
de leurs sacrifices pécuniaires.
Assurément, la hausse de la piastre, qui,
après avoir atteint le cours de 16 francs, se
maintient encore autour de 10 francs, con-
trarie sensiblement l'exploitation caoutchou-'
tière, mais son influence se fait surtout sen-
tir dans les rapports. de la Cochinchine avec
la métropole dont la monnaie se trouve ac-
tuellement tout à fait dépréciée. Elle ne peut
avoir aucun effet sur les marchés étrangers
qui dominent les cours, marchés de Londres
et de New-York qui possèdent, au contraire,
une monnaie saine. C'est dans cette monnaie
que sont établis les prix du caoutchouc, et
quand ils sont rémunérateurs pour nos con-
currents, ils le sont également pour nos plan-
teurs. La hausse de la piastre gêne surtout
les Sociétés qui se sont constituées avec des
capitaux français sur des prévisions d'avant-
guerre, et dont les frais dans la colonie se
trouvent considérablement accrus. Mais lors-
que la production se régularisera et augmen-
tera, les bénéfices alors réalisés compenseront
les pertes subies.
Ce qu'il importe aujourd'hui, d'après les
calculs qui ont été établis, pour que l'exploi-
tation des plantations de caoutchouc ne soir
pas déficitaire et puisse * même couvrir les
frais de production et l'amortissement 'des
charges qui pèsent sur le planteur, c'est que
le cours du produit exprimé en monnaie lo-
cale demeure sensiblement au-dessus d'une
piastre le kilog. Or, si en 1921 et 1922 il
s'est abaissé jusqu'à o 52 le kilog, ce qui a
justifié l'alarme qui s'est produite à partir
de janvier 1923, il s'est sensiblement main-
tenu au-dessus d'une, piastre.
t fr. 20 en janvier 1923; 1 fr. 15 en juil-
let 1923; 1 fr.. 28 en octobre 1923; 1 fr. 10
en janvier 1924.
Ces derniers cours sont de nature à rassu-
rer nos planteurs de caoutchouc. La période
critique semble finie pour eux. Ils peuvent
envisager le remboursement de leurs dettes
et bientôt une rémunération. légitime de leurs
efforts et de leurs dépenses.
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