Titre : Le Monde colonial illustré : revue mensuelle, commerciale, économique, financière et de défense des intérêts coloniaux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1929-09-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34459430v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 septembre 1929 01 septembre 1929
Description : 1929/09/01 (A7,N73)-1929/09/30. 1929/09/01 (A7,N73)-1929/09/30.
Description : Collection numérique : Numba, la bibliothèque... Collection numérique : Numba, la bibliothèque numérique du Cirad
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k97457277
Source : CIRAD, 2016-192274
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 03/10/2016
N° 73. — SEPTEMBRE 1929 Le MONDE COLONIAL ILLUSTRÉ 229
Ruines de Palmyre. — La tache de verdure est la petite oasis, alimentée par des puits et une source. Palmyre, au temps où elle vivait, fut le Damas de l'empire romain, assise comme Damas
à l'orée du désert. Mais elle n'a jamais eu l'équivalent de la Barada. Elle tirait son eau d'alimentation des montagnes au moyen d'aqueducs longs d'une centaine de kilomètres (des foggaras). Cet organisme
urbain délicat s'est écroulé en même temps que l'état régulier,, de forme occidentale.
budget d'entretien, un corps de gendarmerie assurant la
paix publique, c'est-à-dire un empire d'esprit occiden-
tal comme l'empire romain. Le califat arabe fut à sa ma-
nière une très belle chose. Mais sa manière était orientale :
le califatn'ajamais su ce que pouvait bien être un budget
régulier ; la paix publique luifétait indifférente. Sous
le califat, une Palmyre n'était plus viable. C'est Damas
qui était la seulé grande ville désertique possible,
parce que la Barada lui apportait son eau d'alimen-
tation en dehors de toute intervention administra-
tive, par le seul jeu des forces naturelles, par décret
divin rendu une fois pour toutes.
LA GRANDE MISÈRE DES ARBRES
--L'Islam et- Damas ont tué] bien autre^ chose que
Palmyre. Il faut imaginer ce qu'ont dû être les cèdres du
Liban au temps du roi Salomon et de la marine phéni-
cienne — et jeter un coup d'oeil sur ce qui en reste.
La Syrie du Nord, autour d'Alep, a ,une architecture
rurale très particulière. La cabane type a exactement
la forme d'une hutte conique en branchages de nègre
africain ; elle rappelle aussi les vieilles ruches d'ancien
modèle en paille tressée. Par son gabarit., vue de loin,
c'est un abri de sauvage qui évoque l'idée de matériaux
ligneux pu végétaux.
Vue de près, la cabane d'Alep est exactement l'in-
verse. C'est un bijou minuscule de maçonnerie artis-
tique, une voûte étudiée, solidement établie.
|^£L'œuvre d'une vieille race, fidèle à des traditions
race n'a plus à sa disposition de quoi faire une poutre.
La nudité végétale de la Syrie est extraordinaire.
On songe aux auteurs qui nous décrivent la nudité vé-
gétale de la Chine.. Les très vieilles civilisations sont
ennemies de l'arbre. Surtout les vieilles civilisations
orientales. Nos Etats occidentaux ont le souci de'
défendre le bois : nous avons des- services forestiers ;
des inscriptions montrent que l'empire romain avait
des préoccupations analogues.
ANTIOCHE
Le grand meurtre perpétré par l'Islam en Syrie a
été celui d'Antioche.
Les. sinologues ont retrouvé les récits d'ambassa-
deurs chinois qui ont pris Antioche pour la capitale
de l'empire romain..Ces Chinois n'étaient pas si loin
de compte. Antioche était une cité monstre, presque
rivale de Rome ;- la capitale incontestée, avec Alexan-
drie, de la Méditerranée orientale, en- un. temps- où
Byzance n'était pas encore Constantinople. Et An
tioche avec Alexandrie a laissé une œuvre immense,
planétaire, le christianisme.
Elle était- bâtie sur les dernières pentes d'une mon-
tagne abrupte, resserrée entre la montagne et la rive
du fleuve Oronte. C'était une situation redoutable, à
partir du moment où la vie municipale et impériale se
fut éteinte.
Depuis un millénaire, les torrents méditerranéens,
transformés par chaque orage en destructeurs sau-
vages de la montagne, ont accumulé sur la ville haute
d'énormes déblais. Les inondations ont étendu sur la ville basse un linceul épais d'allu-
vions. Tout a disparu, on ne voit plus rien, pas un fût
de colonne, pas un acroptère de temple, pas un clocher
de basilique, rien ne perce le sol. L'archéologue ne sait
pas où donner un coup de pioche, et il s'est laissé aisé-
ment persuader de n'en pas donner un seul. Le cadavre
est parfaitement enterré, soustrait aux curiosités.
Ainsi est-il advenu qu'il n'y a pas. de ruines d'An-
tioche, qui eussent été pourtant infiniment plus pas-
sionnantes que les ruines de Palmyre.
Et pourtant, de la grandeur, passée d'Antioche, il
subsiste au soleil un vestige magnifique,, la chaussée
romaine qui réunissait Antioche à F Asie intérieure,,
à toute l'Asie, la Perse, le Turkestan, la Chine. Les
ambassadeurs chinois ont passé par là. C'était la route
de la soie, la grande voie commerciale.
C'était aussi la grande route impériale des conqué-
rants et des armées. Celle qu'ont suivie Alexandre le
Grand, Crassus, Trajan, Julien l'Apostat, Héraclius
et tant d'autres.
Elle est admirablement conservée, comme Pal-
myre, comme toutes les architectures qui sont mortes
d'un coup, où la vie n'a pas. continué ; parce que c'est
la continuation de la vie qui est la grande destructrice
du passé.
Elle était d'ailleurs si solidement construite, cette
chaussée, si monumentale, en matériaux indestruc-
tibles !
En tel point,. on voit encore une immense inscrip-
tion grecque, haute de deux mètres, relatant avec un
orgueil municipal une réfection, de la chaussée.
En tel autre, ce que nous appelons, un arc. de
triomphe, et qui était évidemment une porte- de
péage, de douane, de garde. L'arc est toujours debout,
comme aussi, à côté, le corps de garde, où on imagine
le piquet de légionnaires, à moins qu'on ne préfère y
mettre les douaniers byzantins.
Les cèdres du Liban. - Des grandes forêts de -la Bible, qui alimentaient en bois d'oeuvre la marine phénicienne, voilà tout ce qui
reste, un Nuquet témoin, pieusement, protégé par une muraille circulaire. Un millénaire d'Islam a passé là.
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Ruines de Palmyre. — La tache de verdure est la petite oasis, alimentée par des puits et une source. Palmyre, au temps où elle vivait, fut le Damas de l'empire romain, assise comme Damas
à l'orée du désert. Mais elle n'a jamais eu l'équivalent de la Barada. Elle tirait son eau d'alimentation des montagnes au moyen d'aqueducs longs d'une centaine de kilomètres (des foggaras). Cet organisme
urbain délicat s'est écroulé en même temps que l'état régulier,, de forme occidentale.
budget d'entretien, un corps de gendarmerie assurant la
paix publique, c'est-à-dire un empire d'esprit occiden-
tal comme l'empire romain. Le califat arabe fut à sa ma-
nière une très belle chose. Mais sa manière était orientale :
le califatn'ajamais su ce que pouvait bien être un budget
régulier ; la paix publique luifétait indifférente. Sous
le califat, une Palmyre n'était plus viable. C'est Damas
qui était la seulé grande ville désertique possible,
parce que la Barada lui apportait son eau d'alimen-
tation en dehors de toute intervention administra-
tive, par le seul jeu des forces naturelles, par décret
divin rendu une fois pour toutes.
LA GRANDE MISÈRE DES ARBRES
--L'Islam et- Damas ont tué] bien autre^ chose que
Palmyre. Il faut imaginer ce qu'ont dû être les cèdres du
Liban au temps du roi Salomon et de la marine phéni-
cienne — et jeter un coup d'oeil sur ce qui en reste.
La Syrie du Nord, autour d'Alep, a ,une architecture
rurale très particulière. La cabane type a exactement
la forme d'une hutte conique en branchages de nègre
africain ; elle rappelle aussi les vieilles ruches d'ancien
modèle en paille tressée. Par son gabarit., vue de loin,
c'est un abri de sauvage qui évoque l'idée de matériaux
ligneux pu végétaux.
Vue de près, la cabane d'Alep est exactement l'in-
verse. C'est un bijou minuscule de maçonnerie artis-
tique, une voûte étudiée, solidement établie.
|^£L'œuvre d'une vieille race, fidèle à des traditions
La nudité végétale de la Syrie est extraordinaire.
On songe aux auteurs qui nous décrivent la nudité vé-
gétale de la Chine.. Les très vieilles civilisations sont
ennemies de l'arbre. Surtout les vieilles civilisations
orientales. Nos Etats occidentaux ont le souci de'
défendre le bois : nous avons des- services forestiers ;
des inscriptions montrent que l'empire romain avait
des préoccupations analogues.
ANTIOCHE
Le grand meurtre perpétré par l'Islam en Syrie a
été celui d'Antioche.
Les. sinologues ont retrouvé les récits d'ambassa-
deurs chinois qui ont pris Antioche pour la capitale
de l'empire romain..Ces Chinois n'étaient pas si loin
de compte. Antioche était une cité monstre, presque
rivale de Rome ;- la capitale incontestée, avec Alexan-
drie, de la Méditerranée orientale, en- un. temps- où
Byzance n'était pas encore Constantinople. Et An
tioche avec Alexandrie a laissé une œuvre immense,
planétaire, le christianisme.
Elle était- bâtie sur les dernières pentes d'une mon-
tagne abrupte, resserrée entre la montagne et la rive
du fleuve Oronte. C'était une situation redoutable, à
partir du moment où la vie municipale et impériale se
fut éteinte.
Depuis un millénaire, les torrents méditerranéens,
transformés par chaque orage en destructeurs sau-
vages de la montagne, ont accumulé sur la ville haute
d'énormes déblais. Les inondations
vions. Tout a disparu, on ne voit plus rien, pas un fût
de colonne, pas un acroptère de temple, pas un clocher
de basilique, rien ne perce le sol. L'archéologue ne sait
pas où donner un coup de pioche, et il s'est laissé aisé-
ment persuader de n'en pas donner un seul. Le cadavre
est parfaitement enterré, soustrait aux curiosités.
Ainsi est-il advenu qu'il n'y a pas. de ruines d'An-
tioche, qui eussent été pourtant infiniment plus pas-
sionnantes que les ruines de Palmyre.
Et pourtant, de la grandeur, passée d'Antioche, il
subsiste au soleil un vestige magnifique,, la chaussée
romaine qui réunissait Antioche à F Asie intérieure,,
à toute l'Asie, la Perse, le Turkestan, la Chine. Les
ambassadeurs chinois ont passé par là. C'était la route
de la soie, la grande voie commerciale.
C'était aussi la grande route impériale des conqué-
rants et des armées. Celle qu'ont suivie Alexandre le
Grand, Crassus, Trajan, Julien l'Apostat, Héraclius
et tant d'autres.
Elle est admirablement conservée, comme Pal-
myre, comme toutes les architectures qui sont mortes
d'un coup, où la vie n'a pas. continué ; parce que c'est
la continuation de la vie qui est la grande destructrice
du passé.
Elle était d'ailleurs si solidement construite, cette
chaussée, si monumentale, en matériaux indestruc-
tibles !
En tel point,. on voit encore une immense inscrip-
tion grecque, haute de deux mètres, relatant avec un
orgueil municipal une réfection, de la chaussée.
En tel autre, ce que nous appelons, un arc. de
triomphe, et qui était évidemment une porte- de
péage, de douane, de garde. L'arc est toujours debout,
comme aussi, à côté, le corps de garde, où on imagine
le piquet de légionnaires, à moins qu'on ne préfère y
mettre les douaniers byzantins.
Les cèdres du Liban. - Des grandes forêts de -la Bible, qui alimentaient en bois d'oeuvre la marine phénicienne, voilà tout ce qui
reste, un Nuquet témoin, pieusement, protégé par une muraille circulaire. Un millénaire d'Islam a passé là.
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